n° 19151 | Fiche technique | 13960 caractères | 13960 2293 Temps de lecture estimé : 8 mn |
21/08/19 |
Résumé: Le moment est venu pour Benoît de montrer à son épouse, Françoise, le contenu de la boîte à chaussures. Mais... | ||||
Critères: voir exhib | ||||
Auteur : Couple.libertinage Envoi mini-message |
Épisode précédent | Série : La boîte à chaussures Chapitre 03 / 03 | FIN de la série |
Résumé des chapitres précédents :
Après la perte de son meilleur ami, Benoît s’est vu remettre une boîte à chaussures contenant entre autres, des impressions de photos érotiques, un grand carnet, parcouru à la va-vite, ainsi qu’une clé USB grâce à laquelle il put entendre les ébats d’un couple. Passionné d’érotisme et de sensualité, Benoît avait bien l’intention de faire découvrir à son épouse Françoise toutes ces petites merveilles. Un réveil câlin, très coquin aussi, en constitua une introduction idéale.
Chapitre 5
Un petit sourire en coin, me faisant face, Françoise ajouta comme pour renforcer notre complicité :
Je me levai et, tout en prenant la direction de la pièce où se trouvait l’ordinateur, j’invitai Françoise à me suivre. Je pris la boîte à chaussures déposée au beau milieu d’une étagère, encadrée de livres sur la musique et la déposai sur le bureau. Je tendis la lettre de Jérôme à mon épouse qui la lut avec attention avant de se figer pendant de longues secondes. Alors que je la regardais, m’apprêtant à caresser son visage, Françoise sortit de son silence :
Mon épouse posa la lettre dans le couvercle de la boîte et plongea la main dans celle-ci. Elle en sortit les impressions de photos et les regarda attentivement. Quelques-unes étaient en noir et blanc et le côté intimiste de celle où une main masculine dans la pénombre posée sur le haut du dos d’une femme retint son attention.
Je poursuivis, partageant le sentiment de Françoise :
**********
Interruption d’écriture.
Ce matin, je me suis levé de bonne heure. L’envie d’écrire était très forte.
Je venais de débuter quelques heures auparavant l’écriture d’un nouveau chapitre d’une histoire érotique. J’en avais la trame principale dans la tête, mais comme j’avais attendu trop longtemps pour coucher tout cela sur le papier, le doute s’était installé à propos du déroulement de l’histoire.
Depuis un jour ou deux, d’autres idées se faisaient jour et venaient embrouiller mon esprit. Elles étaient un peu confuses, mais je commençais cependant à perdre mes certitudes quant à la suite à donner au récit. Cette imagination, je la maîtrisais plutôt bien jusqu’à présent et tant qu’il s’agissait des mots, des mots pesés, évalués, choisis en connaissance de cause puis collés les uns aux autres pour former des phrases qui me convenaient, tout allait bien. Tant qu’il s’agissait de cela… Mais la vie étant ce qu’elle est, il y a des années et des années que ce bouillonnement dans ma tête sème régulièrement la zizanie.
Comment faire évoluer un personnage, comment le faire réagir en mettant en pratique la bien connue formule « Toute ressemblance avec… » ? La suite de cette histoire dépend donc de cette capacité à dissocier le réel de l’imaginaire. Mais que se passe-t-il lorsque le réel provient de l’extérieur, qu’il est totalement étranger à notre environnement, mais surtout qu’il est trop beau, au point de faire envie ? D’autant plus envie qu’il évoque pour moi le plus simplement du monde des désirs depuis si longtemps mis en attente ?
Voici deux semaines, j’ai montré à mon épouse les photos qu’une jeune femme poste sur un site dédié à l’exhibition. Contrairement à la plupart des participants, elle avait pris soin d’expliquer le sens de sa démarche, de façon simple, sans chichis. Elle revendiquait le fait de prendre elle-même ses photos et le résultat était souvent excellent. Pas une once de vulgarité, énormément de douceur et il est évident qu’elle accordait une attention particulière à placer l’appareil photo – ou le smartphone, peu importe – au meilleur endroit, dans le seul but de susciter l’émoi.
