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n° 18703Fiche technique40701 caractères40701
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Temps de lecture estimé : 28 mn
05/12/18
corrigé 06/06/21
Résumé:  À force de rêver, on finit par arriver à quelque chose.
Critères:  #pastiche #historique #aventure #policier #sciencefiction #fantastique #sorcellerie fh inconnu poilu(e)s train amour cérébral fellation cunnilingu pénétratio
Auteur : Guillaume de Baskerville      Envoi mini-message
Appelez-moi Zorro

Chaque matin, il se lève à cinq heures, prend son petit déjeuner, passe sous la douche et enfile sa tenue de transport comme il la nomme, un pull, un pantalon et une veste. Dans un petit sac de voyage, il traîne sa tenue de travail. Pantalon, cravate et veste noirs plus une chemise blanche, une tenue classique pour son boulot.


Il exerce le noble métier de croque-mort. Il en faut, mais personne n’habite avec lui dans son appartement, les femmes se montrent réticentes à l’idée de vivre auprès d’un employé des pompes funèbres.



Après un copieux petit déjeuner, il prend le train de cinq heures cinquante-neuf, où d’autres lève-tôt comme lui y finissent leur nuit.

Il essaie de s’asseoir toujours à la même place, au centre du wagon, contre la vitre. À deux mètres d’elle, face à elle.


Depuis plusieurs semaines, une jolie brune monte dans le train à la même gare que lui, elle s’assied en face de lui, après un léger hochement de tête et un petit sourire. Un casque sur les oreilles, elle écoute de la musique tout en lisant un livre. Menue, les joues roses et rebondies, sa poitrine se soulève d’avoir couru.


Il attend toujours son arrivée pour se mettre à rêver.

Chaque jour, il s’invente une nouvelle histoire. Histoire dont elle devient l’héroïne et lui le héros.

Rêver reste son refuge, le lieu où il peut oublier la noirceur de ce monde, où il peut laisser de côté les pleurs des veuves et des enfants de ceux qu’il porte en terre, où il peut créer des contrées féeriques.

Peut-être est-il amoureux, il n’ose se l’avouer. Surtout, il n’ose l’aborder. Dans ses rêves, il peut enfin l’embrasser, lui dire « Je t’aime ».




La quête



Un chevalier galopait bride abattue à travers la campagne, traversant rivières, prairies et forêts. Il volait au secours d’une jolie princesse, enfermée dans un donjon caché dans le cratère éteint d’un volcan.

Près de la tour posée sur les berges d’un lac aux vapeurs méphitiques cerné de falaises abruptes, un dragon féroce montait la garde devant le pont-levis, crachant flammes et miasmes.

La malheureuse, victime d’un sortilège, attendait qu’un preux chevalier vienne l’en délivrer.



Le seuil de la tour ne pourra passer,

Enfermée là par un maléfice

Pour l’éternité dans cet édifice,

Seul un acte d’amour pourra l’en délivrer.



Le chevalier semblait rayonner, éclater de lumière, monté sur un grand destrier blanc, son armure d’or et d’argent brillait au soleil. La neige de ce mois de décembre amplifiait encore ce phénomène merveilleux.

L’animal était lui aussi caparaçonné, revêtu d’une barde enchantée qui repoussait maléfices, flèches et autres attaques magiques ou non.

Une lance d’orichalque à sa dextre, ses rênes à sa senestre, le chevalier avançait fier et sûr de lui.


Son épée, Foudre Divine, pendait à sa ceinture. Forgée par des Nains métallurgistes, les seuls et uniques maîtres du fer et du feu.

Une légende la disait faite d’un métal issu de pierres tombées des étoiles.

Cette lame reposait pour l’instant dans un fourreau de cuir décoré et tanné par des Elfes, la peau de salamandre ne craignait ni le feu ni l’ondée.

Un écu, revêtu de ses armoiries – Bourses velues d’azur équipolé d’argent – fixé à son bras gauche complétait son équipement.


Avec son cheval Pégase, sa lance et son épée, il se sentait invincible. Ni les trolls des Monts Noirs ni les bandits de la Forêt Maudite ne purent l’arrêter.

