n° 21148 | Fiche technique | 19708 caractères | 19708 3332 Temps de lecture estimé : 14 mn |
16/09/22 |
Résumé: « Une catin perdra la France, une vierge la sauvera », disait-on lors de la guerre de Cent Ans. Isabeau de Bavière, épouse de Charles VI, est la « catin » de cette prophétie. Voici son histoire. | ||||
Critères: #nonérotique #historique #personnages fhhh extracon alliance nympho gros(ses) pénétratio partouze | ||||
Auteur : OlgaT (Quadragénaire, j’aime mêler culture et érotisme) Envoi mini-message |
Collection : Histoires de femmes libres Numéro 07 |
Cette collection parle de femmes qui, par leur pensée, leurs écrits, la liberté de leurs mœurs, ont été des précurseurs dans l’histoire.
Une catin perdra la France, une vierge la sauvera, l’une de l’autre sortira !
Telle était la prophétie, dite de Merlin, qui circulait dans le malheureux royaume de France, au pire moment de la guerre de Cent Ans, et qui fut au cœur de l’épopée de Jeanne d’Arc, la « pucelle d’Orléans ». Isabeau de Bavière, épouse de Charles VI, est la « catin » de cette prophétie. Voici son histoire.
Isabeau de Bavière (1371-1435) est reine de France par son mariage avec Charles VI. Son règne coïncide avec la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons, le désastre d’Azincourt et le honteux Traité de Troyes (1420), qui livre le royaume aux Anglais.
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Isabeau est la fille d’Étienne III de Bavière, duc de Bavière-Ingolstadt et de Taddea Visconti, fille du seigneur de Milan. Louis d’Orléans, frère de Charles VI, et futur amant d’Isabeau, épouse quant à lui Valentine Visconti, cousine au deuxième degré de Taddea Visconti. Ces mariages n’apportent rien au royaume de France et seul en tire profit l’oncle du roi, le puissant Duc de Bourgogne, Philippe le Hardi, celui qui, à la désastreuse bataille de Poitiers, était aux côtés du roi Jean II le Bon et lui disait :
Père, gardez-vous à droite, père, gardez-vous à gauche.
Cela permet au Duc de Bourgogne de prendre le contrôle du comté de Hainaut, dans l’actuelle Belgique.
Au départ, tout se passe bien : un véritable conte de fées. La jeune fille est présentée à Charles VI, qui en tombe éperdument amoureux et la choisit immédiatement pour reine, selon le chroniqueur Froissart. Elle lui plaît immédiatement, il est envoûté par cette jeune fille qui ne parle pas un mot de français, mais dont le corps parle pour elle. Charles VI, veut se marier à Amiens dans les trois jours, malgré l’insistance de son oncle bourguignon, qui aurait voulu célébrer l’union à Arras. Mieux, il refuse la dot d’Étienne III et le cadeau de mariage de l’oncle d’Élisabeth. C’est donc un véritable coup de foudre ! Le 17 juillet 1385, à Amiens, Isabeau, quatorze ans et Charles, seize ans, se marient, pour le meilleur… et pour le pire !
Les contemporains décrivent la jeune Isabeau comme étant une jolie brune, de petite taille, au teint mat. Le mariage débute sous d’heureux auspices. Une fête splendide est donnée dans la capitale, à laquelle assistent de nombreux nobles étrangers. Isabelle conserve sa suite auprès d’elle. Elle n’apprend que tardivement le français et ne visite jamais les provinces. Soucieuse de se préserver, elle amasse des richesses et dote ses proches. Elle donnera douze enfants au roi, mais seulement quatre atteignent l’âge adulte. Le jeune couple s’adore. Les époux se font de nombreux cadeaux. Et quand ils ne sont pas ensemble, ce ne sont que longues lettres enflammées, montrant toute leur impatience de se revoir. Pourtant, malgré toute l’affection qu’il a pour sa belle, Charles n’est pas fidèle, bien au contraire. L’homme est doté d’une ardeur quasi pathologique et va courir la gueuse dès qu’il en a l’occasion. Ses nombreuses grossesses et son train de vie vont la transformer : avec un très fort embonpoint, la jeune fille charmante arrivée en France, avec sa peau pâle et ses cheveux noirs, n’est bientôt plus qu’un lointain souvenir.
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Le destin va tout changer, brutalement : le roi souffre, par intermittence, depuis le 5 août 1392, de sérieux troubles mentaux et d’hallucinations. Cette dégradation évolutive de la santé mentale du roi justifie que le gouvernement du royaume soit mis sous la tutelle d’un Conseil Royal où siègent la reine Isabeau, ainsi que le duc Louis d’Orléans, frère du roi, et les ducs Jean de Berry et Philippe de Bourgogne, les oncles du roi. Quand Philippe de Bourgogne meurt, c’est son fils Jean sans Peur qui siège au Conseil du royaume. Les rivalités s’accentuent pour aboutir à une véritable guerre civile entre les Armagnacs, partisans de Louis d’Orléans et les Bourguignons.
