n° 20284 | Fiche technique | 154269 caractères | 154269Temps de lecture estimé : 113 mn | 26/05/21 |
Résumé: Un capitaine corsaire sans rafiot. Un équipage zarbi. Un bateau qui tombe du ciel. Des filles de joie. Des grains et des tempêtes. Des plages de sable blanc. Et puis aussi de l'or, beaucoup d'or. Mélangez le tout dans un esprit un peu dérangé et... | ||||
Critères: h fh fbi rousseurs bondage historique délire humour aventure -historiqu -aventure | ||||
Auteur : Someone Else (Grand délire ou grand spectacle ?) Envoi mini-message |
Avant-propos : Ce texte a d’abord été publié sur Revebebe sous la forme de 3 épidodes d’une série (numéros 19325, 19330 et 19332). L’auteur a récemment demandé leur regroupement sous ce récit unique.
Préface : À l’origine est : « À bord de l’Étoile Matutine », superbe roman de Pierre Mac Orlan, où l’auteur décrit une réalité nettement moins reluisante – pour ne pas dire carrément sordide – de ce qu’était le véritable monde de la piraterie. Inutile de préciser qu’on est à mille lieues de l’imaginaire collectif !
Ensuite, Soldat Louis s’en inspira pour écrire « Savannah ».
Condamnés à l’océan au vent qui mène le bal
Oubliés des honnêtes gens, du Dieu des cathédrales
Rien ne pouvant plus les sauver, on peut traîner nos âmes
Des tropiques aux bas quartiers de Rotterdam
À force de chercher des brumes où cacher nos erreurs,
Nous gentilshommes de fortune, de quoi avons-nous peur ?
Plus du gibet de Savannah que de Satan et ses flammes,
On préfère la mort du bras qui tient une lame…
Et c’est cette chanson qui, à l’origine, m’a inspiré pour écrire cette histoire… Mais il n’est pas impossible que j’aie quelque peu divergé par la suite.
Deux derniers clins d’œil : personne ne reproche à « Pirates des Caraïbes » de ne pas être réaliste, ni à la série « Kaamelott » de ne pas utiliser le vocabulaire d’époque.
Bonne lecture !
***
Ils me font bien marrer, tous ces Barbe-Noire, Capitaine Kid et autres Surcouf… Même si la moitié de ce que l’on raconte sur eux est vrai, ils sont à peu près aussi sûrs d’entrer dans la légende que de finir un beau jour avec une cravate en chanvre ! Tu parles, quand je vois déjà le bordel que c’est lorsqu’il s’agit de passer inaperçu quelque part, je n’ose imaginer ce que cela doit être quand n’importe quel pékin est susceptible de reconnaître ta tronche !
Moi, de mon côté, je ne risque pas grand-chose, je ne ferai jamais partie de ce folklore qui entoure la piraterie qui fait briller les yeux des gosses et plus encore mouiller les culottes… Ne serait-ce que parce que vous pouvez citer mon nom un peu n’importe où sur cette foutue planète, personne ne me connaît ! Le capitaine Mathias, surnommé à l’occasion « Pine d’Ours », fait partie de ces plus ou moins pirates – ou corsaires, ou flibustiers, ça dépend d’où souffle le vent et de qui est prêt à casquer pour obtenir mes services – qui resteront à tout jamais dans l’ombre. Et ça tombe bien, je n’ai jamais eu envie d’avoir ma trombine placardée sur les murs flanquée d’un avis de recherche !
Enfin, quand je dis que je suis capitaine, je suis plutôt un ex-capitaine… Et pourquoi, je vous le donne, Émile ? Tout ça parce qu’on revenait peinards d’une petite virée dans les Caraïbes où l’on avait réussi, à défaut de choper un galion espagnol rempli ras la gueule d’or inca – ou aztèque, ou maya, en fait on s’en fout, l’argent n’a pas d’odeur, mais l’or non plus – à alpaguer trois rafiots hollandais chargés de diverses chinoiseries en soie et autres épices plus ou moins précieuses. Qu’est-ce qu’ils foutaient là ? Bonne question ! Mais même si, question butin, il n’y avait pas de quoi grimper au mât de misaine, il y avait largement de quoi rentrer au port la tête haute.
Seule chose que l’on n’avait pas prévue, c’était ce fumier d’Anglais qui nous a attaqués alors que nous n’étions plus qu’à quelques encablures de Saint-Malo, sans même avoir hissé le Jolly Roger… Il paraît que nous, les pirates, sommes des individus sans foi ni loi, mais il n’empêche que nous avons un code d’honneur ! Même cette enflure de François l’Olonnais, qui ne fait pourtant jamais de prisonniers, ne s’amuse pas à venir péter la gueule de ses ennemis en pleine nuit !
Bon, faut croire que sa traîtrise ne lui a pas porté chance puisque c’est nous qui avons réussi à avoir le dessus… Et moi qui me débrouille toujours pour laisser l’équipage adverse se démerder avec ce qu’il reste de son navire après que nous l’avons vidé, j’ai fait une exception… Et à l’heure où je parle, tout ce petit monde est en train de barboter ou de donner à bouffer aux poiscailles, et leur sirène qui faisait figure de proue ne fera plus jamais bander personne.
Mais avant d’en arriver là, ça a bardé… Faut dire que les hommes n’aiment pas du tout se faire virer des branles à coup de pompe dans le cul ! Et moi, eh bien je me suis retrouvé face à cet enfoiré de capitaine anglais quand, sans prévenir, il a défouraillé sur moi alors que j’étais à trois pas ! Comment ce glaireux a-t-il réussi à me manquer ? Je vois encore toute cette mitraille, ces bouts de ferraille rouillée ou de verre – et sans doute un peu de merde, aussi, histoire de pimenter l’affaire – me passer à deux doigts du museau ! Enfin, quoi qu’il en soit, j’ai fini par le punaiser d’un coup de sabre sur le mât d’artimon, juste avant de m’apercevoir qu’une balle perdue ne l’avait pas été pour tout le monde, puisque l’une d’entre elles m’avait tout bonnement traversé le gras du bide.
Par bonheur, on a à bord ce qui est sans doute le plus invraisemblable toubib de toute la marine française, et peut-être même du monde… Personne ne sait véritablement d’où lui vient sa science, mais ce mec-là semble avoir bourlingué aux quatre coins du monde comme en témoigne la chiée de bouquins qu’il trimbale toujours avec lui. J’ai eu la curiosité d’en ouvrir quelques-uns et j’en suis resté sur le cul : y en a certains auxquels je capte que dalle vu qu’ils sont en sanskrit ou en chinois, mais y en a d’autres qui semblent être écrits de sa main et qui sont ni plus ni moins que des recettes piquées à des sorciers pygmées ou des Indiens d’Amazonie !
Quoi qu’il en soit, il a une fois de plus fait des merveilles… J’aurais pu crever dans d’atroces souffrances, mais lui m’a remis sur pied, comme il l’a également fait pour d’autres membres de l’équipage parfois bien plus amochés que moi.
Le seul problème, c’est quand on s’est pointés à Saint-Malo… L’armateur a commencé par nous accueillir à bras ouverts, il était tout joyce de tout ce merdier qu’on lui rapportait, il n’a même pas tiqué pour nous filer la part qui nous revenait… Mais c’est après que ça a tourné au vinaigre :
Quand il a vu que nous étions tous plus ou moins éclopés, il a décidé que nous étions incapables de reprendre la mer et a aussitôt refourgué notre rafiot à un autre capitaine… C’est à ce moment précis qu’on s’est tous subitement dit qu’on avait rudement bien fait d’oublier de lui parler de la centaine de kilos d’or que trimbalait l’angliche et qu’on avait tous joyeusement étouffés.
La suite ? Que vous dire ? Qu’un capitaine sans bateau, c’est un clampin comme un autre, et encore un peu plus quand il est estropié ?
Par bonheur, tout ça, c’est terminé… Il ne m’a pas fallu une semaine dans l’ancienne ferme de mes parents pour à la fois à me remettre sur pied et à trouver une planque où je sais que personne ne trouvera jamais mon pognon… Mais pour l’heure, et puisque que j’ai largement assez de thunes pour m’en payer une tranche, direction L’Espadon Moucheté ; il est grand temps pour moi de me faire dégorger le poireau : si ça continue, je vais avoir les couilles comme d’un cachalot.
L’Espadon Moucheté, vous l’avez deviné, c’est un claque comme il en existe des dizaines, planqué bien au chaud dans les rues tortueuses et plus ou moins mal famées des remparts de Saint-Malo. Enfin quand je dis comme les autres, ce n’est pas tout à fait vrai… On est assez loin des gourbis crasseux de Manille ou de Rio, et même assez loin des bars à putes qui pullulent partout dans le monde pourvu qu’un marin ait la bonne idée de poser de temps en temps le pied à terre.
Oh, c’est pas non plus un de ces établissements de luxe réservés aux bourgeois et aux friqués comme il y en a, paraît-il, à Paris ou à Londres… Pas de colonnes en marbre, pas de dorures sur les murs, pas de décors à la con… Non, juste un bordel qui, s’il ne paie pas de mine à l’extérieur, est étonnamment propre et lumineux aussitôt la porte franchie.
Parce que n’entre pas qui veut à l’Espadon Moucheté ! Ou plus exactement, il est facile d’y entrer, mais encore plus de se faire jeter si l’on est vraiment trop dégueulasse, et peu importe la thune que tu sois disposé à y dépenser.
Comme à son habitude, c’est la taulière qui accueille le client et elle me reconnaît aussitôt. Cependant, cela ne l’empêche pas de me reluquer de la tête aux pieds.
Qu’elle m’attend, qu’elle m’attend… Elle m’attend comme n’importe lequel de ses clients, oui ! Ce n’est pas la peine de me prendre tout à fait pour un perdreau de l’année…
Sans un mot, je lui glisse deux pièces d’or dans la fouille. Je ne suis pas certain qu’il soit indispensable de lui filer autant d’oseille, mais, au moins, ça lui fermera le clapet pour un bon moment.
Le chemin en question, c’est celui des bains. Il y a là une quinzaine de donzelles qui n’ont pour mission que de s’occuper de remplir les baquets d’eau chaude et de te filer du savon, histoire de s’assurer que c’est propre comme un sou neuf et surtout débarrassé de tes éventuelles bestioles que tu vas rencontrer les pensionnaires… Et pour ceux comme moi qui prennent une fille pour la nuit, t’y laisses tes fringues et tu les récupéreras demain, propres et repassées. Oui, L’Espadon Moucheté douille un peu, mais t’en as pour ton fric.
Par contre, ces gonzesses-là et même si elles te regardent l’entrejambe avec attention, essentiellement histoire de vérifier que t’as pas une chaude-pisse ou autre saloperie, t’as pas intérêt à les toucher ! Si tu veux pas te retrouver à oilpé et la tête au carré au beau milieu de la rue, t’as intérêt à garder tes mains dans tes fouilles ! Comment ça, t’as pas de poches quand t’es à poil ? Rien à foutre ! Et je ne connais personne qui ait envie de se confronter l’immense black qui, bien que sagement planqué dans un coin, n’en veille pas moins au grain et qui serait capable de lourder n’importe qui si cela s’impose… Faut dire aussi que les filles qui travaillent ici « sous l’homme » ne sont pas des gamines comme l’on en rencontre trop souvent ailleurs, mais ont toutes la vingtaine ou pas loin, ce qui en fait accessoirement des expertes du turbin. Par contre, je suis pas certain que ce soit le cas des lavandières, ce qui explique sans doute pourquoi la maquerelle est à ce point chatouilleuse sur le sujet.
Je ne sais pas combien de temps durent mes ablutions – eh ouais, mon père, j’ai aussi du vocabulaire, faut pas croire –, mais, lorsque je me relève, deux filles se précipitent pour me tendre une toile de lin qui servira à la fois à me sécher et à éviter d’exposer ma pas vraiment glorieuse anatomie dans les couloirs du boxon. Un dernier coup d’œil sur ma teub, et en avant la musique !
Inutile de déranger les autres nénettes, je sais exactement où je vais… Porte numéro 13, Adélaïde m’attend, et là, une fois de plus, c’est le coup de foudre. Mais comment fait-elle pour entretenir une telle crinière ? Ses cheveux, qui ont encore poussé depuis la dernière fois que je l’ai vue – mais c’était il y a huit mois, il est vrai – lui arrivent désormais quasiment aux genoux. Simplement vêtue d’un minuscule corset de velours rouge qui ne cache pas davantage ses ravissants petits nibards que sa case trésor, elle se place face à moi, les mains sur les hanches.
J’ai beau savoir que, comme toute pute qui se respecte, elle sort sans doute la même salade à chacun de ses pigeons, cela fait son petit effet.
Là, sans me laisser le temps de réfléchir – et surtout sans avoir pris la peine de me faire entrer dans sa piaule – elle est déjà à mes genoux et a déjà pris sérieusement l’affaire en main, ou plutôt en bouche, d’ailleurs. Elle te choppe les burnes à pleine main et à partir de cet instant, tu sais que tu ne pourras plus rien faire : t’es son jouet, point. Elle suce, pompe, te lèche le gland, te branle comme une forcenée et toi, tu ne peux que subir. Certes, c’est délicieux, mais t’es encore loin d’avoir expédié la purée que tu sais déjà plus où t’habites… Et tout cela sous le regard d’une dizaine d’autres clients qui semblent soudain plus intéressés par ce spectacle plutôt que d’aller fourrer la fille qu’ils viennent pourtant de choisir et qui pourrait tout aussi bien leur administrer le même traitement !
Tu crois que cette fois, c’est la bonne ? Mon cul, oui ! Elle t’attrape le zgeg, tire dessus jusqu’à ce que tu gueules, se met subitement à te lécher les balloches jusqu’au trou de balle et, une fois de plus, t’as le citron aux abonnés absents… Et quand enfin elle décide de te faire larguer les amarres, elle se débrouille pour que le torrent de foutre gicle exactement où elle veut : sur son front, sur ses joues, dans sa bouche… Toi, t’as beau être dans un état second, tu te retrouves à la fois acteur et spectateur de cette démonstration ! Bien entendu et comme pour faire bonne mesure, elle attend quelques instants que tu reviennes sur terre pour se redresser et, son regard planté dans le tien, elle recueille avec gourmandise et du bout de ses doigts cette semence qui lui dégouline sur le visage comme s’il s’agissait d’un divin nectar, le tout sous les sifflements admiratifs et envieux de tous ces types qui, bien sûr, n’en ont pas perdu une miette !
Trente secondes plus tard, tout ce beau monde a disparu et, à en juger par les grincements des matelas et des sommiers martyrisés – et aussi un peu par les cris des filles qui ne doivent quand même pas voir ça tous les jours – il y en a qui doivent se régaler ! Moi, par contre, j’ai déjà l’impression d’être essoré comme si je venais de franchir le cap Horn.
Le temps d’essayer de me remettre les idées en place, elle nous a commandé de quoi manger… Je me rends compte alors que j’ai une dalle à bouffer des haubans, mais je me doute que le petit numéro d’Adélaïde n’y est pas pour rien. Du coup, alors que nous attaquons – enfin, surtout moi – le poulet et les patates au four que l’on vient de nous apporter, j’en profite pour lui demander entre deux gorgées de rouquin de me raconter les derniers potins du patelin.
