n° 20758 | Fiche technique | 30636 caractères | 30636Temps de lecture estimé : 21 mn | 05/02/22 |
Résumé: Nous sommes en 1886, Paris se prépare pour l’Exposition Universelle. Comme tous les jours à midi, des nuées de midinettes envahissent les rues du quartier Saint-Honoré. | ||||
Critères: fh jardin boitenuit amour soubrette caresses init nostalgie portrait | ||||
Auteur : Patrick Paris Envoi mini-message |
Concours : C'est la première et la dernière fois |
Nous sommes en 1886, Paris se prépare à recevoir des milliers de touristes du monde entier pour l’Exposition Universelle prévue trois années plus tard. La vitrine du savoir-faire technique français pour fêter le centenaire de la Révolution.
Comme tous les jours à midi quand viennent les beaux jours, des nuées de midinettes envahissent les rues du quartier Saint-Honoré. Elles sont toutes aussi charmantes les unes que les autres. Leurs silhouettes attirent les regards, la taille fine, un peu cambrée, robes légères, sacs à main et chapeaux, une femme honnête ne sort jamais sans chapeau.
— --oOo---
Lison vient de fêter ses 20 ans. Elle est couseuse dans la maison de couture Jacques Doucet bien connue de la capitale, rue de la Paix, au fond de la place Vendôme. Elle est fière d’habiller les grandes tragédiennes Réjane et Sarah Bernhardt, et plusieurs courtisanes que l’on peut croiser sur les Grands Boulevards.
Toujours élégante, Lison sent bon le printemps. Elle maintient sa jupe pour marcher, laissant entrevoir son jupon et un pied chaussé d’une fine bottine lacée. Son corsage est ajusté, mettant ses hanches et sa poitrine en valeur, son décolleté est sage. Elle est fière d’avoir tout cousu de ses propres mains.
Avec ses amies, elle aime papoter, se promener dans les parcs, et faire la dînette sur un banc à midi, d’où le nom qu’on leur a donné. Mais leur occupation favorite est, bien sûr, d’observer les jeunes dandys qui se pavanent dans les allées, toujours à la dernière mode, chapeau haut de forme, canne à pommeau à la main.
Dès que l’un d’eux jette un regard sur le groupe de midinettes, celles-ci se retournent en pouffant et en rougissant, se demandant laquelle a été la plus remarquée.
Le jardin des Tuileries est leur parc de prédilection, mais la curiosité aidant, elles aiment traverser la Seine pour découvrir ce grand terrain devant les Invalides, le Champ-de-Mars, haut lieu de la Révolution. C’est sur ce terrain que l’exposition doit se tenir.
— --oOo---
Fils d’un entrepreneur ayant fait fortune avec la révolution industrielle, Charles-Henri, sortant de l’école des Arts et Manufactures, a trouvé un poste d’ingénieur dans les Ateliers de constructions métalliques à Levallois-Perret, qui a des chantiers partout en France.
Son père a fait faillite après la guerre de 1870, il s’est suicidé laissant sa femme et ses cinq enfants se débrouiller avec les créanciers. Eh oui, il avait cinq enfants, sans compter celui mort en couches, ni ceux de ses différentes maîtresses, prouvant qu’il avait bien œuvré pour la patrie.
Il était aussi piètre mari que piètre financier.
Sa femme, elle, savait compter. Les comptes soldés, elle a pu conserver un petit pécule, et leur hôtel particulier du centre de la capitale dans lequel elle éleva seule, avec l’abnégation des femmes abandonnées, ses enfants qui ne manquèrent de rien.
En arrivant à Levallois-Perret, Charles-Henri eut la chance de pouvoir participer au grand projet de la statue de la Liberté, un pylône métallique supportant des plaques de cuivre martelées. Construite à Paris, la statue a passé l’océan en plusieurs morceaux, offerte par le peuple français au peuple américain, pour célébrer le centenaire de la Déclaration d’Indépendance.
A 26 ans, Charles-Henri est ravi d’avoir été associé à une telle œuvre devenue le symbole de l’Amérique. Il a une admiration sans bornes pour son patron, qui l’a ensuite envoyé en Auvergne superviser la construction d’un viaduc.
