n° 19461 | Fiche technique | 26510 caractères | 26510Temps de lecture estimé : 15 mn | 19/02/20 |
Résumé: Atteindre à l'inaccessible mais si convoité orgasme ! Je vous rapporte ici mes espoirs, mes errances et mes déconvenues dans la quête de ce Graal. | ||||
Critères: f fh inconnu prost complexe voir exhib fmast confession | ||||
Auteur : Lamiel (J'admire ceux qui se confient sur ce site et veux essayer.) |
DEBUT de la série | Série : Confession d'une femme frigide Chapitre 01 / 02 | Épisode suivant |
Tout ce qui suit relève d’une sincérité absolue, d’une rigoureuse véracité. À peine ai-je édulcoré quelques pensées trop scabreuses, de celles qui assaillent mon esprit sans que je ne trouve les mots me permettant de les exprimer. Une autre entorse : l’amie évoquée ne se prénomme pas Jocelyne. Par contre, si je réponds effectivement au surnom de Lamiel, caprice littéraire de mes géniteurs, mon vrai prénom est Camille.
Portant mon histoire devant un public, j’espère parvenir à me désenvoûter. L’écrire, la rapporter à d’autres surtout, aura peut-être un effet salvateur ! En quel sens ? Je l’ignore.
J’ai toujours fréquenté des milieux aseptisés. Famille bourgeoise, éducation, religion, pensée, expression, habillement, tout est à l’avenant ! Bref, bourgeoise du bout des orteils à celui des ongles et à la racine des cheveux. Je m’en suis longtemps plutôt satisfaite.
Mariée à vingt-deux ans sans la moindre affinité à un polytechnicien de belle prestance, je n’ai guère éprouvé que de la considération à son égard et dois reconnaître qu’il me la rend bien. Songez donc, même pendant notre plus stricte intimité, nous nous vouvoyons. Je frise à ce jour une fringante quarantaine, j’ai un fils de quinze ans et suis cadre supérieur, au sein d’une PME dont mon mari assume la direction. Enfin, il s’agit là d’un emploi presque fictif : responsable de la communication ; autant dire que je sais arrondir les angles tant au fil de mes propos qu’en prenant mes décisions. Dans mon entourage, familial, social ou professionnel, nul ne songerait à me manquer du respect. Ah ! le respect, j’en ai ma dose au-delà satiété, il m’assomme et m’étrangle. On me juge belle femme, très classe, heureuse et comblée. Belle, il appartient aux autres de le confirmer, classe… c’est concevable, car sauver la forme, je m’y entends et m’y emploie avec beaucoup d’application, heureuse et comblée, c’est mon affaire, et je puis affirmer que le compte n’y est pas.
Ainsi, je n’ai jamais joui et en suis venue, petit à petit, à me considérer comme irrémédiablement frigide. Et pourtant le sexe m’attire ! Preuve en est, je consulte fréquemment un site érotique où je dévore des histoires qui me tournent le sang. Elles résonnent ensuite en ma tête m’invitant aux délices du vice et je lis et relis les passages où les héroïnes atteignent le nirvana, conquièrent l’orgasmique paradis qui me reste fermé. Maintes fois, je me suis caressée et c’est au dernier moment, lorsque je sens mon excitation monter, qu’une pensée saugrenue s’interpose et fait tout capoter. Peut-être est-ce à force de trop m’observer, de guetter un humble signe avant-coureur du plaisir que celui-ci se refuse. Je n’ai de ce fait décroché la timbale en aucune occasion et m’estime indéfectiblement vierge de ces émois qui consacrent une femme. Si à longueur de journée je nourris d’indignes pensées, je rougis rien qu’à me dévêtir devant mon mari et celles-ci me désertent dès que, la nuit, je rejoins la couche conjugale.
Frigide donc, tout en étant accroc au sexe ! Faut l’faire.
