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n° 20739Fiche technique25554 caractères25554
Temps de lecture estimé : 14 mn
28/01/22
Résumé:  Possibilité de passer une commande groupée, s’adresser à M’sieur Jeannot, 57 rue de Varenne.
Critères:  f fh frousses rousseurs médical uniforme fête strip fmast fellation fgode fdanus hgode jouet aliments confession délire humour -humour
Auteur : Radagast      Envoi mini-message
Un jour aux urgences





Matignon, 31 janvier 2022. Bureau du Premier ministre.





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Les urgences, comme chaque jour, bourdonnaient comme une ruche sous ecstasy. La journée venait à peine de commencer que les ambulances du Samu ou des pompiers amenaient leurs lots d’éclopés alors que le service peinait à résorber ceux de la nuit. Sans compter les contaminations dues à la pandémie.

Le Docteur Emma Tome, chef du service des urgences, arriva l’air catastrophé en compagnie du directeur de l’hôpital, monsieur Marcel Serredent, les poings serrés.



S’ensuivit un brouhaha peuplé d’amabilités envers le gouvernement : « ils viennent encore se montrer, faire leur numéro d’illusionnistes », « ils vont nous dire qu’ils pensent à nous, sont de tout cœur avec nous », « ils viennent une journée, pour foutre la pagaille avec leur service de sécurité et les journalistes ».



Après ces échanges instructifs, Marcel Serredent lâcha la dernière bombe :




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L’eau bue éclate



Annabelle sentait bien une certaine réticence parmi le personnel, elle n’était pas la bienvenue, et son patron encore moins, il faut dire qu’à force de « soutenir » sans vraiment soutenir, plus personne ne croyait à ses belles phrases toutes faites. Il faisait plutôt penser à Dalida – toutes proportions gardées – et à sa chanson paroles, paroles…

Mais on lui avait fourni un équipement, blouse, charlotte, masque et surchaussure. Elle se trimballait dans les couloirs avec un stylo et un bloc de papier couvert de notes et signes cabalistiques ainsi qu’une tablette pour stocker ses données. La direction l’avait affectée à une équipe d’urgentistes triée sur le volet, compétente mais revendicatrice.

Elle suivait en trottinant une infirmière qui lui servait de chaperon et tentait de lui expliquer les bases du métier.



L’arrivée de tout un peloton de militaires, de pompiers, de gendarmes en gilets pare-balles, dans des véhicules blindés, mit fin à la discussion et mit l’équipe de soin en émoi, provoquant des craintes bien légitimes. Mais quand des types en combinaisons anti-explosion débarquèrent, là ce fut carrément la panique. Ils ressemblaient à des scaphandriers ou des extraterrestres en combinaison spatiale.



Les pompiers et militaires extirpaient d’une ambulance une civière, sur laquelle était allongé un type recouvert d’une couverture faite de kevlar.



Le militaire disait cela avec sérieux, mais il y avait une lueur qui ne trompait personne dans son regard. Il ne fallait pas grand-chose pour que le gars explose de rire, normal pour un démineur.



Les infirmières soulevèrent la couverture et poussèrent des exclamations en voyant dépasser des fesses, juste le culot de la douille.



« L’obusier » fut installé sur une table d’opération, les fesses en l’air.



Tous les corps gras trouvés dans l’hôpital, même des savons liquides furent réquisitionnés, puis injectés à l’aide de seringues entre les parois du rectum et l’obus. La pince agrippa le culot du projectile et avec de nombreuses précautions il fut extrait du corps du malheureux, qui gémissait à fendre l’âme.

Puis avec un grand PLOP il sortit sous les vivats et applaudissements des spectateurs.



Puis un militaire osa poser la question à 1 000 €.



Ses explications laissèrent pantoise l’assemblée.

Une fois hors de la chambre du blessé, Annabelle toussota légèrement et posa une question qui la chiffonnait depuis quelques minutes.



Et tous de s’entre-regarder, regarder la porte de la chambre du blessé, puis de lorgner, dubitatifs, vers l’obus qui trônait sur une table.



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Annabelle assista ensuite à une scène digne d’un vaudeville. Un homme arriva avec sa fille blessée lors d’un accident de trottinette, elle avait percuté un réverbère. Sans qu’on lui demande quoique ce soit, il se mit à vociférer que sa gamine n’était pas vaccinée et qu’elle ne le serait jamais.




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OVBI


Elles furent interrompues par l’irruption intempestive de quelques pompiers poussant un brancard. Un homme y était allongé, le visage baigné de sang, son élégante chemise blanche devenue écarlate. Un groupe de soignants le prit en charge, suivis par une Annabelle curieuse.