Il se fraya un chemin par le fer et la fureur. Il trancha, il tailla, il démembra et décapita à tour de bras, faisant voler têtes et torses. Aucune éraflure, aucune tâche ne dépareillait sa vêture.


Un sentier tortueux menait aux lèvres du volcan, puis redescendait en lacets vers le lac, là où la belle emprisonnée l’attendait.

Au bas de ce chemin, il se retrouva face au dragon. Sous les pattes de la créature des enfers, moult chevaliers gisaient, squelettes blanchis sous le soleil, armures broyées par les crocs pestilentiels.

La princesse là-haut par une échauguette guettait sa venue, elle lui cria :



Le monstre cracha le feu. De son large bouclier fait de mithril, il se protégea, lui et sa monture ; sitôt le souffle brûlant éteint, Pégase chargea, la lance heurta le poitrail de la bête immonde et la déséquilibra. Il sauta de son destrier tout en dégainant Foudre Divine, et, avant que le dragon ne reprenne ses esprits, il lui grimpa dessus et plongea la lame au défaut de l’épaule, l’enfonçant jusque dans le cœur de l’animal, le sang du monstre giclant à gros bouillons, maculant l’armure et son visage.


À peine essoufflé, le chevalier se précipita dans le donjon, explosant le portail plus qu’il ne l’ouvrit, grimpa les marches quatre à quatre, l’épée devant lui, prête à embrocher un quelconque adversaire. Le paladin atteignit enfin l’ultime porte qu’il ouvrit avec délicatesse, pour ne point effrayer la belle.


Face à lui, les mains jointes, la sublime princesse priait pour ce preux, agenouillée dans une flaque de lumière.



Ce faisant, elle marcha sur sa robe qui glissa de ses épaules.

Totalement nue, elle se précipita vers lui.


Les petits seins tressautaient, la toison fournie chatoyait sous le soleil. Faisant fi de sa nudité, elle se blottit entre les bras de son sauveur.



Heureusement, son facturier lui avait conçu une protection révolutionnaire dont il pouvait s’extraire avec facilité.

La cuirasse à terre, son gambison⁽¹⁾ ne fit guère long feu.

Il embrassait la jolie prisonnière suspendue à son cou. Quelques gouttes de sang du dragon maculaient son visage. Elle en avala un peu.



Sur ces tendres paroles, il la prit par la taille, la souleva et posa le connil ruisselant et velu sur sa framée. Elle noua ses jambes autour des hanches de son sauveur, la bouche ouverte en un cri de joie et de surprise, elle sentit l’hast s’enfoncer lentement en son sein. Il la retenait pour ne point la déchirer trop brutalement.

Lorsqu’elle fut totalement investie, elle s’exclama, en pleine pâmoison :



Ils ne le savaient pas encore, mais un enfant naîtrait de cette étreinte torride. Une fille qui deviendrait une guerrière redoutable et une reine adulée : dans ses veines coulerait un peu de sang-de-dragon.


Il tenait sa bien-aimée dans les bras, enveloppée dans sa cape, Pégase marchait au pas, veillant au confort de ses amis et maîtres.

Le pas de l’animal faisait Clibiliclop, clibiliclop…




ooOOoo




… Clibiliclop, clibiliclop fait le bruit des pas des passagers qui descendent du train.

Il s’éveille en sursaut. Il rate presque sa gare et son arrêt. Plongé dans son rêve, il n’a pas osé ni eu le temps de l’aborder. Elle s’éloigne, là bas, seule, perdue dans la foule.


Il désire juste la prendre par la main, et lui demander :



Ce soir, ce soir il osera. Il doit oser.




ooOOoo




Après sa journée de travail réjouissante, passée à accompagner des gens vers leur dernière demeure, et réconforter les familles, il monte dans le train, en espérant que la belle y soit déjà.


Elle est là !

Il ne veut pas lui faire peur en l’abordant de suite. Ce soir à l’arrivée, il osera lui demander :



Oui, il osera. Il osera lui prendre la main. Il l’emmènera boire une boisson chaude, grignoter quelques biscuits, dans la lumière douce du salon de thé de la Grand-Place, il pourra se repaître de sa beauté ailleurs que sous la lumière glauque de ce wagon de banlieue.