Les baies vitrées de notre appartement donnent sur le boulevard. Là, en bas, la nuit tombée les prostituées racolent. Souvent, je les épie, dissimulée derrière les rideaux, pleine de dégoût et une étonnante boule au ventre. Puis-je l’avouer, il m’arrive de suivre leur manège aux jumelles pour mieux apprécier leur dépravation. Je peux y passer des heures, scotchée au carreau, captivée. J’admire leurs ballets, valse des sexes montés sur de vertigineuses cuissardes, défilé de bustes affûtés comme la proue d’un brise-glace, provocation des lèvres ensanglantées de fards rutilants. Je vais jusqu’à évaluer la durée de leurs passes. J’aime particulièrement quand, à pied, elles embarquent un client le traînant vers leur repère de bonne fortune, lui qui trottine un peu en arrière, confus, le nez en l’air et semblant chercher d’où vient le vent.
Tantôt je m’imagine, à leur exemple, monnayant mes charmes à l’angle d’une sordide venelle sous la pluie battante d’une ténébreuse nuit d’orage. Je m’y vois, le rimmel s’épanchant au coin de l’œil pour en souligner l’éclat prédateur, les cheveux dégoulinants, mes frêles vêtements plaqués sur mon anatomie et en exhibant les reliefs avec plus d’indécence que si j’étais nue. À l’approche d’un quelconque quidam, je me décolle du mur lépreux, me déhanche et me tortille, remontant progressivement l’ourlet de ma robe afin d’exposer ma jambe gainée de résille noire, puis, au-dessus, l’ivoire de la chair nue, lascive, chaude et frissonnante du désir de ses attouchements. Je bombe hardiment mon poitrail dénudé sous la fine soie blanche diaphanéisée par l’averse. J’affiche, avec une impudence exaspérée, mes sombres aréoles renflées d’appétences charnelles, sur lesquelles s’érige fièrement une fraise granuleuse et vermeille, transperçant le tissu. Tendant mon ventre vers lui, offrant les ferveurs de mon corps, gonflant mes lèvres vermeilles, je le hèle « Tu en veux, chéri ». Et lui, n’osant que subrepticement lorgner le triangle des Bermudes qui l’engloutirait. Bien que bavant d’insoutenables concupiscences, il détourne la tête, pâle, rêvant à mes bras de pieuvre qui l’étoufferaient, ou au moins, l’arracheraient à sa grisaille.
Me font-elles rêver, ces comparses inconnues ? Elle, l’opulente rousse callipyge qui ressemble à s’y méprendre à mon amie Jocelyne, la femme du sénateur, flamboyante à la diable sous la torchère du réverbère. L’autre, la petite brune maigrichonne que l’on absoudrait sans confession que j’ai vue se faire sauter dans la ruelle adventice, à peine camouflée par le grand platane. Son client la prenait en levrette, tout en claquant vigoureusement ses fesses. Lorsqu’un instant elle s’est cambrée en arrière, j’ai discerné sa face extasiée aux yeux de louve révulsés. Puis le rustre l’a retournée, frottant dès lors avec hargne les sensibilités de l’épiderme de son dos contre les rugosités de l’écorce et j’ai pu alors clairement distinguer les affres de plaisir qui ravageaient son gracieux visage dévasté par l’exultation. Cette fille ne se bornait pas à assurer ses revenus, mais s’adonnait, hors toute retenue, à une ignominieuse allégresse. Elle beuglait des insanités, qu’isolée par la bulle de mon double vitrage, je n’ai malheureusement pas entendues.
Ces spectacles me font flageoler sur les guibolles, guident mes mains avides vers mes seins et mon sexe. Certains soirs, lorsque je suis seule, je m’affuble de mes escarpins les plus extravagants, ceux dont les talons démesurés s’accordent à leurs échasses et semblent, à défaut de me porter au ciel, m’isoler du sol. Tenant mon affût, je me déshabille graduellement. Quand tombent mes derniers atours, je cède à chaque fois au même étourdissement tandis qu’une folie jubilatoire me fait vibrer. Alors, tremblante et nue, je caresse mon corps d’une main d’emprunt cueillie sur le trottoir et participe ainsi, à l’abri de mes voilages, aux turpitudes de mes adorables pétasses.