Pas grand-chose, en vérité… Quelques exécutions de brigands, quelques Anglais qu’on a expédiés aux galères pour mieux leur apprendre, une soi-disant sorcière qu’on a essayé de cramer, mais qui a été sauvée par un orage parfaitement inattendu, la rombière d’un notable de la ville surprise en train de se faire joyeusement tromboner par ses quatre loufiats qui se sont aussitôt barrés et qui, à en juger à l’allure à laquelle ils caltaient, doivent au moins être en Nouvelle-France à l’heure où elle parle.
La Pomme d’Or, c’est un autre claque de la cité… Il ressemble un peu à celui où je me trouve, Adélaïde en moins.
Comprendre un bordel où les pensionnaires, selon l’expression consacrée, se font du cinq ou six nœuds à l’heure avec toutes les conséquences que l’on imagine.
Intérieurement, je me dis que vais y aller faire un tour, à la Pomme d’Or… quoique la perspective de me récupérer une chtouille maison agrémentée de quelques morpions ne m’enchante pas plus que ça.
Une dernière gorgée de pif plus tard, Adélaïde semble s’intéresser de nouveau à ma queue. Il n’y a pas à tortiller, il y a des filles qui font le tapin parce qu’elles n’en ont pas le choix, et il y en a qui doivent aussi le faire pour le panard… Et je crois bien que ma blonde fait partie de la deuxième catégorie.
Trois coups de langue plus tard, me voilà quelque peu plus présentable… Sauf que cette fois, elle va pas s’en tirer comme ça ! Je l’attrape par le bras, histoire de l’expédier directement sur le paddock, profitant accessoirement qu’à l’Espadon Moucheté, les draps sont changés tous les jours et que, même si précédemment il y a eu un malencontreux accident, tu peux t’allonger sur le pieu sans arrière-pensée ! Adélaïde connaît bien son métier et se laisse faire docilement, se contentant de poser sa tête sur l’oreiller, les pinceaux à l’équerre pour une vue imprenable sur sa chatte.
Et quelle chatte, mes aïeux ! Tout aussi blonde que ses cheveux, elle baye déjà aux corneilles, aussi trempée que les fringues d’un marin qui vient d’essuyer un grain. Mon sang ne fait qu’un tour… Je vais t’en foutre, moi, au sens propre comme au figuré ! Je dirais bien alors que je dégaine l’arbalète, mais il se trouve qu’étant à oilpé sous ce drap, ce n’est pas vraiment le cas.
Pas le temps de tergir ni de verser, je suis déjà enfoncé en elle jusqu’à la garde… Et là encore, quel délice ! J’ignore depuis combien de temps elle officie dans le putanat, mais quelque chose me dit qu’elle a doit s’enfiler davantage de bites en une heure que n’importe quelle bourgeoise en toute une vie, mais cela ne l’empêche pas d’être incroyablement étroite… Un véritable pot de miel !
Tellement serrée d’ailleurs que, bien que je sois en train de la baratter comme un furieux, c’est elle et elle seule qui m’empêche de lui crémer le dindon ! Faut dire que malgré sa monstrueuse turlutte de tout à l’heure, rien n’a rien changé et j’ai toujours les couilles prêtes à exploser !
Elle s’en amuse, d’ailleurs, comme en témoigne ce petit sourire qui ne quitte pas ses lèvres. Bon, eh bien, puisque la force ne semble pas fonctionner, essayons donc quelque chose de plus calme. D’elle-même, elle se glisse sur le côté et me voilà de nouveau bien au chaud tout au fond de son ventre, dans la position de la cuillère. Là, je m’efforce de ne pas trop accélérer la cadence, d’autant que je viens de remarquer le détail qui tue : là, dans ce grand miroir incongru dans cette turne de tapineuse, j’ai non seulement un fantastique panorama sur son anatomie tout entière et sur cette invraisemblable chevelure, mais aussi sur son visage… Et là, ce que j’y lis est sans équivoque : Adélaïde est en train d’apprécier ce que je lui fais !
L’immense majorité des filles de mauvaise vie, comme l’on dit dans les hautes sphères, ne prennent même pas la peine de simuler : elles t’épongent les burnes, point à la ligne… Bon, quelquefois et tu leur promets un pourliche, elles font mine de couiner… Mais je jurerais qu’Adélaïde est réellement sur le point de larguer les amarres.
Je passe alors une main au-dessus d’elle, histoire d’accéder à sa case trésor, et me voilà parti à lui titiller le bouton magique… Je me démène d’un côté et de l’autre, à moitié coincé dans sa formidable crinière, et voilà-t-il pas qu’à ma grande surprise, la voilà qui gémit, et qui gémit de plus en plus fort ! Pas de doute, et une fois de plus le reflet dans la glace est formel, elle est sur le point de jouir ! La cavalcade infernale se prolonge encore quelques instants, jusqu’à ce qu’elle parte dans une longue plainte tandis que sa ravissante anatomie semble possédée par le démon. Et moi, et moi…
C’est une véritable lame de fond qui m’envahit, mais, par chance, j’ai eu le temps de me remettre au-dessus d’Adélaïde et les giclées que je balance sur son buisson ardent sont tellement impressionnantes qu’elles finissent en réalité quasiment entre ses seins. Nos tempêtes respectives se calment, la mer redevient calme. Elle rit.
Même s’il n’est pas plus sincère, voilà qui change par rapport au baratin qu’on te sert à chaque fois… Mais qu’importe, là tout de suite, il n’y a que le sommeil qui m’intéresse.
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C’est un formidable raffut à ma porte qui me sort du cirage… Instinctivement, je cherche mon pétard ou mon sabre, mais ces cons-là sont restés bien au chaud au fond d’un placard au rez-de-chaussée. Les armes, la gnôle et le cul, ça ne fait pas toujours bon ménage ! Cependant, il me semble reconnaître cette voix… J’ouvre.
Il jette alors un œil inquiet sur Adélaïde qui vient de se lever… Du coup, devant une telle apparition, il en a la mâchoire qui se décroche et un filet de bave s’écoule doucement sur le sol.
Deux minutes plus tard et malgré ses yeux comme des soucoupes, Lepainsec finit par enfin cracher le morceau.
Même si cela ne se voit pas franchement, Lepainsec en a sûrement un coup dans la trogne, mais il n’empêche que s’il n’y avait pas anguille sous roche, ils l’auraient simplement envoyé se faire foutre. Y a donc du sérieux là-dedans !
Mais pour le moment, rien à cirer, de toute façon, les gars qui s’occupent de l’affaire doivent en ce moment roupiller peinards bien au fond de leur paddock. Du coup, ça me laisse un moment pour réfléchir même s’il se profile un autre problème, certes moins grave, mais plus nettement plus urgent : mon second a bien du mal à détacher ses yeux des courbes d’Adélaïde, toujours nue et allongée sur le plumard. Et vas-y que je te mate son cul, sa teuche et tout le reste… L’intéressée s’en amuse, mais ne dit mot, tout en s’assurant que mon zouave n’en perde pas une miette. Je me lève alors.
Adélaïde m’interrompt.
Elle marque un point, la miss.
Je ne sais pas si un jour Adélaïde cessera de me surprendre… Elle s’adresse soudain à nous deux.
Lepainsec ne dit mot, mais il faut dire que tout pirate qu’il est, il sait qu’on ne cause pas la bouche pleine.
Pas le temps de répondre, elle a enfilé une sorte de peignoir de soie et est déjà dans l’escalier. Quelques instants plus tard, elle revient avec une miche de pain, un bout de sauciflard, du calendos et deux bouteilles de cidre.
L’appétit vient en mangeant, c’est bien connu, et je me surprends à tirer des crocs comme des baïonnettes… Ce qui ne m’empêche pas de bouillonner de la cafetière.
En fait, à part Lancier et Dubreuil qui doivent tout simplement pioncer auprès de leurs matrones, je veux bien parier que tous ceux qui ne sont pas murgés comme des porcs doivent être, un peu comme moi d’ailleurs, en charmante compagnie. Bref, pas loin, mais pas facile à réunir.
Puis, après un silence :
J’ignore si la boutade d’Adélaïde était sérieuse ou non, mais me le semble bien que Lepainsec l’a bel et bien prise au pied de la lettre. Elle éclate de rire.
Même si, cueilli par la réplique, je le vois farfouiller dans son froc pour en extirper un engin d’une taille ma foi fort honorable.
Comme je m’y attendais, elle sort ce qui est sans doute son refrain favori, mais cela ne l’empêche pas d’examiner l’oiseau sous toutes ses coutures et la forêt vierge qui l’accueille… Faut dire que les morbacs, c’est déjà pas drôle pour nous, mais pour une nénette qui vit du pain de fesses, c’est carrément un coup à mettre la clé sous la porte.
Déçu, Lepainsec ne l’est pas très longtemps… D’abord, parce que la miss vient de s’asseoir face à lui, ce qui offre un panorama trois étoiles sur une extraordinaire touffe blonde et surtout sur des lèvres ourlées de rose et délicieusement humides. Lui qui est déjà raide comme un piquet depuis le tout début, cela ne va pas arranger son affaire, d’autant qu’elle vient de plonger deux doigts au fond de son antre…
Il me faut quelques instants pour comprendre son cirque : en fait, elle vient de recueillir un peu de sa liqueur pour lubrifier la queue de l’autre zouave qui se demande déjà comment il va faire pour ne pas décorer le plafond avant même qu’elle ait commencé à l’astiquer. Pas manqué : une petite vingtaine d’allers et retours, et Lepainsec gicle alors tout ce qu’il peut en arrosant les cuisses de sa divine branleuse. Tout en essuyant avec un mouchoir la cargaison qui dégouline jusque sur le sol, elle ajoute, visiblement furibarde :
Je crois qu’elle est tellement furax qu’elle en serait bien capable !
Joignant le geste à la parole, la voilà qui se met à quatre pattes sur le paddock, les miches posées sur le drap et le fion vers les étoiles. Message reçu cinq sur cinq, comme ne disent pas encore les ouvriers des sémaphores…
Naturellement, je me présente aussitôt devant sa chatte dégoulinante, mais, à ma grande surprise, elle m’attrape le zgeg pour le présenter devant sa petite porte.
Le pote en question, inutile de dire qu’il ne sait plus où se mettre… Mais moi, par contre, je sais exactement où je vais la lui mettre ! L’instant d’après, je me retrouve fiché tout au fond de ses reins et Adélaïde ponctue chacun de mes assauts d’une foule de petits cris délicieux. Délicieux sans doute, mais sans doute aussi un peu forcés : à mon avis, il est aussi question de foutre la rage à notre ami qui tire plus vite que son ombre.
Elle tourne alors la tête vers moi, s’aperçoit qu’il y a un os dans le pâté… Et décide aussitôt de prendre le taureau par les cornes en s’astiquant derechef le bouton magique. Là, le résultat ne se fait pas attendre, je reprends mon pistonnage là où je l’avais laissé et, deux minutes plus tard, elle nous gratifie d’un superbe orgasme qui cette fois n’a visiblement rien de simulé et qui déclenche en moi une irrésistible envie d’arroser son divin fessier… Tandis que les giclées se succèdent, je tourne la tête, mais ce n’est que pour voir la porte se refermer. Lepainsec, vexé, vient de se barrer la queue entre les jambes.
Je jette un œil sur l’horloge fixée au mur… Tout comme le miroir, je me sais pas comment cela a pu arriver là vu que tout le monde sait que les deux coûtent joyeusement la peau des burnes, mais cela me permet de répondre.
Avant toute chose, il faut que je passe à la capitainerie, tout cela sent l’arnaque à plein blaze. Mais à cette heure-ci, le type qui s’occupe de ça est sans doute encore en train de bourrer sa rombière ! Rien ne presse.
Je n’ai pas fini ma phrase qu’Adélaïde, penchée sur mon bas-ventre, a repris son ouvrage. Oui, ben ma cocote, cette fois il te faudra attendre un peu, le matos risque d’être mou du genou pour une plombe ou deux.
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Lorsque je me pointe sur le quai, le petit havre est endormi. Quelques navires y sont mouillés, cargues sur vergues, hunes capelées, et sans fanaux. Et merde, est-ce le parfum capiteux d’Adélaïde qui m’embaume encore les naseaux ? Voilà que je me prends à copier la vraie littérature.
Un peu que je connais le gaillard… Il y a quelques années, cet empaffé m’a arnaqué d’une cargaison de rhum que j’avais chourée à un riche marchand qui n’y avait vu que tchi. J’ai revu l’Araignée par la suite, je lui ai bien pété la gueule, mais cela ne m’a pas rendu mon pèze pour autant.
L’amour que les pères ont pour leur progéniture est toujours assez touchant, sauf que je ne serais même pas plus surpris que ça que le polichinelle qu’elle a dans le placard ne soit même pas de l’autre couille molle… Parce que je connais la donzelle, si le nœud était une unité de distance et non de vitesse, je pense qu’elle ne serait sans doute pas loin de Terre-Neuve.
J’avoue que j’aimerais voir la tronche de Ducon 1er quand il se pointera la bite en fleur et qu’il s’apercevra que son bateau s’est fait la malle.
De fait, je n’ai pas longtemps à chercher, une petite dizaine de charrettes sont déjà prêtes à décharger leur cargaison lorsque je me pointe en face de ce fameux bateau. J’y remarque naturellement ceux qui viennent livrer la flotte, la bectance et le reste, mais aussi tout le bordel qui est la propriété de l’équipage. C’est une coutume, chaque marin a le droit de garder ses armes en plus de ses fringues et de son branle perso.
Je lui montre alors le bifton que j’avais roulé dans ma veste et que le type de la capitainerie m’a fait signer quelques minutes plus tôt.
Dans la marine, on a un principe : il ne faut jamais se plaindre que la marée est trop belle.
Tandis que l’équipage s’affaire, je me dirige directement vers la dunette… Pas vraiment en mauvais état, mais plutôt crade comme en témoigne ce pageot dans lequel un clébard n’y foutrait pas ses puces. De toute façon, ça doit être assez poilant d’essayer de roupiller là-dedans quand tu te prends un coup de tabac l Par contre, il y a quelques bouquins de navigation et les cartes marines m’ont tout l’air d’être à jour.
Sur le pont, je recroise Lepainsec.
Je me retiens de lui dire que des boulets, ce n’est pas ce qui manque à bord…
En fait, le coup de poudre à canon qui n’est en fait que de la poudre aux yeux, ça se serait déjà vu. Je préfère assurer mes arrières et éviter les coups pourris.
Quand je me radine, deux heures plus tard, la moitié des carrioles ont disparu.
Comme tout bon capitaine qui se respecte, je sais être exigeant avec mes hommes lorsque les circonstances l’exigent, mais le reste du temps, je pars du principe qu’ils savent exactement ce qu’ils ont à faire et qu’il est inutile de leur péter les burnes. Ça et jamais assez de rhum pour se prendre une murge, ça évite les embrouilles qui ont vite fait de te pourrir la vie à bord et de finir tous à la baille comme des cons.
Et c’est donc alors que j’ai le balai à la main que Cassius vient me voir. Il s’adresse à moi avec cet accent qui fleure bon son Afrique natale.
Il hausse les épaules.
