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n° 19158Fiche technique43285 caractères43285
Temps de lecture estimé : 26 mn
24/08/19
corrigé 05/06/21
Résumé:  À quoi bon résumer ? Une rencontre, tout simplement.
Critères:  fh 69 pénétratio portrait -occasion
Auteur : Amarcord      Envoi mini-message
Discount




Vérifiez l’étiquette : article en vente rapide


Un dernier truc que je voulais essayer avant de poser ma plume. Il y a, parmi ceux que j’ai postés ici, un texte, un seul, le troisième, que je déteste viscéralement, j’ai vraiment foiré. C’est aussi le préféré des non-inscrits, cherchez l’erreur. Un échec utile, finalement, puisque le suivant reste mon préféré : on apprend de ses erreurs. Puisque j’étais venu ici pour apprendre, me frotter à un genre inconnu, je me suis dit qu’il fallait peut-être que je donne une autre chance à ce personnage et à ce récit raté. En repartant de zéro et changeant tout, mais en utilisant à peu près les mêmes éléments malgré tout, pour voir si un autre résultat était possible. Le ton et le rythme sont beaucoup plus proches des petites nouvelles que j’écris d’habitude, même si j’ai maintenu cette fois bien plus de sexe explicite que je ne le ferais d’ordinaire. Je préfère de loin m’attacher à la description du désir qu’à celle de l’acte sexuel, rapidement fastidieuse et dénuée de tout mystère, quand elle n’est pas franchement grotesque. Un dernier exercice, en quelque sorte, une ultime figure imposée, tâcher de le faire en dépit de mes réserves, en préservant un soupçon d’élégance. Et puis une forme de politesse malgré tout, histoire que tout le monde ici y trouve son compte. Merci à celles et ceux qui ont pris le temps de me lire, et plus encore de commenter, quel que fût leur jugement. Je continuerai pour ma part à vous lire de temps en temps. C’est la semaine du discount : on solde !




~~oOo~~




Je l’ai aperçu, le troisième dans la file. Il était de retour. Il venait souvent au magasin. Un petit panier. Des courses de dépannage, un plat préparé, une baguette, un filet d’oranges, une boîte de thon. Ce genre de choses. Il était toujours très poli, doux même. Un peu emprunté. Un peu encombré de son corps, aussi. Pas obèse, mais un peu massif. Ni beau ni laid. Quel âge pouvait-il avoir ? Quarante ans ? Moins ? J’en sais rien. C’est bien possible qu’une couche de grisaille l’avait terni, comme un voile de poussière sur un produit délaissé en rayon. Cet homme vivait seul : pas besoin de repérer l’absence d’alliance à son doigt pour le deviner. L’étalage de ses achats sur le tapis roulant me le prouvait à chaque fois. Pas de chat ni de chien, non plus. Pas d’excès d’alcool. Des trucs sucrés en revanche, le plus souvent à la vanille, même le gel douche. J’en avais conclu qu’il était bien plus propre qu’il n’était heureux. Il compensait.


Il me regardait toujours sans en avoir l’air, mais je sentais bien que ses yeux louchaient sur mon blue-jean et mon t-shirt aux couleurs de l’enseigne, affichant dans le dos la légende « Puis-je vous aider ? ». Parfois, c’est plutôt « Tu veux ma photo ? » qu’on devrait y floquer. Je me souviens tout particulièrement de la fois où j’avais eu le malheur de mettre un jean taille basse un peu trop lâche. Je me suis aperçue qu’on voyait une fine bande de mon ventre nu et qu’on devinait l’élastique de ma petite culotte. J’ai capté son regard en biais. Je suis sûr qu’il bandait. Je n’ai rien montré de ma gêne, d’ailleurs, à vrai dire, je me suis rendu compte que ça m’excitait un peu moi-même. J’ai tiré mon haut vers le bas et mon froc vers le haut. J’ai levé les yeux, les siens flottaient déjà ailleurs.


Ils ne sont pas si rares, les clients qui me lancent de drôles de regards, quand ce ne sont pas des propos désagréables. On en voit défiler de toutes sortes, à la supérette. Des bourges, des crados, des bimbos, des distraits, des lubriques, des épaves, des pétasses, des gâteuses, des demi-dingues. La clientèle est d’autant plus atypique qu’on ouvre jusqu’à très tard. Je travaille ici cinq jours par semaine, jamais les mêmes horaires. Le plus souvent à la caisse, parfois je donne un coup de main en rayon. C’est pas payé très lourd, c’est juste correct. Je m’en tire parce que j’ai eu droit au logement social. Mais ça reste dur, la vie de mère célibataire.


