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Temps de lecture estimé : 29 mn
29/08/21
Résumé:  Sylvianne n’a aucune passion, rien qui lui fasse pétiller les yeux et l’âme. Une découverte au beau milieu d’une sortie familiale va à jamais modifier sa vie intime.
Critères:  fh 2couples couple extracon candaul fsoumise hdomine cérébral voir intermast nopéné sm attache bondage yeuxbandés -dominatio
Auteur : Myhrisse            Envoi mini-message
Sylvianne




Elle n’en pouvait plus.

Ménage, lessive, rangement, taxi pour les enfants, vaisselle, cuisine, courses, factures, rendez-vous médicaux, rencontres parents/professeur, sa vie était routinière, rassurante, mais ô combien peu enthousiasmante.


Ce n’était pas la faute de son mari. Il l’encouragerait à se trouver une activité personnelle afin d’y éclore et de s’y développer. Elle avait essayé : tennis, gym, natation, équitation, golf, jogging, zumba, musique, danse, chant et même yoga. Elle avait tenté d’apprendre une nouvelle langue. Elle n’y avait trouvé aucun intérêt. La couture, la broderie, la peinture, le crochet, très peu pour elle ! La réparation automobile, la plongée sous-marine ou le pilotage de petits avions n’avaient pas remporté davantage de succès.


Les samedis consacrés aux activités personnelles de chacun des membres de la famille, Sylvianne les passait à faire le taxi et à s’occuper de la maison et à craindre le dimanche, consacré aux activités de groupe. Les parcs municipaux et zoos avaient cédé la place aux musées, aux châteaux, aux parcs à thème et aux randonnées. Son mari ne manquait pas d’idée et portait le foyer dans des endroits toujours plus surprenants… mais tout aussi inintéressants à ses yeux à elle. Elle se forçait à montrer de l’enthousiasme afin que leurs deux adolescents suivent plus facilement le mouvement, mais tout cela l’ennuyait profondément. Elle remerciait son mari de s’occuper de tout cela, permettant au groupe familial de perdurer. Si le thème n’intéressait pas Sylvianne, elle n’oubliait cependant pas de profiter de la présence de ses deux enfants et de son mari.


Après ce bon week-end, Sylvianne et son époux se retrouvaient pour une étreinte charnelle courte et ritualisée, au missionnaire classique dans lequel elle ne prenait aucun plaisir. Son devoir conjugal, simple corvée au milieu de temps d’autres, ne l’enthousiasmait pas davantage que le reste des activités dominicales.


Son mari sentait sa détresse, son ennui, sa volonté d’autre chose, d’ailleurs. Il tentait de l’aider, mais cela ne donnait rien, car elle ignorait elle-même ce qu’elle voulait. Une aventure avec un inconnu ? Non, même pas.



Sylvianne soupirait en retour. Tir à l’arc ou à la carabine, chasse, pêche, planche à voile, lecture, écriture, comptabilité, informatique, électronique, imprimante 3D, travail du cuir ou du bois, poterie, pâtisserie, jardinage… quel ennui ! Où trouver son bonheur ?


Quelle est votre passion ? Quels sont vos hobbys ? Sylvianne ne savait jamais que répondre à cela. Elle en pleurait souvent, seule, le samedi. Son visage affichait un masque de bonheur et de joie le dimanche, lors des déjeuners avec les frères, sœurs, parents, amis et plus rarement voisins ou collègues. Elle s’en voulait de sa tristesse intérieure. Après tout, elle n’avait aucune raison de se plaindre. Une belle maison, une belle famille, de l’argent, la santé… rien ne lui manquait, sauf cette flamme, ce feu intérieur, cette envie, ces pensées qui s’envolent, qui flottent vers ce paradis intérieur.


Sylvianne regardait son mari payer l’entrée, trouvant le prix très élevé. En toute honnêteté, même un euro lui aurait fait le même effet. Une galerie d’art… Sylvianne s’ennuyait déjà. À l’entrée, il était précisé le mode d’emploi. Trois artistes très différents ayant tous trois travaillé sur trois thèmes présentés dans trois salles. Ils visiteraient d’abord « Couleur », puis « Abandon » et enfin « Répétition ». Sylvianne s’obligea à sourire et à parler de manière enjouée. Les adolescents suivirent. Comme elle aurait aimé, elle aussi, faire la tête et ronchonner.


