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n° 20894Fiche technique20665 caractères20665
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Temps de lecture estimé : 15 mn
01/05/22
Résumé:  C'est la luuuutte finaaaaale... Enfin, une légère variante.
Critères:  fh travail
Auteur : ericcontact            Envoi mini-message

Projet de groupe : Jeu "1er mai 2022"
Le premier mai, je fais ce qu'il me plaît.



Je claquai la porte de son bureau en sortant, y laissant toutes mes affaires comme je l’avais fait de si nombreuses fois au cours des années passées. Mais particulièrement plus souvent depuis deux mois que notre fabrique se cassait franchement la gueule, mise à terre par Amazon et ses vendeurs à vingt centimes la coque.

La déléguée syndicale que j’étais devait pourtant bien le reconnaître : il n’y avait plus rien à faire de ce côté-là.

Mais ce qui me mettait hors de moi, c’était que notre patron, Marc Terrier, n’avait plus la niaque pour se battre.


Je sortis du petit bâtiment à un étage qui jouxtait notre grand entrepôt et la fabrique. J’en fis le tour, j’avais besoin de prendre l’air et je savais parfaitement ce qui me ferait du bien. Passé l’angle sud, je vis le petit parc où les arbres et la pelouse accueillaient ce jour, comme chaque année, le barbecue des employés et de leur famille. Sauf que, cette année, l’ambiance n’était pas tout à fait à la fête, évidemment.



Elle revint 9 minutes et 57 secondes plus tard avec le sandwich et la bière. Un centième de mieux qu’Usain Bolt. Quand je laissai tomber mes fesses sur le petit muret, Malika se pencha sur moi, toujours aussi adorable.



Je mordis dans mon sandwich et m’envoyai une lampée dans la gorge. Là, au moins, je ressemblai à une syndicaliste. Cette pensée me fit sourire.



Elle n’avait pas tort, mais je ne l’aurais jamais avoué. Marc était un gars bien, assez discret et joliment taillé dans le style mince échevelé. Et avant que sa morue de trophy-wife ne le largue, il avait un esprit vif et rapide et une attention pour ses employés dont il se sentait responsable. Je n’avais pas grand-chose à défendre, comme déléguée, et notre combat théorique patron-VS-syndicaliste avait souvent tourné à la collaboration intelligente.



On éclata de rire toutes les deux. Nos yeux se tournèrent vers la pelouse.

La petite foule éparse au milieu du parc discutait, s’inquiétait, jouait avec les enfants ou bien certains attendaient juste que le couperet ne tombe à un moment ou à un autre. Tout le monde était au courant. Et je ne savais plus quoi faire, tandis que mon sourire retombait.



Il partit et revint deux minutes plus tard. Avec le même kit merguez-bière que m’avait apporté Malika.



Je toquai à sa porte et l’ouvris sans même attendre de réponse. Ça faisait dix ans que j’entrai dans son bureau comme ça. Il était de dos, face au parc et au semblant de fête qui s’y tenait.



Il avait l’air fatigué, mais les cernes qu’il avait sous les yeux le rendaient un peu plus charmant bizarrement. Malika, cette conne, avait un poil raison. Je le trouvais élégant et, quand il négociait ou présentait un projet, son assurance d’antan m’avait une ou deux fois émoustillé la couenne.



On pouffa ensemble. Mais l’image de la pression qu’il subissait était assez claire.



Il me regarda dans les yeux, en mâchonnant sa bouchée, sa canette à la main.



Il pouffa une deuxième fois et faillit envoyer un morceau de merguez à travers la pièce.



À mon tour, je ris aussi. Il regarda à nouveau dehors. Il avait un truc à sortir, et il y parvint enfin.



Il était aux abois, mais semblait encore sûr de lui. Cette douceur qui émanait de son regard se mêlait à une étrange force que son allure assez fluette ne laissait pas paraître au premier abord. Oui, Malika, cette conne, avait raison : il me plaisait, et ça ne datait pas d’hier.



