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n° 19626Fiche technique15003 caractères15003
Temps de lecture estimé : 9 mn
27/05/20
Résumé:  Un jeune part en vacance dans un camping-car avec un couple d'inconnus rencontré sur le net... cela va lui réserver bien des surprises.
Critères:  hplusag fplusag telnet nopéné nonéro -occasion
Auteur : Hisoka02  (Juste un homme qui essaie de publier un texte)      Envoi mini-message

Série : Vacances sans frontières

Chapitre 01
Le départ

Jean ne savait pas vraiment ce qu’il faisait. Depuis son départ de chez lui jusqu’au hall de gare et ensuite dans le compartiment de son train, le sac à la main, il s’efforçait de ne pas réfléchir à la situation dans laquelle il se trouvait. Pourtant, le choix vers lequel il s’était orienté ne lui semblait pas aussi déraisonnable sur le moment.


Partir en vacances dix jours durant pendant ce mois d’août, à arpenter la France en camping-car, lui qui depuis le divorce de ses parents cinq ans auparavant n’était plus sorti de sa région, même durant son année passée à l’université.


Non, il n’y avait en effet rien de mal à cela !


Sauf que ces vacances ne se font pas en compagnie d’une bande d’amis connus de longue date ni même de son ex-meilleur ami âgé, comme lui de vingt-et-un ans, mais en compagnie d’un couple marié, rencontré, si l’on peut dire, six mois auparavant en dialoguant sur internet.


Le regard perdu dans le paysage, les écouteurs dans les oreilles, Jean prit le temps de se remémorer la façon dont les événements se sont enchaînés.


Retour six mois en arrière…

Comme souvent lorsqu’il s’ennuie le week-end, Jean va vagabonder sur internet et principalement sur des forums de chat IRC.


C’est donc sur un des nombreux forums qu’il a fait la rencontre qui l’avait amené dans ce compartiment.

À la suite des nombreuses conversations devenues houleuses, il s’était orienté vers des salons manifestement réservés aux couples qui portaient toujours les mêmes noms (paradis des couples, et autres noms évoquant la dualité). À peine eut-il eu le temps de saluer la room qu’un onglet s’était ouvert, signal qu’une personne désirait avoir une conversation privée.


Assez peu coutumier de se faire ainsi aborder, mais néanmoins ravi à l’idée d’une conversation, il cliqua sur l’onglet.



Réponse qui le figea, étant donné que c’est de là qu’il était sorti, vingt minutes avant.



La conversation avait été plaisante, amusante, tant sur le salon qu’en privé. À la suite, il les avait recontactés de nombreuses autres fois et avait ainsi pu faire plus ample connaissance.


Ils s’appelaient Pascal et Ève, tous deux trente-huit ans, mariés depuis vingt ans et sans enfants. Vivant en Alsace, de profession libérale et relativement à l’aise, Jean apprit alors qu’ils affectionnaient de nombreux loisirs communs aux siens, notamment une fréquentation régulière des cinémas et des boîtes de nuit.


Au fur et à mesure de leurs conversations qui avaient pris un caractère quasi journalier au bout de quelques semaines, Jean se mit à oser se livrer un peu plus. Cette première année en université était en effet teintée d’angoisse de par le divorce ayant entraîné moult ennuis familiaux.


Bientôt, Jean se mit à leur parler de sa vie plus intimement, rassuré de la complicité s’étant installée durant les dialogues. Complicité réciproque, Pascal n’ayant pas hésité à rassurer Jean de sa timidité en invoquant son propre passé.


À dix-neuf ans, très timide, Jean avait évoqué son malaise vis-à-vis de son manque d’expérience, son inhabileté à aborder celles de ses condisciples féminins qui ne le laissaient pas indifférent.


Un samedi soir, alors qu’il était en ligne avec Pascal, il se prit même à évoquer très brièvement la seule expérience sexuelle qu’il avait eue jusqu’alors. À la demande de Pascal qui s’était pourtant montré le moins pressant possible, il n’avait répondu qu’un vague : « Ce n’était presque rien, mais ça n’était pas terrible ».


Une brusque secousse sortit Jean de sa rêverie. Rien de bien grave, le train s’étant arrêté et le retard annoncé par le conducteur n’ayant duré que quelques minutes. Une fois ce dernier reparti, Jean se rendit compte de la lumière faiblissante de la journée et consulta sa montre : 21 h 24.


Il se souvint alors qu’il devait rappeler Pascal un quart d’heure avant son arrivée à Colmar… à 21 h 41.

Il se saisit alors de son téléphone.



Un seul quart d’heure. Oui, dans une quinzaine de minutes, réalisait Jean, il arrivera à destination. Il se sentit soudain fébrile, stressé. Avait-il définitivement bien fait de se lancer dans ce train ?

Il se remit alors à penser comment cette situation l’avait mené ici, deux semaines auparavant. La conversation s’était amorcée comme à son habitude, racontant la journée, commentant des informations glanées sur internet.


Ève était au clavier et elle avait alors parlé d’un voyage qu’elle et Pascal avaient prévu d’effectuer et qui allait donc les rendre absents pendant une quinzaine de jours, ce dont elle voulait avertir Jean (une méprise étant vite arrivée sur internet). À cette pensée, ce dernier avait alors évoqué une invitation dont une de ses amies lui avait fait part sur le ton de l’anecdote. Cette dernière venait de se faire inviter, elle et sa famille, en Autriche par des amis de ses parents et allait donc y passer tout le reste de ses vacances d’été.