Tout se décide parfois sur un coup de dés. J’étais tellement jeune, tellement conne. Bien trop jeune et bien trop conne. Et lui, bien plus con encore. Ce jour-là, surtout, sur le matelas pouilleux posé dans la cave, où il m’a retournée sans douceur pour me prendre en levrette. Il butait contre mes fesses avec frénésie, je l’ai entendu pousser un long gémissement, et tout de suite après, j’ai compris. Il avait retiré la capote, l’idiot, pour avoir plus de sensations. J’ai paniqué, je l’ai traité de tous les noms, le fils de sa race, il le savait bien, que je prenais pas encore la pilule. Il m’a dit « c’est pas pour une fois ». Eh ben si, figure-toi, abruti !


Il m’a fallu un temps fou pour affronter la réalité. J’ai cherché à me mentir, me raconter des histoires, comptant les jours en croisant les doigts, dévorée par l’angoisse de ne pas voir revenir mes règles. Il a fallu bien plus de temps encore pour que je parvienne à en parler, saisie par la honte. J’avais peur que maman me fasse une scène, qu’elle me reproche d’avoir été si imprudente, si complaisante aussi à m’offrir bien trop tôt à ce jeune coq, comme une volaille décervelée.


Elle s’est contentée de me prendre dans ses bras, et ce ne fut pas un réconfort, ce fut pire encore. Je la sentais trembler en silence, encaissant le choc comme si elle s’y attendait, comme si ce n’était que la confirmation d’une forme de malédiction qui se transmettrait de mère en fille. Elle se revoyait sans doute elle-même, si jeune aussi, à N’Djaména, où elle avait croisé mon père qui y stationnait avec un détachement français, sur la base aérienne. Au moins l’avait-il ramenée en France, déjà enceinte. J’y étais née. Mon père m’adorait, paraît-il. Mais je n’avais pas deux ans qu’il était déjà parti s’installer sans nous dans le midi, sur une autre base, à Orange. Il y vit toujours, avec une autre femme, et les enfants qu’il lui a faits. Tous blonds comme les blés. Il me téléphone, parfois. Je ne le vois presque jamais. Mes demi-frères encore moins.


Pour une fois, c’est ma mère qui l’appela, pour le prévenir, lui demander son avis. Il sembla irrité, excédé, il jugea aussitôt que je n’étais pas mûre pour un enfant, que celui-ci formerait pour moi une lourde hypothèque. Ça, on le savait déjà très bien nous-mêmes, merci. Quant à maman, elle était à la fois très croyante et superstitieuse. Elle ne m’imposa rien. Mais c’est sans doute ça, ainsi qu’une forme de sidération, qui a pesé dans la balance.


Ludovic est né. Les gens se forçaient à me féliciter, à l’hôpital. Mon père a fait parvenir une peluche. Je ne savais pas trop si je devais rire ou pleurer. J’ignorais comment j’allais réagir. Mais au premier regard, j’ai compris que je l’aimerais de toutes mes forces, mon bébé. Dix ans plus tard, c’est toujours lui, le petit homme de ma vie, le seul qui compte, aussi. Il est ma fierté et mon combat, je n’en mène plus d’autres. À ceux qui me parlent des leurs, de la cause des femmes au rejet du racisme, je souris en silence, je n’essaie même pas de leur dire qu’ils n’ont rien à m’apprendre que je n’aie moi-même déjà vu, connu, subi parfois, et, quelle que soit la sympathie qu’ils m’inspirent, je sais que le seul cortège que je suis encore prête à suivre pour Ludo, c’est celui des caddies qui défilent face à ma caisse.




~~oOo~~




Si je l’observe plus que les autres, ce client, ce n’est pas seulement parce qu’il se rince l’œil à bon compte. C’est surtout depuis ce qui s’est passé jeudi dernier. Ce jour-là, il a mis le contenu de son panier sur le tapis. Une lasagne sous vide. Trois petits pots de yaourt à la vanille. Une bouteille de beaujolais. Et puis un quotidien sportif, qu’il avait placé soigneusement sur un magazine. Il m’a fait bonjour, je le lui ai rendu avec un joli sourire. J’ai scanné les articles, un par un. Ne restait plus que le magazine, enveloppé dans de la cellophane. J’ai vu que c’était un magazine de cul, le genre plutôt hard. Il était gêné, le mec, il regardait ailleurs, impatient que le prix s’affiche et qu’il puisse glisser à l’abri des regards sa dose de fesses dans sa dose de foot. Mais le système ne reconnaissait pas le code-barres, me renvoyant sans arrêt le message « article inconnu ». Pas vraiment normal, chaque article en vente est censé avoir le sien, de code. J’en ai parlé le lendemain à Rachida, et elle s’est marrée en me disant que si ça se trouve, c’est Longeval, le gérant, qui les commande lui-même en loucedé hors du circuit logistique de la centrale, les trucs bien crades, et pour son usage personnel.


En tout cas, ça n’avait pas de sens d’introduire le numéro à la main, j’aurais eu le même résultat.



Et c’est vrai qu’il avait vraiment l’air de l’être, désolé, humilié aussi.


