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Temps de lecture estimé : 10 mn
20/05/20
Résumé:  Douze après nos premières rencontres, je retrouve Lucie dans des circonstances particulières.
Critères:  fh asie hépilé amour intermast 69 fsodo mélo -amouroman
Auteur : Come Sorel      Envoi mini-message

Série : Suivre mes traces

Chapitre 03 / 03
La trace incertaine du soleil

Résumé des deux récits précédents :

Le narrateur a raconté ses aventures de jeune homme avec un couple de sa classe de Lettres supérieures. Il a toutefois rompu avec eux quand il a compris que ses sentiments pour le garçon, Benjamin, sentiments non réciproques, mettaient en danger son équilibre personnel.




– 1 –


Bien entendu, nous nous éloignâmes.


Cela se fit sans bruit, sans drames ni colères. Après cette deuxième année de classe préparatoire, nous partîmes tous dans des directions différentes. Moi à B. pour des études de Sciences politiques, Lucie et Benjamin à Paris, Thomas intégra l’École Normale Supérieure et Grégoire partit à L. pour des études de documentation. Les jumelles en Belgique, dans une école de communication.

Nous nous revîmes fréquemment au début, tous ensemble ou par petit groupe, même si je prenais soin de ne jamais me retrouver seul avec Lucie et Benjamin. Mes sentiments m’interdisaient de récolter à nouveau le plaisir de leurs corps. J’avais couvert ce feu-là de cendres.


Peu à peu, nos réunions se firent plus rares, les appels et messages moins fréquents, les conversations plus vagues. Je ne gardais contact qu’avec Thomas, car nos destinées professionnelles devaient se croiser, il devint haut fonctionnaire au ministère de l’Éducation et je travaillais comme administrateur pour le réseau des lycées français de l’étranger. Travail d’un intérêt tout relatif, mais qui me laissait du temps libre et me permettait de passer ma vie à l’étranger.


Mes aventures avec Lucie et Benjamin m’avaient appris quelque chose : pour que ma vie ait un sens, il fallait poursuivre le beau et le plaisir puisque l’amour m’était interdit.

Ainsi, je multipliais les aventures, avec des hommes et des femmes. Aventures d’un soir, passions fiévreuses de quelques semaines et même histoires amoureuses de quelques mois, le temps d’une mission. Cette errance amoureuse ne me pesait pas, chacun de ces amants ou amantes me semblait correspondre au lieu et au moment où je les rencontrais. Paulo était un amoureux merveilleux sous les toits de son immeuble de Rio, Sonja avait été une compagne parfaite pour mon année à Varsovie. À chaque moment de ma vie correspondait un grain de peau, une odeur, un accent et un souffle différent.


Il arrivait que les souvenirs de Benjamin se bousculent dans ma mémoire, que le regret de ne pas avoir pu vivre mon amour avec lui me torde le ventre. Mais ces spasmes passaient comme une fièvre paludique me laissant, pour quelques jours, fatigué de ma solitude et de ma liberté.


Douze années se passèrent ainsi.


Puis une nuit, en poste au Pérou, je reçois un message de Thomas sur WhatsApp.


« Appelle-moi, c’est assez urgent. »


4 heures du matin à Lima, il doit être 9 ou 10 heures à Paris, je peux le rappeler maintenant.

Je me lève, prends le téléphone. Je me dirige vers la cuisine pour ne pas réveiller le beau garçon endormi dans mon lit. Des fenêtres ouvertes du salon vient la rumeur de la ville endormie. Le froid pénètre dans l’appartement et je ferme les fenêtres.

Je frissonne.

J’appelle. Deux sonneries. Thomas décroche. Ces mots :





– 2 –


Alors que Thomas continue de parler, il me donne les détails dont il a connaissance, le monde autour de moi se crayonne au noir. Ainsi se meurent ma jeunesse et la seule personne que j’ai aimées au cours de mon existence. Encore heureux et délié de mon plaisir il y a quelques minutes, je suis comme aspiré par les eaux amères et profondes d’un lac de volcan.


À nouveau, je frissonne et j’ai froid.


Thomas parle, je ne l’écoute pas. Puis tout à coup, il dit :



Quelques minutes encore pendant lesquelles je voudrais lui hurler ma douleur, mais je ne peux et nous raccrochons. Assis sur le sol, les larmes viennent, je pleure mon seul amour, mon éphémère amour.

Puis, revenant peu à peu du royaume des morts, je me souviens du conseil de Thomas.

J’ouvre mon ordinateur et cherche, dans mes contacts, le mail de Lucie. En espérant qu’elle utilise encore cette adresse, je lui écris un long message. Au départ, mes mots sont convenus, mais, peu à peu, je trouve un ton plus juste. Je lui explique que je pense à elle, à eux, à quelques milliers de kilomètres de Paris et qu’il n’est pas juste que cet homme, dont le sourire illumine mes souvenirs, soit mort. Je lui dis que, évidemment, je suis là pour elle.