En même temps, je connais son histoire : en dehors de la mienne, la seule autre expérience qu’il eut avec la marine était celle qu’on lui a fait subir à fond de cale sur un navire négrier. Il a vu comment on balançait les femmes et les enfants par-dessus bord sous prétexte qu’ils avaient moins de valeur que les hommes et qu’il n’y avait plus assez à bouffer ! Du coup, dans cet équipage fait de bric et de broc, mais où personne n’en a rien à péter de sa couleur de peau, il se sent bien. Et moi aussi, d’ailleurs, même si je sais très bien qu’il y en a quelques-uns de ces types que, même moi, je n’aimerais pas croiser au coin d’une rue par une nuit sans lune.
Une idée me traverse alors l’esprit… Et il s’appelle comment, ce rafiot ? Le zig de la capitainerie n’a pas moufté sur le sujet, et il n’y a plus rien de lisible sur sa coque. Pour attirer l’attention, je tire un coup de feu en l’air.
Comme souvent dans cas-là, un formidable brouhaha s’ensuit, mais sans qu’aucune proposition sérieuse n’en sorte vraiment… Jusqu’à ce qu’une main se lève, celle de Gueule d’Ange. Le silence se fait soudain.
En voilà encore un qui, malgré son jeune âge, a su attirer le respect des autres gars. Il faut dire qu’à bord, tout le monde connaît son histoire…
Orphelin à cinq ou six ans, il a été élevé – si l’on peut dire comme ça – par une bande de poivrots qui étaient déchirés du matin au soir et qui n’en avaient strictement rien à cirer de ce gamin. Un jour peut-être, l’état créera des orphelinats pour tous, mais là-bas, à Versailles, qu’est-ce qu’ils peuvent bien avoir à foutre de ce qu’endure le peuple ! Bah, faut pas s’inquiéter, dans quelques siècles, ce sera sans doute… exactement pareil.
Quoi qu’il en soit, sa vie a changé lorsque qu’une mère a commencé à demander à sa fille – qui, comme lui, devait alors avoir treize ou quatorze ans – d’aller lui porter une soupe tous les soirs, histoire qu’il ne pionce pas éternellement le ventre vide. Au fil du temps, elle a réussi à l’amadouer, à lui donner des rudiments de politesse et de vie en société, elle en a presque fait un garçon comme un autre…
Le problème, c’est que les années ont passé et les mioches sont devenus des jeunes gens… Et quand ça te gratte par où ça te démange et que c’est réciproque, ça finit forcément par des activités un poil plus adultes.
Bref, ce soir-là, il était en train de la tromboner joyeusement sous une porte cochère lorsque les couinements de la fille ont fini par rameuter trois types qui ont voulu s’inviter à la fête… La suite, c’est simple, il en a encore la balafre qui lui zèbre la gueule et qui lui vaut son joli surnom. Et quand il est sorti des vapes, divine surprise, la nénette était clamsée !
Là-dessus, les condés ont mené une longue enquête qui a duré au moins cinq minutes pour finir par en déduire que c’était lui qui l’avait zigouillée… Il y a eu une distribution de bourre-pifs et c’est comme ça qu’on l’a récupéré un beau soir de novembre, alors qu’il avait tous les pandores au train et que nous étions en train d’appareiller !
Dès lors, qu’est-ce qu’on pouvait faire ? Faire un crochet pour le débarquer dans le premier port venu ? Le balancer à la baille ? Non, c’est pas trop le genre de la maison, vu qu’on a tous un certain nombre de casseroles au cul et qu’on préfère oublier.
Au fil du temps, Gueule d’Ange s’est avéré être excellent marin, âpre à la tâche comme à la baston. Puis, un soir, alors que nous étions de retour à Brest, la discussion de trois types déjà bien éméchés dans un rade enfumé avait attiré mon attention : avec force éclats de rire, il était question d’un où ils avaient surpris un mec en train de troncher une jeune rouquemoute, qu’il n’avait pas voulu partager, et qu’ils avaient profité qu’il avait le dos tourné et encore le froc sur les godasses pour lui régler son compte. Là-dessus et assez curieusement, la fille ne s’était pas laissé faire, mais, à force de mandales et malgré ses cris et ses pleurs, ils avaient quand même réussi à lui passer dessus… Jusqu’à ce l’un d’eux se rende compte qu’une mornifle un peu plus rude que les autres avait cassé le cou de la rouquine.
J’avais alors demandé à Dubreuil, qui m’accompagnait ce jour-là, de retourner fissa au bateau, de ramener Gueule d’Ange par la peau du cul en lui précisant bien de ne pas oublier de se radiner avec la pétoire que je réserve aux grandes occasions, à savoir un antique tromblon que j’ai moi-même gaulé il y a bien longtemps sur un galion espagnol.
Histoire d’être bien sûr que les lascars ne se barrent pas, je leur avais offert un verre, puis deux…
C’est marrant, dès que tu rinces la gueule à un type, il ne se pose plus de questions ! Bref, une demi-heure plus tard, mes deux compères étaient de retour et je me souviens encore de la tronche des trois zigs, que la surprise venait de décuiter instantanément. Il y a eu des mots, des jurons, des c’est-pas-moi-c’est-l’autre, des j’y-étais-pas-je-sais-pas-de-quoi-tu-causes… Jusqu’à ce que le fracas d’un coup de feu mette fin à ce monceau de conneries dans un nuage de fumée âcre. Gueule d’Ange venait tout simplement de les dessouder d’un coup de tromblon, il savait que cela ne lui ramènerait pas pour autant sa dulcinée, mais, au moins, elle était vengée.
J’interviens alors.
En guise de réponse, l’ensemble des bras se lèvent… Avant que ne monte une formidable clameur. J’attends que cela se calme un peu.
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« C’est un fameux trois-mâts fin comme un oiseau, hisse et ho… »
Je ne sais pas pourquoi cette espèce de connerie me trotte dans la tête, vu qu’elle ne correspond à rien… De toute façon, avec la casquette en zinc que je me trimballe – plus ou moins comme tout le reste de l’équipage, en fait – je crois que le premier qui beugle, il a droit à la planche.
Quoi qu’il en soit, le temps est beau. Ciel bleu, vent de terre, l’idéal pour mettre les bouts… On a largué les amarres vers cinq heures, juste avant que le jour se lève. Le zig de la capitainerie a eu beau me dire la messe, j’ai quand même du mal à croire que cette histoire de navire qui te tombe comme ça du ciel ne finira pas à un moment ou à un autre par puer la merde… C’est d’ailleurs pour ça qu’on dropé aussi tôt, histoire qu’un minimum de gonziers viennent baver tout ce que l’on ne leur demande pas.
Les heures passent, la terre disparaît à l’horizon… Vers où file-t-on ? Logiquement, direction les Caraïbes, sans doute en passant par les Açores même si elles appartiennent à nos chers amis les Espagnols. La plupart des hommes ont consacré leur pognon à aller effacer leurs ardoises, histoire de bien pouvoir en créer d’autres, et ont claqué le reste en se faisant essorer les couilles.
Donc et fort de nos canons et du reste, ce serait bien le diable qu’on ne se dégotte pas un p’tit navire marchand de derrière les fagots avec lequel on parviendra bien à se faire un peu de fric en refourguant la cargaison. Tout est calme, peinard… Jusqu’à ce qu’un formidable raffut remonte depuis les cales. Je m’inquiète.
Pour toute réponse, je n’ai que des cris et des injures… Je ne sais pas ce qui se passe, mais ça bastonne en bas, et ça m’a l’air du genre sévère ! Je me lance dans l’escadrin pour aller voir, mais bien mal m’en prend : je me retrouve nez à nez avec une marée humaine et je me retrouve décalqué comme un con au mât de misaine.
Le spectacle que je découvre lorsque mes yeux parviennent enfin à se remettre en face des trous n’est pas piqué des hannetons : comme je m’en doutais un peu, mon équipage est en train de se foutre sur la gueule, ce qui est assez rare sur les navires que je commande, mais, que voulez-vous, il paraît que les traditions ont la vie dure. Sauf qu’à y regarder à deux fois, mes gaillards ne se castagnent pas entre eux, mais ont à faire à une petite quinzaine de filles tout aussi jolies les unes que les autres, mais également passablement enragées.
Et là, je n’en crois pas mes yeux : mon équipage est tout simplement en train de se prendre une rouste par une marée de gonzesses qui, bien qu’habillées en rose, en vert ou en bleu, sont surtout en train de distribuer les marrons ! Comme cette invraisemblable salade de phalanges commence à courir sur le haricot, je sors mon feu pour tenter de calmer le jeu, mais c’est à ce moment qu’une certaine crinière blonde attire mon attention.
J’ai déjà vu Adélaïde au-dessus d’un bonhomme, mais jamais comme ça… Elle ne s’appelle pas Jésus, mais pourtant elle distribue les pains comme une furieuse, le sang gicle, jusqu’à ce qu’elle tourne la tête vers moi. Qu’importe, je poserai des questions plus tard, il est urgent d’arrêter le massacre, tout ce petit monde va finir par se faire mal… Mon coup de feu claque, tranchant sur les fracas de la baston et du vent dans les voiles. Tout le monde s’arrête soudain, et… Trou noir.
Lorsque je rouvre les yeux, je me retrouve allongé les bras en croix au beau milieu du pont. En me voyant sortir des vapes, tout le monde semble soulagé.
J’ai beau avoir la théière comme une pastèque, je ne tarde pas à capter ce qui vient de se produire : en tirant en l’air, j’ai dû toucher une poulie, un réa ou une connerie du même métal et le tout, drisse comprise, m’est descendu sur la gueule… Dans la série « j’ai testé pour vous », c’est de l’inédit !
En temps normal, quand Gambille opère, il a un anesthésique en bronze : tu t’enfiles cul sec la moitié d’une bouteille de rhum et là, même s’il devait de cautériser une plaie au fer rouge, tu ne sentirais rien. Bon, au réveil, c’est pas vraiment vraiment la même musique, vu qu’à la douleur du charcutage lui-même s’ajoute une solide envie de dégueuler et surtout un mal de tronche façon empereur inca.
Seulement, là, faut d’abord que je parvienne à comprendre ce que ce troupeau de gonzesses fait à bord… Alors, tout en serrant les dents autant que je le peux, j’écoute ce qu’Adélaïde a à me dire.
Ça, c’est sûr que dessouder un notable, même par accident, ça le fait moyen… Surtout quand on a un passif dans le putanat.
Elle marque un point, Adélaïde. Une femme à bord, ça porte malheur, alors, un pacson comme ça, je vous dis pas !
Elle monte alors l’escadrin qui mène à la dunette et, de là-haut, harangue l’équipage.
Un brouhaha de réprobations parcourt l’assistance. Encore une fois, la seule matelote que l’on apprécie, c’est celle de poiscaille !
Là, subitement et Dieu sait pourquoi, l’attitude de tous mes gaziers change brusquement… Comme je viens de rejoindre Adélaïde sur la passerelle, je lui glisse à l’oreille :
En bas, évidemment, c’est une bronca comme pas possible… De nouveau, je me tourne vers elle.
Elle a un petit sourire en coin qui en dit bien plus long que n’importe quel discours…
Que répondre à une combine pareille ? Alors, je l’attrape sans ménagement et l’expédie sur le pont, où elle atterrit – parfaitement par hasard – sur une pile de caisses sur lesquelles elle fait mine de tomber à la renverse, la robe retroussée jusqu’au nombril. Son extravagante touffe blonde attire aussitôt tous les regards, intérêt qui ne se dément évidemment pas lorsque j’y plonge une queue aussi raide que le mât de misaine.
S’ensuit un pilonnage de forcené qui ne la laisse pas indifférente bien qu’elle ait toutes les peines du monde à s’accrocher au rebord de la caisse… Mais, malgré notre formidable cirque, tout cela ne met pas le feu aux poudres, personne ne nique autour de nous ! Je me penche alors à l’oreille d’Adélaïde :
Aussitôt me suis-je déboîté d’elle que je l’attrape de nouveau par le bras pour la retourner tandis que de l’autre, je viens de dégainer mon sabre d’abordage… Un frisson traverse alors l’assistance, qui se transforme bien vite en soupir de soulagement lorsque je tranche simplement les cordons qui fermaient le corset de sa robe.
Et quelques coups de reins plus tard, ma partenaire est à totalement poil et fait face à l’assistance… Et le frémissement qui s’ensuit n’est subitement plus le même ! D’autant que ces dames se sont enfin décidé à passer à l’attaque et que, c’est bien connu, un homme a rarement assez de sang pour irriguer à la fois le cerveau et la teub.
Mais pour Adélaïde, la fête est bien loin d’être finie, je me retrouve allongé sur le dos, elle à cheval sur mon dard, mais dans le sens inverse de la marche. Moi, je ne vois pas grand-chose à ce qui se passe, mais pour les autres, cela doit valoir le déplacement ! Voir cette fille tortiller du croupion pour s’empaler sur moi, voilà une vision à laquelle ils n’ont sans doute pas souvent été invités ! À tel point que cela donne quelques scènes assez cocasses, l’Artiste réussissant à se faire sucer comme un dieu sans même un regard pour sa pompeuse ou Dubreuil qui, sans doute en hommage à sa femme qui vient de lui pondre un chiard alors qu’il était parti depuis plus d’un an, bourre ce qui est pourtant une ravissante brunette sans même se rendre compte qu’elle est également en train de branler joyeusement un autre type…
Dans une telle situation, la logique voudrait que je ne m’occupe finalement que de ma gueule – et, à la rigueur, du plaisir de ma cavalière –, mais je ne peux m’empêcher de regarder un peu partout pour apercevoir par exemple les deux nénettes en train de s’affairer sur la pine d’âne de notre ami Cassius ou sur celle, nettement plus raisonnable, de Gueule d’Ange qui, assez curieusement, semble nettement moins se préoccuper de la mémoire de sa très chère Éloïse !
Un ventre vide n’a pas d’oreilles, mais je crois qu’une paire de couilles pleines n’en a pas davantage…
L’attention sur nous étant subitement retombée, je fais comprendre à Adélaïde qu’il serait bon d’arrêter les frais, d’autant que ma tronche recommence à me faire souffrir.
Si ce cirque continue, l’ambiance risque de devenir sympatoche… Il faudra quand même que tout ce petit monde pense à manœuvrer le bateau de temps en temps, sinon cela pourrait mal finir…
Lepainsec a la tronche d’ahuri du type dont on ne sait pas bien s’il a vu la vierge ou s’il vient de tirer son coup… Quoique le demi-litre de foutre gluant qu’il vient de laisser sur le ventre d’une superbe blackette me donne un élément de réponse. Quoi qu’il en soit et bien qu’il ait toujours la bite au vent, il n’en perd pas le nord.
Histoire de livrer mille batailles pour l’or du roi d’Espagne, comme il me semble avoir entendu quelque part.
Comme on dit souvent dans ces cas-là, j’ai déjà entendu des choses plus cons.
Ce qui se passe en fait, cela a un petit côté mouvement perpétuel : aussitôt qu’un type s’est dégorgé le poireau, un autre prend sa place avec la fille avec laquelle il était, sans s’occuper un seul instant que le terrain de jeu n’est plus forcément très frais. Mais tout le monde s’en fout d’autant que, dès qu’elles sont de nouveau libres, les filles s’empressent de se trouver une autre paire de couilles à essorer !
Du coup, et j’avoue que cela me fait moi-même de l’effet, à force de voir ces croupes d’enfer et ces paires de nichons se balader sous le nez, t’as le zgeg qui se redresse ! Et vlan, t’es prêt à remettre deux thunes dans l’bastringue !