Il s’assoit, elle lui fait un petit sourire et hoche la tête, puis se plonge dans son livre, les écouteurs sur les oreilles.

Il appuie la tête sur la vitre et rêve…




Le privé




Philipp Marlou alluma sa première cigarette de la journée et ouvrit la porte de son agence.

Il ramassa les diverses lettres et publicités vantant les mérites des sex-shops des environs. Il jeta les factures à la poubelle et étudia une pub pour de la lingerie féminine tout en se préparant une tasse de café.

À peine avait-il plongé ses lèvres dans sa boisson préférée – après le Kilbeggan – que quelqu’un poussa la porte.


Marlou vit d’abord des bajoues, une calvitie avancée, le ventre proéminent que contenait à peine un pantalon de bonne facture.

Le gros homme entra sans aucune gêne ni même se présenter, fit craquer une chaise en s’y asseyant.

Il déclara de but en blanc :



Sur la photo il vit le portrait d’une jolie jeune femme brune au regard mélancolique.



Marlou avait trop besoin de fric pour se plaindre de la conduite du type. Un client qui paye a toujours raison.

Par conscience professionnelle, se faisant passer pour un agent du service d’entretien électrique, le privé installa quelques micros et caméras dans diverses pièces et autour de la résidence du couple, sans en parler à son client. Il lui facturerait le matériel.


Les trois premiers jours, la jeune épouse resta chez elle, ne recevant aucune visite ni coup de téléphone. Philipp regardait la jolie femme vivre et s’occuper. Chaque jour il se trouvait un peu plus sous le charme de la belle brune. Chaque jour elle était son rayon de soleil dans le crachin d’automne.


Le quatrième jour, il planquait devant la maison, quand vers quatorze heures la jeune beauté sortit au volant de sa BMW I3, pour se rendre au centre-ville où elle fit quelques emplettes, une robe et des sous-vêtements. Il regretta de ne pas pouvoir la suivre, il se ferait griller de suite. Un homme ne pouvait entrer seul dans ce genre de boutique sans passer pour un voyeur. De plus ses émoluments ne lui permettaient pas d’offrir ce genre de choses à une hypothétique petite amie. Il prit toutefois quelques photos, posté sur le trottoir d’en face.


Hannah ressortit, hésita quelques instants, puis entra dans un salon de thé non loin de là.

Bien qu’il n’ait pas l’allure d’un consommateur, il la suivit quand même. Avec son nez cassé, sa cicatrice sur le front, son crâne en boule de billard, son menton carré et son allure de mercenaire de série Z, il dépareillait dans ce genre d’endroit. L’art de la filature consistait à se fondre dans le paysage, quel que soit l’environnement. Cette fois il se trouvait à la limite de ses capacités de camouflage.



Il regarda la femme de son client déguster un thé. Pas la peine de commander une Rauchbier ou un Bruichladdich dans ce troquet.



Il vit Hannah prendre son téléphone et appeler.



Le gros avait peut-être raison, un gigolo allait débouler et emmener sa filature dans un hôtel du coin. Cinq minutes plus tard, une blonde pulpeuse embrassait la brune, elles se mettaient à papoter.



Elles discutèrent de tout et de rien pendant presque deux heures. De leurs hommes respectifs, des hommes de leurs amies, de mode, des prochaines vacances, bref, rien que de choses essentielles.

Le pauvre Philipp se faisait suer comme un rat dans un congrès de chats végans, et, chose délicate, éprouvait de plus en plus de difficultés à passer inaperçu. Il tentait de lire une revue oubliée par une cliente. Lui, lire Cosmopolitan ! Il recommanda plusieurs chocolats, grignotant des biscuits du bout des incisives telle la Baronne de Machin-Chose.


Heureusement son calvaire prit fin, la brune quitta la blonde après une série de bises devant la voiture. Rentrée chez elle, Hannah s’empressa d’essayer ses emplettes.

Il téléphona au gros mari :



Tant qu’il payait ! Surtout que ce boulot ne comportait pas que des inconvénients.


Dans sa voiture, Philipp béait devant son ordinateur. Une réaction physiologique bien naturelle pointait dans son caleçon.