Première salle. Le photographe montrait des fleurs, une coccinelle et une femme indienne. Le peintre aurait pu réaliser une toile bariolée, mais non, il avait opté pour un style plus sobre. Douze tout petits tableaux ornaient les murs, avec, sur chacun d’eux, une seule tache d’une seule couleur. Sylvianne admit que l’œuvre la prit au dépourvu. Le troisième artiste faisait vibrer les tympans des visiteurs en proposant une musique enjouée, virevoltante, au son de violons et de flûtes. Sylvianne imaginait de nombreuses couleurs à cette écoute. Si le photographe ne l’avait pas du tout convaincu, les deux autres auteurs parvenaient à ne pas trop lui faire regretter le temps passé dans ce lieu.


Sylvianne soupira en imaginant la seconde salle. La musique la plongea immédiatement dans des abîmes de tristesse et la photographie d’un personnage, seul, dans l’ombre d’une rue vide finit de l’anéantir. Ceci dit, elle devait admettre que les artistes parvenaient à merveille à lui faire se sentir abandonnée, ce qui était exactement dans le thème. Le peintre la fit sourire. Un seul tableau était proposé, de taille moyenne, commencé, mais pas achevé, abandonné en plein milieu. L’idée de décrire l’abandon en abandonnant était audacieuse.


Sylvianne ricanait encore lorsque ses yeux se posèrent sur le dernier mur où une photographie, plus petite qu’une feuille classique, se montrait. Sylvianne s’en approcha, complètement subjuguée. L’abandon était visible, total, clair, transparent, évident, prenant et pourtant, cette femme souriait, béant dans la plénitude et le bonheur. Personne ne l’avait abandonnée. Emmaillotée dans des cordes accrochées au plafond qui la faisaient décoller du sol, elle s’abandonnait.


Sylvianne eut du mal à avaler sa salive. La vision la brûlait au plus profond d’elle-même. Cette femme était nue, mais à trois quarts de dos, on ne voyait rien. La photographie était érotique, sans être vulgaire ou indécente. Le modèle était beau sans être parfait. Quelques rondeurs, quelques marques de vie n’enlevaient rien à la beauté de l’œuvre dont on ne voyait, de toute façon, que ce bonheur puissant et envahissant.



Elle ne bougea pas, tétanisée devant la scène. Son mari s’approcha, jeta de nouveau un œil à la photographie qu’il avait déjà admirée un peu plus tôt, puis se recentra sur sa femme.



Soudain, une frayeur immense parcourut tout son corps. Être attachée ? Se retrouver impuissante, vulnérable, désarmée ? Devant qui, pour qui ? L’animal en elle hurla de ne rien en faire, de fuir devant ce danger, de passer son chemin.



Son mari soupira d’aise, parce qu’il avait compris, mais aussi parce que sa femme semblait enfin s’être trouvé une passion. Ce moment de joie fut court et suivi d’une grimace.



Sylvianne, plongée dans ses pensées, ne prit pas la peine de lui répondre. Elle le suivit dans la dernière pièce, sans vraiment se rendre compte des sons dissonants d’un orchestre en pleine répétition ni des photographies d’acteurs de théâtre, textes à la main, déclamant encore et encore les mêmes vers, et encore moins ces tableaux identiques couvrant deux murs entiers de cette dernière salle.


À peine rentrée, elle se rua sur son ordinateur. Que chercher ? Quels mots de recherche mettre ? Elle commença par taper « Corde nue » et tomba sur énormément de photographies représentant exactement ce qu’elle cherchait. Ceci ne lui indiquait cependant pas comment cela se nommait. Était-elle censée se rendre à la mairie et demander « Je veux attacher des femmes nues, où puis-je faire cela ? ». Elle finirait au poste de police, sans aucun doute !