Deux semaines se passent sans réponse de sa part. Puis, un matin, à mon bureau, je m’aperçois qu’elle m’a, à son tour, envoyé un message. J’attends le soir, dans mon appartement de San Isidro à Lima pour ouvrir ce mail. Il est écrit avec simplicité, mais chaleur. Lucie me remercie pour mon message. Elle me raconte la maladie de Benjamin et sa nouvelle vie de solitude. Elle me parle d’eux et de nous, elle me dit que ce « nous » a compté pour Benjamin et pour elle. Elle termine en écrivant :


« De tous nos amis (et malgré la distance et le temps, tu en fis toujours partie), tu as été peut-être le plus proche de nous, de moi. Tu es le seul, probablement, à avoir aimé Benjamin autant que je le fis. Voilà pourquoi je ne fus jamais jalouse, il y avait trop de douceur dans tout cela. « 


Dans les semaines qui suivent, nous entamons une correspondance amicale et régulière. Par goût et peut-être par défi, pour frotter nos âmes au réconfort de l’écriture, ces échanges épistolaires deviennent rapidement quotidiens. Moi qui aime tellement le silence, je n’en reviens pas de trouver avec elle si facilement les mots.


Chaque matin, me levant plus tôt pour avoir le temps et profiter de l’ambiance que m’offre la lumière pâle de l’aube sur Lima, je m’assois à la table de mon salon avec un café fumant. Là, j’ouvre mon ordinateur et commence à relire la lettre qu’elle m’a envoyée la veille et que, généralement, j’ai déjà pu lire avant de m’endormir. Puis, pendant une demi-heure, pendant que de ma fenêtre montent les bruits et les odeurs de la grande ville qui se réveille, je lui parle. De littérature, des villes que j’ai connues, de Benjamin. Je lui réponds. Sur la musique, les paysages ou Benjamin. Cette demi-heure passée, je pars au travail en mourant un peu, le cœur vide, attendant que, en haut de l’écran de mon ordinateur vienne s’afficher l’alerte m’annonçant qu’elle m’a répondu.


Elle m’annonce un jour qu’elle quitte Paris et son poste d’enseignante en littérature italienne pour retourner vivre en Normandie, dans la maison qu’elle vient d’hériter de ses grands-parents, et travailler comme traductrice pour plusieurs éditeurs.


Je lui réponds que la seule chose qui me manque de ma jeunesse, c’est la lumière des plages de sable du littoral de la Manche où l’éclat timide d’un soleil presque toujours voilé de longs nuages passant haut ne laisse au regard qu’une trace incertaine. Évidemment, elle m’invite à venir lorsque je reviendrai en France.

Je dépose dans la journée une demande de congés que j’obtiens sans difficulté. J’irai en septembre en Normandie.




– 3 –


La gare de V. où je débarque semble à l’abandon. Seul un train rhumatisant s’y arrête encore deux fois chaque semaine, de l’herbe pousse entre les rails et les poteaux portent des traces de rouille à leur sommet.


Sur le quai, il n’est pas difficile de distinguer Lucie. Grande, d’une belle élégance dans un pantalon cigarette gris et un débardeur jaune, elle s’approche vers moi, souriante. Quatre bises rapides : son visage, son odeur, le grain et la douceur de sa peau, rien n’a changé, sinon le voile de douce tristesse de ses yeux.

Nous montons dans sa voiture et partons vers N. à vive allure.



Je demande :



Elle rit à ce souvenir.



Nous parlons ensuite des romans qu’elle a commencé à traduire puis, gagnés tous les deux par la mélancolie du jour gris sur le bocage normand, nous nous taisons. Arrivés dans la maison, je reconnais le canapé où… mais je chasse ce souvenir inopportun.


Je m’installe dans une des chambres d’ami pendant qu’elle prépare le repas et je la rejoins dans la vieille cuisine aux meubles de bois dont la peinture est passée depuis longtemps. Nous mangeons, tandis qu’elle énumère les travaux qu’elle va devoir entamer pour rendre la maison plus agréable.

Après le repas, elle me propose d’aller marcher sur la plage.



Sur le parking avant la plage, deux véhicules, un camping-car immatriculé en Hollande et un vieux break hors d’âge. Nous n’avons aucun mal, une fois passée la dune à repérer leurs propriétaires respectifs perdus dans la grève de sable : un couple de sexagénaires blonds se tenant par la main et deux vieux Normands profitant de la basse mer pour une partie de pêche à pieds.



Le vent semble souffler plus fort depuis que nous avons franchi la dune.

Lucie, dont les pieds nus et délicats semblent ne faire qu’effleurer la surface du sable, et moi, marchons une dizaine de minutes sur la plage quand elle me désigne un endroit sur la dune :



À cause du vent, je ne saisis pas si elle affirme ou si elle me pose une question. Elle reprend :



Je dois me pencher vers elle pour entendre ce qu’elle me dit.



Le vent, soudain, s’est calmé, mais les premières gouttes d’une pluie froide de fin d’été s’annoncent.



Nous nous prenons la main et revenons vers la maison.