Par écran interposé, il assistait à un charmant strip-tease. Les petits seins aux tétons et aréoles sombres apparurent, puis ce fut le tour de la toison, un petit ticket de métro anthracite sur le mont de vénus bombé et surtout, un bel abricot lisse et divinement fendu.


Le privé s’échauffait derrière son volant, Hannah se montrait sous toutes les coutures : il put ainsi apprécier aussi le postérieur rebondi, les reins cambrés et la peau hâlée. Les bas mettaient en valeur les jambes fuselées, le porte-jarretelles, les fesses rondes.

Le simple fait d’imaginer cette jeune femme se faire tripoter par son bedonnant client lui donnait la nausée.

La belle passa ses vêtements neufs, juste avant que le gros Mike ne rentre à l’improviste.



Elle ne put terminer sa phrase, elle reçut violente gifle.



L’enfoiré, se dit Philipp. Merde, il va me la tuer !


Le gros homme attrapa le cou de sa femme et se mit à serrer, serrer.

Tel un grand fauve, le détective sortit de la voiture en courant, sauta la grille avec quelques difficultés et entra par la baie vitrée.


Faudra quand même que je me remette au sport.


Le drame se passait dans la chambre, à l’étage.

En un seul coup d’œil, il embrassa la scène : la femme aux yeux exorbités, les lèvres bleues, qui tenait inutilement les poignets de son agresseur, la bouche ouverte, cherchant vainement un peu d’air.

Et l’autre qui serrait, serrait la gorge délicate.


Le détective sortit sa matraque télescopique et en flanqua un coup violent sur la nuque du mari.

Il prit la jolie brune dans ses bras et sortit avec elle, la berçant telle une jeune enfant.



Il appela les secours, fournit aux flics les résultats de son enquête et les copies de ses vidéos, le bedonnant fut arrêté, jugé, condamné et embastillé. Aux dernières nouvelles, plusieurs détenus trouvaient de nombreux attraits à son joufflu rebondi.


Quelques mois plus tard, sur une île perdue de l’océan Pacifique, un couple se promenait le long d’une jetée. Un grand chauve baraqué et une jolie brune dont le ventre s’arrondissait.

Comme chaque soir, un grand dauphin vint les saluer.





ooOOoo




Kikikik fait le train en freinant.



Il se réveille en sursaut, il la voit descendre et se fondre dans la nuit.

Perdu dans ses rêves, il n’a pas pu ni osé.

Demain, oui, demain, il osera lui demander :





ooOOoo




Il a mal dormi, d’un sommeil agité. Il va la perdre. Il faut absolument lui parler, aujourd’hui. Sinon les cauchemars qui lui ont gâché sa nuit vont se réaliser, il la voit tenir la main d’un homme, d’un inconnu et il les observe s’éloigner ensemble.



Il monte dans le train, s’assied à sa place habituelle, elle n’est pas encore arrivée. Il s’inquiète. Soudain elle apparaît, essoufflée, les joues roses. Elle est juste un peu en retard.


Elle le regarde, lui fait un petit sourire, s’installe à sa place habituelle, face à lui, sur le siège d’en face, pose son casque sur les oreilles, et plonge dans son livre.


Il est rassuré, mais ne l’abordera pas encore ce matin, il est trop tard.

Il pose la tête sur la vitre et se met à rêver.




Les bandits de grand chemin



Le carrosse brinquebalait sur la route défoncée, guère améliorée par les dernières intempéries de ce printemps pourri. Le cocher tenta de faire accélérer l’équipage, il y renonça bien vite, l’unique passagère se faisait secouer trop violemment. Sur des chevaux qui rappelaient plus des Ardennais que des Lusitaniens, deux gardes armés de rapières trottaient aux côtés de la voiture.

À l’endroit le plus délabré de la piste, l’attelage et les gardes durent marcher au pas.

Là les attendaient en embuscade une bande de malandrins.

Le chef de la troupe, un colosse vêtu de hardes sales et puantes était le seul à posséder un pistolet.

Il tira un coup en l’air en hurlant :



Une dizaine de ruffians encerclèrent le véhicule. Le cocher sauta de son siège et se sauva en hurlant qu’il avait deux femmes et un enfant, les gardes piquèrent des deux et s’enfuirent eux aussi sans demander leur reste, bousculant au passage un bandit.