« Apprendre corde nue » lui permit de tomber sur des tutoriels expliquant comment bien monter à la corde ou sauter à la corde. Elle soupira. Cela risquait d’être long…


Des heures de recherche à soupirer devant des vidéos de nœuds marins, Sylvianne avait déjà bien amélioré son vocabulaire. BDSM, bondage, shibari, kinbaku avaient fait leur entrée. Elle avait ensuite appris que le riz permettait de faire des cordes, tout comme le chanvre, la jute, le coton ou le plastique, tout en ignorant toujours lesquelles prendre, nageant dans un océan d’avis et de contre-avis. Les internautes semblaient se mettre d’accord sur le diamètre : pas trop fin pour limiter les risques.

Les risques ? Les risques de quoi ? Parce que c’est dangereux ? Sylvianne frémit et poussa ses recherches plus loin. Elle découvrit effarée et terrifiée la compression des nerfs pouvant entraîner une paralysie temporaire voire définitive.


Comment commencer ? Elle débuta par acheter quelques ouvrages, les dévorant, s’imaginant enlacée, maintenue, serrée, comprimée. Elle apprit les méthodes de base, les précautions à prendre et réalisa quelques auto-bondage qui ne la satisfirent que fort peu.



Son mari la transperça des yeux, sourit doucement puis soupira en secouant la tête. Il était clair qu’il ne la croyait pas une seule seconde.



Son mari lui lança un regard désespéré.



Son mari soupira en secouant la tête. Sylvianne se leva.



Sylvianne ne prit pas compte de sa remarque et fila dans le salon avec son portable.



Il y eut un silence. Anne attendait que Sylvianne crache le morceau.



Sylvianne fut tellement soulagée de sa réponse !



Sylvianne sautilla de joie et réclama du sexe avec son mari, qui le lui offrit bien que le calendrier annonçât jeudi.


Pratiquer s’avéra bien différent de la théorie. Sylvianne fut appliquée, attentive, motivée, volontaire et persévérante. Elle ne rata aucun cours, aucune leçon, posa des questions. Elle maîtrisa d’abord le sol avant de passer à des suspensions partielles puis enfin aux suspensions totales.


Anne évolua en même temps que son amie, riant d’abord avec elle puis appréciant de plus en plus ces moments dans les cordes, s’y apaisant sereinement malgré l’absence totale de sentiment amoureux pour son attacheuse.

Sylvianne et Anne attendaient le début du cours lorsqu’un des attacheurs réguliers s’approcha de Sylvianne et s’accroupit près d’elle.



Franck se leva et rejoignit son modèle sans lui laisser le temps d’ajouter quoi que ce soit.



Cette terreur qui la traversait la fit rougir des pieds à la tête. Le sang afflua brusquement, son cœur s’affolant, sa respiration s’accélérant sans qu’elle ne puisse l’en empêcher. L’animal hurlait d’angoisse. La rationnelle reprit doucement le contrôle. Pendant le cours, Sylvianne l’observa. Il avait des gestes précis, rapides, parfaits. Il réalisa une suspension totale sans défaut, au plus grand plaisir de son modèle.



Sylvianne lui tira la langue en réponse puis bouda. Pas du sexe, pas du sexe… Pfff… Et si elle acceptait, est-ce qu’elle tromperait son mari ? Elle ne voulait pas le blesser ni lui faire le moindre mal. Le soir même, elle lui parla de la proposition de Franck.



Deux ans de pratique régulière, de leçons et d’entraînements quasi quotidiens sur elle, des mannequins, des pieds de table ou de chaise, tout ce qui existait dans la maison avait senti la morsure d’une corde.



Sylvianne frémit et une larme coula sans qu’elle puisse l’empêcher. Oui, elle voulait se faire attacher, elle l’admettait enfin. L’animal revint à la charge : et le danger alors ? Sylvianne calma l’esprit bestial. Franck venait au cours depuis plus longtemps qu’elle. Il maîtrisait son art. De plus, Sylvianne le maîtrisait aussi et saurait reconnaître les mauvaises manipulations s’il devait y en avoir. Enfin, le tout aurait lieu sous les yeux d’une dizaine d’autres participants. Les risques étaient très minimes.