Il m’arrive de coller ma poitrine contre la froideur stimulante de la vitre, d’y écraser l’arrogance brûlante de mes tétons. Quelqu’un pourrait certes m’apercevoir, au cours de ces moments de délire, cependant je m’en moque éperdument, en viens parfois presque à l’espérer. Un jour, la brunette m’a tellement ébranlée que, mes jambes se dérobant, je me suis lourdement accrochée aux tentures dont la tringle a cédé. Décidément, si la seule idée de me faire tringler déclenche déjà des catastrophes, je reste très loin de grimper aux rideaux, derrière ce double vitrage qui, opérant à la façon du bocal confinant un poisson, m’enferme, m’isole du plaisir et partant, de la vie. Bien que ne lui en allouant qu’une faible responsabilité, je vais finir par haïr mon mari d’épargner, avec autant d’obstination, nos voilages.
Depuis quelque temps mon mal s’accentue, m’étiole et me consume. C’en est Jocelyne, la responsable. Cette pimbêche m’a raconté comment, pressurée par la foule lors de « la fête des Lumières » un individu s’est collé dans son dos, pelotant ses fesses à travers son manteau. S’enhardissant, il a glissé sa main armée d’un objet tranchant au fond de la poche de sa pelisse et l’a lacérée afin d’accéder au moelleux de son ventre. Elle, à côté de son sénatorial époux, s’est gardée de broncher avant de se prêter au jeu et de desserrer la ceinture de sa jupe, espérant que l’intruse en profiterait, ramperait jusqu’à l’élastique de sa culotte puis passerait en dessous. Cela n’a pas tardé. Elle a ensuite écarté les cuisses, décidée à accueillir chaleureusement la visiteuse. À son tour, elle a introduit sa main entre les boutons du haut de son manteau pour agripper ses seins douloureusement dilatés, les triturer à travers l’étoffe de son chemisier au rythme des séismes que lui infligeait la migrante. Elle en est venue à se pincer cruellement les mamelons ayant le sentiment d’en faire jaillir une gerbe d’étincelles. Enfin, elle s’est contractée sur les phalanges ardentes qui la fouillaient sans ménagement, se mordant les lèvres pour éviter de hurler pendant sa jouissance. Elle en chancela et trépida si fort que son époux s’inquiéta craignant qu’elle n’ait froid, ce à quoi elle lui objecta, dans un souffle, que c’était le feu d’artifice qui la convulsait.
Elle m’a rapporté la péripétie avec force détails, insistant sur le surcroît d’euphorie que lui avait valu le contexte public de la scène et l’anonymat complet de son acteur, se vantant des délices procurés par ses sécrétions qui, le reste de la soirée, empoissèrent sa chatte et dégoulinèrent, en laves incandescentes, le long de son entrejambe. Quelle catin ! Je lui en veux terriblement ! D’abord de son incartade, davantage encore de se permettre de m’en prendre à témoin et par-dessus tout, d’avoir ainsi violemment joui. Au-delà, je m’étrangle surtout de jalousie. Pourquoi donc de telles aventures n’arrivent-elles qu’aux autres ? Il faut bien m’y résoudre, je ne dois pas savoir les provoquer.
Ce soir, mon fils est chez ses grands-parents, mon mari, à Singapour, visite des clients asiatiques. La rouquine a singulièrement soigné ses ressemblances avec Jocelyne. Je meurs d’envie de descendre, de la confondre et l’enjoindre à se comporter honorablement, à moins… à moins qu’il s’agisse de me laisser entraîner jusqu’à m’établir à son côté. Mon sang bouillonne, toutefois non, le bitume me paraît trop dangereux.
Une demi-heure après, le hall de cet hôtel de renom me recueille. Beaucoup savent qu’il capte à son bar de pauvres bourgeoises crevant d’ennui sous le fard des mondanités. Quand j’y entre, seule, les conversations s’interrompent. Je me suis pourtant habillée fort sobrement, loin des outrances des péripatéticiennes du boulevard. Ce silence, lourd d’interrogation, est si généralisé que je soupçonne ceux qui me tournent le dos de disposer d’yeux dans leur nuque. Je dois être écrevisse. Je me juche difficilement sur l’un des tabourets à l’extrémité du comptoir que personne ne fréquente. Ce faisant, j’accroche ma jupe à l’une de ses éclisses, ce qui la fait remonter très haut, dénudant ma jambe. Voilà qui m’aide à passer inaperçue ! Ma solitude est de courte durée et bientôt un petit ventru, un brin dépenaillé se détache d’une table et vient, s’abstenant le moindre peu de sauver les apparences, se poster sur le perchoir qui jouxte le mien.