Adélaïde, qui n’en perd naturellement pas une miette, remarque que ma teub est de nouveau au beau fixe.
Bien loin de ce à quoi je m’attendais, la voilà qui rassemble ses longs cheveux derrière ses épaules et qui prend la pose tout en se dirigeant vers Lancier – qui n’a pas des masses le moral depuis qu’il a trouvé sa bourgeoise au pieu avec la fille de la voisine – et surtout L’Abbé, tous deux étrangers à ce formidable foutoir. Pas la peine de finasser, elle est en train de faire en sorte qu’ils profitent à fond du panorama, et comme elle arriverait à faire bander un tronc d’église…
Là-dessus et quasiment à l’insu des deux gars, elle extirpe leurs goupillons de leurs frocs et, encore une fois sans qu’ils aient eu le temps de tergir ou de verser, ils se retrouvent tous deux avec un mandrin à enfoncer des clous. Dès lors, et sachant pertinemment que l’homme n’a pas assez de sang pour irriguer correctement le cerveau et la teub, la machine est en branle est plus rien ne peut l’arrêter…
Très vite, je me retrouve de nouveau allongé à même les planches du pont, Adélaïde empalée sur ma queue, mais cette fois elle me fait face… Enfin, si l’on peut dire, puisqu’elle est en grande discussion avec Carlos, qui ne semble pas comprendre plus que moi où elle veut en venir. La réponse, c’est ma queue qui me la donne, et il faut voir comment ! Naturellement, la miss est toujours aussi étroite et t’as toujours l’impression d’être monté comme un seigneur quand elle te donne l’occasion de visiter son entresol. Mais alors là, avec l’autre qui vient de s’inviter du côté de l’entrée des artistes, c’est un festival ! En plus, et comme si cela ne suffisait pas, pas la peine de bouger le petit doigt, c’est elle qui mène la danse… Moi qui avais si bien réussi à me maîtriser tout à l’heure, j’en ai la moutarde qui me monte au nez.
Sauf que, sauf que… fourrer sa queue dans la teuche d’Adélaïde, ça te donne une idée de ce que tu dois ressentir quand on te passe les brodequins ! C’est même là qu’on se dit qu’ils sont complémentent cons vu que si l’on remplaçait tous les Samson de France et de Navarre par des filles comme elle, t’obtiendrais tous les aveux que tu veux sans abîmer le matériel ! Et la question – qu’elle soit ordinaire ou extraordinaire – aurait subitement un tout autre intérêt pour le bon peuple… Oui, t’as raison, je débloque, j’ai sans doute du mal me remettre du coup que j’ai reçu sur la cafetière et la quiche qui fait de la roue libre.
Quoi qu’il en soit, pour envoyer la purée, tu peux toujours te la tailler en pointe ! Par contre, ce n’est pas tout à fait pareil pour notre troisième larron qui, lui, est en train de se faire pomper le dard juste au-dessus de ma tronche… Heureusement que l’essentiel des événements se situe plus bas parce qu’un trou de balle et une paire de couilles poilues qui balancent à dix centimètres de ton pif en guise de paysage, c’est pas l’extase !
Et encore le pire reste peut-être à venir… L’autre oiseau, là-haut, a du vent dans les voiles. Pendant un instant, j’ai l’impression que cette tête de nœud va m’envoyer sa cargaison en pleine tronche, mais, comme la professionnelle qu’elle est, Adélaïde a senti le coup venir et s’empresse de récupérer le tout dans sa bouche grande ouverte. Bien lui en prend, je n’ai même pas droit à quelques éclaboussures… Pendant ce temps, l’explorateur de son trou de balle n’en peut plus à son tour, et vogue la galère ! Du coup, je me retrouve un peu plus libre de mes mouvements et j’en profite alors pour faire enfin ce dont j’ai envie depuis un bon moment déjà : attraper Adélaïde par les hanches pour mieux la pilonner tout en restant en dessous, ce qui m’était impossible jusque-là.
Et vlan, passe-moi l’éponge… Et un p’tit voyage en haute mer pour la donzelle, un ! Son regard si bleu se trouble brusquement et là, sans crier gare, elle largue les amarres… Et comme je n’ai pas véritablement envie de rester sur le quai, une lame de fond surgit de mes reins et emporte tout sur son passage. Quelques instants plus tard, elle s’amuse du flot de semence qui s’écoule de son entrejambe.
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À chaque fois que c’est possible – comprendre que le temps est à peu près clément et n’exige pas qu’une armée de gugusses aille faire les cons au milieu des vergues et des bômes – j’essaie de faire en sorte que nous mangions tous ensemble et en même temps sur le pont. Évidemment, quand le temps est pourrave, chacun graille quand il peut et où il peut ! C’est Lepainsec qui ouvre le feu.
Tu parles ! Avec le numéro de claquettes qu’elles nous ont servi, le contraire serait étonnant ! Et d’ailleurs, il me tarde que vienne le soir pour essayer mon nouveau paddock avec Adélaïde. Cependant, il me semble important de mettre les choses au clair.
Manitou, qui ne parle pourtant jamais beaucoup, lève la main.
Il a pas tort, notre ami… C’est sûrement pas dans leurs robes à la con qu’elles vont pouvoir grimper dans les haubans. Adélaïde intervient.
Puis, après un sourire :
Éclat de rire général. Je reprends la parole.
Même s’il a parfaitement raison, j’ai quand même le sentiment qu’il a de la suite dans les idées fixes.
Le problème, c’est que quand bien même les fafs seraient parfaitement clean, si un autre navire se pointe et qu’ils sont cinquante à ferrailler dans tous les sens, ben t’as un poil l’air con. Du coup, je préfère prendre les devants et éviter de courir après les emmerdements.
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Ce qu’il y a de chiant avec cette partie de la Bretagne, c’est que tu peux toujours te l’astiquer pour trouver une crique pour t’y planquer… Mais à côté de ça, et vu que c’est quasiment que des plages, t’es pas obligé de grimper les falaises comme si t’étais né à Grenoble.
La nuit est presque noire, seule la lune irise quelque peu la flotte et encore, uniquement quand les nuages ne viennent pas y mettre leur grain de sel. J’ai fait jeter l’ancre de la Belle Éloïse à quelques encablures de la côte en espérant que personne ne nous remarquera. De toute façon, le Jolly Roger est bien planqué à fond de cale, ça devrait éviter les questions hasardeuses si d’aventure les archers maritimes se radinaient pour nous chercher des noises.
J’ai préféré que Lepainsec reste à bord au cas où il y aurait du grabuge, et seule Adélaïde m’accompagne. Elle a tressé ses longs cheveux en une énorme natte et, avec son ample chemise qui cache ses formes et son froc qui lui arrive au mollet, elle fait tout à fait couleur locale… Même le manteau qu’elle s’est bidouillé avec un vieux morceau de voile est raccord. C’est bien la première fois que je la vois complètement habillée.
Encore deux coups de rame et la chaloupe se pose sur le sable. Nous passons tous deux par-dessus bord, et j’essaie de l’amarrer tant bien que mal à un énorme rocher.
J’ai beau essayer de penser à autre chose, chaque percée de la lune au travers des nuages me donne l’occasion d’observer deux ravissants petits nichons qui gigotent sous le tissu. Plusieurs fois, je suis à deux doigts de l’arrêter pour lui en coller une tournée à la sauvette – je sais qu’Adélaïde ne demanderait que ça –, mais l’heure tourne et il faut absolument que nous et notre rafiot soyons hors de portée lorsque l’aube se pointera.
Encore quelques centaines de mètres à slalomer dans la lande et nous y voilà… À ma grande surprise, la lourde est grande ouverte, nous entrons, mais il n’y a personne. Je sors mon briquet à étoupe : la flamme n’éclaire qu’à trois pas, mais elle nous permet de nous diriger dans ces couloirs sans fin. Soudain, quelques rires parviennent jusqu’à nous.
Au bout du couloir, il y a le cloître, sans doute bien utile par mauvais temps même si tout le monde sait qu’il ne vase jamais en Bretagne. Au milieu de la pelouse, il y a un feu de camp autour duquel les sœurs se sont posées… Mais il me faut un moment pour comprendre ce que deux autres sœurs foutent debout en tenant leurs torches : elles en éclairent deux autres, à oilpé sur le gazon, et elles sont précisément en train de se le brouter, ce foutu gazon !
De loin et dans la lueur vacillante des flambeaux, je peine à voir l’assistance… Par contre, pour ce qui est de la séance de grougnotage, je n’ai aucun doute ! Ma très chère Anna est en train de subir l’assaut de sa comparse qui s’est assise derrière elle, face à la petite troupe, et tout ce petit monde assiste à une cavalcade pas piquée des vers ! Deux doigts lui pilonnent la chatte tandis que l’autre main lui trifouille le bouton magique. Je ne sais pas depuis combien de temps ce numéro de cirque est commencé, mais quelque chose me dit que j’en connais une qui ne va pas avoir besoin de prier pour atteindre l’extase ! Les yeux mi-clos, elle braille tout ce qu’elle peut, en réclame encore un peu plus jusqu’à ce qu’elle se prenne un panard terrible qui fait trembler les murs, le tout sous les applaudissements des autres nénettes qui n’en ont naturellement pas perdu une miette. Adélaïde me glisse à l’oreille.
Sur ces entrefaites, ce qui m’a tout l’air d’être un nouveau genre de communion vient de reprendre, mais les rôles se sont inversés, et c’est Anna qui est cette fois à l’ouvrage. À genoux dans l’herbe, le cul bien l’air et les pattes écartées, elle ne planque absolument rien de son adorable fion et de sa case trésor comme pour mieux s’affairer entre les cuisses de sa partenaire… Et les gémissements qui ne tardent pas à apparaître ne parviennent pas à couvrir ce florilège de bruits mouillés. De là où je suis, je ne peux pas précisément dire ce qui se passe, mais j’en ai quand même une petite idée : elle doit la léchouiller entre les lèvres, s’attarder sur le bouton magique, lui fourrer à l’occasion un doigt ou deux dans l’enfer – vu que Satan l’habite, c’est bien connu – et peut-être même lui attraper les escalopes entre les dents histoires d’alterner plaisir et douleur. Soudain, la fille se met à hurler et ma sœur n’a que le temps de se redresser, puisqu’un long jet de je ne sais quoi et provenant de la teuche de sa victime vient de la frapper en plein visage. Surpris, je me tourne vers Adélaïde.
Ben voyons ! Et tout cas, ça n’a l’air de gêner personne, puisque broute-mi et broute-moi sont de retour… Et de nouveau, un cri strident résonne dans l’édifice. Il n’y a pas à dire, si l’on entendait plus souvent ce genre de cantique, j’irais sans doute plus souvent à la messe.
Seul petit souci, c’est qu’Adélaïde vient de virer ce qui devait être un vase d’un coup de coude, et il explose sur le sol… L’ensemble des regards se tourne alors vers nous alors que la lumière se fait. Je connais ce système, je l’ai déjà vu en Égypte où ils utilisent ça depuis Mathusalem : un réseau de petites goulottes pleines d’huile et taillées dans la pierre… Quand on l’allume à un bout, le feu se propage tout autour de la pièce et c’est plein feux sur la vedette.
L’une des premières à se précipiter vers nous est Anna… Et elle n’en a visiblement rien à carrer d’être à poil devant moi.
Désarçonnée par le naturel de ma frangine, Adélaïde ne moufte même pas, comme si elle se doutait qu’Anna a eu une autre vie avant de finir dans les ordres et que, Dieu sait comment, elle est capable de détecter un flic, une pute ou un maquereau rien qu’à les voir. Y a pas à tortiller, ce genre de faculté ne s’acquiert pas en traînant ses guêtres dans les beaux quartiers et quelque chose me dit que ma sœurette y a autrefois déroulé du câble… Je ne serais d’ailleurs pas plus surpris que ça qu’elles aient œuvré toutes deux dans le même corps de métier, ce qui explique que les deux filles se fassent la bise comme si elles se connaissaient depuis des lustres.
Lorsqu’elle revient, quelques instants plus tard, elle est toujours à poil… Mais apparemment, tout le monde s’en branle dans la joie et la bonne humeur. The superious mother me tombe dans les bras.
Je lui explique alors brièvement le sac d’embrouilles dans lequel on est : ce foutu rafiot acheté pour des nèfles, les filles qui se sont barrées de leur claque et dont l’une au moins est poursuivie pour meurtre, et puis le problème de bectance alors que, pour le moment, il est un tantinet risqué de se pointer la gueule enfarinée dans un port.
Je sors de ma fouille une poignée de pièces d’or.
En fait, pas de quoi fouetter un chat : elle et ses frangines récupèrent un chariot ou deux, y chargent quelques caisses de boustifaille que l’équipage rapatrie dans des chaloupes sur la plage, et vogue la galère.
J’espère bien qu’il me le rendra ! Avec le pognon que je leur ai filé, ils vont avoir de quoi grailler pour un moment et il en restera largement assez pour régaler pas mal de pauvres. Cela dit, je ne sais pas si Dieu existe, mais je sais qu’à cet instant précis, il doit être train de se fendre la gueule devant le numéro de claquettes que je suis en train d’exécuter.
Demain ? Sauf que Lepainsec a pour consigne de décarrer si Adélaïde et moi ne revenons pas avant l’aube. Une idée me traverse l’esprit.
Là-haut, l’air frais du large est une bénédiction. Et, comme je l’espérais, je vois nettement la Belle Éloïse ancrée au large et qui se balance au gré du sac et du ressac. Une lampe à huile, et en voiture : tous les marins du monde savent s’envoyer des bafouilles à l’aide de signaux lumineux. Reste à espérer qu’à bord, ils n’ont pas tous la bite à la main ou bien au chaud dans les frangines du bord.
Quelques minutes s’écoulent, la réponse me revient enfin : message compris, ils vont se barrer au large histoire de ne pas être repérés et rappliqueront demain soir à la nuit tombante.
On peut rien du tout, en vrai ! Et pour cause, les deux greluches sont en train de se rouler des galoches à n’en plus finir tandis que l’exploration de l’autre est déjà bien attaquée, comme en témoignent ce bout de cul et ces petits nichons qui brillent d’un blanc éclatant sous les rayons de lune.
Sans compter que les gueulantes qui ne vont pas manquer de se pointer à l’horizon risquent d’être nettement moins discrètes sur ce point haut plutôt que bien à l’abri des murailles de l’abbaye.
Une fois en bas, la logique voudrait qu’elles réduisent quelque peu la voilure… Mais c’est tout le contraire qui se produit puisque les deux s’en vont rejoindre l’espèce de scène à ciel ouvert où les deux sœurs continuent de porter les flambeaux. La séance de grougnotage reprend de plus belle, sous les yeux ébahis des autres religieuses, qui, à défaut de capter si c’est du lard ou du cochon, n’en perdent pas une miette.
Ah, tiens, y a du nouveau par rapport à tout à l’heure, dans la mesure où tout ce petit monde vient de se retrousser. Bien que, selon l’expression bien connue, l’on n’y voie pas beaucoup plus que dans le trou du cul d’un nègre – celui des blancs étant forcément plus lumineux, c’est évident – j’ai quand même droit à une collection de sourires verticaux de tous les genres : des foncés, des clairs, des touffus, des clairsemés, des fermés comme des huîtres et d’autres qui bâillent aux corneilles… Cependant, tout ce petit monde a un point commun, celui de dégouliner comme un navire en pleine tempête. Et pour cause, il faut croire que la démonstration des deux nénettes est en train de faire son petit effet ! Tout ce petit monde fourrage dans son entrejambe – ou dans celle de la voisine, des fois qu’elle s’ennuierait – et bien vite, les bruits mouillés et les gémissements parviennent à couvrir ceux des deux instigatrices de ce petit manège. Et je découvre qu’au petit jeu de celle qui gueulera le plus fort, ma frangine n’est décidément pas la dernière !