Sylvianne fut tirée de ses pensées par la réception d’un SMS. Anne lui indiquait, désolée, qu’elle ne pourrait être présente à la prochaine leçon de cordes. Sylvianne n’en revint pas comme la coïncidence était… Elle se rendit compte que son mari venait de reposer son portable d’un air nonchalant qu’il n’avait jamais.



Son mari regarda le plafond puis, ne tenant plus, se mit à rire.



Justaucorps uni, simple, moulant, souple et confortable, cheveux attachés, Sylvianne se tenait devant la porte de l’école de shibari, immobile, tétanisée à l’idée de faire ce dernier pas. L’animal hurlait de faire demi-tour, de rentrer, de retourner dans le cocon sécurisé, de se nicher au fond de la grotte, de disparaître au fond du terrier, bien à l’abri. Sylvianne l’envoya à la niche. Elle l’attacha au plus profond d’elle-même et entra, bien décidée à passer outre.


Elle s’assit au fond, le cœur battant la chamade, et prépara les cordes, les disposant comme elle aurait aimé qu’elles soient. Première arrivée, elle attendit les autres participants. Le professeur du jour ne fit aucune remarque sur sa tenue ni sa position, à l’opposé de celle habituelle. Les fesses sur les talons, l’appréhension montait à chaque minute qui passait.


Il entra dans la pièce. Elle détourna le regard de lui dès que ses yeux se posèrent sur elle. Elle constata qu’il renvoyait son modèle qui partit en souriant. Il s’approcha tandis que Sylvianne sentait de plus en plus sa volonté s’éloigner. Il se plaça derrière elle et resta silencieux. S’il avait dit « Ce n’est pas trop tôt » ou « Tu as enfin accepté tes envies profondes », elle serait partie immédiatement. Il eut l’excellente idée de ne rien dire.


Le cours commença. Les participants étaient aguerris sans être experts. Franck attrapa avec douceur les mains que Sylvianne tenait sagement posées sur ses cuisses pour les lui mettre dans le dos. Elle les plaça paume contre paume, comme Anne avait appris à le faire. Il commença par nouer les poignets. Sylvianne frémit. Le Takate Kote, la base de la plupart des shibari, simple, mais efficace. Après les mains, il passerait autour du buste, ce geste obligeant les participants à se rapprocher. La plupart en profitaient pour…


Les cordes passèrent avec précision, rapidité, calme et élégance. Le geste était parfait. Sylvianne eut le souffle coupé, non pas par la performance de son attacheur dont elle se détacha rapidement, mais par ses propres émotions. La poitrine comprimée, pas trop, juste assez, l’emmena aux portes d’un Nouveau Monde.



Le lapin blanc venait de disparaître dans le terrier. Allait-elle le suivre, au risque de se faire couper la tête ?



Sylvianne se sentait perdre pied. Le monde autour d’elle disparaissait. Une immense chaleur l’entoura. Il venait de la prendre dans ses bras.



Sylvianne se cala sur la respiration douce et apaisée de son attacheur. Elle se sentit mieux, prête à explorer les galeries, à fêter son non-anniversaire. Les cordes passèrent, repassèrent nœud après nœud, et soudain, l’envol. Plus de pesanteur, pied de nez à la gravité et Sylvianne s’abandonna totalement.


Des flux partirent de son ventre pour s’envoler à travers les cordes vers le ciel, jusqu’à la vider entièrement. Ses muscles lâchèrent, son esprit rendit les armes, le vide l’entoura, un néant rassurant, tendre, doux comme du coton, soyeux, léger, enivrant, merveilleux, fantastique…


La réalité du sol la saisit. Depuis quand avait-elle retrouvé le plancher des vaches ? Franck massait doucement ses poignets endoloris. Elle était détachée sans avoir le moindre souvenir de ce moment. Son corps recouvert d’une couverture chaude ronronnait de bien-être.



Sylvianne n’en avait aucun souvenir.



L’animal revint en courant.



Tandis qu’elle reprenait ses esprits, il rangea consciencieusement ses cordes au milieu desquelles il plaça une petite carte avec son nom, son adresse et son numéro de téléphone.

De retour chez elle, Sylvianne observa la carte, incapable de se décider.