Il s’assit sur son bureau, posa sa bière et le reste du sandwich en croisant les bras. Il me regardait comme il l’avait fait des centaines de fois, dans cette position typique qui n’appartenait qu’à nous deux : il me mettait au défi de trouver une meilleure idée que la sienne.

Mais là, sans les infos, j’étais dans le noir. Il avait toujours fait ça. Distiller peu à peu les tenants et les aboutissants, comme s’il dégustait mes réactions petit à petit, comme on boirait lentement un vin pour… le savourer. Et je dois dire que j’aimais ça. J’aimais qu’il attende, qu’il essaie de me lire, cette attention qu’il me portait dans cette situation si particulière.



Je le regardais en même temps que je cogitai. Et tilt.



Mourad et Mathieu. C’était nos deux moulistes. Ils fabriquaient, usinaient, taillaient les blocs d’acier dont on faisait les moules servant à injecter le plastique. Quand Mathieu était entré en alternance, il y a cinq ans, ça avait pris cinq minutes à l’ensemble des salariés pour le surnommer m&m’s, comme les cacahuètes enrobées. C’était une des fiertés de notre fabrique, de pouvoir faire nos propres moules grâce à un coup de génie de Marc qui avait racheté une section d’usinage entière à bas prix.



Je ne m’excusai pas cette fois. J’étais en colère. Marc le vit et… prit mes mains dans les siennes.



Je grommelai dans ma barbe, le visage baissé vers le sol et ses mains autour des miennes. J’étais furieuse, coincée, frustrée. Tout à la fois. Je le regardai et vis cette douceur et toute la bienveillance qu’il essayait d’accorder à trente familles dont il se sentait responsable.


Et sans réfléchir, mes pieds se redressèrent sur les pointes et je me collai à lui en l’embrassant.

Il m’enlaça par la taille, mes bras entourèrent son cou. J’avais les deux consciences sur chacune de mes épaules, les deux petits bonhommes en forme d’ange et de diablotin. À ma gauche, le petit ange me faisait des grands signes en criant non ! , et pas bien ! mais aussi patron ! , pas le moment ! , et également t’es pas épilée ! , assez bizarrement.

Sur mon épaule droite, le diablotin ne disait rien, écroulé de rire sur le dos parce qu’il savait très bien que j’en mourais d’envie.


Mes mains glissèrent sous sa chemise, je sentis ses abdos et ses pectoraux en les remontant. Il n’y avait plus de faillite, plus de déléguée ou de patron, plus de problèmes, plus rien. Tout disparut en même temps que sa langue s’enroulait autour de la mienne.

Quand ses mains descendirent de ma taille à mes fesses, le point de non-retour était déjà dépassé.


Je défis les boutons de sa chemise, il dégrafa mon pantalon, nos vêtements volèrent à la suite et je le fis s’allonger sur son bureau de la taille d’une table de ping-pong tandis qu’il en dégageait à grand bruit tout ce qui était posé dessus d’une volée de la main.

Mon chemisier ouvert et en string, je grimpai sur lui juste après avoir baissé son dernier rempart, son boxer, sur ses chevilles. Il bandait dur, joliment et, sans plus réfléchir, je l’enjambais et vint m’empaler sur lui en écartant ma dentelle.

Il soupira en penchant sa tête en arrière et, mes mains appuyées sur son torse, je savourai son sexe que mon intimité visiblement déjà prête laissa s’enfoncer en moi.

Ses mains sur mes fesses accompagnèrent mes hanches qui se mirent à onduler, monter, se laisser retomber, puis il entra lui aussi dans la cadence et m’accompagna dans une frénésie rapide, brusque et absolument délicieuse. Je pris son visage dans mes mains, l’embrassai encore et il me le rendit tout aussi fougueusement jusqu’à ce qu’à l’unisson nos corps exultent et qu’un orgasme nous terrasse.