Les truands s’esbaudirent de leur chance, ils venaient d’attaquer un équipage armé sans subir de perte. Eux qui n’agressaient le plus souvent que de pauvres paysans, des religieux sans le sou, parfois la bonne fortune les faisait sur le dos d’un marchand, cette fois la chance leur souriait. Un carrosse signifiait un riche butin.



Le chef ouvrit la portière du véhicule. Pelotonnée sur un siège, une jeune femme tremblait et murmurait.



Les autres coupe-jarrets la regardaient avec convoitise, presque la bave aux lèvres. Petite et potelée, de beaux yeux noisette affolés, sa robe de brocart vert chiffonnée au large décolleté laissait admirer sa gorge blanche, la naissance de ses seins et le doux sillon séparant ses deux globes. Ses pieds menus étaient passés dans des chaussures vernies ornées de boucles d’argent.



En poussant des cris de joie, ils jetèrent au sol des malles dont ils sortirent d’autres robes de dentelle, de satin, une bourse lestée quelques dizaines de pièces d’or, et un petit coffret contenant un collier de perles, une émeraude sertie sur une bague ainsi qu’une parure de diamants.



La jeune femme se redressa de toute sa taille, fière et combative.



Les truands de hurler, crier de joie et jeter en l’air leurs chapeaux avachis.

Affolée, la jeune femme tenta de se débattre, d’échapper à ses ravisseurs, en vain. Ils lui tenaient fermement les bras. Elle hurlait de terreur et de rage mêlées.


L’un des ruffians dégaina un coutelas et trancha les lacets de la robe, de la nuque au bas du dos. L’autre lui agrippa le haut de son corsage et tira, arrachant le tout, bustier et jupons. Hormis ses bas et ses chaussures, elle était nue sous son vêtement.


Elle cria, tenta de cacher sa poitrine menue de ses mains, croisa les jambes pour dérober aux regards salaces ses parties intimes. Ils mirent fin à sa tentative de camouflage en lui saisissant et écartant les bras, la secouant pour l’obliger à dévoiler son giron, à montrer ses petits seins frémissants.



Tous les autres de s’esclaffer. Il y avait là des borgnes, des édentés, des balafrés, des estropiés, tous plus hideux et crasseux les uns que les autres.

Des mains tripotaient la donzelle, palpaient les fesses et tentaient même de s’insinuer dans ses pertuis secrets.


Holà, marauds, qu’est-ce donc ?


Le Chevalier de Pardevant cheminait sur la route qui menait à la capitale, aux côtés de son cheval fourbu.

Il expliquait à un Bucéphale intéressé, les festins qu’ils feraient tous deux sitôt fortune faite à Paris quand il entendit un coup de feu et des cris.

Il enfourchait sa monture dépitée lorsqu’il croisa des hommes en livrée qui fuyaient.



N’écoutant que son courage, Paul, Chevalier de Pardevant, unique héritier du titre et d’un château en ruines, talonna son pur-sang noir ébène.

Jamais un Pardevant ne laissa une femme se faire malmener sans réagir : ses ancêtres le hanteraient à jamais s’il ne mettait pas un terme à cette forfaiture. Une dame de haute naissance, semblait-il.


Il entendait des hurlements de femme et des rires gras.

Il découvrit tout d’abord un carrosse portières ouvertes, des effets éparpillés tout autour : quatre chevaux alezans regardaient indifférents la scène de cauchemar qui se déroulait devant eux.


Une jeune femme, nue, bras et jambes écartés, plaquée à terre par quatre soudards alors qu’un autre se tenait agenouillé entre les jambes ouvertes de la donzelle. Les chausses baissées, il secouait sa pine en ricanant.



Elle fermait les yeux, ne voulant voir cette horreur.



Le jeune homme vit arriver sur lui neuf malandrins hurlants, des armes de toutes sortes à la main, de vieilles anelaces, des coutelas, fauchons, flamberges.

Il dégaina Rancune la rapière de sa famille tout en ôtant son baudrier.


Il para avec aisance les premiers assauts désordonnés de ses adversaires qui se gênaient entre eux, se bousculaient. Au milieu de la mêlée, il frappait de taille et d’estoc, perçant poitrines et ventres, de sa cuissarde, il dégaina une alumelle qu’il planta dans un bas-ventre qui passait par là. Il négligeait les quelques éraflures que pouvaient lui occasionner ses rivaux.