Avec ses amis, habillé à la dernière mode, il aime flâner dans les rues de la Capitale. Ensemble, ils refont le monde comme tous les jeunes, mais leurs principales préoccupations sont les jeunes filles qui sortent des boutiques du quartier. Il les regarde passer, imaginant la moins farouche qu’il pourrait mettre dans son lit.
— --oOo---
En ce jour de grand soleil, Lison s’est attardée avec ses amies dans son parc favori, elle se presse pour ne pas être en retard. Dans une allée, la faute au chemin ou à ses bottines, elle trébuche. En la voyant par terre, ses amies rient et se précipitent pour l’aider à se relever. Plus rapide, Charles-Henri, qui passait par là, la relève d’une main ferme :
Ladite demoiselle rougit en s’appuyant sur le bras de son sauveteur. Voulant se remettre debout, sa cheville lui fait mal, elle doit s’accrocher pour ne pas retomber, elle boite un peu, enfin légèrement, très légèrement. Charles-Henri galant se propose de la raccompagner, elle accepte avec un pâle sourire. Il lui prête sa canne sur laquelle elle pourra s’appuyer tandis qu’il la tient par le bras.
En arrivant à l’atelier de couture, elle le regarde avec reconnaissance :
Le lendemain, le temps est maussade, il faut attendre trois jours pour voir le soleil revenir. Sur un banc des tuileries, ce midi, Lison termine de manger avec ses amies. Cette fois pas question de courir, elle veut rentrer plus tôt, quand elle aperçoit un groupe de jeunes gens qui s’avance vers elle. Elle le reconnaît, Charles-Henri est parmi eux, lui aussi l’a reconnu :
Il se baisse devant elle, lui touche pied :
Sans attendre sa réponse, il lui prend le mollet pour tester sa cheville. Ce simple contact la fait frissonner.
Troublée, elle se sauve avec ses amies.
Le lendemain, en sortant elle le voit, il est là Place Vendôme, il se dirige directement vers elle :
Elle ne dit pas non.
L’habitude est vite prise, au fil des jours Lison délaisse ses amies, pour aller au parc avec Charles-Henri. Ils marchent côte à côte, elle lui parle de sa vie, du travail à l’atelier, mais conclut rapidement :
Charles-Henri, lui, aime se raconter, aime l’éblouir. Lison écoute si bien. Jeune ingénieur, après avoir travaillé quelque temps sur la statue de la Liberté, il a véritablement commencé sa carrière à Garabit en Auvergne. Il lui parle du chantier, de ce viaduc tout en fer, une prouesse technique, le plus haut viaduc du monde, la plus grande arche.
Il n’insiste pas, les femmes ne peuvent rien comprendre à la technique. Inutile non plus d’évoquer son nouveau projet, une idée de son patron pour l’exposition, une tour en fer, la plus haute du monde.
Lison est si charmante, il préfère lui parler de ses yeux, de son sourire, de sa grâce.
— --oOo---
Aujourd’hui, alors qu’ils se dirigent vers le parc, des nuages s’amoncellent, en quelques minutes le ciel s’obscurcit, des gouttes commencent à tomber. Toujours galant, Charles-Henri abrite Lison de ses bras, elle se blottit contre lui pour éviter d’être trop mouillée. En courant, ils se mettent à l’abri d’une porte cochère. Reprenant leur souffle, riant en voyant l’eau ruisseler sur leurs visages, leurs yeux se croisent. Subitement sérieux, il la prend dans ses bras, leurs lèvres se touchent en un tendre baiser, presque innocent. Bien vite leurs bouches se soudent dans un baiser plus passionné.
La pluie a cessé, toujours dans les bras de Charles-Henri, Lison se rend compte que la pause est terminée, il faut rentrer rapidement à l’atelier. Un dernier baiser rapide, elle part en courant pour ne pas être en retard.