Pour qui me prend-il, ce goujat ? Il est hors de doute qu’il a compris ce que je suis : une femelle sans foi ni loi, dépourvue de la plus élémentaire pudeur, une dévergondée qui ne sait se refréner. Une terrible envie de m’enfuir me submerge et néanmoins je reste là, figée. Mes membres sont paralysés ; je le fixe de mes billes exorbitées.
Il me détaille en souriant, de pied en cap, sans aucune vergogne. Mes pauvres nippes fondent sous ses braises égrillardes. Maintenant ses lance-flammes remontent, embrasent ma gorge qui s’enfle à tel point que je me demande si l’attache de mon soutien-gorge ne va pas sauter. On se retrouve un verre à la main où les glaçons tintent parodiant un glas ou les trompettes de Jéricho. On trinque… à quoi ? Je conçois que ce geste scelle notre accord. Quel accord toutefois ? Voyons Lamiel, ne fais pas les pimbêches, ça tombe sous le sens.
C’est la première fois que je me hasarde à l’observer vraiment. Qu’il est laid ! Des touffes de crin noir sortent par paquets des entrebâillements de sa chemise, un poil (si j’ose dire) trop étroite, débordent de ses manchettes et mangent ses pognes jusqu’au bout de ses doigts boudinés et graisseux que décore une outrecuidante chevalière en or. De petits yeux porcins, des bajoues de bovins. Il ne transpire que légèrement, mais sue la vulgarité par tous les pores de sa peau. Son allure générale d’orang-outang (que ceux-ci me pardonnent, je ne souhaite en rien être désobligeante envers eux), très éloignée de la plus rudimentaire correction, m’hallucine.
Un sourire carnassier ne le quitte pas. Après avoir ingurgité une lampée de whisky, secouant la tête, il s’en gargarise, claque de la langue en l’agitant ignoblement au seuil de sa bouche entrouverte avec un bruit de succion. C’est obscène. Il doit se dire que si je résiste à cette démonstration, je suis disposée à tous les outrages. Le pire, c’est qu’il tape juste. Un bel Adonis, un élégant Apollon ou encore un courtois Don Juan me laisseraient de glace et conforteraient mon ennui. Lui néanmoins, si sordide, emporté par la frénésie de son rut m’hypnotise, moi, la proie fragile démunie de défense. Sans que j’ose en convenir, je veux la bête qui, échauffée par ses instincts, attisera enfin les miens.
Je ne brigue de sa part aucune tentative de séduction, par contre j’attends qu’il enflamme et aiguillonne mes convoitises les plus déraisonnables et bestiales. Je veux qu’il me saillisse en m’accablant de grossièretés, qu’il me traite de chienne vicelarde, de pute en chaleur ou de truie éhontée. Mon dieu, comme il me reluque ! Si mon mari m’avait regardée une seule fois de la sorte, je n’en serais pas là ! Rien qu’avec ses yeux, il me baise déjà et j’y découvre le cochon qui me désire de toutes ses couilles. Moi qui suis sèche d’habitude au point d’espérer qu’avant une intromission mon homme me dispense un cunnilingus, je sens une bouffée de chaleur envahir mon ventre, tandis qu’une moiteur exaltante poisse mes cuisses. Quel délice, mais quelle honte aussi. Je m’empourpre. Il me devine, heureusement sans saisir cependant toute l’ampleur de mon désarroi, et en profite pour empoigner mon avant-bras de sa patte velue. Une araignée ! Je déteste ces bêtes. Là, pourtant j’hésite à immobiliser sa main en plaquant la mienne dessus. Peu de chance qu’elle abandonne une position si précaire.
