n° 18716 | Fiche technique | 43474 caractères | 43474Temps de lecture estimé : 32 mn | 11/12/18 corrigé 06/06/21 |
Résumé: Les années 80, un bistrot vieillot, un jeune type et ... une pute. | ||||
Critères: fh cunnilingu pénétratio fdanus fsodo -amourpass | ||||
Auteur : Claude Pessac Envoi mini-message |
Je reprends et repars ici d’un extrait d’un texte déjà paru, mais que des circonstances particulières avaient fait dériver vers un délire rageur. La colère est passée, mais pas l’envie d’explorer les tendresses d’un couple atypique. Donc, ne vous étonnez pas si vous avez l’impression d’un déjà… lu. Normal !
Amateurs de scenarii surprenants, rebondissements en cascade et originalité à tous crins, passez votre chemin… C’est juste une histoire simple, dégoulinante de tendresse et bons sentiments.
Une guimauve ! Une vraie guimauve !
oooOOOooo
À cette époque-là, j’ai vingt-cinq ans, je suis un homme, un vrai, pas tatoué, ce n’est pas encore la mode. Au début des années 80, il n’y a que les motards, les légionnaires et les punks pour exhiber des aigles flamboyants, des croix douteuses, des « Maman je t’aime » et autres « Sandra pour la vie ». Moi, je suis propre sur moi, conventionnel, un peu bourge diraient certains. J’ai un bon job, un appart, une voiture. Une vieille R5L, 782 cm3, levier de vitesse sur la planche bord, un peu pourrie (la R5, pas la planche de bord, quoique !).
Bon, enfin… pas vraiment un aspirateur à minettes en tous cas.
Cela dit, de ce côté-là, ça va, ça vient. C’est l’essentiel non ?
J’ai déménagé, quitté mon patelin, à cause de mon boulot. Je suis monté à la capitale. Régionale la capitale, on se calme ! C’est cool : ville universitaire, ça bouge, des fêtes, des occases sympas. Et sinon, je sors en boîte le week-end. Régulièrement, je ramasse une poulette ou je me fais embarquer par une tigresse.
Le soir, deux ou trois fois par semaine, je vais au ciné. J’ai dégoté une salle Art et Essai, l’entrée est moins chère qu’au Gaumont et on y passe des bons films. J’ai découvert « Répulsion » de Polanski avec Deneuve (choupette à vingt-deux ans !), revu « Vol au-dessus d’un nid de coucou », trop génial et aussi « Parfum de femme », aaahhhaaAAgostina Belli…
En sortant du cinoche, j’ai pris l’habitude de faire une halte chez Nono. Chez Nono, c’est un bistrot vieillot, à cinq minutes de chez moi. Noël et Marguerite tiennent la boutique depuis des lustres sans doute et sont deux petits vieux bien gentils. Pour sûr, côté clientèle, c’est pas super jeun’s (comme on ne dit pas encore à l’époque) ; il y a un flipper, d’accord, mais modèle 1962 « Bugs Bunny contre Elmer Fudd ». Rien de renversant. Mais Nono est sympa, sauf les soirs où il a effectué un peu trop de contrôles qualité sur ses tireuses Kro et rabâche mél-alcoolique, genre « ♫ Avec le temps, avec le temps, va tout s’en va ♫ ».
Sinon, côté avantages, ce sont les bières les moins chères du secteur et puis, on y risque pas de s’éterniser : les vieux baissent le rideau vers 23 heures maxi. C’est mieux, quand on bosse le lendemain.
Un soir, j’étais en train de discuter sérieux… avec ma bière entre une nana qui s’installe au bar, juste à côté de moi. Mignonne, grande, blonde, un peu trop peinturlurée à mon goût, un peu trop de ricil et mascara (ah, c’est pareil ? bon !), mais bien, vraiment bien, la meuf. Juste, un peu trop, c’est tout. Habillée très court. Notez que je n’ai pas dit trop, j’ai dit très ! Ajoutez un décolleté ravageur et pas de soutif sous le lycra diaphane. Bref, vous l’aurez compris, la demoiselle est une pute. Non, stop, calmos, ce n’est pas un jugement de valeur, juste un constat : c’est une pro, une péripathétique-chienne de garde.