Il se déplaçait tel un grand félin parmi un troupeau de pourceaux. Il laissait derrière lui un sillage de mort et de sang.

Les hurlements de rage et les râles d’agonie ponctuaient sa progression vers la jeune femme. Bientôt il ne restait plus que le chef des truands comme ennemi encore debout.



Le combat fut bref et fatal. Le scélérat tenta une attaque violente et brutale, que le chevalier para avec grâce, il enroula la lame large et épaisse de son adversaire, et d’une botte élégante lui perfora le cœur.



La jeune femme s’était relevée et observait le duel.

Au début du combat elle priait pour la vie du jeune et séduisant gentilhomme venu à son secours. Un homme seul face à cette armée de coupe-jarrets, elle s’attendait au pire. Oubliant sa nudité, elle porta une main sur son cœur, l’autre à ses lèvres, craignant défaillir.


Le dernier truand mort, elle s’adressa à son séduisant protecteur :



Elle déchira un long morceau de sa robe en lambeaux en vue de panser son sauveur. Le jeune homme se lissa les moustaches tel un gros matou en appréciant les appas de la jeune beauté. Les mignons petits seins tressautaient à chaque geste. Les tétons dardaient vers le jeune homme, quémandant inconsciemment une caresse. En parfait gentilhomme, il évitait de regarder trop ouvertement la jeune femme, mais ne pouvait s’empêcher de l’admirer.



Après une hésitation il baissa ses bottes et son vêtement. Les yeux de la jeune femme s’écarquillèrent, un « oh » muet se lut sur ses lèvres.


Elle voyait pour la première fois le sexe d’un gentilhomme, flamberge qui palpitait en son honneur. Les deux jeunes gens se regardaient, indécis, ne sachant quelle attitude adopter.


N’écoutant que son instinct, elle lui sauta au cou et pour la première fois aussi, embrassa un homme.

Leur manque d’expérience en la matière étant largement compensé par un enthousiasme débordant.


Il caressait les petits seins, pressait et embrassait les tétons, ne savait où donner de la main ni de la bouche. La peau de la jeune femme rosissait sous les baisers de son sauveur.

La langue du chevalier venait chercher celle de Charlotte en un tendre duel.


Des doigts hésitants agrippèrent et caressèrent le vit qui se pressait sur son ventre. La moustache du jeune homme vint se perdre dans le buisson odorant et humide de la belle. Elle ne cessait de répéter Merci mon Dieu, pardon mon père tout en écartant les jambes.


Elle craignait depuis longtemps le jour où elle devrait offrir son trésor à son vieux mari, et ce jour arrivait, non pas avec le Duc, mais avec ce sémillant jeune Paladin.

Son cœur de romantique palpitait tout autant que sa Divine Ouverture.


Le grand bâton de Moïse vint tout naturellement se nicher dans le fourreau velu. Telle une amazone, la jeune femme chevauchait Paul, qui voyait s’agiter les mignonnes pommes d’or du jardin des Hespérides.



À force de caresses, de mots tendres, de baisers, ils ne mirent guère longtemps à reprendre leur activité, lui allongé sur la belle qui ahanait sous les coups de boutoir. Aux doux jeux de la joute amoureuse Paul tenait bien en lice. Les yeux plantés dans ceux de son amant, un sourire extatique aux lèvres, la belle Charlotte gémissait une série de mots sans suite : Messire Paul – oui, Paul – mon Dieu, ce qui avait le don de décupler les facultés de son galant.


Venant de frôler le pire des maux, la jolie damoiselle se donnait corps et âme à son sauveur, et advienne que pourra. Ils touchaient de nouveau les portes du Paradis quand dans un élan quasi mystique, elle déclara Oh oui, comme je vous aime, ce qui eut le don de déclencher un orgasme commun. Le chevalier s’avoua vaincu, mais au tendre jeu de l’amour, les défaites ne sont jamais cruelles.



Le carrosse gigotait de nouveau d’étrange façon quand une troupe armée investit la petite clairière.