Alors j’ai cherché le prix en euros, sur la tranche et sur le bord de la couverture.

Et du coup, j’ai pas pu manquer la photo. On y voyait une grande fille black, à poil dans un petit harnais de cuir, quelques lanières cloutées à peine, qui cerclaient ses gros nibards, ses hanches et son cul, et qui n’aurait rien caché de son anatomie si l’éditeur n’avait pas pris la peine de faire recouvrir sa chatte et ses tétons de pastilles autocollantes fluo. Je me suis toujours demandée qui se chargeait de ce genre de job. Si on le confiait à un atelier protégé, et dans quel état devaient se trouver les ouvriers handicapés après avoir touché du doigt toute la journée tant de sexes et de seins de femmes.


Toujours est-il que la fille black me ressemblait un peu, avec de plus gros nichons, trop gros que pour être naturels. Elle avait une carnation plutôt claire, presque autant que ma peau café au lait. Ses traits étaient assez fins, mais elle n’avait pas mes yeux verts ni mes petites taches de rousseur. Elle portait en revanche la même coiffure afro. La sienne était plus fournie et exubérante, plutôt crépue. La mienne, plus sage, davantage bouclée, mais colorée elle aussi d’une teinte châtain clair. Ses mains étaient liées dans le dos par des menottes, elles-mêmes liées à des chaînettes qui devaient probablement aboutir à des pinces à tétons, sous les pastilles fluo. Un titre rouge, en anglais, barrait la couverture, et semblait lui promettre bien du plaisir, à partir de la page 24. Par contre, j’ai pas trouvé trace du prix en euros pour la France, il n’y avait que celui en dollars, en livres britanniques, et puis €6,80 aussi, mais pour l’Allemagne.


Le type était tétanisé, les yeux fixés sur le terminal de paiement. J’ai pas eu le cœur d’appeler Gérard, pour qu’il se renseigne en rayon, et prolonger encore son calvaire, en montrant bien en évidence la couverture, face au reste de la file en attente, tout en clamant bien fort :



Je me suis plutôt tournée vers le client et lui ai demandé sobrement :



Alors j’ai répondu d’accord, j’ai tapé le prix allemand, et je lui ai donné le montant total du ticket.


Il a payé, m’a remercié, avec dans le regard une forme de soulagement, et puis il s’est dirigé vers la sortie et l’obscurité déjà tombée sur le parking.


Je m’étais retenue de lui souhaiter une bonne soirée, tant elle semblait s’annoncer froide, solitaire et toute tracée. Une lasagne sans saveur réchauffée au four, ou pire, au micro-ondes. Un coup de rouge. Un yaourt à la vanille. Et puis une longue séance de branlette face à la fille qui me ressemblait un peu, dans le magazine de hard.


La mienne aussi était toute tracée, de soirée. Je rentrerais dans mon appartement vide, puisque Ludo dormait ce soir chez maman, comme c’est le cas chaque fois que je bosse suivant l’horaire décalé, le rôle du soir. Elle le vénère comme son dieu, trop d’ailleurs, elle le gâte sans arrêt. J’ai peur qu’il en devienne bientôt un autre de ces petits mâles satisfaits et paresseux, qui croient que tout leur est dû, sans avoir rien à faire ni prouver. Sans avoir rien d’autre à offrir à une fille que leur jolie gueule de gouape et leur trop-plein de sperme.


Donc, ce soir, je rentrerais. Je me ferais un thé, j’allumerais la télé, que je regarderais distraitement en faisant mon repassage. Je me laverais les dents. Et puis je lirais un peu au lit, parce que j’aime ça, les livres, ils sont les écoles et les tendresses qui m’ont manqué ; et les voyages que je n’ai pas faits, je les entreprends dans le courant de leurs pages. C’est mon secret bien gardé, celui que ne soupçonnent pas ceux qui m’identifient à mon job et me croient inculte. Je n’ai pas eu accès au luxe de poser un choix de carrière. C’était pas une vocation, caissière au discount. Ce n’est pas indigne, non plus.


Et puis je m’endormirais.


Pour être honnête, peut-être que je me toucherais juste avant, moi aussi. Le besoin de sexe me poursuit. J’ai parfois des amants, je n’ai pas de difficulté à les trouver, dès lors qu’il ne s’agit que d’une séance de baise d’un soir. Je suis jeune encore, bien roulée, comme le rappelle sans arrêt Gérard, avec un clin d’œil complice. Mais je ne les supporte plus, les gars de mon âge, ceux du quartier. Leurs fanfaronnades, leur égoïsme, leur puérilité. Leur manque d’élégance et de respect aussi. Je sais très bien que dès qu’il m’auront sautée, ils iront s’en vanter auprès des copains, tout en rajoutant plein de détails fantaisistes pour s’offrir le beau rôle, chasser leurs frustrations et entretenir ma légende de femme seule et donc suspecte. Combien je serais bonne au lit. Avec quelle voracité je les aurais sucés. Avec quelle bestialité ils prétendraient m’avoir ensuite enculée. Dans vos rêves, connards !