On discute. Sympa, la meuf. Et pas con, même pas vulgaire. Nono, derrière sa tireuse, ne dit rien : a priori, il la connaît, et visiblement, il l’aime bien, Rebecca. Et Marguerite aussi visiblement l’a à la bonne. On discute. Longtemps ; les p’tits vieux commencent à monter les chaises sur les tables.
On a quitté le bar pour une table dans un coin.
Comment c’est arrivé, je ne sais plus, mais le fait est qu’on parle… d’art ! Elle me raconte « Le Cri » de Munch, son émotion la première fois qu’elle a vu une repro de la toile, et sa passion pour les impressionnistes. « Moi, je préfère les pré-impressionnistes comme Turner », je dis. Pas pour me faire mousser, mais parce que c’est vrai. Point. Voilà. Je n’ai aucune raison de vouloir l’impressionner et surtout, surtout, j’ai pas envie de lui mentir. Pourquoi ? Je-sais-pas !
On parle, on parle, Marguerite a fini de passer le balai, Nono ferme le rideau de fer.
Rebecca m’explique :
Oh-oh !
Seuls, on continue à discuter, à rigoler, et un peu à spleener… Cool. Longtemps.
Au moment de partir, Rebecca me dit :
Et tout de suite, elle ajoute :
Embarrassé (je ne veux pas lui faire de peine, allez savoir pourquoi !), je réponds :
Elle n’insiste pas, petit sourire tristounet. Sur le trottoir, on se fait les bises
On part dans des directions opposées, mais je me retourne pour zieuter son joli petit cul…
Le surlendemain, re-cinoche, mais le film est nul, enfin, il ne me plaît pas et… et à 10 h 20, je suis au bar. Nono ne fait aucune allusion, mais Marguerite, c’est une première, est venue me faire la bise quand je suis entré. À croire que je fais partie de la famille désormais ! Je me descends deux Fischer et Nono me glisse :
Trop cool pépère !
Dans le mois qui a suivi, on s’est vu sept ou huit fois Rebecca et moi. C’est pas beaucoup ? Oubliez pas quand même, elle est censée bosser de nuit ! À chaque fois qu’on se voit, on parle, on se raconte, on se fait des confidences, on partage des émotions, nos envies, nos espoirs. On a toujours quelque chose à se raconter.
Elle ne m’a plus jamais proposé de la raccompagner chez elle. Juste, la deuxième fois qu’on s’est vu, elle m’a demandé :
Bien embarrassé le mec !
Elle n’a pas fini sa phrase, et je n’ai pas su quoi lui dire. Je ne voulais pas lui faire de peine. Ou j’étais trop con tout simplement. Mais bon, stop, mettez-vous à ma place, là, c’était notre deuxième rencontre, je ne la connaissais que depuis l’avant-veille ! Donc, il y a eu un blanc, on a bu un coup (de bière, pas de blanc) et on est reparti dans nos discussions art-ciné-bouquins-et-je repeins le monde.
Et çà donc, pendant un bon mois. Parfois, en nous voyant dans le miroir piqueté à côté de notre table, j’avais l’impression qu’on jouait Milord « ♪ ♫ Allez venez Milord, vous asseoir à ma table ♫ ». Rebecca aussi aimait Piaf, même si ce n’était pas de notre âge ! Elle était gentille, Rebecca, je la trouvais même de plus en plus… gentille. Et pas que ! Mais, entre nous deux, avec le décor un peu minable du café, ça aurait risqué de finir comme les Amants d’un Jour « ♪ ♫ ; On les a trouvés se tenant par la main ♫ ».
Un soir, au bout d’un mois donc, au moment de se quitter, sur le trottoir, elle me demande : T’es libre demain soir – moi oui – je serai là vers neuf heures.
Elle a débité sa phrase d’un trait et me fixe avec un regard anxieux. No prob, je viens ! Neuf heures, OK… même… qu’on pourrait… se retrouver plus tôt et se faire un resto si tu veux ?
Là, elle est sciée la môme et piaffe : Tu… tu irais au resto avec moi ? Craquante ! Ben oui,… m’enfin, si t’as aut’chose à te mettre que… ton bleu de travail…
Elle rit, aux anges. T’es couillon toi ! Merci pour l’invite, mais pas demain, une autre fois. Mais c’est d’accord, hein, demain neuf heures !