Mon absence de réaction l’incite à poursuivre ses explorations et l’arachnoïde bondit ensuite sur mon genou auquel elle s’agrippe. Quelle sensation : une froideur reptilienne amplifiée par la brûlure urticante de la méduse me terrasse. C’est l’étreinte du vampire conjuguant attraction et répulsion en un cocktail explosif. J’en crève ! Mes tripes se nouent, ma vulve encore distille ses liqueurs, mon cœur part en chamade, quant à mon pauvre cerveau, il est laminé. Tandis qu’il malaxe mon genou, il enfonce son œil lubrique dans mon décolleté. Le pire, c’est qu’à l’instant où je témoigne ici, dans la tranquillité de mon écritoire, devant des inconnus, de mes turpitudes, je sens un feu analogue me dévorer. Je risque un œil sur sa braguette distendue. Je la présume grosse, longue, entourée de poils nauséeux, me la représente forçant ma bouche, distendant mes mâchoires et à l’avance m’en régale. Je n’aime pas sucer si ce n’est par procuration, chargeant l’une des salopes du boulevard de s’y coller à ma place. Présentement, j’attends dès maintenant son sperme dense et âcre, engluant ma bouche.
J’en ai la gorge sèche et vide mon verre d’un trait.
Volubile, il cause, et cause encore cherchant à s’étourdir de son aubaine, à m’étourdir de sa fatuité. Avec un bagout outré, il me noie sous ses discours salaces et grivois, qu’il récite probablement en de nombreuses occasions. Toutefois, occupée à combattre mes démons intérieurs et à déguster mes fièvres, je ne l’écoute même pas. Je vois ses lèvres baveuses qui remuent, répugnantes et ordurières, sans saisir le sens de ce qu’elles émettent. Une injonction, soudain, me frappe :
Furtivement, me tournant vers le bar, j’introduis une main sous ma ceinture et tâte discrètement ma vulve. Ce contact est électrique et je décharge une nouvelle bordée de ces humeurs inconnues en piaulant de surprise. Côté pondération, c’est réussi, et ce d’autant moins que lui, dénué du moindre tact, s’est penché en avant afin de mieux suivre ma manœuvre.
Très fort, de façon à être entendu de la salle entière, il commente :
Puis baissant le ton, en confidence :
Évitant de l’interroger, je me plie à ce caprice.
Il en lèche et pourlèche chaque phalange.
Moi… « Bonne au lit », qu’a-t-il dit là ? Je rêve et décolle. Aucun compliment n’était susceptible d’un tel impact et succès. Je manque de l’embrasser et salue son éloge d’une bouffée de fluide bouillant entre mes cuisses. Il va me faire craquer comme une allumette. Pleine d’une assurance insoupçonnée, un peu éméchée et surtout grisée par ce propos, je minaude et badine à mon tour tout en tripotant nerveusement les boutons de mon chemisier que j’ouvre progressivement. Mon dieu, qu’il est facile de singer les putains. Il est aux anges, pour ne pas dire à la diablesse et transpire de plus en plus abondamment, pendant que je transforme, moi, les fondrières de mon con et de mon cul, en sirupeux marécages.
Enfin, il m’interrompt. L’instant est décisif, le temps se suspend ainsi que ma respiration. La tête me tourne, je chavire !
Il m’aide à dévaler de mon perchoir, ce dont, au vu de mon ébriété, j’aurais été bien en peine autrement. Je quitte celui-ci en constatant le sillage de mouille qui en décore le skaï. C’est là bave d’escargot. Il faut croire que j’ai secrété un sacré bouillon, me dis-je, partagée entre des sentiments d’orgueil et d’indignité. Tandis qu’il m’entraîne, je l’imagine gravissant l’escalier sur mes talons, reluquant alternativement le popotin détrempé ou les mollets fuselés que je fais danser sous son nez en guise de promesse. Je prévois, dès à présent, que la porte de son antre franchie, il se précipitera sur moi afin de m’éplucher, ou pis, qu’assis au coin du lit, goguenard et arborant son sourire gras, il m’ordonnera « à poil, espèce de garce ». Et, majestueusement, je m’exécuterai, exploitant les ressorts d’une véritable libertine pour épuiser les ravissements de l’impudeur, camouflant mes quelques carences et étalant insolemment mes atouts, me fardant des rougeurs d’un plaisir que j’essayerai de travestir en timidité, devinant combien ces troubles, fussent-ils feints, flattent les mâles vanités.
Hélas, pas d’escalier, un triste ascenseur, piteux instrument mécanique inadapté à la conquête de l’Olympe, le remplace. Il me pousse rudement vers lui.