Je n’entendis d’abord aucun commentaire de la part de mon épouse et il me fallut lui demander ensuite si elle trouvait cette photo-là jolie pour connaître son point de vue.
« Oui ». Un oui moyennement, peu convaincant, d’autant moins convaincant que la suite de la réponse traduisait clairement le doute quant au fait que cette femme ait pu prendre elle-même tous ces clichés. Je manifestai mon désaccord avec cette idée et m’empressai de passer à autre chose. Je ne saurais dire combien de fois j’ai montré de jolies photos à mon épouse. Contrairement à certains couples, c’est un sujet que je peux aborder en toute liberté avec elle. Mais à mon grand regret, jamais son imagination ne viendrait à reprendre à son compte certaines idées photographiques. Sans doute suis-je désormais sans espoir de ce côté-là, et j’oubliais assez bien vite ce moment de partage trop vite devenu égoïste.
Jusqu’à cette fin d’après-midi où le chapitre à écrire m’amena, au bout de trois paragraphes à repenser aux photos de la jeune femme. Je me souvenais qu’elle disait avoir vingt-cinq ans et vivre en couple. Elle affirmait que son compagnon ne ressentait pas le besoin de venir sur le site, qu’elle lui avait fait part de son intérêt pour ce genre de photos, qu’elle apprécierait qu’il s’y intéresse un peu, bref, qu’il se montre un peu curieux. Manifestement, au bout du compte, de partage entre eux sur ce point, il n’y avait aucune trace. Mais elle continuait malgré tout.
Je voulais voir, maintenant que l’esprit sensuel de ses photos cliquetait à nouveau dans mon cerveau passablement en ébullition, ce qu’elle avait publié récemment. Une fois sur sa page, mes yeux se posèrent d’abord sur son pseudo. Ce mot, créé de toute pièce et qui n’a en réalité aucun sens, suggère pourtant à mes yeux – comme à d’autres, je n’en doute pas un seul instant – l’idée de liberté amoureuse ou pour être plus précis encore, le souhait ardent de se donner à l’autre afin qu’il la transporte aux confins du bonheur. C’est donc avec en tête ce mot si joliment évocateur que je cliquai sur les dernières photos publiées. Elles étaient peu nombreuses. Il me sembla donc que cette personne privilégiait manifestement la qualité à la quantité. Sans doute avait-elle la volonté d’exprimer ses envies au compte-gouttes, avec peut-être le souci d’accroître la curiosité. Quoi qu’il en soit, je ne tardai pas à découvrir trois clichés qui ne choqueraient personne dans mon entourage et qui pourtant se révélaient être d’un érotisme irrésistible.
La jeune femme porte un haut blanc, fermé de haut en bas par de petits boutons de couleur claire. Le col largement arrondi découvre naturellement le cou ainsi que le haut de la gorge. Le tissu du vêtement laisse régulièrement place à de très fines rayures ajourées, laissant croire à de la dentelle. Il se dégage ici un tel sentiment de féminité, sans aucun doute valorisé par le dessin d’une poitrine délicatement épanouie et libre de tout soutien. La provocation n’est pas de mise, la douceur est au contraire à l’honneur.
J’ai rarement vu une telle dose d’innocence dans des photos. À tel point qu’il m’est encore plus difficile d’imaginer des hommes considérer la femme comme un objet. Sont-ils devenus des bêtes ? Le caractère immaculé du petit haut trouve son pendant dans une jupe d’une très belle et lumineuse, couleur terre, agrémentée de larges boutons aux reflets gris, beiges et marron. Ces trois clichés font partie d’une série axée sur l’humour, mais mon attention ne s’attardera pas sur la bouteille de bière au nom à la fois vulgaire et puéril, cachée d’abord dans la jupe puis dépassant de celle-ci, jusqu’à aller se nicher, sur la dernière photo, entre les seins largement découverts de la jeune femme. Non, décidément, l’humour n’a aucun effet sur moi. Je préfère rester sérieux, un sérieux empreint d’un total respect, où chaque petit détail pris à part représente peu de chose en soi, mais propulse mon imagination vers des territoires beaucoup plus sensuels lorsqu’il est assemblé avec les autres.