Le temps de dire oui, elle me colle un bisou express sur la bouche et part en courant. J’en reste comme deux ronds de flan, à me suçoter les lèvres.
Le lendemain samedi, toute la journée, je suis comme un gamin ! Heu-reux ! Putain (oui, facile, je sais !), je suis aux anges « ♪ ♫ … tout le restant m’indifè-èè-re, j’ai rendez-vous avec vous ! ♫ ».
Et donc, neuf heures moins juste, j’entre chez Nono et Marguerite. Merde, y a une gonzesse installée à notre table ! Mer-deuh ! Je suis déjà prêt à aller engueuler Nono (gentiment, j’ai le respect des têtes chenues) quand la meuf me fait signe.
Je sais bien que la lumière est pas violente dans le troquet, mais quand même, c’est qui cette brunette cheveux courts toute timide ?
Oh putain, je le crois pas, c’est Reb !
C’est bien elle qui se lève, toute gênée, pas de perruque blonde ou rose, pas de maquillage, juste un peu masca… ricil, nature ! Petite robe stricte, même pas décolletée. Manque juste les chaussettes blanches pour faire étudiante sage.
On s’est assis, je la mange du regard.
Elle sourit, enfin, et son regard est doux, rasséréné, confiant. Moi, je ne sais plus sur quel pied danser. Les pensées se bousculent dans ma tête : Merde, elle est trop jolie – Je craque – Et c’est quoi ce rendez-vous ? – Qu’est-ce qu’elle me veut ? – On va où ? – Putain, je la veux – Oui mec, mais c’est une pute, oublie pas ! – M’en fous, j’suis raide dingue ! – Mer-deuh, je l’aime !
Tout de suite les grands mots ! Je n’ai jamais su faire dans le détail !
Rebecca, enfin Steph, voit bien que je suis un peu perdu et elle reprend l’initiative.
La voilà qui se penche et attrape un grand carton à dessin, genre A1. Elle ouvre cet immense porte-feuilles et commence à faire défiler des dessins. Ses dessins, je vois bien la signature. Il y a de tout, des fusains, des gouaches, des esquisses, des pastels, des encres de Chine… Portraits, paysages, natures mortes, nus,… Dans tous les styles : abstrait, figuratif, hyper réalisme, pointillisme…
J’ai beau être amateur d’art, à vingt-cinq piges, je ne vais pas prétendre être un expert pour autant. Mais j’en sûr, c’est beau, c’est top, c’est vraiment du grand art ! J’adore !
J’en bafouille :
Putain (oh-merde !), je le savais ! Je savais que cette fille n’était pas juste une pute ! Qu’elle était bien plus que ça !
Tout de même, à cet instant, on me demanderait d’additionner 1 + 1 que je serais incapable de donner la réponse ! Paumé, largué, éparpillé par petits bouts façon puzzle, je ne sais plus comment je m’appelle !
Complètement étourdi, je contemple ma voisine :
Steph affiche une mine inquiète. Elle a replié le porte-folio et l’a repoussé sur le côté de la table. Elle se tient toute droite sur sa chaise, les avant-bras sur le formica, les mains jointes, doigts serrés en poing.
Elle saisit la balle au bond :
J’ai décidé ! Je ne veux pas la laisser poursuivre. Je pose mes mains en conques sur ses poings joints, les caresse un instant avant de les soulever pour les porter doucement à ma bouche. Je dépose une kyrielle de baisers légers sur ses doigts qui lentement se desserrent. Nos regards sont suspendus l’un à l’autre, verrouillés.
Je sens ses mains trembler contre ma bouche. À moins que ce ne soient mes lèvres qui tremblent. Longtemps, nous restons immobiles, sans parler, sans ciller. Le temps s’est suspendu, les secondes sont des heures, nos gestes ralentis.
Sa voix n’est qu’un chuchotis, à peine audible, un souffle frémissant, trahissant ses interrogations, sa peur, ses attentes. Je voudrais la rassurer tout de suite, ne pas la laisser sur des charbons ardents, mais je suis tellement partagé, tiraillé entre les sentiments et le désir que j’ai pour elle et… et ce qu’elle est, ce que je suis, la complexité évidente, criante, d’une relation entre nous. Je cogite à toute allure, je tente de peser le pour et le contre, de raisonner.