Je vous connais bien, j’ai vu suffisamment tôt le revers de votre façade. Comment, dès que vous êtes privés de l’assurance de la bande, votre arrogance se recroqueville, comme vous êtes faibles et gauches, et même lâches, le plus souvent. Rien chez vous n’appelle encore mon désir. Et tout m’invite à vous fuir, à ne pas vous offrir en modèle à Ludo, à supposer que vous soyez prêts à accepter sa présence. Mais quelle responsabilité êtes-vous jamais capables d’assumer ?


Je n’ai pas davantage d’indulgence pour ces jolis garçons si distingués, si bien élevés, si prévenants en apparence, mais si condescendants aussi ; il faudrait les remercier de vous avoir remarquée, de vous avoir séduite et baisée, et ne pas s’étonner ensuite qu’ils vous larguent sans un mot, vous, la simple fleur de supermarché.


Je ne demande rien de compliqué. Je ne cherche pas désespérément l’amour ni un père pour mon fils. J’ai appris à m’en passer, et lui tout autant ; j’ai tout porté seule et je ne serais même plus disposée à offrir à quiconque un tel statut. J’ai juste envie de contact physique, celui que réclame mon instinct. La simplicité du sexe. Je cherche le regard d’un homme qui me désire, sans laideur et sans mensonge, sans affect aussi, du moment que ce soit sans mépris. Je cherche la sensation troublante de ses mains qui me déshabillent, qui m’envahissent et me prennent. L’énergie animale de l’accouplement, la férocité de l’orgasme, qui me laisse ensuite repue, emplie de la sensation d’exister.




~~oOo~~




Ce soir, peu avant la fermeture, j’ai donc scanné mécaniquement les achats de l’homme au magazine, encaissé le paiement, l’ai salué d’un au revoir distrait. La journée avait été longue.


Et puis Longeval est arrivé.



J’ai fait au plus vite. J’ai dégagé le tiroir sécurisé, me suis précipité au local, me suis livré au comptage des espèces, j’ai rempli le formulaire. Et puis j’ai récupéré mon imper et mon sac dans l’armoire métallique du vestiaire, dévalé les escaliers, et couru jusqu’à l’arrêt, juste en face du magasin.


Et merde ! J’ai vu briller les feux de position du bus, qui s’éloignait déjà sur la route humide. Aucune envie de me taper une heure de trajet à pied, à cette heure tardive, avec en plus cette fine pluie qui tombait. J’ai juré. Et puis j’ai pris conscience de la présence de l’homme qui me regardait, à côté de sa voiture. Il m’a adressé un petit sourire navré. J’ai hésité.



En route, nous avons très peu parlé. Je lui ai donné mon prénom, rien ne m’y obligeait, mais j’ai trouvé ça plus poli. Il s’est présenté, lui aussi. Il s’appelait Yves. Sa voix était agréable, bienveillante. Il m’a demandé de le guider, insistant pour me déposer à mon domicile, le détour serait quoi qu’il arrive minime, et puis il pleuvait. Je l’ai trouvé pareil à lui-même : pas très loquace, mais poli, gentil même.


Après deux minutes, on n’entendait plus rien dans la voiture, à part le feulement discret du moteur, et puis aussi le couinement sur le pare-brise d’un des balais d’essuie-glace, usé. Le silence était un peu tendu. C’était peut-être moi qui me faisais des idées, mais j’avais l’impression que s’il scrutait avec tant d’attention la route, c’est parce qu’il luttait contre l’envie qui le dévorait de me regarder.


Arrivés devant mon immeuble, il m’a souri faiblement, m’a souhaité une bonne soirée.


J’ai saisi la poignée, ouvert la portière. J’ai marqué un temps d’arrêt, je l’ai regardé. Et je me suis dit : pourquoi pas lui ? Alors, pour la première fois, je l’ai tutoyé.



Il a semblé un peu décontenancé, embarrassé.



L’ascenseur était à nouveau en panne, nous avons pris les escaliers. Il semblait particulièrement troublé, presque inquiet, et moi plus encore ; j’avais les jambes en coton. Je ne sais pas ce qui m’avait pris. J’avais peur qu’il me prenne pour une pute. Peur aussi de ne plus pouvoir reculer, après lui avoir fait cette promesse explicite.