Ainsi, ces petits bracelets, différents selon qu’ils soient au bras gauche ou au bras droit, des bras découverts depuis le dessous de l’épaule et sur lesquels je crois deviner de minuscules taches de rousseur. Ce dernier élément est-il déterminant dans ma perception de cette photo ? Assurément non et d’ailleurs je suis nettement plus sûr d’être profondément touché par les mains de la jeune femme et ses doigts finement dessinés. Le désir se fait jour ; l’envie de lui parler, d’oser la regarder en face, de découvrir ses yeux que bien évidemment elle nous cache. Il y a ici une part de mystère, elle est certes infime, mais qui penserait à rêver à une image identique où son visage nous serait dévoilé ? Que le mystère perdure ! Il est si bon de découvrir de temps en temps des photos telles que celles-ci, où l’assurance d’une femme se complaît à jouer avec nos émotions.
Décidément, ma curiosité était grande d’en savoir un peu plus sur elle et je découvris alors quelques messages postés en réponse à des sujets lancés par d’autres personnes. Elle y expliquait ainsi qu’elle a essayé de faire entrer son compagnon dans son petit monde, en lui montrant le site, en lui disant ce qu’elle aimait et pourquoi. Mais il n’a pas accroché. Si ce n’est pas son truc, elle poursuit en disant qu’il comprend qu’elle en a besoin et qu’il accepte. Pour terminer son intervention, elle suggérait à son interlocuteur d’exposer ses désirs à son conjoint, de lui expliquer dans un premier temps ce qui lui plaît dans le fait de poster des photos et de voir ensuite.
Voir ! Ou ne rien voir ! Quel dommage en tout cas de côtoyer virtuellement une jeune femme moderne, semble-t-il, équilibrée, mais aussi libérée – sans pour autant être dévergondée – et qui ne partage pas ces si beaux moments avec son partenaire.
Décidément la vie est mal faite. Il y a sûrement beaucoup de couples où le mari souhaiterait que sa femme soit plus coquine, pas nécessairement au lit, mais plutôt dans son comportement, dans sa volonté de surprendre, par des photos envoyées à l’improviste pour éveiller l’envie par exemple ou encore par la façon de s’habiller. Encore faut-il que cette femme-là le veuille. Si ce genre de comportement lui est étranger, alors…
Bien faire l’amour en couple, donner du plaisir à son partenaire, jouir ensemble en même temps sont des gages indéniables d’un bel épanouissement sur le plan sexuel. Mais en vouloir un peu plus en élargissant la palette des plaisirs, en aiguisant la curiosité de l’autre, voilà une limite souvent infranchissable.
L’amour doit-il se contenter de banalités ? C’est en tout cas avec le secret espoir de voir mon épouse s’inspirer un jour de l’imagination de cette jeune femme que j’allais m’endormir. Encore tout à la vision du joli visage de ma femme, assise face à la fenêtre en cette fin d’après-midi et souriant à notre fille, je perçus comme un douloureux rappel du quotidien sans imagination le fait de la voir se coller à moi dans le lit et de poser sa main sur ma poitrine. Ce geste, si rempli d’amour soit-il, s’apparenta pour moi au fait de déchirer les photos regardées quelques heures plus tôt. J’avais besoin d’autre chose, qu’à mon âge, je n’aurai probablement jamais. Cette réflexion dans la tête m’empêcha de trouver le sommeil.
L’écriture du nouveau chapitre de mon histoire sera sans doute très difficile à poursuivre et rien ne dit que celui-ci sera terminé un jour. L’idée de faire vivre des personnages qui connaîtraient de plus jolis moments de complicité, plus variés en tout cas, que les miens, m’est devenue insupportable. Sur ce plan, l’âge ne favorise pas l’espoir. Ainsi vont les envies fracassées.