Comme s’il était possible de raisonner sous adrénaline !
Car c’est bien ce qui se passe, des flots de cet euphorisant acide stressant ont remplacé l’hémoglobine et bloquent le bêta transi. Paralysé, le pépère !
Stéphanie, d’un simple geste de tête et les yeux écarquillés, renouvelle son interrogation.
La pauvre est visiblement ébranlée par ma déclaration. Sourcils froncés et air incrédule, Stéphanie se lève lentement, semble hésiter, balance d’un pied sur l’autre. Elle jette un coup d’œil derrière elle, croise le sourire confiant de Marguerite qui opine doucement du chef. Je me suis levé moi aussi, prêt à bondir si jamais elle tournait les talons, prêt à dire d’aussi énormes bêtises que « Je t’aime », par exemple.
Mais l’adorable se tourne vers moi, s’approche, pose sa main sur ma joue et vient doucement se blottir contre moi.
Délicieux bâillon, sa bouche se soude à la mienne, nos lèvres se palpent, se goûtent, se fondent. Si nous n’étions pas en totale apnée, nos souffles bien sûr se mélangeraient et la seconde d’éternité de cette fusion magnifique nous transporte bien au-delà de nos désirs les plus fous. Nos peurs s’évanouissent, la transgression nous magnifie, le monde s’évanouit et le petit bistrot minable se mue en décor hollywoodien, où nous sommes le couple éternel.
Stéphanie lance un regard à Marguerite et désigne silencieusement son carton à dessins. Petit signe de tête de la mamie qui confirme qu’elle se chargera de ranger le porte-folio.
Sans rien dire, nous sortons dans la rue et j’entraîne ma compagne.
Mon appart est effectivement très proche, mais il nous faudra de longues minutes pour atteindre mon immeuble. Nous courons certes, mais stoppons tous les quinze mètres pour nous étourdir de baisers, nous câliner. Nous avons si faim l’un de l’autre ! Et peu importe la pluie !
Si Steph est surprise par cette interpellation étrange, moi je souris et me retourne :
J’entraîne ma chérie en lui glissant :
Arrivés à destination, nous reste encore un marathon à parcourir jusqu’à ma chambre, course d’embûches où nous débarrassons fébrilement de presque tous nos vêtements qui alors parsèment les interminables deux mètres soixante-trois du couloir.
Sur la page blanche du lit, nous voulons écrire notre passion. Étreintes fulgurantes, baisers passionnés, caresses affolées, nous prenons le temps de nous découvrir. Nos sous-vêtements, derniers remparts de nos pudeurs, ultimes barrières à l’explosion de notre désir, attendront pour voler que nos peaux se soient amadouées, reconnues, apprivoisées. Nous nous serrons l’un contre l’autre, nous pressons aussi fort que possible comme à vouloir pénétrer, envahir, submerger le corps de l’autre. Nous savourons cette fusion des chairs impatientes.
Ma bouche finit par oublier les lèvres brûlantes de ma douce timide, glisse dans son cou, aborde le satin doré de sa gorge. Les fines dentelles noires du soutien-gorge reculent, découvrant peu à peu l’opalescence d’un sein dont je devine le téton érigé sous les dentelles ajourées. J’ai compris que Steph ne prendra aucune initiative, me laissera le contrôle, ne fera aucun geste pour m’encourager, ni me refréner. Je comprends sa réserve, sa prudence : elle sera sage ! Offerte, mais sage. Pure ! Je suis ému et heureux de la sentir se tendre, réagir à mes caresses, haleter sous les circonvolutions de mes doigts horripilants sur sa peau dorée. Chaque fois que mon regard plonge dans le sien, j’y lis son impatience apeurée. Elle est petite fille effrayée, impatiente et offerte.
Je défais l’agrafe coquine entre les bonnets qui, libérés, s’écartent et dénudent les petits monts laiteux, préservant quelques instants encore leurs sommets turgides. Doucement, je repousse un des triangles de soie noire, le laisse s’accrocher au sombre pic dressé avant de le repousser complètement. L’aréole est si contractée qu’elle a disparu pour se fondre en un insolent fanfaron qui me nargue et appelle mes caresses et ma bouche.