Les jours qui suivent, malgré le soleil qui est revenu, Charles-Henri pose son bras sur les épaules de Lison comme pour la protéger, elle ne dit rien, elle est bien. Chaque fois que l’occasion se présente, il l’entraîne dans une petite rue déserte pour l’embrasser à l’abri des regards. Elle s’abandonne dans ses bras durant quelques secondes, sans aucune retenue.
Aujourd’hui, ils marchent jusqu’à une porte qu’elle ne connaît pas, Lison découvre l’appartement de Charles-Henri, elle le suit dans sa chambre.
Comme tout jeune homme de bonne famille, il a lu un manuel des bonnes manières. Pour ne pas heurter la pudeur naturelle de Lison, ne voulant pas l’effrayer, il éteint la lumière. Elle se laisse déshabiller sans rien dire et se glisse nue entre les draps bien frais. Il la rejoint après avoir ôté ses vêtements. Elle l’attendait, légèrement anxieuse. Il l’embrasse en la caressant du bout des doigts. Leurs corps se rejoignent, son sexe bien tendu touche la cuisse de la belle qui réalise que le sexe de son petit frère qu’elle avait vu dans sa jeunesse, n’avait pas cette taille.
La sentant réceptive, Charles-Henri n’a plus peur de lui déplaire. Lui caressant les seins, jouant avec ses tétons, il dévore son corps de baisers. Quand il arrive sur son pubis, Lison, étonnée de cette caresse, ne sait quelle attitude adopter, elle le laisse faire, il a l’air de savoir où il va. Elle frémit quand elle sent sa langue lui lécher ses lèvres intimes, instinctivement elle écarte les jambes. Au début ça la chatouillait un peu, mais très vite elle trouve que ce n’est pas désagréable. Elle retient sa respiration quand en remontant il l’embrasse avec fougue, elle lui rend son baiser, ça elle sait faire. Elle aime sentir ses seins se presser sur sa poitrine dont les poils la caressent voluptueusement. Il lui prend la main, la pose sur son sexe, à ce contact inattendu elle sursaute et retire sa main comme si elle venait de se brûler. Il ne fait aucune remarque, reprenant ses baisers enflammés.
Se trouvant un peu sotte, Lison ne veut pas passer pour une oie blanche, elle tend la main vers cette chose qu’elle a hâte de découvrir. C’est dur, c’est doux, elle se rend vite compte qu’il apprécie son initiative. Elle accélère le mouvement en le branlant, sans imaginer le bien que cela lui procure. Il s’approche, se positionne devant l’intimité de sa belle devenue humide sans savoir comment ni pourquoi, ce qui facilite la pénétration. Elle ferme les yeux, étonnée de ne pas avoir mal comme on avait pu le lui dire, bien au contraire c’est très plaisant.
Charles-Henri joue avec son petit bouton, tout en accélérant ses va-et-vient. Il se crispe, elle sent un liquide chaud, le plaisir la submerge, inattendu, violent, elle laisse échapper un petit cri signe de son premier orgasme.
Pas de temps à perdre, ayant encore peur d’être en retard pour la reprise du travail, elle se lève d’un bond. Grâce à la bonne éducation qu’il a reçue de sa mère, Charles-Henri se fait discret, il la laisse seule pour faire un brin de toilette. Il a prévu un broc d’eau, un savon, une serviette et une cuvette à cet effet.
Lison sort quelques minutes plus tard, et sans avoir le temps de penser à ce qu’ils viennent de faire, arrive essoufflée à l’atelier de couture.
Depuis ce jour, ils se promènent de moins en moins, pour passer plus de temps dans la chambre de Charles-Henri. Un jour, il laisse la lumière allumée. Curieuse de tout, Lison va enfin le voir nu. Agréablement surprise, elle n’en laisse rien paraître. Une fille bien élevée ne doit pas montrer le plaisir qu’elle prend. Malgré sa volonté de bien faire, Lison a du mal à ne pas exprimer bruyamment sa jouissance quand elle sent monter un orgasme. Ce qui conforte Charles-Henri en son pouvoir de séduction.