J’ai tourné la clef, basculé l’interrupteur, je l’ai conduit au salon, où trônaient encore la planche à repasser et un panier de linge propre. Il y eut un moment de silence et de gêne. Je lui ai proposé de s’asseoir dans le canapé. Lui ai réclamé cinq minutes de patience, le temps de me rafraîchir, tout en l’invitant à se servir dans le frigo. J’avais l’impression de puer le poulet rôti, après toutes ces heures passées à baigner dans les relents du comptoir qui les propose dans de vilaines enveloppes en plastique, pour les tenir au chaud. J’ai pris une douche éclair, sans attendre que l’eau ne soit vraiment chaude. Une fois séchée, j’ai hésité. Je n’étais plus sûre de vouloir ni de pouvoir. Et puis tant pis, j’avais eu une furieuse envie de baise, je l’assouvirais, et il était trop tard pour faire ma difficile. Le mec n’était pas une gravure de mode, mais c’était un mec. Au moins, il avait l’air gentil, trop, presque. Je ne voulais pas non plus paraître à ce point facile en étant d’emblée nue sous mon peignoir. Alors j’ai malgré tout passé par dessous un soutien et un petit string. Et je l’ai rejoint.


Il était debout, face à l’étagère, un flacon de Perrier à la main. Il avait tombé la veste, pour se mettre plus à l’aise. Il regardait un cadre, un portrait de moi à seize ans, avec une guitare posée sur les genoux. Il a un peu sursauté en m’entendant approcher.



Nous avons échangé un regard. Et puis j’ai vu le sien courir sur moi, de haut en bas, jusqu’à mes pieds nus.



Il s’est tu. Il attendait.



Il a fait oui de la tête.



Je me suis rapprochée, j’ai laissé tomber le peignoir. Il a dégluti.



Il a posé ses mains lourdes sur ma taille, encore un peu hésitant, comme pour un joli paquet cadeau qu’on hésiterait à déballer. J’ai déboutonné le col de sa chemise, j’ai entendu son souffle s’accélérer.


Mes doigts ont poursuivi leur travail plus bas, libérant chacun des petits disques de nacre. J’ai posé mes mains sous la chemise et j’ai souri. C’était doux et épais, couvert de longs poils bouclés. Il était comme traversé de petits sursauts. J’ai fait coulisser les manches de sa chemise, jusqu’à l’en débarrasser. Il semblait un peu mal à l’aise. Ses épaules et ses bras étaient épais et musclés, plus que je ne l’aurais cru. Il était incroyablement velu. De longs poils noirs couvraient tout son corps. Son torse. Ses épaules. Son dos, son ventre rebondi.



Je l’ai trouvé touchant, vulnérable. Mais pas de chance, ce n’est pas du tout ce que je cherchais ce soir. Il fallait que je le rassure. Ou que je le provoque, au contraire.



Ce n’était pas tout à fait faux. Je n’avais jamais connu ça, et ça avait une certaine dose de mystère et d’attrait, de danger, ça lui donnait soudain du caractère. En tout cas, il a compris le message, est sorti de sa torpeur. Ses doigts épais ont un peu bataillé avec l’agrafe de mon soutien-gorge. Elle a fini par leur obéir, et j’ai senti la pression des bonnets se relâcher. J’ai dégagé les bretelles de mes épaules.



Il m’a dit qu’il les trouvait magnifiques. Leur forme, leur douceur et leur poids dans ses mains. Il s’est mis à les palper.



Il a enfoui son visage entre mes seins, les a embrassés, léchés, suçotés.


Je n’avais pas envie qu’il se contente de me contempler, de me caresser timidement. Je ne cherchais pas ce soir un gentil teddy bear couvert de poils qui me fasse la conversation. J’avais juste envie de baiser, sans réfléchir. Que ce soit fort, cru, un peu âpre, un peu rude. Alors j’ai eu cette idée.



Tout en lui parlant, j’avais rapidement défait la boucle de sa ceinture, dégagé l’agrafe de métal, fait coulisser la fermeture Éclair. Son pantalon était tombé sur ses chevilles. Il avait des cuisses larges, musculeuses et rebondies, couvertes de poils sombres, elles aussi. Il s’est agenouillé pour enlever ses chaussures, se débarrasser du vêtement. Il est remonté lentement en embrassant mes jambes.



J’ai lâché un petit rire, et il m’a lancé un clin d’œil. Je me suis soudain rendue compte qu’il venait de sourire pour de bon, et que ça le transformait, ça en faisait un autre homme, bien plus avenant, presque léger. Sa bouche remontait sur mon corps, qu’il parcourait en larges cercles, depuis mes cuisses jusqu’à mon ventre, en s’approchant toujours plus près de mon entrejambe. C’était plutôt agréable, à défaut d’être vraiment excitant, mais je l’ai relevé, l’ai attiré contre moi, tout proche, mes mains sur ses épaules.



Il a hoché la tête.



Il a acquiescé.



Il m’a saisie par le bras, m’a fait pivoter, a plaqué mon dos sur son ventre, et sa bouche sur ma nuque. Ses larges pattes se sont posées sur mes seins, les ont serrés fermement. Mes soupirs l’ont encouragé. Ses doigts se sont écartés pour mieux emprisonner mes larges tétons sombres. Il s’est mis à les étirer et les pincer, de plus en plus fort, sous mes premiers gémissements.