Ma langue vient aborder doucement l’irrésistible fraise, le premier contact, léger, fait sursauter sa belle propriétaire. Sur sa peau hérissée, je lis en braille les séismes qui la parcourent, les ondes délicieuses qui la transportent. Ma bouche, gourmande désormais, joue du téton dressé, s’amuse de sa fermeté, en jauge la résistance, s’extasie de sa surface grumeleuse. Ma main gauche, exploratrice charitable, est partie en mission humanitaire sur l’autre sein : il ne s’agirait pas d’en faire un laissé-pour-compte !
Sous cette avalanche de caresses et suçons, Stéphanie ondule, se tend, s’effondre avant que de nouveau propulser ses seins pour subir de nouveaux assauts de ma langue. Dans mon dos, ses mains s’affolent, plantent des ongles douloureusement expressifs dans ma peau.
Pour échapper à ces sévices délicieux, laissant à mes mains le soin d’entretenir le feu dans les seins raidis, ma bouche abandonne les mandarines pour continuer le voyage du tendre. Friponne, elle lèche le ventre plat, s’insinue dans le nombril, dégringole jusqu’à l’orée d’une petite forêt bouclée dont quelques arpents se sont échappés des dentelles d’une fine culotte.
Je devrais prendre mon temps, deviner dans les ajours de la broderie le dessin délicat de l’autel velu, me saouler des fragrances enivrantes du sacré bénitier, mais mon impatience s’est faite douloureuse. Je fais glisser l’encombrante culotte et découvre, émerveillé comme un gamin innocent, le sombre triangle frisotté qui surplombe les berges dodues du ravin scintillant d’un miellat doucereux.
Délicatement, ma langue dardée va explorer ces berges rosées à peine parsemées de duvet, aller et venir, monter et descendre sur la ligne de crête avant d’effleurer les replis délicats des petites lèvres ennoyées. Je les gobe ces petites lèvres crénelées, bois à la fontaine avant, insidieux manipulateur, de venir agacer l’étonnant bourgeon dressé dans le haut de la fente, l’impudique farfadet qui darde sa perle irisée. La réaction de ma consentante victime est à la hauteur de mon attente : ses doigts, perdus dans ma chevelure, se crispent et appuient sur ma tête, me plaque sur son con ruisselant. Stéphanie se cabre, tressaute, se tord et ondule. Elle crie, gémit, pleure et rit, emportée par la vague assassine de son plaisir. Peu lui importe à cet instant que je me noie en elle, que je m’étouffe dans ses soubresauts erratiques, dans les flots de son miel, elle prend le plaisir que je lui offre avec tant de bonheur. Je participe à ce séisme dont je suis le fier déclencheur, en goûte la force, en savoure l’exquise puissance.
L’étau des mains sur ma tête se desserre peu à peu, j’émerge et te trouve dévastée, embrumée, ensuquée dans un bonheur dont tes yeux embués témoignent. Tu m’attrapes aux épaules, me hisses vers ta bouche. Tes baisers, doux et légers, me comblent. D’incompréhensibles syllabes s’échappent de ta bouche, comme si tu voulais parler, mais refusais en même temps que des paroles définitives ne franchissent tes lèvres. Je te sens torturée, comprends combien tu es empêtrée de ce que tu es, coincée ton statut misérable, paria bâillonnée, interdite d’innocence et surtout de franchise.
Une vraie panique passe dans son regard, Steph me repousse sur le côté, se redresse :
Comme je veux répondre, elle enchaîne, plus véhémente encore :
Je comprends que je ne pourrai plus l’empêcher de parler, de me livrer ce que, tout à l’heure déjà chez Nono, elle voulait me dire.
Alors Stéphanie parle. Elle me raconte, les Beaux-Arts, ses petits boulots étudiants, le soutien de ses parents. Et puis, le chômage, brutal, pour son père et sa mère lorsque la boîte où ils bossaient l’un et l’autre a brutalement fermé, le PDG étant parti avec la caisse. Les traites de la maison, la déprime, l’impossibilité pour eux de continuer à financer ses cours.