Le mot me cingle à la manière d’un coup de cravache. Un seul mot suffit à dissiper toute ma belle assurance, si bien que je me referme à l’instar d’une huître. Si, effectivement, là-haut, dans sa chambre, je me retrouvais frigide ? Si soudain je m’asséchais et qu’il me fallait, selon mes habitudes, simuler ? S’il se rendait compte que je ne suis qu’une novice inexpérimentée ? Autant le tremplin qui me déclarait « bonne » m’avait propulsée à des hauteurs inattendues, autant celui réveillant le spectre de ma frigidité me terrasse. Une chape de plomb s’abat sur moi et m’anéantit. Je reste une seconde pétrifiée avant de m’arracher de son bras et de m’enfuir terrifiée.
Dehors, la fraîcheur de la nuit, loin de me calmer, me fouette et, dégrisée, je m’affronte immédiatement à mon dilemme : dois-je être fière ou honteuse d’avoir si lâchement déguerpi ? Chez moi, impossible de fermer l’œil de la nuit. Je reste victime de son emprise et son dernier beuglement me poursuit. Nue sous ma couette, de mes mains fébriles, je cherche vainement un apaisement et me trouve à nouveau aussi aride que le Sahara. Dès qu’un semblant d’excitation me gagne, son rire tonitruant retentit et me coagule.
Qu’ai-je fait ? Depuis, ça boucle dans ma tête et à chaque tour, je me remémore un détail croustillant, effroyablement graveleux qui renforce ma dépendance. À chaque tour, le mal s’amplifie et c’est pire, bien pire qu’avant ! Le remède que j’ai essayé de mettre en œuvre s’avère d’une malignité supérieure à celle du mal qu’il devait combattre. Dire que sans la stupidité qui m’a crispée sur un mot et incitée à la fuite, je serais vraisemblablement guérie.
Désormais, je pousse mes scrupules jusqu’à m’interdire de guetter celles qui tapinent sous mes fenêtres dont, il s’en est fallu de peu, je serais devenue la consœur. J’ai envie de retourner là-bas, néanmoins quelle humiliation si je l’y retrouve ! Je l’entends d’ici déclarer à la salle, « Tiens revoilà notre pucelle en quête du bûcher qui consumera enfin sa virginité » ou quelque grossièreté du même acabit. L’autre soir, deux jours après son retour de Singapour, j’ai entrepris mon mari. Revêtue de dentelles somptueusement affriolantes, je l’ai chauffé comme marron sur le gril avant de lui assener le coup du : « Tu montes, chéri ». Ça a marché d’enfer… pour lui. Il m’a montée tandis que moi, je descendais dans des abysses où je suis restée de glace. À chaque fois que j’ai cru m’envoler, l’autre gluant s’insérait entre nous, la bouche pleine de son sarcasme : « Tu es une bonne frigide ! »
Actuellement, tant pour fuir que réactiver cette obsession, je me réfugie de plus en plus dans ce havre de langueur que constitue Rêvebébé. Hélas, le site exclut de ses nombreux critères de recherche celui de la « femme frigide » (va-t-il l’ajouter à l’issue de cet écrit ?).
Il y a une dizaine de jours, j’y ai découvert une perle : le récit d’une jeune femme se livrant sans fausse pudeur. Je le suppose fictif tout en m’astreignant à le croire véridique. Qu’importe d’ailleurs, ce n’est guère ce qu’elle rapporte qui me plaît, bien moins en tout cas que l’usage qu’elle en fait et la manière dont elle le fait. Elle tente en effet de transformer ses aveux publics en thérapie. J’ai lu et relu son bref texte qui m’a poussé à rédiger ces « Confessions d’une femme frigide ».
J’ignore si elles m’absoudront. Peut-être me vaudront-elles d’être tenue pour une exhibitionniste qui se méconnaît, une intrigante en quête de satisfactions virtuelles. D’aucuns en trouveront l’expression trop littéraire, qu’ils m’excusent, c’est là déformation professionnelle normale chez une chargée de communication. Une chose est certaine, les écrivant, j’ai renoué avec mes émois sensuels les plus puissants. Je suis sûre que d’autres femmes partagent mon calvaire ; beaucoup en ont pris leur parti, toutefois je ne puis, pour ma part, m’y résoudre.
Maintenant, cher lecteur (chère lectrice) anonyme, compatissant et empathique ou plus sévère et critique, juge, condamne, plains ou acquitte-moi.