Je sentais la raideur de sa queue, sous son short de maille de coton, dressée contre mes fesses. J’ai tendu la main vers le petit seau, sur la planche à repasser, devant moi, et j’y ai puisé deux pinces à linge, que j’ai tendues vers lui, dans mon dos, sans même le voir.



Il s’y est pris doucement, lentement, cherchant à m’équiper sans trop de sévérité. Mais il n’avait pas tort, quand les mâchoires se sont refermées, ça a fait un mal de gueux, et je n’ai à chaque fois pas pu m’empêcher d’émettre une plainte.


Ça l’excitait pourtant, tout comme moi, et ça l’émouvait aussi, parce qu’il s’est mis à poser de tout petits baisers sur mon dos, en suivant ma colonne vertébrale, comme s’il voulait mêler la gratitude à la cruauté. J’ai vu son bras prendre un torchon sur le tas de linge à repasser. Il a saisi mes avant-bras, les a ramenés dans mon dos, qu’il m’a fait cambrer, et j’ai senti qu’il avait fait du tissu un lien pour y emprisonner mes poignets. Il a serré le nœud fermement, mais sans excès. Il a saisi un autre linge, l’a roulé, et l’a noué pour en faire un bandeau qu’il a appliqué sur mes yeux et noué derrière ma tête.



Je tremblais un peu. J’ai entendu qu’il fouillait dans sa veste. Ça a duré un bon moment. J’ai eu comme une intuition. Ce type un peu mal à l’aise ne me servait pas bêtement un plan de domination sans imagination. D’ailleurs, c’est plutôt moi qui l’avais guidé sur cette voie foireuse. Il m’avait mis un bandeau pour que je ne le voie pas, pour que je passe outre à son apparence, pour laisser une chance à sa propre audace d’oublier ses complexes, et à mon propre désir de se fixer sur un objet plus opaque et plus flatteur. C’était touchant, et habile aussi, puisque ça produisait déjà ses effets. Mon excitation montait en flèche, et elle n’allait pas tarder à décoller.


Je l’ai à nouveau senti contre moi, dans mon dos. Le contact de ses poils sur ma peau nue, celui de son ventre rond. Et puis celui de sa verge, qui se dressait désormais libre de toute entrave contre mon cul.


Sa bouche est venue se coller tout près de mon oreille. Il s’est mis à me murmurer des mots doux et chauds pour décrire mon corps, et sa main les suivait patiemment avec des caresses simultanées, tout aussi douces et chaudes. C’était délicieux. Il m’a soufflé aussi des choses plus audacieuses, il m’a décrit sa queue, qui roulait entre mes fesses, combien elle était dure, impatiente de venir en moi, qu’elle serait sans merci. Il l’a placée dans la paume d’une de mes mains liées, j’ai pu la toucher, la serrer, me faire une idée de son calibre, redoutable. J’ai senti qu’il avait enfilé un préservatif, et ça m’a fait sourire.


Sa main a lentement migré vers le bas, elle est passée sous le cordon de mon string, elle a flatté mon sexe, l’apprivoisant avec douceur, avant de l’explorer avec plus d’autorité, de s’insinuer entre mes lèvres, de stimuler la paroi de mon capuchon et faire éclore mon bouton d’or, mon bouton de nerfs.


Je ne voyais rien, mais je sentais l’excitation surgir avec d’autant plus d’intensité. De son autre main, il me parcourait toujours avec la même lenteur sensuelle, comme s’il voulait me dire que son désir était à la fois puissant et patient, irrépressible et respectueux. J’étais son instrument, sa guitare, et il s’appliquait à me faire résonner.


Autant cet homme semblait au quotidien dépourvu de grâce, autant il déployait dans le sexe un talent sensuel totalement inattendu, tellement différent de ce que j’avais vécu avec d’autres hommes, si fébriles de me consommer, si anxieux de reproduire leurs propres obsessions préméditées, en ne laissant aucune place à l’inconnu, à l’imprévu, à la singularité de la rencontre avec l’autre. Plus j’en prenais conscience et plus je m’abandonnais au plaisir sans retenue, me surprenant de l’invention dont il usait pour me manipuler ; je lui offrais mes clefs à l’aveugle, et il ouvrait aussitôt de nouvelles portes en moi, libérant des sensations inédites. Sa voix me parlait du parfum de mon corps, de l’impatience qui était la sienne de découvrir celui de ma fleur, si tendre et délicate sous ses doigts en plein travail, sa langue léchait ma peau pour en goûter la saveur avant de chatouiller mon oreille, ses dents marquaient de leur trace mon épaule, il éveillait mes sens en multipliant les contrastes, balayant mon ventre avec la délicatesse d’une plume, avant d’empoigner mes fesses et les rudoyer. Je me sentais si désirée et si désirable. Je gémissais sous ses doigts, je tressautais sous leurs sollicitations variées, je m’affolais, il le vit, il l’entendit à mon souffle.