La dèche. Le trou noir.
Le studio dont elle ne sait pas comment elle va pouvoir renouveler le bail et la troisième année aux Beaux-Arts, compromise.
Et puis, sa meilleure copine, Pauline, compatissante, qui lui avoue arrondir ses fins de mois difficiles en vendant son corps. Le refus. La réflexion. L’impasse.
La chute.
Trois mois, depuis début août, trois mois et quatorze jours passés dans la rue ; les passes, les pipes, les totales, toujours protégées, toujours, insiste-t-elle.
Les aveux, désespérés :
Je ne suis pas convaincu :
Son regard est douloureux :
Elle pleure, doucement, sans hoquet, sans renifler. Des vannes se sont ouvertes, de l’eau coule de ses yeux, simplement, irrésistiblement. Je serre la pauvrette contre moi, son visage sur mon torse, ses larmes inondent ma poitrine. Je la laisse s’épancher, j’attends qu’elle se calme. Je compatis, m’associe à son désarroi.
Et je réfléchis.
Tout doucement, je demande :
Steph se redresse, me sourit timidement :
Elle lâche un petit rire :
Devant mon air ahuri, elle explique :
Après quelques instants, quelques rouages ayant correctement fonctionnés dans ma petite tête, je demande :
Steph marque un temps, prend une profonde respiration :
Je caresse doucement sa joue :
Les mots, certains mots, n’arrivent pas à franchir le bord de ses lèvres.
J’ajoute, avec force :
Voilà qu’elle pleure à nouveau. Tremblante, avec une toute petite voix chevrotante, elle ose, enfin :
Ses lèvres frémissantes ont le goût salé de ses larmes.
Mais avec quand même un sacré goût du bonheur !
oooOOOooo
Je suis en train de glisser ma clé dans la serrure de mon appart. Je reconnais immediatly la voix de ma british voisine.
Sacrée Betty ! Toujours à me guetter pour m’alpaguer et me voler un petit quart d’heure. Quand c’est pas toute une soirée. Elle aime ma compagnie, la veuve !
Le con, il est dix-huit heures, j’ai parlé trop vite : elle va me coincer assez longtemps pour que je me ramasse une musette ! Et j’ai pas envie ! Je veux garder la forme moi ! J’improvise :
Pas la peine d’essayer de l’embrouiller la rosbif ! Sacrée bonne femme ! J’adore son accent, ces « r » qu’elle avale, ces « u » qui sonnent toujours « ou » et ces féminins-masculins qu’elle mélange sans arrêt. À croire qu’elle le fait exprès de se planter aussi systématiquement !
Non, mais ho, mamy, Tu veux des détails peut-être ?
Je me contente de bougonner…
Celle-là ? Tiens, ça a dû lui échapper !
M’enfin ! De quoi je me mêle !
Betty fait la moue, avale une gorgée du tourbé :
Comme je ne réponds pas, elle enchaîne :
Eh merde, elle insiste ! Non, je ne suis pas déçiou ! Je proteste :
Qu’est-ce que j’ai à lui… ?
Non, mais attends ! Hey ! J’ai pas rêvé, elle a paumé son accent tout à coup : pas de « r » avalé, un « tu » parfait ! Non, j’ai pas rêvé, elle cause comme vous et moi, sans accent !
Et elle rigole, et elle se paye ma tronche !
Waouh mémère, tu pourras te vanter de m’avoir épaté !
Schkling fait mon verre en tombant sur le carrelage !
Franchement, je vous le dis, LÀ, je traverserais la rue, un double-decker bus, dégringolant du quatorzième étage d’un gratte-ciel me tomberait pile sur la tronche (oui, je sais, c’est pas crédible parce que comment qu’il aurait fait, le bus,… pour justement tomber pile au bon moment, sur ma tronche, hein ?), mais bon, admettons, qu’il le ferait, l’Impérial, que j’en serais moins assommé !
Hey, mais c’est qui cette mémé ? Comment qu’elle sait pour Steph ? Elle a pourtant pas la tête d’une James Bond Girl ! C’est… Tata Harry, une Mata Hari, version rosbif de l’espionne de nos cours d’histoire ?