Heureux pour elle, et bien que dépourvu à ce moment de jalousie, cette nouvelle l’avait alors rappelé à sa propre réalité, lui qui n’était plus parti hors de sa région depuis maintenant plus de dix ans. Et cela lui manquait. Mais, et selon les nombreux adages qu’il s’efforçait de se remémorer pour contrer l’amertume : « tout vient à point à qui sait attendre ». Oui, le temps viendrait où il savourerait à nouveau ce plaisir des départs en vacances.


Pour leur part, Ève et Pascal n’ignoraient pas ce fait (il leur en avait déjà parlé), mais il ne fut cependant pas très surpris lorsqu’Ève lui avait posé la question :



C’est ainsi que le voyage fut envisagé. Quelques minutes plus tard, Pascal et Jean discutaient par téléphone des détails de leur éventuel voyage. Lui et Ève gagnant très confortablement leur vie, ils avaient fait l’acquisition, un an auparavant, d’un camping-car suffisamment vaste pour quatre ou cinq personnes. Ils avaient assuré Jean que, si ce voyage avait lieu, ils pourraient sans problème rembourser le prix du billet de train.


Quant à l’inquiétude de Jean concernant ses parents, Pascal et sa femme se feraient passer pour ceux d’un ami de fac qui aurait donc lancé l’invitation.


Trois jours plus tard, tout était décidé, réglé, planifié. Jean prendrait le train dès le samedi matin pour se rendre à Paris. De là, il prendrait une correspondance à destination de Colmar où il arriverait en milieu de soirée. À son arrivée, les sacs en mains, Pascal et Ève l’attendraient et ils partiraient tous les trois dans leur camping-car, s’arrêtant sur les aires où ils le pourraient et en profitant allègrement de leur trajet qui les mènerait à déposer ainsi Jean dix jours plus tard chez lui.


Oui, se dit Jean au rappel de ces circonstances, il n’y a rien de bizarre. C’est même une chance de pouvoir bénéficier de dix jours loin de toute ma vie et de ne plus penser qu’à la détente.


Cette fois, ce fût la voix du conducteur qui brisa sa réflexion, pour annoncer l’arrivée imminente du train à destination.


Tout en prenant ses deux sacs, lourds des livres et des vêtements embarqués (la plupart légers, mais aussi parfois plus habillés pour être sûr de ne manquer de rien et d’être présentable en cas de sortie) et en vérifiant, comme le soulignent les recommandations toujours éclairées de la SNCF, de n’avoir rien oublié dans son compartiment, il se souvint qu’il n’avait jamais vu ni les visages ni les silhouettes de ses hôtes.


Tandis qu’il posait le pied sur le quai de gare, il fut pris d’une brève angoisse à l’idée de n’être pas capable de les reconnaître, qui fut balayée par le fait qu’il avait le téléphone et que de toute façon, ils seraient les seuls ou presque à être stationnés en camping-car.


En effet, il ne lui fût pas difficile de les localiser. Le jour était presque tombé sur le parking de la gare et la majorité des voitures qui y étaient stationnées, bien que nombreuses, ne dépassaient pas le volume d’un monospace et étaient surtout vierges de passagers. Les camping-cars étaient au nombre de sept, mais un seul arborait un plafonnier et des phares allumés.


Jean se dirigea vers le véhicule, avec cependant la nervosité d’un jeune postulant se dirigeant vers le bureau du patron de l’entreprise qu’il envisage d’intégrer. Le véhicule allait être sur sa droite et lui faire face et il distingua les visages de ses occupants.


Il eut le temps de noter que Pascal et Ève avaient une allure très jeune, vive. Deux silhouettes, l’une les cheveux bruns coupés assez court et coiffés manifestement à la brosse et l’autre une chevelure auburn longue et ondulée. Tandis qu’il n’était plus qu’à une dizaine de mètres, ils tournèrent tous deux le visage dans sa direction, ce dont il ne s’étonna pas, étant donné qu’il était le seul à en venir.


Pascal, qui était du côté conducteur, l’invita à entrer. Il eut le temps d’apprécier la taille du véhicule et le confort de son intérieur.


Ève le reçut la première. Sa voix était vive, douce et rieuse. Elle arborait un sourire convivial et chaleureux, souligné par un maquillage dont les tons rosés donnaient à ses lèvres une élégance certaine. Ses yeux d’une teinte brune étaient également soulignés par une couleur chair subtile. Le chauffage lui avait fait ôter un foulard ample posé sur le dossier de son siège et qui laissait ses longs cheveux d’un blond éclatant tomber librement autour de son visage. Elle se présenta ainsi dans un pantalon de sport en corsaire et un tee-shirt épousant les formes d’un corps habitué à n’en pas douter à une pratique sportive régulière.


Pascal était par ailleurs à la hauteur de son épouse, ce dont Jean se sentît gêné (pensant comme toujours qu’il n’était pas suffisamment sportif malgré ses pratiques de nombres de disciplines). Pascal arborait un short de toile ample et un débardeur noir tout aussi ample qui laissait voir une carrure sans prétention, mais à la musculature mince et entretenue. Sa voix était plus rassurante et ferme qu’au téléphone, mais son sourire aimable et ses yeux sombres et attentifs ne pouvaient qu’attirer l’amitié et la sympathie.


Un instant, Jean se sentit honteux de venir s’introduire pour quelques jours dans la vie de ce couple qu’il ne connaissait que par correspondance. Mais les paroles de Pascal vinrent étouffer ses craintes.



Et, après un rapide appel à sa mère lui confirmant son arrivée à destination et lui promettant un appel dans les deux jours, nous fûmes lancés, tous les trois, vers le début de mes premières vacances, vers un inconnu qu’il soupçonnait réjouissant, convivial et plein de complicité.