– 4 –


Arrivés à la maison, nous recommençons à parler de nos vies respectives puis, vers 18 h, nous commençons à préparer le repas, une salade de coquilles Saint-Jacques que nous accompagnons d’un Vouvray. Revenant dans le salon, nous choisissons, dans sa collection de DVD, de regarder Nosferatu de Murnau, l’un des rares cinéastes que nous aimons tous les deux.


Tandis que les ombres du vampire montent sur les murs du château, prise d’un frisson de peur, elle se blottit contre moi. À la scène suivante, elle ne se retire pas et pour le reste du film, sa tête se repose sur mon épaule, mon bras passé autour d’elle.

Quand le film se termine, dans le silence de la nuit qui n’est troublé que par le crépitement de la pluie, nous restons ainsi, immobiles et attentifs. Je prends conscience que sa main repose sur ma cuisse, elle tourne son visage vers moi et mes yeux se ferment, je plonge contre ses lèvres et nous échangeons un long baiser.


Ma main s’aventure sous le coton de son débardeur. Son ventre est doux sous mes doigts que je remonte vers sa poitrine. Ému, je saisis son sein gauche dont je caresse le téton. Elle lâche ma bouche quelques instants, exhale un soupir. Elle se tourne et me fait face tandis que je m’allonge sur le canapé. Je passe une main derrière sa nuque et attire à nouveau ses lèvres vers moi. De sa main gauche, elle caresse mon ventre, descend, ouvre les boutons de ma braguette, passe sous l’élastique de mon caleçon et s’empare de mon sexe.


Elle se recule et m’adresse un sourire en constatant que je suis épilé.



Je ne la laisse pas finir, trop gourmand d’elle, et me lève à demi pour l’embrasser.

Sa main est descendue maintenant sur mes testicules qu’elle caresse doucement avant de remonter sur mon pénis et de commencer à me masturber. Je continue à l’embrasser et mes mains à explorer son ventre, son dos, sa poitrine.


Puis, elle se décale avec grâce et se met debout. Elle fait passer son débardeur par-dessus sa tête et descend son pantalon, révélant une simple culotte de coton blanc, petite étoile brillante dans la pénombre. Pendant ce temps, moins gracieusement, je me contorsionne sur le canapé pour me mettre nu.


Je me lève, lui fait face et à nouveau nous nous embrassons. Ma main glisse le long de son corps, son ventre plat, ses hanches sèches, l’espace entre ses cuisses. Mes doigts vont et viennent sur la culotte de coton sous laquelle je sens son sexe humide. Elle pose une jambe sur la table basse pour me faciliter la tâche. Un doigt passe sous l’élastique, je lui fais suivre le contour de ses lèvres gorgées de cyprine.


Je l’emmène dans ma chambre et la pose sur le lit. Je m’allonge à côté d’elle. Nos langues se mêlent et chacun de nous commence à branler l’autre doucement, comme le lent roulis d’une barque le long d’une rivière tranquille. Lorsque nous n’en pouvons plus d’excitation, elle se place tête-bêche sur moi et, tandis qu’elle enfourne ma queue dans sa bouche, je dévore son sexe dont le jus coule sur mes lèvres, mon menton et mes joues.


Je pourrais jouir maintenant, mais je veux la prendre, je n’ai jamais eu autant envie d’une femme avant ce jour. Je la pousse, la mets sur le dos, elle écarte ses jambes, son sexe aux lèvres roses luit tant il est humide et je n’ai aucun mal à la pénétrer. Pour que je vienne plus loin, elle ramène ses jambes sur ses épaules.



Mais aucun de nous deux n’a encore joui. Elle se détache de moi et s’allonge dos contre mon corps. Elle prend ma main droite et trempe deux doigts dans son sexe puis les amène à l’entrée de son anus.



Elle tend son cul pendant que je la pénètre avec mes doigts. Je la lubrifie régulièrement avec sa propre mouille puis lorsqu’elle se sent prête, elle saisit mon sexe et l’amène. Je m’enfonce délicatement, elle retient son souffle, puis peu à peu, nous entamons un mouvement de va-et-vient. Elle a placé une main sur son clitoris et se masturbe. Nous accordons peu à peu notre rythme. Mon sexe est tendu, serré dans ce passage étroit, le plaisir monte peu à peu. J’écoute ses râles de plaisir pendant qu’elle se branle, je veux venir en même temps qu’elle. Nous jouissons tous les deux, ensemble.


Elle se retourne, la sueur colle ses cheveux sur ses tempes. Elle m’embrasse et ne dit rien. Nous prenons une douche et nous endormons dans mon lit l’un contre l’autre tandis que la pluie continue de tomber.


Au petit matin, le jour se levant à peine, je me lève tandis que Lucie dort encore. La pluie tombe, moins fort que cette nuit toutefois. Dans la cuisine, pieds nus sur le carrelage froid, je prépare le café puis, une tasse en main, me poste à la fenêtre.


Le ciel est gris, mais, au loin, sur l’océan, des rayons de soleil percent déjà les nuages. Le vent vient de l’ouest.


Cet après-midi, il fera beau.