Jamais elle n’oserait parler de ses désirs, de ce qu’elle aime. C’est toujours lui qui décide, ravi de mettre en pratique ce qu’il a appris avec les pensionnaires des maisons de tolérance du quartier Saint-Lazare qu’il fréquente régulièrement avec ses amis. Il multiplie les positions, lui fait comprendre qu’elle peut le toucher, le caresser, le prendre dans sa bouche.
Lison est une bonne élève, elle apprend vite, tout lui plaît. En quelques jours, elle devient une parfaite amante, grâce aux conseils éclairés de Charles-Henri, et à ses dispositions naturelles.
— --oOo---
Les semaines passent. Lison vient régulièrement chez Charles-Henri, elle ne peut se passer de lui, il est tellement inventif, ses jeux sont si agréables.
Ce jour-là, nue, allongée sur son grand lit, Lison joue avec la bite de son amant. Elle aime la faire se dresser entre ses doigts, c’est pour elle un mystère toujours recommencé. Tandis qu’il tente de lui expliquer son travail, en lui montrant les plans d’une tour dont son patron vient d’acheter les brevets à deux ingénieurs visionnaires. Il a l’intention de la construire en plein Paris en bord de Seine, sur le grand terrain devant les invalides.
Lison regarde le sexe bien tendu de son Charles-Henri, en souriant :
Cette réflexion le fait sourire :
Allusion au patron de la société qui l’emploie pour son projet grandiose, les Ateliers Gustave Eiffel. Cette tour, ce grand truc en fer qui ne servira jamais à rien, mais dont il est très fier. Il lui dit joyeux « Il faudra planter un drapeau au sommet ». Lison, regardant le gland qu’elle vient de faire apparaître, trouve cette idée saugrenue, mais si ça peut lui faire plaisir, elle ne va pas le contrarier.
Exalté, Charles-Henri veut faire partager son enthousiasme à Lison :
Républicain convaincu, Charles-Henri raconte à Lison les bienfaits de la révolution. Celle-ci, dans sa candeur, ne comprend pas pourquoi couper la tête d’un roi sans défense est la marque d’une grande démocratie. Elle est bien naïve.
Il n’essaye pas de lui expliquer, « La politique n’est pas une affaire de femme » conclut-il en pensant qu’il est temps de passer aux choses sérieuses. Il bascule Lison sur le lit, qui se demandait depuis un moment pourquoi elle était venue.
— --oOo---
Charles-Henri, venu la chercher à son travail, crie, gesticule. En proie à une grande agitation, il lit les titres :
« Ouah ! il en connaît des gens mon Charles-Henri », se dit-elle sans l’interrompre.
Lison ouvre de grands yeux, Charles-Henri continue :
« Il dit n’importe quoi mon Charles-Henri, quel rêveur ! », pense-t-elle sans rien oser lui dire.
Lui râlant et gesticulant contre ses détracteurs, ils arrivent dans son appartement. Voyant qu’il ne se calme pas, Lison se dit qu’elle doit faire quelque chose. Elle l’allonge sur son lit, le déshabille en lui faisant des petits baisers, l’entendant encore maugréer contre tous ceux qui ne comprennent pas que cette tour sera un chef-d’œuvre.
Sa robe, son jupon, ses sous-vêtements se retrouvent rapidement sur le tapis. Nue, elle s’assoit au bord du lit, l’embrasse, le caresse, prend son sexe à pleines mains, le lèche de haut en bas et le fait glisser entre ses lèvres. Tout en s’appliquant à lui prodiguer la fellation qui doit le calmer, elle lui caresse les bourses, et se prend à jouer avec son petit trou. Une amie lui a dit que les hommes aiment ça, elle se rend vite compte que Charles-Henri est comme tous les hommes. Ne tenant plus, il jouit très vite et lui remplit la bouche dans un râle libérateur. Elle qui jusque-là avait toujours refusé, malgré ses demandes répétées, avale en se disant « ce n’est pas si mauvais, un peu salé, pas déplaisant ».