Ses mains se sont serrées autour de ma taille, elles étaient larges et solides, elles l’entouraient comme un harnais ajusté, j’ai senti le contact froid et métallique de sa chevalière sur mon ventre. Il m’a fait déplacer à petits pas vers le canapé, a marqué un temps d’arrêt. Je comprenais à sa respiration qu’il ne serait plus nécessaire de l’encourager.



Sa main s’est à nouveau immiscée sous mon string, mais elle a cette fois saisi le petit triangle de tissu, et l’a brusquement arraché, avec une violence qui m’a coupé le souffle.


Il m’a aussitôt saisie fermement, et m’a m’installée, accroupie au-dessus de lui, le cul tourné vers son visage, après s’être allongé. Il a légèrement écarté mes cuisses, j’ai compris qu’il s’apprêtait à me pénétrer, il m’a guidée en douceur, me laissant lentement redescendre, et ma respiration a sursauté en percevant le contact du gland. Sa queue épaisse a fini par coulisser avec précaution dans le fourreau de ma vulve, j’ai poussé un petit cri et il a lui-même émis une forme de plainte. J’ai fait ce qu’il attendait de moi, j’ai commencé à le chevaucher, avec précaution et lenteur. À défaut de chercher la vitesse, je m’appliquais à tenir le rythme. Ses soupirs et sa main caressante me disaient qu’il goûtait à la fois le spectacle du trajet lancinant de ma croupe et le doux frottement de mon vagin sur sa verge. La sensation était pleine et forte, elle me renseignait sur les proportions de celle-ci, et il n’était pas besoin d’accélérer mes mouvements pour me sentir gagnée par de profonds soubresauts, des lames de fond qui berçaient mon plaisir.


Il défit alors le lien pour libérer mes bras, ce fut un soulagement, car il entravait aussi mes épaules, et compliquait l’amplitude à donner à mes ondulations que je voulais savantes, féminines, élégantes, je montais et descendais en rythme sur lui comme les notes sur la portée, et mon plaisir se faisait lui-même musical.


Il vit pourtant que ma position était inconfortable, il me saisit avec douceur, se redressa un peu contre le dossier, me ramena contre lui, caressa mon visage, avant de pénétrer à nouveau mon sexe humide. Il prit le relais, c’est lui qui désormais imprimait le mouvement, et la puissance de ses muscles donnait à ceux-ci un autre caractère ; il montait en moi en saccades, et chacune de celles-ci me tirait un nouveau gémissement. Ils se rapprochaient à mesure que s’élevait la fréquence de ses coups de boutoir. Il posa la main au sommet de mon ogive, fit frétiller ses doigts sur mon plus doux secret ; mes gémissements devinrent de petits cris, je perdais haleine. C’est le moment qu’il choisit pour me libérer de la morsure des pinces, et c’est aussi alors que la douleur surgit, irradiant mes seins, entre brûlure et volupté, m’arrachant une plainte rauque.


Mon orgasme éclata avec violence rare, ma nuque se raidit, basculant ma tête en arrière, la bouche grande ouverte sur un long cri silencieux. Je me suis agitée, débattue, sa queue a glissé hors de ma vulve trempée, je gisais sur lui, tremblante, j’ai écarté sa main de mon sexe, traversée par des ondes qui raidissaient tous mes membres. Il m’a aussitôt débarrassé du bandeau. Ses mains massaient mes épaules et apaisaient mes tempes, il posa un simple baiser sur mon front.


Le calme est revenu, je me suis retournée, nous souriions tous les deux. Il n’y avait plus la moindre gêne, plus d’appréhension, plus de fausses pudeurs ni de masques, juste une jolie complicité. J’ai saisi sa verge pour entretenir sa vigueur, la récompenser de ses efforts à me faire jouir, bien décidée à lui rendre la pareille. Je la découvrais enfin, plus solide encore que je ne l’avais imaginée, harmonieuse, mais intimidante, dressée par-dessus sa touffe sombre et fournie et ses bourses fripées. Je me rendis compte que j’avais pris goût à sa forte pilosité, qu’elle me plaisait, qu’elle m’excitait, et qu’elle encourageait mon appétit.



Il a compris l’allusion, a souri, j’ai roulé l’œillet de la capote pour libérer son gland joufflu, et je lui ai aussitôt souhaité la plus moelleuse des bienvenues. Comme il protestait, j’ai bientôt pivoté pour superposer mon bassin à son visage, et bientôt nous nous dévorâmes mutuellement comme les plus affamés et attentionnés des cannibales.