Ma tête posée sur son épaule, encore à califourchon sur lui je savourai un moment cet élan, pas si surprenant au final. Je sentais sa respiration revenir peu à peu à la normale, son sexe ramollir en moi et sortir, rien de bien sexy, mais je ne sais pas… ça ne me dérangeait pas, étrangement.


Je redressai ma tête et le regardai, quand je vis qu’il avait la sienne sur le côté et qu’il ne quittait pas des yeux quelque-chose par terre.



Il me regarda sans rien dire. Y’avait une lueur scintillante dans ses yeux.



Il se redressa et resta assis sur le bureau, son regard faisait des allers-retours entre le mien et le tas de trucs qu’on avait viré du dessus de son bureau, y compris mon sac renversé.

Je ramassais mon pantalon tandis qu’il se levait et allait vers… le bazar en question. Et il ramassa au milieu des babioles que contient tout sac à main de femme un objet bien précis : mes boules de geishas violettes en silicone.


Un peu gênée, mais pas plus que ça, je le vis se rasseoir sur le bureau, chemise ouverte et bite à l’air, sans qu’à aucun moment il ne soit gêné, tout obnubilé qu’il était à regarder en détail l’objet et en le faisant tourner dans tous les sens.



Il sentit la paire de boules en silicone en la faisant passer sous son nez. J’en fus étonnée, avant de le voir ensuite regarder de plus près les contours, puis les fins joints de moulage résiduels, la liaison entre les deux globes, elle aussi moulée dans la même pièce que l’ensemble faisait.




Un an pile-poil plus tard.


Les enfants hurlèrent hors-jeu quand Saïd marqua le but. Mais tout le monde autour, employés et familles, applaudit le doyen qui venait de donner la victoire à l’équipe des parents contre celles des enfants.

Ça riait de partout, parlait, mangeait des merguez comme s’il en pleuvait. Soda et bières coulaient à flot et une enceinte bluetooth diffusait born to be alive, pour au moins la troisième fois de l’après-midi : à croire que tout le monde l’avait dans sa playlist, celle-là.



Ils éclatèrent de rire en partant comme des balles vers le barbecue.

Derrière celui-ci, en fait un bidon d’acier coupé en deux avec une grille dessus, Marc jouait les shivas en jonglant avec deux pinces pour tourner tout ce qui peut se griller : viande avec ou sans viande, légumes avec ou sans légume, bref. Il souriait à chaque sandwich qu’il tendait à ses ouailles heureuses.



On pouffa de sa vanne. Elle me tendit une bouchée de carotte grillée. Ça avait l’air de vouloir rester dans mon estomac.



Re-pouffade.




Nos regards se posèrent en même temps sur la petite cinquantaine de personnes rassemblées comme chaque année dans le parc de la Fabrique.

À la différence qu’il y a encore un an, personne n’était sûr qu’on serait encore là aujourd’hui.



On se regarde en la mimant, bouche ouverte et yeux hagards, les deux bras croisés en X sur sa poitrine, et ce qu’elle a dit ce jour-là sort de nos deux bouches en même temps :



On éclate de rire.



Malika recracha sa bière en manquant de s’étouffer de rire.



Re-re-pouffade.


Je me levai difficilement et Malika me soutint par le bras.



Elle me regarda en riant, et passa sa main sur mon ventre.



Sylvain, le nouveau stagiaire que Marc avait débauché chez le fournisseur de silicone, arriva avec deux sandwichs et deux bières dans ses mains.



Il rit et rougit en même temps, je vis que Malika le bouffait des yeux.



Il nous fit un clin d’œil et retourna vers le barbecue.



On éclata de rire à nouveau.

Le parfum dans l’air mêlait grillades, herbe coupée, mais aussi la musique, la joie et un brin de confiance dans l’avenir.


Mais là, pour l’instant, il fallait définitivement que j’aille pisser.