Agréablement surpris par la détermination de sa belle, Charles-Henri pense lui faire profiter de ce qu’il a appris avec la Grande Lulu. Il la retourne, se colle à ses fesses, elle se cambre lui permettant de la pénétrer rapidement. D’instinct, elle pousse ses fesses et ondule du bassin sous les coups puissants de son amant qui décidément a des ressources. Un orgasme fulgurant la saisie, ils jouissent ensemble et s’écroulent dans les bras l’un de l’autre. Elle s’assoupit de fatigue, sans même avoir la force d’aller se laver.
Cette fois, Lison arriva en retard et reçut un blâme. Elle se jura de faire plus attention à l’avenir.
— --oOo---
Par un beau dimanche d’août, Charles-Henri emmène Lison danser dans une guinguette des bords de Marne.
Il est beau en venant la chercher, avec un canotier et un petit foulard autour du cou qui le fait ressembler à un Apache. Pour lui plaire, elle a mis sa robe fleurie avec deux jupons du plus bel effet, et une large capeline pour la protéger du soleil, afin de ne pas altérer la blancheur de son teint.
Toute une expédition, il faut aller Gare de la Bastille en tramway pour prendre le train pour Nogent. Le voyage est long, mais le paysage les enchante.
En arrivant, ils se dirigent vers un champ en bordure du fleuve. Lison a tout prévu pour un pique-nique, elle étend une belle nappe fleurit et sort leur déjeuner du panier en osier qu’elle a apporté, repas léger, arrosé d’un petit rosé plus très frais qui leur monte vite à la tête. Après avoir rangé ses affaires dans le panier, Lison rejoint Charles-Henri qui s’est déjà allongé dans l’herbe.
Assise contre un arbre, la tête de son amant sur ses jambes, elle lui caresse tendrement les cheveux. Il s’est assoupi. Elle se demande combien de temps durera son bonheur, ne va-t-il pas se lasser d’elle ? Elle tient à lui, mais jamais elle n’oserait lui avouer ses sentiments. Et lui, l’aimait-il ? Impossible, Charles-Henri ne pouvait aimer une jeune fille qui n’est pas de son rang.
La musique la tire de ses réflexions. Elle a envie de danser, ils sont bien venus pour ça. Elle le réveille doucement, l’embrasse et l’entraîne vers la piste de danse. L’orchestre vient juste d’entamer un cancan, histoire de réveiller les danseurs qui commencent à somnoler. Plutôt drôle à voir, tout le monde essaie, mais personne ne lève la jambe comme à Montmartre.
Emportés par le tourbillon, Lison ne quitte pas les bras de Charles-Henri, enchaînant les danses tout l’après-midi. Étourdie, elle se laisse tomber sur une chaise, et sourit à son cavalier venu lui apporter un verre, avant de retourner sur la piste pour ne pas perdre une minute de cet après-midi enchanteur.
Sans faire attention aux autres danseurs, Charles-Henri l’embrasse, ses mains lui font comprendre combien il a envie d’elle. Ah ! s’ils avaient été seuls, Lison se serait bien laissée aller dans l’herbe, près de la rivière.
Tout à une fin, le soleil commence à décliner. Dernière danse, une polka piquée endiablée, à laquelle tout le monde participe, les laisse essoufflés et en sueur sur le bord de la piste. Il est temps de rentrer. Un peu tassés dans le train de retour, ils somnolent dans les bras l’un de l’autre, heureux et fatigués de cette journée en plein air.
À cette heure plus de tramway, il faut rentrer à pied. Main dans la main, Charles-Henri raccompagne Lison, les rues faiblement éclairées par les becs à gaz abritent leurs confidences. Sans un mot, il monte dans sa petite chambre sous les toits. En s’embrassant, ils se déshabillent, avant de s’allonger sur le lit de Lison. La nuit est à eux, une nuit entière à s’aimer, comme elle en rêve depuis si longtemps.