Quand il se sentit parvenir au bord de la délivrance, il me fit comprendre qu’il préférait revenir en moi. Je me suis simplement allongée sur le dos, j’ai posé mes chevilles sur ses larges épaules, prête à l’accueillir. Il s’y est pris doucement, comme pour mieux retarder l’échéance, sans cesser de me regarder, et moi qui l’avais encouragé à l’ardeur, je goûtais à présent le rythme serein de ses marées, puissantes et obstinées, leur niveau montant lentement mais sûrement, jusqu’à ce qu’elles se fracassent en écume, dans un gémissement retenu.


Il tremblait un peu, je l’ai attiré contre moi, malgré ses scrupules, il avait peur de trop peser sur mon corps, mais j’avais une envie folle de l’apaiser, de l’envelopper, de passer mes mains de femme sur son dos d’homme, de lui être douce.


J’étais moi-même surprise du soin instinctif que je prenais soudain de cet homme qui ne m’était rien, que j’avais choisi délibérément comme tel, pour m’éviter tout enjeu, toute tentation de séduction, un instrument prélevé au hasard pour combler un manque organique. On baise alors simplement pour baiser, on obéit à ses pulsions, on se crispe sur son plaisir, sur les gestes qui le déclenchent, et puis on se retrouve soudain gagnée par une fragilité inattendue. Ce n’est pas de la mélancolie, c’est l’irruption de l’autre, la place que vous lui accordez soudain dans votre intimité, celle qu’il a su y gagner en vous offrant la vision désarmante de sa jouissance, du désir qu’il vous porte en toute humilité et du pouvoir qu’il vous accorde. Toute cette charge dont vous ne pouvez alors vous résoudre à être la simple spectatrice : l’émotion de l’autre vous ramène à la vôtre, celle que vous pensiez ne pas chercher, ne pas trouver, ne pas vouloir partager. Elle est contagieuse, elle vous laisse un peu interdite et pensive, vous ne savez trop qu’en faire, vous la craignez un peu, mais elle s’insinue. Et vous, qui ne vouliez surtout croire à rien, sinon à la délivrance du corps, vous contemplez, le temps d’une minute nocturne, ce petit miracle, plus troublant encore que celui de l’orgasme : la tendresse existe.


La fatigue nous gagnait. Je voyais le cadran digital de la télévision éteinte m’annoncer que nous avions franchi minuit. Nous sommes encore restés silencieux quelques minutes, nos corps joints en dos de cuillères. Son regard s’est arrêté sur les vestiges de mon string, sur le sol. Il l’a saisi, a bredouillé un « désolé », et puis nous avons ri tous les deux, je lui ai dit qu’au contraire, j’avais adoré ça, et que je le lui offrais volontiers en souvenir, comme on confisque le drapeau d’un régiment vaincu au combat. Je le regardais et je le trouvais à nouveau presque gracieux, à le voir rire. On s’est regardés, ce fut un très joli moment.


Et puis je me suis levée pour rejoindre la salle de bains. Je lui ai tendu une serviette éponge propre s’il voulait en faire de même. Quand il est revenu, j’ai entrouvert la porte de ma chambre en bâillant, et lui ai fait comprendre qu’il pouvait rester dormir ici, s’il le souhaitait. Mais il m’a dit non, merci, c’est gentil. Il devait absolument rentrer chez lui, s’y changer, pour le lendemain. Ça m’arrangeait plutôt, à vrai dire. Je devrais moi-même me lever tôt ce matin, puisque cette fois je me chargerais de procéder à l’ouverture, et d’aider au déchargement du camion.


Il s’est rhabillé en silence, a recouvert son corps de ses couches de grisaille. Je l’ai raccompagné à la porte, il a manqué trébucher sur la trottinette de Ludo, mal rangée, s’est rattrapé, a souri. Il m’a enlacée, sa main a couru une dernière fois sous mon peignoir, elle a effleuré mes seins, mon ventre, mes fesses, mon pubis, et ce n’était pas pour me peloter. C’était pudique et tendre comme un baiser, comme un adieu à regret, comme un merci. J’ai frémi.



Nous ne sommes pas embrassés, ne jugeant pas nécessaire de fermer une parenthèse qui n’avait jamais été ouverte. Il a franchi la porte, s’est retourné un instant. Alors, à mon tour, j’ai voulu lui dire un truc, et ça m’est venu comme ça, spontanément, sans réfléchir.



Je ne sais pas s’il m’a crue. J’en doute.


Mais j’ai malgré tout vu courir sur ses lèvres un léger sourire. Et flotter dans ses yeux une soudaine douceur de vanille.


Je l’ai revu plusieurs fois, à la caisse. Il y avait du monde, il ne fallait pas traîner. Encoder vite, enchaîner les clients, du rendement. C’est la loi du discount. On ne s’est rien dit. Mais je l’ai vu à chaque fois hésiter, et moi aussi, tandis qu’il plaçait ses achats dans le sachet.


Il n’a plus jamais acheté de magazine.