Sylvianne rougit.



Elle mettait une telle force à rejeter cette éventualité. Se mentait-elle à elle-même ?



Ce disant, elle tendit la carte à son mari.



Elle hocha la tête.



Une maison banale, classique, au milieu d’un quartier résidentiel. Le modèle habituel de Franck ouvrit la porte.



Sylvianne sourit. En même temps, vanille, son mari l’était. Le missionnaire du dimanche soir lui suffisait amplement.



Sylvianne s’engouffra dans le corridor, tremblante de peur et d’angoisse, mais également d’impatience et d’exaltation. Une porte dévoila une pièce nue, au sol recouvert de tatamis. Plusieurs poutres traversaient le plafond, agrémentées par endroit d’anneaux. Un mur offrait des dizaines de cordes aux visiteurs.



Maëlys acquiesça d’un geste de la tête. Elle ne semblait pas gênée le moins du monde de voir ses préférences ainsi dévoilées à de parfaits inconnus.



Sylvianne la suivit volontiers, tandis qu’Emmett restait avec Franck. Dans une chambre, Sylvianne retira ses vêtements tandis que Maëlys attendait sagement dans le couloir. Sylvianne revint seulement vêtue de son justaucorps. Elle se mit en position, au milieu de la pièce, assise sur ses talons.


Emmett attendait dans un coin. Franck avait dû lui donner quelques consignes, car il n’avait pas émis le moindre son depuis l’apparition de sa femme pourtant légèrement vêtue, même s’il était vrai que ce justaucorps n’avait rien d’indécent.


Franck commença par un Takate Kote classique qui, de nouveau, amena Sylvianne aux portes du terrier du lapin blanc. Elle aurait cru que l’émotion aurait été réservée à sa première fois, mais non, elle venait de revenir.



Sylvianne hocha la tête et plongea dès l’envol, ressentant pleinement chaque corde, chaque mordillement dans ses chairs, autour de ses poignets, de ses bras, de ses seins, de ses jambes, de son ventre, de son sexe. Elle profita de ce sublime moment de détente totale, complète, de cette libération profonde et intime, de ce sentiment envahissant de plénitude et d’abandon. Plus de facture, plus de lessive ou de ménage, plus d’inscription aux grandes écoles pour le grand et de choix de matières pour la grande, juste le vide, l’esprit qui arrête de tourner, le calme au milieu de la tourmente. Au centre de la tornade, elle observait le ciel bleu et souriait béatement.


Franck accompagna la redescente avec douceur et bienveillance. Revenir sur Terre la transperçait de douleur. Ne pouvait-elle pas rester là-haut pour l’éternité ? Elle retrouva toute notion de l’espace et du temps pour constater la présence de Franck près d’elle, une main posée sur ses hanches, lien essentiel dans ce toboggan vertigineux. Sylvianne le vit faire un geste de la tête puis entendit des pas affolés.



Sylvianne rougit fortement.



Emmett venait, en toute naïveté, d’exprimer tous les questionnements internes de Sylvianne. Franck sourit.



Maëlys rit doucement.


L’angoisse de Sylvianne n’égalait que son excitation. Cette fois, la suspension ne serait que l’entrée, pas le plat de résistance. Il y aurait davantage ensuite. Emmett assurait sa sécurité et le bon suivi des règles pré-établies.


Ceci dit, Sylvianne avait confiance en Franck. Les deux couples n’étaient plus des inconnus. Ils s’étaient vus en dehors du shibari, avaient partagé des barbecues, des randonnées et des musées, des châteaux et expositions. Depuis que le shibari était entré dans sa vie, Sylvianne vivait tous ces moments familiaux avec joie. La disparition de ses enfants partis vivre leur vie avait laissé un vide qu’elle ne pensait pas ressentir négativement. Pouvoir réaliser ces sorties avec d’autres personnes la remplissait de joie.


Ces moments avaient été nécessaires pour que Sylvianne prenne confiance. Le couple ami restait un véritable mystère, une énigme pour Sylvianne, et encore davantage pour Emmett. Maëlys et Franck ne cachaient rien de leur relation lors des moments privés. En extérieur, ils ressemblaient à n’importe quel couple classique.