Se tenaient là aussi le père de la jeune femme et le futur marié. Lorsque Paul et Charlotte sortirent nus comme des vers, les soldats se retroussèrent les moustaches.

Jean-Aymar de Vauquonnery et René de Sessandre se récrièrent.



Charlotte, toute hérissée, les mains posées sur les hanches et ne tenant aucun compte de sa tenue, se plaça devant Paul.



Le militaire, chef de cette troupe, désignait les cadavres des bandits en fixant le jeune homme dans les yeux.



Le chevalier venait de reconnaître Monsieur, frère du Roi. Vu l’accoutrement des deux protagonistes, le père et le futur mari ne pouvaient tolérer de tels propos. Ils commençaient à émettre des objections, sans toutefois oser contredire ouvertement le Royal Frangin.



Ignorant la réaction du duc et du baron, il continua.



Le frère du roi lui secoua vigoureusement l’épaule.





ooOOoo





La jeune femme lui secoue l’épaule.

Il sort de son songe alors qu’elle sort du train.

Elle s’éloigne, perdu dans son rêve, il ne lui a pas dit un mot.


Perdu dans ses pensées, il travaille machinalement. Il mène à leur dernière demeure quatre personnes, il pense à sa belle inconnue, sa main douce sur son épaule.

Elle l’a remarqué, elle sait où il descend, ce soir il osera lui parler.




ooOOoo




Assis à sa place habituelle, il la voit monter dans le train, s’asseoir, lui faire un petit sourire et un signe de tête.

Il lui sourit en retour, hésite à la remercier pour ce matin. Il faut attendre encore un peu.

Comme à son habitude il préfère plonger dans ses rêves.




La planète oubliée



Le capitaine John Deuff, dit JD, tentait de maîtriser la navette. Le petit vaisseau tanguait, secoué par le souffle de l’explosion. Ses adjoints gisaient, inconscients, sur leurs sièges.


Alors que le Spéculum, vaisseau spatial d’exploration de la fédération terrienne approchait du système planétaire Trappist, le commandant Bill Bocquais décida d’envoyer une équipe d’exploration sur Trappist F.

En effet d’étranges signaux émanant de cette planète avaient attiré l’attention de l’équipage.


Le Spéculum devait explorer une partie de la galaxie, tandis que d’autres vaisseaux – tel le Coloscope – du même type partaient à l’aventure dans d’autres secteurs.

À peine le petit appareil de reconnaissance venait-il de quitter le Spéculum que celui-ci fut touché par un tir de laser à haute densité.


Le vaisseau mère explosa, secouant la navette comme un fétu de paille.


Les voyants clignotaient sur le tableau de bord et les alarmes hurlaient de toutes parts.

JD se trouvait au bord de la syncope.

Le petit appareil, attiré par la gravité de la planète, finit par entrer dans l’atmosphère et se poser tant bien que mal sur le sol, les tôles encore rougeoyantes.


Il tenta en vain de contacter le vaisseau, celui-ci, Bill Bocquais et tout l’équipage tournoyaient en milliers de débris autour de Trappist F.


JD devait sortir explorer les alentours. L’endroit semblait habitable, mais guère hospitalier. L’accueil laissait à désirer.

Après avoir mis en sécurité ses collègues toujours inconscients, il fit le tour de l’épave, se rendant vite compte que la navette ne volerait plus jamais. Il s’aventura un peu plus loin, vers ce qui lui semblait être une clairière.


Là, une vision de rêve le cloua sur place.

Ce qu’il prenait pour une clairière était un grand lac bordé d’arbres en fleurs. Un oiseau dans les frondaisons lançait un cri de temps à autre, un Coucou très mélodieux.


Un étrange équipage arrivait vers lui. Des gardes humains entouraient un palanquin porté par deux animaux à six pattes et à tête de rhinocéros. Dessus se tenait la plus belle femme qu’il ait jamais rencontrée. Vêtue de soies transparentes, un diadème posé sur les longs cheveux de jais, des bracelets d’or et d’argent enserraient ses bras et poignets. Il admirait les adorables petits seins qui gigotaient derrière le tissu, il pouvait même voir les tétons se hérisser ainsi qu’une ombre plus sombre au bas du ventre.


La divine créature posa les pieds sur le sol et s’approcha de lui.