Ce qui choqua la jeune chargée de mission ne fut pas l’énumération des dommages subis par le malheureux, mais l’attitude des pompiers qui se pliaient de rire à chaque énumération des blessures.



Là, ce fut le délire, c’était à peine si les pompiers pouvaient parler, des larmes coulaient sur les joues et ils se tenaient le ventre.



Comme il semblait que les secouristes se trouvaient dans l’incapacité de les renseigner, il fut décidé de procéder à quelques examens préalables, radios, prise de sang, test PCR et taux d’alcoolémie.

Puis il fut nettoyé de tout ce sang qui le maculait. La radio décela une fracture du nez avec déplacement de la cloison, mais pas de lésion ni sur l’arcade souricière – l’infirmière était une fan de Rvbb – ni sur la pommette.

Par contre, son sourcil était littéralement explosé, il allait arborer un énorme coquard qui allait du front à la joue, avec en plus une vilaine entaille sur la lèvre. Les analyses ne révélèrent aucune infection au Covid, et un taux d’alcoolémie modéré de 0,8 g.

Mais la question restait, qui lui avait fait cette tête au carré ? Il semblait avoir rencontré le grand frère de Tony Yoka.

Alors qu’il se faisait panser, il raconta son histoire, et détrompa les soignants. Ce n’était pas « qui » l’avait agressé, mais « quoi » !



Devant l’incompréhension du corps médical, mais aussi de la chargée de mission auprès du Premier ministre, qui s’apprêtait à faire des révélations extraordinaires à son patron sur une éventuelle vie extraterrestre, le blessé entreprit de raconter son histoire.


J’étais le témoin lors du mariage de mon meilleur poteau, hier soir nous avons organisé un enterrement de vie de garçon du tonnerre de Zeus. Nous n’étions pas très frais ce matin, jour de la cérémonie, mais nous faisions tout de même bonne figure.


On lui avait posé une poche de glace sur le pif tandis que l’infirmière lui injectait un anesthésique autour de sa blessure. En attendant que le produit fasse effet, il continua son récit.


Lors de chaque mariage, vous trouvez les mêmes critères, les parents qui pleurent, de joie ou de chagrin, parce que leur grand bébé prend son envol. Puis vous avez les amis du marié un peu torchés et les amies de la mariée qui gloussent. Puis les autres membres des familles, les oncles, tantes, les cousins et les amis qui pensent mettre de l’ambiance mais te cassent les oreilles et le reste. Car dans tout mariage qui se respecte, il y a toujours un âne bâté qui décide de lancer… La Chenille. Et vas-y que toute la noce se mette à la queue leu leu et que tu te retrouves coincé entre le vieil oncle qui pue des dessous de bras et la tante qui a les tympans en peau de saucisson et qui croit que tout le monde est dur de la feuille et te gueule dans les esgourdes mets tes deux pieds en canard… Alors j’ai fui, prétextant quelques troubles intestinaux ou un coup de fil urgent. J’ai erré dans le bâtiment, et à un moment, j’ai entendu des rires, des gloussements et des gémissements venus d’une pièce.


Il serra les dents quand le médecin lui toucha la plaie sur le front, mais il continua son récit pour ne plus songer à la douleur.


Alors j’ai tourné la poignée, espérant trouver un peu de réconfort après l’épisode des « chenilles processionnaires » mais je suis resté comme un con sur le pas de la porte, tétanisé par le spectacle qui s’offrait à moi.


Le praticien commençait à lui faire des points sur l’arcade et il grimaçait.


Les amies de la mariée, ses demoiselles d’honneur et sa témouine s’étaient cautérisées pour lui offrir un cadeau qu’elles ne pouvaient déballer devant tout le monde. Elles étaient parties du principe que le marié ayant enterré sa vie de garçon la veille ne serait plus bon à rien pour la nuit de noces – ce en quoi elles avaient raison, il tenait à peine debout devant le maire et le curé. Alors elles avaient dégotté je ne sais où la Rolls des godemichets, la Ferrari des sex-toys : le Rocco IV, le gode des stars et la star des godes. Trente-cinq centimètres de long, quatre et demi de diamètre et d’un poids de cinq cents grammes.


Il poussa un grand soupir.


Je connais tout car elles m’ont lu la notice et le mode d’emploi en attendant les secours ! Ce truc ne fonctionne pas avec des piles LR3, mais avec une batterie rechargeable, vingt modes de vibrations différentes, marche avant et arrière, peut faire MP3 et vibrer sur du Orelsan, du Booba ou du Mariah Carey à la Noël, ou avec Le zizi de Pierre Perret. Elles ont voulu l’essayer de suite. Alors elles se sont isolées dans cette pièce et quand je suis entré, j’ai vu la témouine, Manon, une mignonne rouquine allongée sur une table, la robe retroussée jusqu’aux aisselles, les jambes écartées, avec dans sa jolie cramouille rousse le Rocco IV vibrant et bourdonnant enfoncé jusqu’à la garde, tandis qu’elle se trémoussait et feulait comme une lionne. J’en ai été tout esbaudi. J’en suis resté figé.