Pour ce premier encordage sexuel, le seul sexe nu serait celui de Sylvianne, les autres participants devant rester sages. Emmett en était totalement dubitatif. Du sexe sans sexes ? Il ne cachait pas sa perplexité. Sylvianne vêtue seulement de sa peau entra et se mit en position. Emmett observa sa femme, fronçant les sourcils. Sylvianne sourit. Elle ne montrait aucune pudeur. Cela le dérangeait probablement. Sylvianne eut un peu peur que son mari soit jaloux de la voir se montrer ainsi sans atours devant d’autres gens. Son silence la rassura. Après tout, il pouvait s’exprimer librement.


Le Takate Kote, toujours le même, l’introduction qui, selon les cas, disparaissait d’ailleurs en cours de séance pour être remplacée par autre chose. Une corde posée ne restait pas forcément là.



Sylvianne bouda en réponse.



Elle obtempéra sans sourciller. Franck n’était que son attacheur. Il n’y avait officiellement pas de liens de domination entre eux. Cependant, le modèle réalisait souvent des mouvements pour faciliter les actes de l’attacheur. Ainsi, se lever n’était pas un ordre, juste une demande.


Sylvianne avait eu la chance de pouvoir observer, par caméra interposée en direct et sans enregistrement, l’encordage de Maëlys par Franck, la lutte, la prise de pouvoir, la domination bestiale. Elle avait compris pourquoi elle ne pouvait pas se trouver dans la pièce : les deux protagonistes utilisaient tout l’espace. Maëlys, telle une tigresse sauvage, ne laissait pas le chasseur la prendre. Il devait la maîtriser, la soumettre.


Sylvianne avait eu un peu peur de voir de la violence, mais il n’en fut rien. Ni coup, ni morsure, ni gifle, ni fessée, ni griffure, les protagonistes jouaient dans le respect de l’autre. Si une corde passait autour d’un membre Maëlys immobilisait celui-ci, ce qui permettait à Franck de le ligoter. En revanche, elle n’hésitait pas à défaire les nœuds de ses mains libres. Ainsi, Sylvianne découvrit que Maëlys s’y connaissait également très bien en shibari.


La caméra avait été coupée dès que Maëlys fut immobilisée, la suite de la séance ne regardant que les deux protagonistes. Ces deux-là se connaissaient sur le bout des doigts et se complémentaient à merveille.


Sylvianne ne se voyait pas lutter contre Franck. Beaucoup plus grand et plus fort qu’elle, il l’aurait soumise sans difficulté. Maëlys, de même taille et de même corpulence que Franck, offrait une résistance réelle que Sylvianne ne pourrait jamais proposer. De toute façon, elle n’en avait aucune envie. Elle ne voulait pas lutter. Elle voulait s’abandonner.


Le Takate Kote fut relié au plafond et Franck le tendit, obligeant Sylvianne à se tenir sur la pointe des pieds. Elle gémit. La position n’était pas agréable.



Elle grimaça et gronda. En réponse, Franck passa une corde autour de sa jambe droite et l’attacha rapidement, avant de la relier à un anneau d’une poutre, et de tirer. La jambe s’éleva. Sylvianne se retrouva en équilibre précaire sur un pied… sur la pointe du pied.


Franck s’approcha d’elle. Ce shibari amenait des émotions bien différentes de l’habitude à Sylvianne. Pas de terrier, pas de lapin blanc. L’inconfort la maintenait bien éveillée, dans le monde réel. Il posa sa main sur son ventre et Sylvianne se rendit alors compte de son impuissance. Elle ne pouvait pas l’empêcher de la toucher. Il pouvait la manipuler à loisir.


Sylvianne se sentit redevenir une petite fille. Venait-elle de trouver le méchant loup ? Avait-elle le droit de vouloir entrer dans sa tanière ?

Naturellement, aucun bâillon n’entravant sa bouche, elle pouvait à tout instant demander la fin de la séance et elle aurait obtenu immédiatement gain de cause. Elle se savait en sécurité.