Lors de ses crises, il arrive que le roi frappe son épouse. Isabeau se met alors à prendre des amants. Elle se trouve aussi une remplaçante dans le lit du roi, en la personne d’Odette de Champdivers, qui arrive à apaiser le roi fou lorsque ses terribles crises surviennent. La jeune reine soutient dans un premier temps le parti bourguignon. Puis elle se rapproche de Louis d’Orléans, dont elle devient la maîtresse et dont le futur Charles VII, né en 1403, pourrait être le fils adultérin. Cette liaison n’est pas acceptée par le Duc de Bourgogne, pas pour des raisons de moralité, mais du fait de l’influence sur le Conseil que la situation donne aux deux amants. Jean sans Peur, se sentant évincé du pouvoir, menace Paris en 1405 et fait assassiner le duc d’Orléans en 1407. Les mauvaises langues ont dit qu’après l’assassinat de Louis d’Orléans, Jean sans Peur lui succéda, non seulement à la tête du pays, mais aussi dans le lit de la reine. On ne prête qu’aux riches !
Jean sans Peur va se servir de la révolte des cabochiens (du nom de leur chef, le boucher Simon Caboche), pour prendre le pouvoir à Paris en 1413. Le roi Henri V d’Angleterre, profitant de ces troubles, relance la guerre de Cent Ans : il envahit le pays, remporte la bataille d’Azincourt en 1415, véritable désastre pour l’armée française, et s’empare de la Normandie. Isabeau soutient les Bourguignons. Mais son amant, Jean sans Peur, est, à son tour, assassiné par des hommes de main des Armagnacs, lors d’une entrevue avec le dauphin Charles, le futur Charles VII, au pont de Montereau, le 10 septembre 1419. Henri V s’allie, par le traité de Troyes (1420), avec la reine Isabeau et le jeune duc de Bourgogne, Philippe III le Bon, désireux de venger le meurtre de son père. Henri V est reconnu comme héritier du trône et régent, après avoir épousé Catherine, fille d’Isabeau et de Charles VI. Ce dernier conserve néanmoins le titre de roi de France. Son dernier fils vivant, le futur Charles VII, qualifié de « soi-disant dauphin de Viennois », est renié dans le traité, « en raison de ses crimes énormes ». Charles installe à Bourges un gouvernement Armagnac et contrôle environ la moitié sud du royaume. Il devient, jusqu’à l’épopée de Jeanne d’Arc, le « roi de Bourges ».
La reine Isabeau de Bavière vient de brader la France à l’Anglais, réduisant à néant les ambitions politiques de Yolande d’Aragon à qui elle demande en plus de lui envoyer son fils Charles, afin qu’il se soumette à la régence anglaise. Mal lui en prit ! Ce fut en ces mots que Yolande lui répondit :
À femme pourvue d’amant, point n’est besoin d’enfant. N’ai point nourri et élevé icelui jusqu’ici pour que vous le laissiez trépasser comme ses frères ou le rendiez fol comme son père, à moins que vous le fassiez anglais comme vous. Le garde mien ; venez le prendre si l’osez !
Henri V s’installe au donjon de Vincennes avec sa nouvelle épouse. Isabeau vit entre l’hôtel Saint-Pol et Vincennes, assez recluse. Tout le monde semble attendre la mort du roi. Mais pas celui qu’on attendait : en effet, Henri V décède le 31 août 1422, laissant derrière lui un seul fils, Henri VI, âgé de dix mois. Charles VI, quant à lui, passa de vie à trépas le 21 octobre de la même année. Ce fut un nouveau tourment pour la France, les Anglais voulaient ce qui avait été convenu et le Dauphin, désormais Charles VII, allait se battre pour la reconquête de son royaume. Quant à Isabeau, il lui restait treize ans à vivre, dans son hôtel Saint-Pol, occupant son temps à la gestion de sa fortune et de ses biens. Elle n’exerce plus aucune influence sur les deux possibles rois de France, ni son fils, ni son petit-fils anglais. Elle vit assez longtemps, néanmoins, pour assister au miracle de Jeanne d’Arc et à l’ascension de son fils, Charles VII, au trône de France. Elle meurt dans l’indifférence totale, le 29 septembre 1435, à l’âge de soixante-quatre ans.