Il en avait des étoiles plein son œil valide.


Je ne sais pas si elle a eu un orgasme, ou si elle a été surprise de me voir arriver, ou plus sûrement les deux, mais lorsque je suis entré elle a gueulé encore plus fort, a contracté les muscles de sa Sainte-Chapelle, du coup le bidule a été éjecté à la vitesse du son, je l’ai vu arriver sur moi vibrant et menaçant, je n’ai rien pu faire pour l’éviter. Elle n’a pas une chatte, mais une catapulte, un trébuchet. Il tournoyait sur lui-même, tantôt je voyais le gland, tantôt les couilles. Il m’est atterri en pleine poire, l’Ovbi, l’Objet Vibrant Bien Identifié, du côté le plus rigide, côté couilles, là où se trouve la batterie.


Toute l’assemblée éclata de rire, le médecin faillit en rater son point de croix.




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Annabelle avait bien vu des reportages ou lu des rapports sur les urgences des hôpitaux, des services débordés, en sous-effectifs, avec des soignants qui couraient partout, des malades qui attendaient ou qui engueulaient tout le monde, ou pire, devenaient violents.

Mais jamais elle ne se serait imaginée se trouver en dessous de la réalité.

Un ballet incessant d’ambulances amenait des hommes des femmes ou des enfants blessés, victimes d’accidents de la circulation ou de malaises. Début février, les conditions climatiques rendaient glissants les routes et les trottoirs avec son lot de fractures de toutes sortes. Ou des personnes âgées qui déliraient.

L’été, ce n’était guère mieux selon les soignants, avec les coups de chaleur, brûlures de barbecue ou insolations.

Le pire étant les blessés avinés, agités et violents, qui souvent dégueulaient partout et insultaient tout le monde, si ce n’est pire.



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Chandeleur



Annabelle s’apprêtait à quitter le service des urgences quand le Smur amena un homme qui geignait à fendre l’âme. Elle avait noué des liens amicaux avec les infirmiers, aides-soignants et médecins, aussi elle suivit son équipe qui s’affairait autour du blessé avant de partir.

Elle ne put réprimer un cri d’effroi en voyant les plaies du malheureux.



Tous les hommes compatirent aux déboires du pauvre bougre, avec des frissons jusque dans le rectum. Un ou une cannibale rôdait-il en ville ?



Comme il ne portait qu’un marcel, il ne pouvait prouver ses dires par un certificat de vaccination, il ne possédait aucun papier sur lui.



Le gars semblait moins souffrir grâce à l’anesthésie. Par contre, les médecins et infirmières se demandaient qui lui avait fait ça, et surtout, comment. À chaque question plus indiscrète, il répondait de façon très évasive.



Alors qu’il répétait ces phrases en une sorte de mantra, une autre équipe d’ambulanciers arriva aux urgences en catastrophe.

Ils amenaient une jeune femme sobrement vêtue d’une petite culotte. Elle souffrait d’une très vilaine brûlure sur l’épaule, d’un œil poché, d’une longue plaie sur le cuir chevelu, de la lèvre supérieure éclatée et certainement d’une fracture du nez. Elle semblait en état de choc.



Une secrétaire venue chercher des documents pour l’admission de « l’homme à l’obus » s’écria : Mais, je les connais !



Le mordu remua dans son brancard.



Avec des sanglots dans la voix, Noëlle entreprit son récit.



Les sourires coquins de tout l’auditoire en disaient long sur l’état d’esprit qui régnait dans la salle des urgences. Ça donnait même des idées à certains.



Beaucoup imaginaient la scène et se retenaient de rire.




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Annabelle mettait à jour ses notes en vue du rapport qu’elle allait faire au Premier ministre. Elle disait aussi au revoir à ses hôtes d’un jour, des gens sympathiques mais épuisés. Des gens avec qui, en une seule journée, elle avait tissé des liens d’amitié. Des gens qui, à force d’heures supplémentaires et de journées à rallonges, n’en pouvaient plus.

C’est ce qu’elle dirait au Premier ministre. Elle y ajoutait des annotations qui ne sortiront jamais du bureau.


– Lui dire de faire attention en faisant des crêpes, il a deux mains gauches ;

– lui demander aussi de commander pour Matignon un lot de Rocco IV, si près des élections il ne refusera pas ;

– en envoyer quelques exemplaires dans ce service, pour les remercier de leur accueil.