Malgré tout, l’animal ne pouvait s’empêcher de paniquer, empêtré dans ces liens, cette position inconfortable l’obligeant à s’offrir sans restriction, à s’abandonner aux désirs de son attacheur. Forme différente d’abandon, ressemblant davantage à un don de soi qu’à une paix intérieure.


Franck enlaça Sylvianne avant de souffler dans son cou, amenant le modèle à gémir. Un bisou dans le cou tandis qu’une main passait entre les jambes pour découvrir l’abricot humide et sensible. Sylvianne sursauta, voulut se soustraire. Les cordes l’en empêchant, le plaisir monta d’un cran. La respiration haletante, elle gémit de plus belle.


La main se fit plus pressante, précise, douce, parfois tourbillonnante, parfois lente, rendant Sylvianne folle. L’excitation montait. Des vagues de plaisir la parcoururent, mais le plaisir continua à monter. Elle ignorait qu’il existât quoi que ce soit après. Ce déferlement doux et régulier était le seul qu’elle ait jamais connu. Se pouvait-il qu’il y ait autre chose, de plus fort ?


Les mouvements sur son clitoris, alternant tendresse et dureté, douceur et force, lui firent perdre pied. Pas le lapin blanc, mais quelque chose de bien réel, de bien plus puissant aussi. Le plaisir monta et bientôt, elle le sentit, elle exploserait, bientôt, juste…

Tout cessa brusquement.



Il tapota doucement son sexe.



Il détacha sa jambe puis l’attrapa tandis que la corde reliant le buste au plafond tombait à son tour. Il la guida vers le sol et défit les nœuds tandis que Maëlys donnait à boire à Sylvianne à l’aide d’une paille. Elle massa ses poignets endoloris et ne put cacher sa rage, sa détresse, sa colère envers Franck.



Sylvianne, assise par ailleurs, plaça les mains comme demandé. Il noua les poignets avant de remonter le long des avant-bras. Sylvianne lançait des regards insistants envers Franck, qui sembla enfin s’en rendre compte.



Un encordage inconnu d’elle et voilà que l’animal revenait au galop. Sylvianne sentit son cœur s’accélérer tandis que ses bras devenaient soudés l’un à l’autre. Franck passa derrière elle et la coucha aisément sur le dos, l’accompagnant dans sa chute afin qu’elle lui soit agréable et douce.


Les chevilles se retrouvèrent enserrées par des cordes reliées, pour le moment, à rien. Alors que Maelys attrapait les bras, posés sur le ventre, pour les faire passer au-dessus de la tête, Franck attrapait les cordes des chevilles pour les passer dans des anneaux enfichés dans les poutres. Ensemble, ils tirèrent sur les cordes. Les bras reliés à un anneau dont Sylvianne n’avait juste là pas remarqué l’existence, au ras du sol l’empêchaient de protéger son torse. Les cordes tendues aux chevilles obligèrent les hanches à se relever. La suspension partielle dévoilait son intimité trempée sans possibilité d’évasion. Sylvianne lutta dans les liens. Impossible de se soustraire aux regards ni aux gestes.


Franck caressa le sexe offert tandis que Sylvianne gémissait. Il délaissa l’entrejambe, aux plus grands dams du modèle qui se tordit dans le peu de mouvement que lui permettait le shibari, pour s’occuper des seins. Sylvianne sursauta aux caresses, aux pincements, aux prises en main fermes. Elle tira sur ses bras, mais les liens tenaient.


Ce shibari, contrairement au précédent, était extrêmement confortable, fait pour durer. Sylvianne en eut la chair de poule. Combien de temps Franck comptait-il jouer avec elle de la sorte ?



Maëlys apparut pour placer un bandeau sur les yeux de l’attachée.



C’était un appel du pied. Ils avaient convenu que le bandeau faisait partie des possibles, mais en séance, parfois, une limite changeait en fonction du niveau émotionnel. Elle pouvait donc, à tout moment, dire « Pas » suivi de la pratique pour la voir supprimer. Il lui suffisait donc d’annoncer « Pas le bandeau » pour qu’il s’en aille. De plus, un simple « rouge » mettait fin à la séance en elle-même. Sylvianne ne voulait pas retrouver la vue. L’animal venait de parler. Il avait le droit de s’exprimer et Sylvianne en ressentit une immense liberté. Elle n’avait plus à le contenir. Il pouvait s’exprimer sans l’empêcher, elle, de vivre intensément ce moment.