Au matin, surprise, étrange phénomène alors qu’il dort encore, sans même l’avoir touché, Lison découvre que Charles-Henri bande comme jamais elle ne l’avait vu bander. Décidément il l’étonnera toujours. Bien décidée à en profiter, elle le cajole, l’embrasse, ce qui réveille son amant heureux de cette caresse matinale. Bien vite, elle le prend dans entre ses lèvres, et s’applique à le satisfaire :
Lison lui répond par un sourire, en reprenant sa tâche. Elle lève enfin la tête, et tendrement vient lui offrir ses lèvres. Allongé sur le dos, la Tour bien dressée, Charles-Henri l’invite à s’asseoir sur lui. Sans hésiter, elle le chevauche et s’empale d’un seul coup, les mains appuyées sur ses épaules. Il lui caresse tendrement les seins, jouant avec ses tétons durcis de plaisir. Un orgasme la saisit, elle se laisse retomber sur lui, le plaisir les envahit, leurs lèvres soudées par un tendre baiser. Elle a du mal à reprendre sa respiration, s’abandonnant dans ses bras qui ne la lâchent pas.
Mais il est tard, Lison doit partir travailler. Après un rapide petit-déjeuner, elle part laissant Charles-Henri qui lui a tout son temps. Le soir en rentrant, elle a l’agréable surprise de le retrouver chez elle. Ils vont dîner dans un petit restaurant du quartier, au dessert il lui murmure en souriant :
— --oOo---
Une année a passé. Le chantier sur le Champ de Mars est bien avancé. Toujours curieuse, Lison est excitée d’aller voir à quoi il ressemble. Ils se retrouvent Place de la Concorde, et passent le pont d’Iéna se mêlant aux nombreux badauds venus, comme eux, voir les gros piliers de béton sortis de terre et les poutrelles d’acier qui s’élancent vers le ciel.
Le chantier est grandiose, des dizaines d’ouvriers s’affairent. Toujours enthousiaste, Charles-Henri explique chaque phase de la construction, saluant au passage les contremaîtres et les ouvriers. Il semble connaître tout le monde.
Assis sur un banc, toujours le même, ils se tiennent par la main, impossible de s’embrasser en public, ça ne se fait pas, un peu de tenue que diable ! Lison a une grande nouvelle, elle n’y tient plus :
Charles-Henri pense vraiment à tout, mais ce qu’il oublie de dire, c’est que l’usine dont il doit prendre la direction, se trouve pas très loin de Nancy, à plus de 300 km de là.
Un mois plus tard, Lison s’installe dans un petit studio, sous les yeux jaloux de ses amies de la maison de couture, qui toutes cherchent le généreux protecteur qui leur permettra d’arrêter de travailler.
— --oOo---
Charles-Henri se marie pour plaire à sa mère, c’est dans l’ordre des choses. Mais il ne change pas ses habitudes pour autant. Il rend régulièrement visite à Lison, et une fois par semaine, il retrouve ses amis dans un des multiples établissements de plaisir de la capitale.
Lison est fière à son bras. Certains promeneurs se retournent sur le passage de ce joli couple, dont la taille de la dame ne laisse de doute à personne. Se reposant sur leur banc, ils regardent la tour, majestueuse, le sommet sera bientôt atteint.
Charles-Henri, toujours perdu dans ses pensées, fasciné par la dame de fer qui s’élève devant eux :
La date du mariage approche, la naissance de bébé aussi. Charles-Henri vient toujours visiter Lison à midi pendant sa pause, ou le soir en sortant du travail, parfois il passe la nuit avec elle. Enfin quand mademoiselle de la Ruche lui en laisse le temps, c’est-à-dire très souvent.
Il va passer sa dernière soirée de célibataire avec ses amis, aux Nymphettes, le nouvel établissement ouvert à Montmartre où il a rencontré une charmante jeune femme originaire du Tonkin. Tandis que Lison met au monde un gros bébé joufflu, son petit homme.
La Tour est inaugurée juste à temps, avant l’ouverture de l’exposition. Lison a reçu une invitation à la fête de fin de chantier, elle est fière de l’honneur rendu à tous les ouvriers, mais surtout à son amant dont elle a confié le fils à une voisine pour l’après-midi.