Le seul souci, c’est quand l’une des religieuses tourne ses yeux vers moi… Ce n’est pas une étincelle que je vois dans son regard, c’est un véritable brasier ! Pas le temps de comprendre, je me retrouve aussitôt les bras en croix, maintenu au sol par quatre furies en cornette et la bite au vent. Et aussitôt, c’est un festival. À tour de rôle, elles viennent toutes s’empaler sur moi tout en s’astiquant le bouton magique, et à défaut de véritablement décoller, elles braillent leur bonheur à n’en plus finir ! Pourquoi est-ce que je ne gicle pas une bonne fois pour toutes, histoire de débander un bon coup et mettre fin à ce supplice ? Parce que l’une d’entre elles me serre les couilles comme dans un étau et qu’à chaque fois que le vase est prêt à déborder, elle me les tord jusqu’à ce que cela se calme…
Combien sont-elles à venir se faire reluire sur mon poireau ? Bonne question ! Et j’ai bien l’impression que si l’habit ne fait pas le moine, la bite fait bien la religieuse… La plupart d’entre elles se contentent de relever leur robe et de me faire redécouvrir toute leur collection de chattes, et en place pour le quadrille ! Tout ce que j’en sais, c’est qu’au bout d’un moment qui me semble interminable, celle qui m’écrasait les burnes relâche enfin sa pression et là, larguez les amarres ! La douleur est invraisemblable, ce n’est pas seulement du foutre qui sort de ma queue, mais mon foie, mes reins, mon cœur et tout le reste… Extinction des feux !
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Combien de temps suis-je resté dans les vapes ? Je n’en sais foutrement rien, mais tout ce que je peux dire, c’est qu’il fait jour… Et que c’est le claquement des roues des charrettes sur les pavés disjoints qui m’a sorti du coaltar. Anna, qui a enfin trouvé le temps de renfiler sa robe de bure, vient vers moi.
Je tourne la tête, inquiet de ne pas voir Adélaïde.
Un coup d’œil à la vigie – pardon, en haut du clocher – me confirme que la Belle Éloïse a bel et bien mis les voiles. Reste plus qu’à espérer que ce cher Lepainsec n’ait pas envie de me la jouer à l’envers. Bon, en fait, ça ne le mènerait pas loin, à moins qu’il se décide à balancer la moitié des gars au bouillon !
Sur le chemin caillouteux qui mène chez les bonnes sœurs, les chariots se succèdent. De la viande et du poisson séché ou salé, des légumes secs, des caisses complètes de biscuits, mais aussi une tapée de poules et même quelques cochons. Je distingue même dans quelques cages quelques bêtes à longues oreilles, qui sont pourtant censées porter malheur à bord d’un navire !
Je ne sais pas d’où vient cette connerie – d’autant que les Arabes ou les Chinois s’en foutent, de cette superstition – vu qu’on a jamais vu de lapin bouffer des cordages comme le veut la légende ! Par contre, ce que j’en vois, moi, c’est que si tu te démerdes bien et vu qu’ils passent leur temps à niquer et à niquer encore – presque autant que nous, en fait – t’as à peine fini d’en bouffer trois ou quatre qu’une femelle en a déjà pondu une dizaine… Et ça, ça change de l’ordinaire et du pain fourré aux charançons ou parfumé à la pisse de rat.
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Le transfert s’est bien passé… Cette fois, cap sur les Caraïbes ! Bon, en fait et au vu de l’ambiance qui règne à bord, personne n’est pressé d’aller se friter avec les Espingouins… D’autant que j’ai décidé de mettre cap au sud, direction le large de l’Afrique avec dans l’idée d’aller choper les alizés, non pas tellement dans le but d’arriver plein pot sur notre destination, mais davantage pour profiter des températures agréables de ces contrées.
Depuis notre second départ, l’on ne voit pas des masses notre cuistot ni la Gambille. Je ne sais pas où ce dernier a été pécher cette combine, mais il s’est fait fabriquer des bocaux en verre sur lesquels il flanque un couvercle en métal avec un joint taillé dans une drôle de matière qu’il appelle caoutchouc et qu’il fait venir Dieu sait comment du Siam ou de pas loin. Bref, quel que soit son bidouillage, la bidoche ou les légumes qui d’habitude sont nazes au bout d’une semaine sont encore bons trois mois plus tard !
Mais il n’y a pas qu’à la cuistance qu’il se passe des choses bizarres… Ce qui faisait tout le charme de l’Espadon Moucheté ou de la Pomme d’Or, ce n’était pas tant la beauté des filles – quoique, dans le lot, il n’y a pas beaucoup de thons –, mais la certitude de ne pas se coltiner des morpions ou des poux. Seulement, pour que tout ça s’éternise, il vaudrait mieux que ces demoiselles ne soient pas les seules à se laver le derche !
Du coup, deux ou trois fois par semaine, les deux immenses demi-barriques abandonnées par les anciens proprios et dont personne ne connaît l’usage sont remplies d’eau de mer et c’est opération savon et décrassage… Au départ, tout cela n’a pas beaucoup plu à cette équipe de blaireaux pour qui la flotte, même douce, n’est même pas bonne dans ses godasses ! Mais comme ce sont les filles qui ont pris l’affaire en main et qu’un gros récurage de la teub ne se termine jamais sans un petit polissage du chinois – sans doute histoire de vérifier que le matériel fonctionne – plus personne ne proteste.
Mais il y en a un qui, jusque-là, est toujours passé au travers : Jésus. Non, ne cherchez pas, son surnom ne vient pas de sa barbe ni de sa tignasse, mais de son aversion pour l’eau. C’est bien simple, si on le balançait à la baille, il serait foutu de marcher sur l’eau !
Mais là, même si personne ne pipe un mot, quelque chose est en train de se goupiller, j’en jurerais. Déjà, il y a eu ces quatre filles que j’ai vues s’habiller de manière inhabituelle, fichu sur la tête et chemisier fermé, et cette bouteille de rhum oubliée comme par hasard dans le gourbi où il pionce habituellement… Et elles ont sagement attendu que la boutanche soit bien entamée pour passer à l’attaque. Forcément déjà bien berzingué, l’autre zig n’a rien capté qu’il est déjà à poil, le cul dans le baquet d’eau froide, et que les nénettes ont commencé le récurage ! Et quand je dis récurage, je n’exagère même pas puisqu’elles ont sorti les brosses de chiendent que l’on utilise d’habitude pour décrasser le pont…
Déchiré ou non, il n’apprécie pas ça, le bougre ! Seulement, à partir du moment où la jolie Cynthia lui tient le chibre et qu’elle l’astique furieusement pour l’amadouer – à moins que ce ne soit pour décoller l’épaisseur de crasse qu’il doit y avoir sur l’engin en question – il se tient à carreau !
Soudain, une autre de ces apprenties blanchisseuses sort un coupe-chou… Un silence inquiet se fait brusquement pour se terminer en un immense éclat de rire ! La nénette en question vient de s’attaquer à cette invraisemblable tignasse et c’est par poignées que ce mélange de crins et de Dieu sait quoi va rejoindre ses frusques mises à brûler dans le brasero. Non, quand c’est vraiment trop dégueulasse, faut prendre le mal à la racine !
La barbe suit, puis les sourcils, jusqu’à ce qu’il se retrouve avec un zob aussi déplumé que celui d’un gamin. Là, les filles lâchent enfin leur attirail pour s’occuper d’une manière plus classique de ce zgeg qui, sans doute tout surpris de voir la lumière, n’en est pas moins à la verticale.
Les trois quarts du temps, quand on en est là, il y en a toujours une pour venir te pomper le poireau histoire de bien te mettre en condition avant que t’ailles lui visiter la passerelle, la cale, la dunette arrière… Mais là, peau de zob ! En fait, elles se relaient pour l’astiquer de manière nettement plus classique. Ce qui m’étonne le plus c’est que, malgré qu’elles n’aient d’habitude pas froid aux yeux – ailleurs non plus, mais c’est une autre affaire – et qu’une giclée de foutre, même en pleine quiche, ne leur a jamais fait peur, elles semblent se tenir à l’écart… Cependant, le traitement de choc semble bien faire son petit effet, comme en témoigne notre ami Jésus qui sait manifestement de moins en moins où il habite ! Naturellement, avec un traitement pareil, que voulez-vous bien qu’il se passe ? Notre homme finit par se crisper, et un long jet jaune dégueu part vers le ciel avant de retomber dans l’eau…
Adélaïde, accoudée au bastingage à côté de moi, n’en a naturellement rien manqué.
Puisque la professionnelle a parlé, il est temps pour moi d’aller jeter un œil sur les cartes et de ressortir le sextant, histoire de vérifier que l’on n’est pas en train de mettre le cap sur la chapelle Sixtine. Il y a peu de chances, mais je sais que, lors de l’un de mes premiers voyages où je n’étais que mousse, notre capitaine s’était tellement mélangé les pinceaux qu’on s’était retrouvés tankés en Baie d’Along alors qu’on était censé débarquer au pays des geishas et qu’on avait les boules…
Mais mes calculs sont interrompus par L’Abbé, qui a élu domicile dans la vigie pour essayer de profiter d’un peu de repos. Ah, la vie est pas toujours facile quand on est à la fois prêtre et équipé d’un mandrin hors normes ! De là-haut, il gueule.
De fait, un coup d’œil dans la lorgnette et j’arrive enfin à distinguer ce que je pense être deux femmes qui n’en finissent plus de gesticuler. Sur le pont de l’autre navire, ça n’a pas l’air mal non plus… J’ai l’impression qu’il s’agit en fait d’un navire négrier et que l’équipage est en train de s’en prendre plein la couenne, le vent se chargeant de nous transmettre l’écho des coups de flingue et le cliquetis de la ferraille. De temps en temps, deux ou trois blacks tombent à la baille mais cela les calme pas, bien au contraire…
En fait, je connais le topo, vu que ça s’est déjà produit un paquet de fois : pour une raison quelconque, l’un des quidams a dû ouvrir sa gueule en imaginant que personne dans sa marchandise ne captait le français. Qu’ils soient hommes, femmes ou enfants, les noirs devaient bien se douter qu’on n’allait pas leur offrir des fleurs à l’arrivée rien qu’à voir leurs conditions de transport – y a pas à dire, attachés par des fers à fond de cale, éternellement dans la pénombre et dans une chaleur étouffante, à six ou sept au mètre carré et baignant dans la merde, c’est pas tout à fait le confort trois étoiles – et ils ont fini par réussir à se libérer de leurs chaînes et sont allés se plaindre du service à bord… D’où ce léger malentendu qui semble en passe d’être résolu.
Et puis, même si je rechigne à utiliser la méthode, cela peut faire une bonne monnaie d’échange. Une fille pour un droit d’asile, c’est ce que ça coûte.
Mais en attendant que les gars mettent la chaloupe à l’eau et aillent rechercher les deux naufragées, j’ai largement le temps de trouver une soluce à un souci qui devient de plus pressant : Adélaïde, comme d’ailleurs la plupart des autres filles, s’est résolue à abandonner le froc, la veste et la chemise pourtant confectionnés avec tant de soin pour enfiler, température aidant, ce que les dames de la haute enfilent sous leurs robes… En fait, une sorte de jupon plutôt léger – pour cause, elles les mettent habituellement par paquet de douze – et d’un bustier boutonné généralement par-devant. Seulement et on s’en doute, pour cavaler dans les coursives ou grimper dans les haubans, c’est loin d’être le pied ! Du coup, tout ce petit monde a décidé de couper tout cela au genou, et le résultat est assez saisissant.
Un embrun ou un paquet de mer un peu plus maousse que les autres, et les demoiselles se retrouvent trempées, avec les conséquences que l’on imagine sur cette fine étoffe blanche. Un coup de vent fripon et elles se retrouvent retroussées jusqu’à la taille ! Et quand il s’agit d’aller hisser les vergues, alors là, c’est carrément la fête !
Comme si tout cela ne suffisait pas, il se trouve que cela fait assurément un bon quart d’heure qu’Adélaïde me tourne autour en minaudant et quelque chose me dit qu’il serait bon de m’occuper de son cas avant que le feu qu’elle a au cul n’embrase tout le bateau, ce qui serait problématique dans la marine en bois qui, comme chacun sait, ne donne pas forcément une santé de fer.
Bref, avant qu’elle n’ait eu le temps de comprendre, je l’entraîne bien vite dans mon carré et, la saisissant par la taille, la dépose vivement sur la table à cartes. Son regard est sans équivoque : elle se régale déjà de me voir ouvrir mon falzar et de l’embrocher séance tenante… Seulement, moi, j’ai flairé une autre entourloupe : à force d’apercevoir la pointe de ses nichons tendre le tissu, à force de voir son cul se dessiner au travers de l’étoffe et sa chatte apparaître au moindre coup de vent, le locataire de mon grimpant a eu le temps de monter en pression et si d’aventure j’avais l’idée saugrenue de la punaiser sur la planche comme elle l’espère, j’aurais bien vite fait de décorer son entresol sans même qu’elle ait eu le temps d’y prendre plaisir. Certes, elle a dû être habituée à ce genre de traitement du temps où elle officiait à l’Espadon Moucheté mais ce n’est pas ce que j’ai dans la tronche à cet instant précis.
Relever sa robe ? Pas la peine, le courant d’air l’a déjà fait pour moi, à moins que ce ne soit Adélaïde elle-même qui s’en soit chargé. Quoi qu’il en soit, les compas largement écartés, son adorable toison blonde s’ouvre sur une chatte visiblement dégoulinante de désir. Y flanquer deux doigts et l’expédier tutoyer les anges en deux temps trois mouvements ? Voilà une idée qu’elle est bonne ! Seulement, moi, j’ai un autre plan…
Je m’agenouille bien vite et, sans lui laisser le temps de souffler, je me mets aussitôt à lui butiner le sillon magique. Ma langue se glisse entre ses lèvres et je n’ai que le temps de m’attaquer à son petit bouton qu’elle se crispe déjà et me chope les cheveux à pleines mains. Et là, mon père, va réussir à te décoller de sa case trésor ! Dès lors, je n’ai que deux solutions : abandonner la partie quitte à clamser entre ses jambes, ou bien essayer tant bien que mal de l’expédier là-haut avant de finir aussi bleu qu’une veste de pandore.
Seulement, je commence à me sentir aussi à l’aise qu’une poiscaille échouée sur le pont ! Alors, pour lui faire lâcher prise à tous points de vue, je lui enfile ces fameux deux doigts aussi loin que possible et commence à la pistonner dans la joie et la bonne humeur. Le verdict est sans appel : elle desserre son étreinte et s’effondre aussitôt sur la boîte à sextant qui s’en va rejoindre les deux bouteilles de rhum que je me réservais pour ma consommation personnelle.