Une immense plénitude s’empara d’elle tandis qu’un objet piquant touchait son épaule droite pour descendre le long de son corps. Elle n’avait aucune idée de la nature de la source de la sensation. À gauche, quelque chose de doux et soyeux la caressait. L’asymétrie la désarçonnait. D’un côté une griffure électrisant ses nerfs, de l’autre la tendresse. Elle ne savait plus que penser, que ressentir, le chaud et le froid, le bien et le mal. Et cette chaleur dans son entrejambe qui réclamait de l’attention.



Sylvianne gémit et se mordilla les lèvres en réponse. Des doigts sur son sexe et Sylvianne décolla immédiatement. Des vagues de satisfaction la submergèrent et comme un peu plus tôt, le plaisir continua à monter, bien au-delà de ce qu’elle avait connu toute sa vie. Franck allait-il la laisser exploser, cette fois-ci ? Ou bien allait-il la priver de cette découverte une fois de plus ?


Les doigts jouaient avec habileté tandis que les cordes la privaient de tout droit de défense. Elle pouvait bouger, pas comme Maëlys qui aimait la restriction totale de mouvement, mais le peu de possibilités qu’elle avait ne servait à rien. Son clitoris restait disponible, quelles que soient ses pathétiques tentatives de le libérer. La main s’éloigna et immédiatement, Sylvianne gémit.



La main retrouva sa place. Les doigts reprirent leur danse experte et Sylvianne fut au bord.



Elle ignorait qu’un tel plaisir fut possible, envahissant, pénétrant, sinuant à travers tous ses membres pour atteindre le cerveau, redescendre pour revenir. Et ces doigts qui ne s’arrêtaient pas, l’obligeant à ressentir encore, et encore, et encore…


Nouvelle explosion et les liens qui maintenaient ce corps perdu, l’empêchant de se soustraire à la perversité de ces doigts habiles et persévérants.



Il voulait la voir jouir encore plus fort ? Était-ce vraiment possible ? Elle était tellement épuisée. Chaque vague la portait plus loin, plus fort, mais elle commençait à venir poindre une douleur nouvelle. Avoir du plaisir pouvait-il faire mal ?



La demande, implacable, mais tellement vraie. Il la voulait, elle. Ça ne s’arrêterait que lorsqu’elle l’accepterait en tant que partenaire. Il réclamait une vraie place, pas le simple attacheur, intermédiaire vers le plaisir. Il voulait être reconnu en tant que source du contentement. Il le méritait amplement. Sylvianne lui faisait entièrement confiance.


S’offrir à lui ne fut pas difficile. Son corps se détendit d’un coup. Ses muscles contractés relâchèrent leur tension et l’orgasme la prit par surprise, tant par sa violence que par sa présence, totale, complète, incommensurable, démesurée. Elle entendit ses propres cris de plaisir, surprise de s’entendre capable de tels rugissements. Elle grognait. Elle criait. Elle miaulait. Elle beuglait. Elle aboyait. Elle hurlait.


La redescente dans ses bras fut douce et agréable. Les caresses tendres, les mots doux, la couverture chaude, le thé et les gâteaux servis par Maëlys, Sylvianne reprit conscience du temps et de l’espace.



Sylvianne rougit.


Le virage à peine dépassé, Emmett lança :



Sylvianne resta muette face à cette déclaration.



Que son mari lui annonce aussi librement ses activités érotiques ne la surprenait pas. Ils en parlaient ouvertement depuis toujours. De ce fait, Sylvianne connaissait déjà le peu d’attrait d’Emmett pour les cordes et le BDSM plus généralement. Résolument vanille, rien d’autre qu’un bon missionnaire ne l’excitait.



Il grogna en réponse. Sylvianne continua :



Sylvianne sourit. Son mari venait enfin de lui demander son avis à elle. Elle explosa de rire. Les séances suivantes promettaient d’être intéressantes.