Deux mois après, Charles-Henri l’invite à visiter l’exposition, les pavillons des différentes nations, ceux des colonies, sans oublier de monter sur la Tour pour découvrir Paris comme elle ne l’a jamais vu. Il l’emmène voir le bureau de monsieur Eiffel tout en haut, elle a le vertige malgré ses paroles rassurantes. Après un baiser à 300 m du sol, s’agrippant à son bras, elle redescend très vite retrouver la terre ferme. Mais ce qu’elle préfère, c’est le Wild West Show de Buffalo Bill, William Cody en personne entouré de véritables indiens venus d’Amérique. Les coups de feu et les cavalcades des chevaux l’effraient un peu, mais c’est excitant, et la main de Charles-Henri est si rassurante.
Son travail terminé, en accord avec Gustave Eiffel, Charles-Henri part en Lorraine diriger l’usine métallurgique de son beau-père. Il dit au revoir à Lison après une dernière nuit d’amour, l’assurant qu’il passera la voir lors de ses voyages dans la capitale.
Il ne tint pas parole. Absorbé par ses nouvelles fonctions, il oublia Lison. À moins qu’il ne soit jamais revenu à Paris, ce qui parait étonnant, certains disent l’avoir vu du côté des Nymphettes.
Il fit quatre enfants à sa femme, quatre filles dont deux jumelles, il en laissa l’éducation à son épouse étant trop préoccupé par ses multiples activités. Fort de son expérience, il développa l’usine familiale au-delà de toutes espérances. Les temps étaient favorables à l’industrie, il fit fortune dans les années qui suivirent en vendant des canons.
— --oOo---
1897, Paris se répare pour la prochaine Exposition Universelle qui marquera le changement de siècle. Tout le monde parle d’un grand projet, souterrain cette fois, un métropolitain comme à Londres, New York ou Chicago. Ce n’est pas le premier, ce ne sera pas le dernier.
Résignée, Lison se fit rapidement une raison après le départ de Charles-Henri. Lors d’une matinée à l’Opéra, elle trouva un gentil protecteur pour assurer le loyer de son studio, et lui permettre d’élever son enfant sans avoir besoin de retourner dans la maison de couture.
Deux années plus tard, elle fit la connaissance d’Albert, ouvrier aux ateliers d’entretien de la ligne de Chemin de Fer de Paris à Saint-Germain-en-Laye, face au square des Batignolles. Ils s’aimaient d’un amour sincère. Il l’épousa et adopta son enfant, sans jamais vouloir savoir par quelle opération du Saint-Esprit ce petit était venu au monde.
Maintenant, ils habitent dans un logement mis à disposition des ouvriers par la société. C’est là qu’elle donna à Albert deux charmantes petites filles.
Aux beaux jours, Lison aime prendre l’omnibus dont les chevaux amusent les enfants, pour aller au Champ de Mars se promener sous la grande tour, sa tour, qui n’a pas été détruite après l’exposition comme cela était prévu.
Ses enfants jouent devant elle, courent dans tous les sens. Lison repense toujours avec un peu de mélancolie à ses années d’insouciance, à sa jeunesse.
Elle reconnaît la voix. Ce n’est plus le jeune dandy qu’elle a connu, c’est un monsieur dont le ventre atteste la réussite sociale.
Il lui sourit, comme s’ils s’étaient quittés hier. Il redevient le jeune homme qu’il était :
Elle est heureuse de le revoir, sa présence remue tellement de souvenirs, elle a tant de choses à lui dire.
Marchant l’un à côté de l’autre, il ne fait pas attention aux trois enfants qui jouent devant eux. Il parle de lui, de son travail, des quatre enfants que lui a donnés sa femme, sans se préoccuper de savoir ce que Lison a fait depuis toutes ces années.
Sortant sa montre gousset en or de la petite poche de son gilet :
Sa plaisanterie ne fait plus rire Lison. Sans même lui faire une bise, il part rapidement. Elle le regarde s’éloigner, déçue qu’il n’ait même pas fait attention à son fils.
C’est vrai qu’il est tard, la nuit va bientôt tomber. Il faut aussi qu’elle rentre chez elle. Le cœur gros, Lison pousse un gros soupir et appelle ses enfants :