Je m’occuperai de tout ce merdier plus tard, pour le moment j’ai autre chose à faire ! Et quand je dis à faire, ce serait plutôt à foutre vu que là, tout de suite, j’ai une terrible envie de dégainer l’arbalète et de le flanquer ce magistral coup de bite qu’elle espère depuis tout à l’heure. Mais il faut croire que, pour elle aussi, il y avait le feu au lac puisqu’elle se prend aussitôt un panard aussi explosif que peu discret.
Quelques instants plus tard, c’est à mon tour d’y avoir droit… Elle m’a expédié sur le pageot et me pompe avec une telle vigueur que j’en vois déjà des étoiles ! Pourtant et pour Dieu sait quelle raison, l’heure d’envoyer la purée n’est pas près d’arriver. Du coup, je la laisse soigneusement me malaxer les burnes tout en me branlant comme une furieuse. De toute façon, à un moment ou à un autre, je sais qu’elle va de me reprendre en bouche ou faire courir sa langue sur mon frein et là, ce ne sera plus la même musique.
Le jeu dure un bon moment, jusqu’à ce je décide de passer à autre chose et, sans doute un peu déçue de ne pas être parvenue à ses fins, Adélaïde se laisse faire docilement. Retour sur la table à cartes, les nibards posés sur la planche, elle va voir ce qu’elle va voir, elle va avoir intérêt à s’accrocher au bastingage ! Mais ça, ce serait sans compter sur l’esclandre qui est en train de se produire sur le pont. Lepainsec, sans s’étonner une seule seconde de me voir la bite à la main et Adélaïde les pattes écartées, s’adresse à moi.
Tout en tentant de rentrer la bête à l’écurie, je cavale jusqu’à la coursive pour comprendre la raison de tout ce bordel. Là, en bas, les deux naufragées sont montées à bord… De toute évidence, il s’agit d’une aristo et de sa servante et si cette dernière se tient soigneusement à l’écart, l’autre, l’ombrelle bien en main, est en train de nous chier une pendule à treize coups sous prétexte que l’accueil à bord n’est pas à la hauteur de Sa Seigneurie. Tu parles ! Si je n’interviens pas très vite, l’équipage ne va pas tarder à aller lui faire vérifier si les requins auront plus d’égard pour son sang bleu. Furax, je gueule.
Elle me balance ça sur un ton méprisant comme si j’étais son larbin… Subitement, je comprends mieux la réaction des gars et je me dis qu’à défaut d’aller nourrir les squales, je pourrais bien, après lui avoir collé son pébroque dans le valseur, lui offrir un petit séjour tous frais payés à fond de cale où elle aura tout loisir de taper le carton avec les rats.
Adélaïde me glisse à l’oreille.
Elle ne me laisse même pas le temps de répondre qu’elle est déjà sur le pont. Elle s’adresse alors à quelques autres filles, mais je n’entends pas le sujet de leur conversation, avant de se diriger vers la fameuse duchesse, tout sourire.
En guise de réponse et sans se départir de son sourire, Adélaïde lui balance une mandale à décorner un bœuf, et notre duchesse se retrouve sur le cul au beau milieu du pont. Elle n’a pas le temps de comprendre que les quatre autres filles l’ont déjà chopée et qu’elle se retrouve allongée sur une caisse, et les bras en croix et solidement maintenue. Adélaïde, quant à elle, se contente de fixer le regard de cette très chère Marie-Chantal avec un sourire amusé. A-t-elle la moindre idée de ce qui lui pend au nez ? Non ? Eh bien, elle devrait, vu que notre amie vient de lui expédier ses jupons sur le pif, ce qui laisse apparaître accessoirement et en vrac deux forts jolis compas, une paire de bas blancs tout juste maintenus par un nœud de soie rouge ainsi qu’une ravissante chatte impeccablement taillée et d’un noir de jais. Y a pas à dire, on ne s’emmerde pas dans la haute.
L’autre n’en finit plus de brailler des injures dans les esgourdes, et il est fortement question de galère, de fouet et autres joyeusetés, mais Adélaïde n’en a strictement rien à cirer : elle vient de plonger son visage entre les cuisses de la duchesse et même si je ne peux pas véritablement voir ce qui se passe, j’en ai quand même une petite idée… Là-dessous, cela doit grougnoter sévère ! Tout cela ne dure en fait que quelques instants, juste le temps pour notre amie de se relever, toujours le sourire aux lèvres.
Deux orgasmes plus tard, madame la duchesse a nettement moins fière allure… De son somptueux accoutrement, il ne lui reste plus que ses bas. Les yeux hagards, elle quémande de l’eau. Grand prince, je réponds.
Pendant ce temps, Adélaïde revient vers moi, tout sourire.
Voilà une idée qu’elle est bonne… C’est d’autant plus facile qu’elle attend, tranquillement adossée au mât de misaine.
L’autre n’en revient pas… Il faut dire que c’est peut-être la première fois qu’on s’adresse à elle de la sorte.
L’autre, bien entendu, ne sait plus où se mettre, rouge comme un feu d’entrée de port.
Schéma classique, en vérité. Un départ de Nantes avec un bateau chargé de diverses merdouilles destinées à être échangées contre des esclaves sur les côtes du Sénégal. Ensuite, cap sur l’Amérique avec l’intention de vendre cette marchandise qu’ils considèrent moins que les pierres qui leur servent de lest. Tous les matins, visite des cales, foulard sur le nez à cause de la puanteur où, entre deux coups de trique, l’on vérifie qui est mort et qui ne l’est pas… Et au moindre soupçon de maladie, direction le bouillon ! C’est au cours de l’une de ces opérations de « nettoyage » que deux blacks ont réussi à se faire passer pour morts et à désarmer les matons. Inutile de s’attarder sur la suite, j’en ai déjà une petite idée.
De toute façon, il est grand temps pour Adélaïde et moi de finir ce que nous avions si bien commencé… Elle n’aura rien perdu pour attendre, et je compte bien lui prouver derechef.
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C’est la fin d’après-midi… La mer est calme, l’air chaud sans être brûlant, nous naviguons toutes voiles dehors par vent arrière et Adélaïde a disparu. Que fait-elle en ce moment ? Je n’en sais rien, mais c’est peut-être mieux comme ça : à force de me tirer sur l’élastique, elle va finir par me rendre zinzin. On tape à ma porte.
À ma grande surprise, revoilà la duchesse. Elle a revêtu pour l’occasion la tenue que les filles portent désormais toutes à bord, à savoir ces plus ou moins robes blanches confectionnées à partir des froufrous devenus désormais bien inutiles. Je m’interroge sur ses yeux cernés jusqu’aux oreilles.
Y a pas à dire, aussi haut que l’on soit assis, on ne l’est que sur son cul. Un petit rappel à la réalité ne peut pas faire de mal.
Indubitablement – merde, revoilà que je me prends pour un auteur – il ne s’agit plus de la même personne que celle qui est montée à bord trois plombes auparavant. Il y a quelques années, une fille que j’avais rencontrée à Québec dans un bordel du port m’avait dit que le bonheur, c’est parfois simple comme un coup de bite… Mais apparemment, ça marche aussi pour un coup de langue.
Alors, puisqu’elle le demande et qu’en vrai, je n’en ai rien à carrer, je lui raconte notre histoire : comment je me suis fait débarquer que mon navire, comment j’ai récupéré la Belle Éloïse, comment les filles sont arrivées là…
Le geste qu’elle fait alors, celui d’un ventre qui s’arrondit, est assez explicite… Elle a surtout peur de se retrouver en cloque.
Pas loin, c’est sûr, surtout quand on ne connaît le monde qu’au travers des cartes et des atlas.
Savannah n’est qu’un petit bled situé sur la rivière qui porte le même blaze. Problème, tout ce coin est sous domination britannique et, d’après ce qu’en dit la rumeur, l’on aime bien y faire sécher le linge, surtout s’il appartient à un pirate ou à un Français… L’ennui étant qu’ils oublient souvent de sortir le bonhomme de ses fringues avant de le pendre à une corde. Bref, j’ai pas envie d’aller y traîner mes guêtres.
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Les jours s’écoulent sous un ciel de plus en plus bleu, les peaux prennent de jolies couleurs… La duchesse semble s’être adaptée, elle s’efforce de se mêler à l’équipage et de donner le coup de main à l’occasion même si, évidemment, elle n’y parvient pas toujours… Mais elle a une arme secrète qu’elle vient elle-même de découvrir : il n’y a pas de connerie qui ne puisse être excusée contre une bonne pipe. À tel point que je la soupçonne des fois de se foirer juste pour avoir l’occasion de pomper un dard ou deux.
Pour Julia, c’est beaucoup plus simple… C’en est à se demander si notre servante n’était pas plutôt soubrette dans une vie antérieure ! J’en parle d’ailleurs à Adélaïde.
En vérité, j’ai quasiment les couilles comme des raisins secs. Je crois que même si je le voulais, je ne parviendrais pas à fourrer une autre nénette.
L’objet, cylindrique, fait grosso modo la largeur d’une main sur un peu moins d’un pouce de diamètre. Arrondi à chaque extrémité, il est muni d’une clé qui ressemble beaucoup à celle d’une de ces pendules qui ornent les cheminées des friqués.
Trois tours de clé, et l’engin se met alors à vibrer… Plus fort, il semble s’allonger à une extrémité pendant que l’autre s’évase avant de reprendre sa taille initiale et de s’allonger de nouveau.
En fait et même si je ne l’avais pas capté au premier jet, le bazar est constitué d’une multitude de petites plaques dorées qui semblent coulisser les unes sur les autres… Et de fait, il se met soudainement à se dilater jusqu’à doubler de volume, juste avant de se rétracter.
Elle s’assied alors sur le rebord de mon burlingue et, les jambes quasiment ouvertes à l’équerre, retrousse sa robe. J’ai beau savoir ce que je vais découvrir, j’ai beau l’avoir vu une tétrachiée de fois, le résultat est toujours le même : garde-à-vous ! Apparentement, son bidule doré est mécanique, mais je me demande si tout cela est bien utile puisque le locataire de mon froc est également remonté comme un coucou suisse.
Là-dessus et après avoir soigneusement lissé sa jolie touffe, elle écarte ses lèvres et, sans la moindre hésitation, s’insère le bout du bidule dans la case trésor. Et là, l’impensable se produit : le bidule en question se remet à vibrer, mais, en plus, semble ramper pour s’enfoncer encore et encore dans l’antre détrempé ! Soudain, il s’arrête et se met à grossir. Adélaïde, qui jusque-là se contentait d’apprécier le traitement, se fige : il faut dire qu’à en voir sa chatte distendue, ça doit lui faire drôle au niveau de l’entresol ! Puis, l’engin semble rétrécir avant de reprendre sa progression et il disparaît totalement… Que se passe-t-il à l’intérieur ? Seule Adélaïde pourrait le dire, mais cela m’a tout l’air d’être quelque chose de velu ! Régulièrement, elle se crispe, se fait craquer les jointures à force de me serrer le bras, le regard dans le vide… Pour elle, j’en mettrais ma main au feu, le monde entier n’existe plus, tout se résume à ce qui se passe tout au fond de son ventre.
Et un panard, et puis un autre… À chaque nouvelle jouissance, elle me regarde dans les yeux, ne capte visiblement pas ce qui se passe avant de repartir vers un pied d’autant plus violent qu’il est de plus en plus difficile à obtenir. Tiens, une tête vient de se détacher dans l’embrase de la porte, celle de Duchesse… Elle sourit en voyant la somptueuse boîte posée à côté d’une Adélaïde qui n’en finit plus de hurler son bonheur.
Ça, pour être terrible, le mot est faible… Une vraie machine infernale, plutôt ! J’espère simplement que le palpitant d’Adélaïde ne va pas nous la jouer petit bras et qu’il tiendra le coup, sans quoi y aurait de quoi se bouffer les noix.
Adélaïde n’est plus qu’un bateau ivre qui, à défaut de se fracasser sur les rochers, ne va quand même pas tarder à s’en mettre une sur le plancher. Du coup, je la prends dans mes bras et la dépose sur le pucier où elle ne cesse pas pour autant de se tortiller… De toute façon, je crois bien que même si je la foutais à la baille, cela ne l’empêcherait pas de continuer à jouir ! Je l’abandonne pour aller aux nouvelles.
Ce qu’il y a au bout de ma longue-vue, c’est un galion espagnol visiblement chargé jusqu’à la gueule comme en témoigne son tirant d’eau. Je n’ai aucune idée de ce qu’il y a dans sa cargaison, mais ce ne sont sans doute pas des plumes d’autruche.
Derrière moi et totalement étrangère à ces considérations somme toute bien futiles, Adélaïde n’en finit pas de couiner, Duchesse à ses côtés.
De retour sur le pont et toutes les voiles hissées, la Belle Éloïse file bon train.
Soudain, l’impensable se produit : alors que nous n’étions plus qu’à quelques encablures, le galion s’arrête brusquement. Cette fois, le banc de sable était définitivement trop haut et l’espagnol vient simplement de s’échouer.
Précision sans doute inutile, mais on ne sait jamais : je connais les lascars qui officient du côté des canons, et ils ont tendance à défourailler sans réfléchir… Et on a beau avoir mis au point une méthode pour recharger plus vite, c’est comme en amour : si tu décharges trop vite, t’es certain au final de te la mettre sur l’oreille.
Nous ne sommes plus qu’à quelques dizaines de mètres de l’autre navire lorsque des coups de feu retentissent, mais, à ma grande surprise, ils ne sont pas dirigés contre nous. Je ne sais pas ce qui se passe chez ceux d’en face, mais ça canarde dans tous les sens. Puis, soudain, tout s’arrête, je parviens même à distinguer un drapeau blanc qui se détache sur le nuage de fumée.
Logiquement, dans la marine, un drapeau blanc ne se discute pas. Mais depuis l’arnaque de cet enfoiré de British au large de Saint-Malo, je me méfie… Nous sommes désormais largement à portée de n’importe quel calibre, mais, pourtant, c’est le silence qui règne, tout sujet perturbé par le souffle du vent et le clapotis des vagues.
Une planche est lancée et, flingues en main, je monte à bord de l’autre bateau et là, tout s’éclaire : d’un côté, on dirait bien que tout ce qui portait un uniforme de gradé a rejoint le statut de macchabée et tout ce sang sur des tenues blanches, ça frôle la faute de goût.
J’ignore quelle est la raison de ce merdier, mais les mecs encore saucissonnés sur les mâts et le dos en sang n’y sont sans doute pas étrangers. Pas la peine d’avoir fait l’école navale et tout le traczir pour savoir que quand tu fouettes un type qui y a déjà eu droit quinze jours auparavant, le cuir ne rencontre que des plaies à peine refermées et encore purulentes… Bref, c’est une véritable boucherie, à tel point qu’il me semble bien qu’un bon nombre d’entre eux ne reviendra pas en deuxième semaine. J’espère simplement qu’ils ont eu le loisir de voir leurs officiers se faire dessouder avant de passer l’arme à gauche… L’un des survivants s’avance vers moi.
Même si l’autre se pointe les mains dans les poches, je garde mes flingues en pogne. Un malentendu est si vite arrivé.
Le type se ramène quelques instants plus tard avec une statuette d’une trentaine de centimètres et qui pèse visiblement un âne mort. Et pour cause, il s’agit d’une figurine aztèque ou inca et qui, comme il se doit, est en or massif. Devant mon étonnement, il poursuit.
Il marque un point, l’Espagnol.