Une princesse ? Une déesse oui !



Heureusement, son traducteur universel lui permettait de saisir les paroles de la sublime créature.

Avant qu’il n’ait pu comprendre le sens précis du discours, de demander ce qu’était un Zourg, des cris retentirent, les gardes furent bousculés et une troupe hurlante de petits êtres bas sur pattes et agressifs se saisit de la princesse et la brutalisa. Des personnages à casquette et capuche, pantalons bas du cul et hurlant comme des damnés.





ooOOoo





Il se réveille en sursaut, son traducteur semble déconner une nouvelle fois.



Il ne rêve plus. Sa belle inconnue se fait secouer par deux loubards encapuchonnés. Elle s’agrippe à son sac avec l’énergie du désespoir. Les autres passagers se planquent courageusement.

Encore mal réveillé, il ramasse sa besace et s’approche de l’algarade. Il se sent des velléités de paladin, de mousquetaire, de privé.



Sans réfléchir, il balance son sac sur la tête du truand, un grand bruit métallique s’ensuit, un genre de Chklong Booing, le gus marque un temps d’arrêt, ouvre la bouche dont s’échappent quelques dents.



Elle vient de planter un violent coup de genou dans les « gosses » du sinistre individu, le pliant en deux.



Tel un héros de film ou un de ces personnages qu’il invente, il fait tourner son sac comme une fronde et le flanque sur la tronche du malandrin.


Le sale type émet un « Beuuhh » du plus bel effet avant de s’effondrer pour le compte. Les autres passagers ragaillardis applaudissent.

Sur ces entrefaites, le train s’arrête et des policiers menottent et embarquent les malfaisants. Les voleurs voulaient tirer des bourses, ils allaient passer quelques jours avec des glaçons sur les leurs, de bourses.





~o~




La jeune femme sort, accompagnée de son chevalier servant.



Il fouille dans sa sacoche et en extrait un étrange objet.



Il a le cœur qui bat à deux cents pulsations par minutes quand une petite main vient se glisser dans la sienne et qu’une douce voix lui demande :





ooOOoo




Ce samedi, il ne travaille pas. Il ne rêvera pas sur le trajet.


Son rêve dort encore à ses côtés. Les cheveux étalés en corolle autour de son visage, un léger sourire flotte sur ses lèvres. Cette tendre image reflète mal les scènes furieusement érotiques qui se sont déroulées presque toute la nuit.


Loin des héroïnes romantiques qu’il imagine, aussitôt rendus chez elle, sa belle se jette sur lui, lui roulant une pelle d’enfer, en profitant pour le déshabiller.

Une fois nu, elle pose ses lèvres partout sur son corps. Bien entendu, sa baguette magique réagit au quart de tour à ce traitement.


Elle fait durer le plaisir en passant la langue tout le long de la bête, puis l’embouche lentement. Il se mord les lèvres sous cette douce caresse.



Elle se déshabille tout en lui prodiguant cette câlinerie. Elle lui griffe la peau des testicules d’un ongle délicat. Il est presque au bord de l’explosion lorsqu’elle se relève et lui dit tout bas :



Comment résister à une telle supplique prononcée d’une douce voix.


Il s’installe entre les jambes largement ouvertes, se coule sur le corps couvert de sueur. C’est elle qui s’empale sur le pieu tendu en projetant son ventre à la rencontre de son amant.

Tandis qu’il pénètre son antre, il embrasse avec fougue les lèvres, les joues, les épaules. Il caresse les petits seins tout en allant chercher au fond des entrailles offertes les points de plaisir.


Au point de non-retour, elle plante ses ongles dans les muscles des épaules, s’arque et enserre la taille de l’homme de ses longues jambes.


Ils refont l’amour, encore et encore, jamais rassasiés.

Il aime la regarder prendre son envol, assise sur lui, les yeux révulsés.

Il aime enfouir son visage dans la douce fourrure et venir lécher son nectar.


Elle ouvre les yeux et lui sourit. Il caresse le visage et dépose un petit baiser sur la bouche.



Difficile de raconter une histoire quand une belle Agathe te caresse les gosses.



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⁽¹⁾ Gambison : Pourpoint rembourré porté sous une armure.