Et elle est contente avec ça hein ! Ça la fait bien marrer !
Pendant que je ramasse les bris de mon verre et éponge le scotch pour que King Charles, son clebs, ne se ramasse une cuite, elle commence à raconter :
Elle enchaîne :
Bon, Mamy, accélère, je m’en tape de tes petites aventures.
Mais elle continue son histoire, tranquille : la putain la recueille et au bout de quelques jours, l’initie au taf ! Quoi ? Eh ben, merdum ! Lady Betty Lampton a été pute ! Si je m’attendais à ça ! Eh bé, elle en a d’autres des comacs ?
Oui, me dis-je, je vois assez bien… mais bon… épargnez-moi les détails please !
Betty me sourit gentiment :
Là, je n’hésite pas une seconde :
Je la coupe :
Je la coupe, proclame avec force :
Non, mais Mamy, tu crois que c’est facile à dire des trucs pareils ?
Betty fronce les sourcils, m’interroge du regard. Je reprends, intimidé :
Betty se recule, s’adosse confortablement dans son fauteuil :
Elle me laisse digérer son sermon, si on peut appeler ça comme ça ! Gonflée quand même, mémère, pas froid aux yeux, et pas la langue dans la poche ! Dans le genre direct et sans fard, elle se posa là !
Je suis un peu scotché par tout ça ! En même temps, il me vient une énorme tendresse pour cette incroyable Lady putain ! Je me lève et m’en viens lui coller un énorme bisou sur la joue, je la serre fort contre moi :
La vieille dame se détache de moi, surprise par cet élan de tendresse. Elle me repousse gentiment :
Et reprenant son vrai-faux accent british :
oooOOOooo
Nous sommes pelotonnés l’un contre l’autre, imbriqués, le dos de Stéphanie plaqué à mon ventre. Position fœtale. Tendresse, volupté, sérénité. Nous apprécions la douceur du moment, le lent atterrissage duveteux et confortable d’après orgasme. Stéphanie ronronne.
Je l’embrasse dans le cou, dans la nuque. Mes mains titillent ses seins, caressent sa peau.
Notre position, dos à dos, doit être propice aux confidences :
Ouff, la gourmande, elle n’a pas l’air décidé à me laisser récupérer bien longtemps !
Elle est trop, cette nana ! Je lui souffle :
La pauvrette pousse un soupir de soulagement.
Je sais tout ce que cela représente pour elle : un cadeau. L’acte d’une soumission consentie, ultime, totale. Peut-être plus encore pour elle que pour aucune autre !
Reb se couche à plat ventre sur le lit.
Je la fais se retourner, s’allonger sur le dos, lui relève les jambes et bascule son bassin. J’ai la double vision bénie de sa conque et de son cul serré, tout en pouvant capter, dans son regard, ses appréhensions, sa douce terreur impatiente. Trop bon !
Je prélève en effet suffisamment du mélange de sa mouille et de mon sperme pour bien lubrifier la raie.
Les yeux dans les yeux, doucement, je porte d’abord mon majeur à l’entrée inviolée, masse l’étoile plissée qui se détend peu à peu. Quand le doigt la pénètre, ma douce sursaute un peu, ferme les yeux un instant, les rouvre et me sourit.
Calmement, je pousse mon gland vers l’entrée de service. Stéphanie relève encore son bassin, écarte les globes de ses fesses des deux mains. C’est elle qui vient s’empaler sur mon chibre, son cul avale mon nœud, ma tige coulisse dans l’anneau étroit de son cul.
Elle sourit toujours, m’encourage :
Ma queue coulisse sans difficulté dans l’étoile Polaire, plonge dans le trou noir. Je lui ramone le fond, je la bourre, sans ménagement désormais. Mon adorable petite pute se malaxe un sein et se branle le clito. Les yeux écarquillés, lèvres serrées, elle subit avec bonheur mes coups de boutoir. Le plaisir sera express, je le sais, pour elle comme moi. L’attrait de l’inédit sans doute, le parfum de l’interdit, de l’exclusive. D’une… première fois !
Quand l’orgasme nous emporte, entre deux cris de jouissance, elle proclame :
Je suis le roi du monde, elle est ma reine !
Une putain d’impératrice !