Et là, pendant des heures et sous la surveillance des filles, j’assiste à l’impensable. Les allers et retours se succèdent, et cela n’en finit pas… Faut dire que l’or, c’est formidable, mais c’est également l’enfer, comme en témoignent ces minuscules caisses remplies de doublons, mais qu’il faut quand même se coltiner à quatre. De temps en temps, je jette un œil sur tout cet invraisemblable bric-à-brac : si on veut pouvoir écouler tout ce merdier, faudra le fondre, ce qui me les brise dans les grandes largeurs vu la finesse des gravures et du reste. Dire que dans plusieurs siècles, personne ne se posera la question de savoir d’où vient l’or de l’alliance ou de la bagouse qu’il porte au doigt… Si ça se trouve, il porte encore en lui le sang de ces peuples décimés par ces fumiers de conquistadors !
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Malgré la nuit noire, nous naviguons toutes voiles dehors et sans aucune lumière à bord. La raison en est simple : notre lascar, maintenant qu’il est libre et malgré notre accord, nous file sans doute le train, histoire de récupérer sa cargaison. Ou alors, l’équipage va retourner à son port d’attache, prétendre que les officiers se sont tous fait buter lors de l’abordage, qu’ils ont réussi à sauver la moitié du butin – peut-être en en ayant déchargé un peu dans une crique déserte, je suis assez bien placé pour dire que cela se serait déjà vu – et au final, toute l’armada espagnole va nous coller au train comme des morpions.
Bref, il nous faut décarrer le plus vite possible… Et ensuite ? Perso, je connais un petit chapelet d’îles assez loin des routes habituelles et auprès duquel, il y a un paquet d’années déjà, un navire chargé d’animaux vivants s’est éventré sur les récifs. Si une bonne partie des veaux, vaches, cochons, couvées, a bu le bouillon, un paquet d’entre eux ont survécu et vivent désormais en liberté sur les îles en question.
Il n’a pas tort, Lepainsec. Bon, de toute façon, les îles en question sont à trois jours de mer, ça va me laisser le temps de cogiter.
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Je suis bien incapable de dire quel âge j’avais quand j’ai pris la mer la première fois… Par contre, ce que je sais, c’est que des levers du soleil, j’en ai vu des centaines sur toutes les mers du globe, mais je ne m’en rassasie pas. J’ai profité de notre petite escapade sur la Corne d’Or pour rafler quelques kilos de café et c’est donc une tasse à la main que je profite des premières lueurs de l’aube. Adélaïde, qui a enfin réussi à se remettre de ses émotions avec son bidule mécanique, se tient à mes côtés.
J’adore Adélaïde – j’espère que la réciproque est vraie –, mais je crains qu’elle ne change jamais. Est-elle vraiment en train de se soucier du bien de l’équipage ou a-t-elle simplement envie de changer de cavalier ? En vérité, je m’en fous un peu… Et si elle voulait bien me lâcher la grappe un petit moment, cela fait déjà un bail que j’ai une terrible envie d’aller en coller une tournée à Duchesse, histoire de vérifier si elle a bien assimilé les coutumes de cet équipage hors normes.
Coïncidence, Cassius passe précisément devant nous. À mon avis, il revient de faire pleurer le colosse et, encore à moitié dans les vapes, il s’en va rejoindre son hamac. Mais, comme ça, tout juste vêtu de sa limace, son énorme mandrin pendouille entre ses jambes et cela me donne une idée. Je lui fais signe de monter.
L’intéressée, incrédule, n’en croit pas ses oreilles.
Cassius s’exécute d’autant plus facilement qu’Adélaïde se laisse faire sans poser de question. Une chose est certaine, aucun des deux n’a une broque de ce que j’ai dans la tronche.
Oh la tronche de l’intéressée ! Baiser avec Cassius ou avec n’importe qui, Adélaïde s’en bat l’œil, et c’est rien de le dire. Mais elle sait – tout comme moi d’ailleurs – qu’elle ne parvient jamais à aller visiter le septième ciel par la porte de derrière, ou alors ce n’est qu’en se trifouillant le bouton magique. Or, avec les mains liées, cela risque d’être un poil plus compliqué.
Pourtant, je ne peux pas dire qu’Adélaïde est particulièrement résignée lorsqu’elle tente d’emboucher l’énorme teub. Je dis bien tenter puisqu’en fait et malgré tous ses efforts, elle ne parvient même pas à en gober le bout ! Du coup, elle se contente de le lécher, de le sucer, de faire courir sa langue sur toute la longueur de cet invraisemblable chibre… De temps à autre, elle lui gobe les burnes… Au moins, celles-ci sont d’une taille plus raisonnable.
Dans la douce lueur du matin, j’avoue que le spectacle d’un index et d’un majeur noirs comme du charbon entrant dans la fente d’une blonde ne manque pas de piquant ! L’intéressée accueille l’assaut avec un long soupir auquel succède un florilège de petits bruits mouillés. La suite, Cassius l’a très bien comprise : recueillir ce flot de mouille sur le bout de ses doigts, lubrifier autant que possible la rondelle offerte avant de s’en enduire le dard, et en avant la musique…
Le tableau qui en résulte vaut son pesant de cacahuètes. Cassius s’est simplement assis sur le sol, adossé au bastingage tandis qu’Adélaïde, qui s’est positionnée pour que je n’en perde pas une miette, est tout bonnement en train de s’empaler sur l’énorme chibre. Bon sang, mais comment fait-elle pour s’enfiler un machin pareil ? Certes, je suis assez bien placé pour dire que l’entrée de service ne lui fait pas peur, mais tout de même ! De temps à autre, elle s’arrête quelques instants comme pour reprendre son souffle, avant de reprendre sa progression comme si de rien n’était.
Combien de temps prend-elle pour engloutir cette formidable colonne de chair ? Guère plus, mais pas moins, comme on disait à une époque. Quoi qu’il en soit, aussitôt est-elle parvenue à se l’enfoncer jusqu’à la garde qu’elle commence ses allées et venues avec, bien entendu, une amplitude impressionnante. Est-ce que cela lui plaît ? À en juger par les expressions de son visage où se mêlent le plaisir et la douleur, j’en jurerais ! Cassius, quant à lui, ne sait déjà plus bien où il habite.
Oui, me répond-il d’un signe de tête… En même temps et connaissant les donzelles du bord, elles n’ont sans doute pas été longues à remarquer que notre ami est équipé façon grand seigneur.
Non, me fait-il de nouveau de la tête… Tu parles, des filles de ce calibre, ça ne court pas les rues ! Mais en vrai, en ce moment, je crois qu’il s’en tamponne le coquillard. D’ailleurs, Adélaïde n’a que le temps de se retirer qu’un monumental jet de foutre part vers le ciel et, contre toute attente, celui-ci retombe sur la toison intime de notre amie ! En temps normal, je sais quel serait son manège : elle recueillait cette semence du bout de ses doigts avant de les lécher comme s’il s’agissait d’un divin nectar… Mais là, avec ses poignets entravés, elle se contente de se retourner pour que son partenaire ait tout loisir de découvrir sa liqueur en train de dégouliner le long de sa chatte. L’autre serait en train de voir la vierge que ce serait pareil.
Très honnêtement, je doute fort qu’il parvienne à remettre le couvert pour le moment, mais avec Adélaïde, sait-on jamais ! Parce que je ne suis pas dupe : pour n’importe quelle nénette, ce petit numéro pourrait passer pour une rebuffade, mais pour elle, ce n’est autre qu’un défi parmi d’autres et qu’elle va se faire un plaisir de relever.
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Eh ben quand ça veut pas, ben ça veut pas. En dehors d’Adélaïde, s’il y a une nana à qui j’aimerais vraiment en coller une tournée, c’est Duchesse… Sauf que ladite Duchesse est train de perfectionner son maniement du sabre avec Carlos qui, de temps à autre et en plus de nous apprendre quelques mots d’espagnol, fait office de maître d’armes avec beaucoup de talent. Elle n’est d’ailleurs pas la seule à s’entraîner… Et pas seulement à l’horizontale. Bref, tous ceux qui ne sont pas en train de profiter de la démonstration d’Adélaïde et de Cassius sont sur le pont et ça ferraille dans tous les sens.
Du coup, j’ouvre un bouquin qui traînait sur l’une des étagères de ma piaule, mais, au bout de quelques lignes, mon esprit décroche. Il y a comme ça des fois où des bouffées de souvenirs vous reviennent en pleine gueule sans trop que l’on sache pourquoi…
Cela ne remonte pourtant pas à des siècles… En fait, mes parents n’étaient que métayers de la ferme qu’ils occupaient, et qu’accessoirement je ne leur ai offerte que tardivement avec le pognon récolté lors de mes premières balades en mer en tant que matelot. Mais avant ça, il y avait eu Géraldine, la fille du proprio.
Cette ravissante rouquine aux yeux verts s’emmerdait à cent sous de l’heure dans l’immense baraque de son daron et c’est sans doute pourquoi elle s’était mis en tête de nous apprendre à nous, pourtant fils de paysans et sans un kopek, à lire et à écrire. Seulement, soyons clairs : la seule chose qui nous intéressait, nous, c’était d’aller nous friter avec les gosses du village d’à côté ou d’aller piquer des pommes dans le jardin du curé ! Son écriture, ses bouquins et ses plumes, elle aurait bien pu se les tailler en pointe et se les carrer quelque part… S’il n’y avait pas eu un tout petit détail : à chaque fois qu’elle était contente de nous, elle nous laissait reluquer dans son corsage et même, pour peu qu’on ait fait des étincelles, aller mater sous sa jupe ! C’est con, hein, mais quand t’es à un âge où tu ne sais même pas à quoi peut bien te servir ta bite…
Et c’est donc sur les bancs de l’école improvisée que j’ai non seulement appris à écrire, mais également rencontré Lepainsec, Gambille et quelques autres qui constituent toujours mon équipage. Par la suite, Géraldine a eu fort à faire avec nous, parce que le reluquage, ça va bien un moment ! Et nous, on voulait toucher, palper, explorer, ce qu’elle nous avait toujours formellement interdit, et ce n’était pas le fait qu’on lui avait trouvé un fiancé qui allait arranger nos affaires !
Eh ben en fait, si… parce que la jeune fille bourgeoise n’était peut-être pas aussi blanche que ses parents l’imaginaient pour le plus grand bonheur de son fiancé, mais également pour le nôtre.
Régulièrement – enfin, deux ou trois fois par semaine – elle filait un rencard à son zig, le plus souvent dans les écuries paternelles. Là, les trois quarts du temps, elle finissait à moitié à poil dans le foin et l’autre cloche, qui n’en espérait pas tant, profitait de l’aubaine pour lui en coller des kilomètres. Comment on sait, ça, nous ? Parce que, bien planqués dans les greniers pendant des plombes, on assistait au spectacle qu’elle se faisait un plaisir de nous offrir, et en toute connaissance de cause !
Pendant que l’autre la fourrait encore et encore, elle nous gratifiait de quelques œillades bien senties comme pour mieux nous faire savoir qu’elle était au courant de notre présence. D’ailleurs, une fois où j’étais seul et que c’est complètement par hasard que je l’avais surprise en pleine action, j’avais été étonné de ne pas l’entendre gueuler aussi fort que lorsque nous étions à notre poste d’observation. Avec le recul, je ne sais toujours pas si elle en faisait naturellement des caisses ou si, précisément, le fait de savoir que nous la mations décuplait son plaisir. Tout ce que je peux en dire, c’est que si cela avait encore continué quelques années, je suis sûr que ma pomme, Gambille et les autres, en plus de savoir lire et écrire, on en serait à apprendre le mandarin ou l’austro-hongrois moyenâgeux… En attendant, c’est la voix de Gueule d’Ange qui me tire de mes rêveries.
***
Ça fait déjà un bon moment que Lepainsec n’en finit plus de s’agacer, un œil sur les cartes et l’autre sur le sextant. Il se tourne vers moi.
Cela fait deux jours que l’on tourne autour de ces îles… La tâche est d’autant plus difficile que le moindre caillou fumant se trouve comme par hasard au milieu de récifs ou de hauts-fonds. Seul avantage, celui qui voudra nous retrouver devra galérer autant que nous ! Et puis, cela nous offre par moment de quoi remplir notre armoire à souvenirs, quand presque toutes les filles et tous les gras se retrouvent à poil dans un mètre d’eau plus chaude que celles des bains à l’Espadon Moucheté, le tout dans des nuées de poissons multicolores. Petit détail assez poilant : dans ce genre de cas, on rigole, on s’éclabousse, on s’offre des étoiles de mer grandes comme des plats à tarte, on fait les cons avec des poulpes, mais au final ça ne baisouille même pas… Faut croire qu’il y a un temps pour tout !
Effectivement, il s’agit bel et bien de la planque que je cherche, l’astuce étant d’y entrer soit à l’étale, soit à marée montante… Mais pas trop tôt sous peine de racler le fond, ce qui fait toujours désordre. Par bonheur, nous n’avons pas trop à attendre, et, quelques minutes plus tard, nous abordons quelque chose qui ressemble assez bien à la définition du paradis.
Tout y est tel que les anciens nous l’ont raconté et tel que dans mes souvenirs : le sable blanc, les cocotiers, l’eau aussi chaude que limpide. Le bonheur, d’autant que nous avons remarqué que quelques cochons viennent eux aussi profiter de ce panard géant. Quelque chose me dit que ce soir, il y aura des fruits et de la viande fraîche au menu !
L’autre avantage de l’endroit, c’est que la mâture de la Belle Éloïse ne dépasse pas des frondaisons : si, comme nous le pensons tous, nous sommes pourchassés, ceux qui nous filent le train vont pouvoir se l’arrondir un bon moment avant de nous épingler à leur tableau de chasse.
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Au tout début de cette aventure et même si tout le monde était heureux de pouvoir queuter plus que l’on aurait jamais osé rêver, j’avais de gros doutes que tout cela pourrait tenir bien longtemps. En fait, cela ne s’est pas passé comme je l’avais prévu… Certes, le rafiot ne reste jamais silencieux plus d’une plombe ou deux – vu qu’à un moment donné, t’en as toujours un ou une qui beugle son plaisir de s’envoyer en l’air – mais le reste du temps, tout ce petit monde bosse et s’entraîne comme si de rien n’était.
L’autre truc qui me surprend aussi, c’est l’ardeur que les filles mettent à éponger les gars. À terre, on pouvait estimer qu’elles n’œuvraient que pour se faire un maximum de thunes en espérant un jour décrocher d’un quotidien où ce n’est que rarement l’extase. Or, à bord, elles pourraient se contenter du service minimum, mais ce n’est pas le cas : je viens d’en avoir la preuve – c’était juste avant que nous ne débarquions – avec Clara qui, étant restée seule sans doute un peu trop longtemps, était allée chercher elle-même Manitou et que ce dernier lui a joué le grand air de la brouette infernale… La beuglante qu’elle a poussée nous a confirmé alors qu’elle n’avait visiblement pas fait le voyage pour rien.
Mais à terre, ce n’est pas tout à fait pareil. Là, tout autour du feu et à la lueur des étoiles, on rit, on danse, on chahute, on picole aussi par mal, mais on baise finalement assez peu. À force d’à force, les couilles auraient-elles enfin fini par être à sec ? J’en doute… Quoi qu’il en soit, Adélaïde et moi avons décidé de nous mettre un peu à l’écart de cette troupe aussi joyeuse que bruyante. Mais entre nous, peut-on reprocher à des boucaniers de faire un boucan d’enfer alors qu’ils sont en train de boucaner la viande ?
Un bout de plage forcément déserte, et le clapotis des vagues et le bruissement du vent dans les cocotiers ne sont perturbés que par les hurlements de nuées de perroquets multicolores. Là, un bout de drap chouré je ne sais où posé à même le sol, Adélaïde s’allonge auprès de moi.
Et là, le croirez-vous, on fait l’amour. Non, on ne baise pas… On s’embrasse, on se caresse, je m’extasie de la douceur de sa peau et du galbe de ses hanches, de la finesse de sa taille, de la rondeur de ses seins ou de la délicatesse de sa fine toison… Je joue avec ses cheveux, m’en sers comme d’un délicat pinceau pour effleurer son sillon, que sais-je encore… Elle, de son côté, n’en finit plus de me cajoler le zgeg, mais, à aucun moment, ni l’un ni l’autre ne désire s’engager sur le chemin qui mène jusqu’à l’orgasme.
Et puis, on cause aussi…
Elle ne croit pas si bien dire, Adélaïde… Je pourrais lui raconter l’expédition dans le port de Veracruz ravagé par la peste, comment on s’est retrouvé tous à chialer comme des cons devant le portrait d’une jeune fille qui nous rappelait quelque chose à tous, comment mon capitaine d’alors a abandonné deux mutins sur une île déserte, sans même leur laisser une arme pour se faire sauter le caisson, et qui pourtant ne cessait de jurer sur la bible, comment nos routes ont croisé la route d’un matelot qui avait bossé sur le fameux Hollandais Volant et qui pourtant n’avait rien d’un fantôme, comment on a coursé le légendaire trésor du Capitaine Flint et à quel point on s’y est lamentablement foiré, ou comment Mary Red nous a niqués dans les grandes largeurs et nous a mis minable… À la limite, cette vieille ordure de Marceau qui ne cherchait qu’à enculer les mousses, les coups de tabac, les abordages merdiques et les tempêtes dans les Quarantièmes Rugissants, les multiples passages foireux autour du cap Horn, les baleines qui, d’un coup de queue, expédient ta chaloupe sur les rochers ou les glaces qui te coincent pendant des semaines et où tu te retrouves à bouffer des phoques ou des ours blancs et où la moitié de l’équipage finit par claquer du scorbut, j’en ai un peu rien à péter.
Elle éclate de rire.
Elle sourit, amusée.
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Cela fait une petite semaine que nous sommes à terre… Et il ne faudrait pas que cela dure trop longtemps, nous finirions par y prendre goût.
Ben non, elle n’est pas avec lui… Pour la bonne raison qu’Adélaïde et elle se sont lancées dans un concours de branlettes et qu’à force de couiner comme ça, elles ne vont plus tarder à devenir aphones ! Heureusement que Gambille est le champion des pommades apaisantes, cela les aidera sans doute à soigner leurs doigts endoloris. Pour le reste, elles n’auront qu’à se coller le derche dans l’eau froide, ça leur refroidira les ardeurs.
Si les marins étaient de bons grimpeurs, ça se saurait. Une montagne, ça n’a rien à voir avec un mât ou avec une chute de reins ! Bref, c’est trempé comme une soupe et complètement naze que je retrouve mon second.
D’habitude, je ne me déplace jamais sans ma longue-vue, mais, la dernière fois que je l’ai vue, elle coulissait joyeusement dans la chatte détrempée d’Adélaïde. De toute façon, le temps est tellement clair qu’il n’en est nul besoin pour apercevoir les trois vaisseaux espagnols qui mouillent au large.
C’est vrai que quand les homards que tu pêches sont déjà cuits, il y a de quoi se poser des questions.
Il y a quelques années, alors que nous naviguions dans le Pacifique, nous étions passés près d’Hawaï. Là, nous avions assisté à l’éruption d’un volcan et à ce flot de lave ininterrompu qui se jette dans la mer dans un vacarme infernal. Nous étions loin, mais rien que d’y penser, j’en ai encore froid dans le dos… Et là, justement, ce qui se passe en bas du cratère ne me dit rien de bon. Ça bouillonne sévère dans cette marmite de l’enfer et ça fouette, en plus ! Les nuages de fumée âcre et qui remontent nous brûlent les yeux sans que nous sachions pourquoi.
Tout en redescendant, je cherche un plan d’attaque. Tout capitaine que je suis, ça risque de ruer dans les brancards quand je vais leur annoncer qu’il est temps de décarrer de cet endroit… Or, il ressemble quand même sacrément au paradis et les filles ne s’emmerdent même plus à s’habiller, passant leurs jours à laisser leurs jolis corps prendre des reflets cuivrés.
M’ont tous l’air méchamment préoccupés, mes lascars ! Et pour cause : à un jet de pierre de notre camp de base et provenant du sommet du volcan, une trouée d’une vingtaine de mètres a fait son passage dans la végétation jusqu’à la mer et tout n’est plus que cendres encore fumantes. Cela a visiblement surpris tout le monde, à commencer par les animaux comme en témoignent les carcasses calcinées qui jonchent le sol.
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La marée ne nous était pas trop favorable, mais nous sommes tout de même parvenus à franchir la passe. Reste la cerise sur le gâteau : les Espagnols, toujours au mouillage à quelques encablures de la côte. Ils nous cherchent, mais ils ne s’attendent pas à nous voir débouler toutes voiles dehors en plein milieu de leurs navires… Et comme, en plus, on vient de leur balancer une salve de boulets chaînés dans la foulée et que cela a foutu un très léger bordel dans leurs mâtures, nous serons loin avant qu’ils n’aient eu le temps de réparer.
L’île que nous venons de quitter est sur le point de disparaître à l’horizon… Mais cela n’empêche pas un grondement sourd de parvenir à nos oreilles tandis qu’un immense panache grisâtre se détache sur le ciel bleu.
Coup de bol inouï, la déferlante qui vient de nous arriver pleine bille n’a fait que nous soulever… Les Espagnols, eux, ont eu moins de chance, comme en témoignent les débris calcinés de leurs bateaux qui flottent désormais autour de nous.
Les heures se sont écoulées, la tension nerveuse s’est enfin clamée, bien aidée par les rasades de rhum. De retour dans ma piaule, Adélaïde roupille : tant pis, je la réveillerai plus tard, elle ne perd rien pour attendre.
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Tiens, il y a un attroupement à tribord… À mon avis il doit encore s’y passer quelque chose de fumant, mais, pour une fois, je sais qu’Adélaïde n’y est pour rien, et pour cause : elle se tient à mes côtés. Par contre, ce que je découvre me cloue sur place… Quelqu’un a tricoté un chandail un peu particulier à Duchesse, qui pendouille attachée à une vergue.
Un coup d’œil me confirme ce que je pense : quelqu’un l’a ficelée façon rôti de porc et le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est du raffiné. La corde de chanvre – je peux utiliser ce mot puisque qu’à bord d’un navire, la seule corde qui existe est la corde du pendu et que Duchesse est précisément suspendue au mat – passe derrière son cou, descend jusque sa case trésor, même si elle ne passe visiblement pas entre les lèvres de sa chatte. Là, elle remonte dans son dos jusqu’aux épaules et ensuite, c’est tout un entrelacs de nœuds et de machins qui lui redressent les nibards et j’en passe. À ma grande surprise et sans comprendre pourquoi, j’en attrape une trique à en enfoncer des clous.
Seulement, il n’y a que moi qui suis habilité à bord à prononcer des châtiments, et personne ne se risquerait à outrepasser ses droits. Et là, trois choses me choquent : dans un premier temps, l’assistance est silencieuse. Ensuite, il y a L’Artiste, qui a tranquillement sorti son chevalet et est en train de barbouiller le tableau. Et puis surtout, il y a l’attitude de Duchesse qui, bien que bâillonnée et devant subir ce que je pense être le martyre, reste étonnamment silencieuse. Et pourtant, rien que de voir ses talons à hauteur de ses fesses et les liens qui lui rentrent dans la viande, j’en ai mal pour elle…
Or, elle reste là, impassible, immobile, les yeux mi-clos, incroyablement calme. Du coup, moi qui étais sur le point de sortir mon sabre pour tailler dans le vif, enfin plutôt dans le chanvre, je m’interromps.
Elle me répond d’un simple hochement de tête. Bon, en même temps, si elle ne s’était pas laissée faire, personne n’aurait pu exécuter un tel numéro de macramé. Par contre, je ne vois pas bien où elle voulait en venir.
L’intéressée ne moufte pas, mais l’expression que je lis dans son regard n’est pas piquée des vers, mélange de peur, d’espoir et de désir. Je m’approche d’elle et, encore une fois, je m’attends à ce qu’elle parle, mais pas un mot ne sort de sa bouche. Alors, puisque c’est comme ça, voyons voir !
Vous avez déjà vu quelqu’un se faire marquer au fer rouge ? Hélas, moi, si, et de nombreuses fois… C’est d’ailleurs aussi pour cela que je n’ai pas tellement insisté quand Adélaïde et ses consœurs se sont pointées à bord, le marquage au fer rouge sur le croupion et les arpions en bouquets de violettes, c’est pas trop mon truc.
Eh ben là, c’est pareil… Il n’a suffi que d’un simple effleurement sur sa chatte distendue pour que tout son corps se cambre et qu’elle parte aussitôt vers une longue et bruyante extase. Non, pas d’introduction, pas quelques allers et retours, juste un simple contact du bout du doigt… J’attends qu’elle redescende sur terre et, incrédule, je repose mon index au même endroit. Et un deuxième panard dans la foulée, un !
Je suis sur le point de recommencer une troisième fois que je croise son regard suppliant : couverte de sueur, les yeux hagards, elle n’en peut simplement plus !
Non, me fait-elle de la tête.
Cette fois, elle me répond par l’affirmative.
Elle acquiesce de nouveau.
Adélaïde se penche alors vers moi.
Même si tout cela n’est pas dit à haute voix, Duchesse n’en a pas perdu une miette, et il suffit de croiser son regard gourmand et plein d’espoir pour capter que c’est précisément ce qu’elle attend.
Là encore, le hochement de tête de la ficelée est parfaitement clair. Je m’interroge.
Tandis qu’elle baisse les yeux, je la vois sourire vu qu’à mon corps défendant, je suis toujours victime d’une godanche de derrière les fagots et qui déforme toujours mon futal. Elle m’attrape par le bras et m’entraîne dans un coin où, relativement indifférente à ce qui se joue à quelques mètres d’elle, Évita rêvasse.
L’argument est pourtant massue, mais peine visiblement à la convaincre. Elle poursuit.
En découvrant l’énorme bosse de mon froc, elle éclate de rire.
Tout le monde sait à bord qu’Évita n’aime pas les pertes de temps, et c’est pour cela qu’elle est déjà passée au-dessus de sa robe. Là, totalement nue et les mains sur les hanches, elle offre à mon regard sa taille de guêpe, ses petits seins hauts perchés, ses longues jambes fuselées et le triangle parfait de sa toison intime. Avec sa peau d’ébène, l’on pourrait presque croire qu’il s’agit d’une statue de bronze. Sauf que…
Sauf que les statues ne sucent pas aussi bien ! Elle est visiblement une reine de la pipe, et le contraste de sa peau noire sur mon dard blanc me fait un sacré effet ! À un moment, le souffle court, elle se met à me branler comme une furie tout en affichant un sourire à croquer la fortune, à décroisser la Lune, à bouffer des haubans… Non, mais voilà que je débloque encore !
Tout cela ne dure pas longtemps vu que, dans l’état d’excitation où je suis, je ne vais pas tarder à exploser comme un mousquet foireux. Du coup, elle se contente de s’asseoir sur une caisse et, le temps de le dire, je me retrouve tout au fond d’elle. C’est délicieux… Son corps incroyablement musclé est dur comme de la pierre, son fourreau est un véritable étau, j’en vois trente-six chandelles ! Alors, je la lime avec prudence, j’ai l’impression qu’elle pourrait me casser la teub si elle le décidait. Et il y a toujours l’opposition de nos couleurs de peau qu’elle remarque.
Tu parles ! Sans compter qu’il y a la cerise sur le gâteau : Adélaïde. Elle aussi s’est assise sur une caisse et a retroussé sa robe pour mieux fourrager dans son entrejambe… Les yeux rivés sur ma queue qui trombone joyeusement ma partenaire, elle s’est enfoncé deux doigts dans sa caverne intime tandis que ceux de l’autre trifouillent un peu plus haut. C’est ce moment précis que choisit Évita pour resserrer encore un peu son antre et là, c’est un feu d’artifice dans ma tronche… Je ne vois plus rien, je ne contrôle plus rien, je ne comprends plus rien ! Lorsque mon citron se remet enfin à fonctionner, c’est pour découvrir que le ventre d’Évita est couvert de longues traînées de foutre blanc sur sa peau noire. Adélaïde, quant à elle, en est encore au ramonage de son écoutille, mais pas pour longtemps : elle vient de pousser un long râle, ce qui signifie qu’elle vient de décrocher le cocotier.
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Là-bas, dans le lointain, je regarde quelques voiles qui se détachent sur un soleil qui n’en finit plus de tomber dans la mer. La température est douce en ce début septembre et, pour la première fois de ma vie, je suis vraiment heureux d’être à terre… Je caresse doucement le ventre d’Adélaïde qui s’arrondit doucement.
Comme il est d’usage dans la piraterie, le butin est toujours partagé à parts égales, quel que soit le poste que l’on occupe à bord. Seul le capitaine a droit à une part et demie, mais celle-ci sert souvent à rincer l’équipage au premier rade du port et à lui donner quelques souvenirs supplémentaires, en plus d’une formidable gueule de bois… Et dans le cas qui nous intéresse, il n’y avait aucune raison que les filles touchent moins que les gars. Une sorte d’égalité salariale, en somme ! Et quand chacun des deux dispose du même paquet de fric, l’on peut être certain que ce n’est pas l’appât du gain qui régit le couple.
Adélaïde, bonne sœur ? Déconnez pas, ce serait un coup à me faire rentrer dans les ordres !
Ça y est, le soleil a définitivement disparu. Quand j’étais gamin, je me demandais toujours pourquoi je n’entendais jamais le plouf que cela devait faire lorsqu’il tombait dans l’eau… En attendant, la nuit est claire et le ciel est constellé d’étoiles.
Adélaïde s’insurge.
Intérieurement, je souris. Chassez le naturel, il revient au galop… Mais c’est peut-être précisément parce qu’elle est autant éprise de liberté que moi que je l’aime autant.
J’imagine bien la scène : Adélaïde, nue comme il se doit, enfichée sur la queue d’un type avec deux ou trois autres qui regardent, le tout sans doute sous les sifflets admiratifs des autres clients encore dans les étages. Elle qui monte et descend sur, soyons fous, un énorme chibre et qui prend des positions invraisemblables pour que son client et les autres puissent profiter du panorama, de sa chatte entrouverte, du dard qui coulisse dans l’étroit passage tandis qu’elle se trifouille le petit organe. Elle qui, comme à son habitude, crie son bonheur avant de jouir carrément. Pour la suite, je ne sais pas, mais je les vois bien tous en train de s’astiquer comme des furieux avant de gicler chacun leur tour sur le visage d’une Adélaïde absolument ravie. Enfin, je dis ça, mais j’en sais rien… Mais, la connaissant, je ne dois pas être très loin de la vérité.
Fin