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Beaucoup de choses ont été dites sur Isabeau de Bavière et ont alimenté sa terrible réputation. De la même façon que la légende noire de l’impératrice Messaline a été relancée par le romancier et poète Alfred Jarry, avec son « Messaline, roman de l’ancienne Rome » (1901), Isabeau de Bavière a « bénéficié » de toute l’attention du sulfureux Marquis de Sade, trois siècles plus tard, dans son ouvrage « Histoire secrète d’Isabelle de Bavière, Reine de France ». Le « divin Marquis » prétend que la maladie du Roi progresse différemment, selon que sa femme ait quelques envies ou non de diriger le pays et de détourner de l’argent. En gros, il dit qu’Isabeau fait passer le roi pour fou afin de gérer le royaume. Pour Sade, aucun des enfants de la Reine n’a pour père le Roi. L’auteur a beaucoup contribué à la réputation sulfureuse posthume d’Isabeau !
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Cette réputation a aussi été étayée par les témoignages de contemporains, la façon dont la reine était perçue et surtout par sa conduite. Son époux le roi Charles VI est fou, avec des crises périodiques, ce qui facilite les débauches de son épouse. Entourée d’une cour brillante, initiée aux plaisirs des sens par les plus grands du royaume, Isabeau est séduite et elle séduit. Ses amours s’enchaînent. En quelques mois, les Parisiens lui ont trouvé un surnom : « Isabeau, la grande Gaure », autrement dit « Isabeau, la grosse truie ». Pour ses ennemis, à commencer le parti des Bourguignons, la reine a de nombreux amants et son hôtel de Barbette n’est qu’un lupanar géant.
Jacques Legrand, moine augustin, prêche devant la reine à l’occasion de l’Ascension 1405. Isabeau aime le luxe, les bijoux et les beaux vêtements, et comme une souveraine se doit d’être la vitrine de ce qui est à la mode, tout le monde la suit. Nouvelle mode, nouvelles coiffures et de plus en plus de peau montrée : la gorge, les épaules et même une sacrée échancrure entre les seins. Le moine lui dira dans son sermon, en présence du roi, pour une fois lucide :
Je voudrais, noble reine, ne rien prononcer qui ne vous soit agréable ; mais votre salut m’est plus cher que vos bonnes grâces… Dame Vénus règne seule à votre Cour. L’ivresse et la débauche lui servent de cortège et font de la nuit le jour, au milieu des danses les plus dissolues.
Le chroniqueur Brantôme, qui écrit au siècle suivant, qualifie quant à lui Louis d’Orléans de grand débaucheur des dames de la cour. Il raconte une terrible anecdote : un soir, le roi Charles VI, lors de l’une de ses crises, erre dans le château et va dire bonsoir à son frère le duc d’Orléans, qui, occupé à besogner la reine, ne s’interrompt pas. Isabeau a la tête sous les couvertures et le roi ne la reconnaît pas, bien au contraire. Charles et Louis vont se partager la « ribaude ». Son frère lui a juste demandé, par respect pour cette « grande dame », de ne pas retirer la couverture sous laquelle elle dissimulait son visage !
La conduite libertine de la reine et de sa cour scandalise les grands du royaume comme le peuple. Isabeau a eu autant d’amants que possible. Parmi les noms qui furent cités : le vidame de Maulle, conseiller du Duc de Bourgogne, Lourdin de Saligny, Pierre de Giac (1377-1427), qui sera ensuite ministre de Charles VII, Georges de la Trémoille (1384-1446), futur conseiller de Charles VII et ennemi de Jeanne d’Arc. Une rumeur alimentée par les ennemis de la reine prétendait qu’une de ses distractions était, à l’instar de Messaline, de se déguiser en prostituée avec quelques dames de sa suite et de se rendre dans les rues malfamées de Paris et de se livrer à la « bourdelerie », en s’accouplant avec des « voleurs et des meurtriers ». En tout cas, Isabeau a prouvé qu’on savait s’amuser à cette époque, avec des fêtes somptueuses, et ses nombreux amants.
Louis de Bosredon fut le plus célèbre des amants d’Isabeau, à cause de la punition que lui fit infliger Charles VI. Le connétable Bernard d’Armagnac, et le prévôt de Paris, Tanguy du Chatel, décident de mettre un terme aux intrigues d’Isabeau et de son amant Bosredon, qui était premier écuyer de la reine. Bosredon était le principal compagnon de débauche d’Isabeau, c’était aussi le plus dépravé, l’organisateur et l’instigateur de toutes les orgies. Bosredon était grassement payé par la reine qui était fort riche. Isabeau, qui était probablement très amoureuse, donnait à son amant Bosredon d’importantes sommes d’argent et des joyaux. Pour perdre Bosredon, le Duc de Bourgogne fit savoir à Charles VI que Bosredon était l’amant de la reine. Un jour Louis de Bosredon, qui revenait de Paris, croisa sur son chemin le roi, tandis qu’il rejoignait le bois de Vincennes. On dit qu’il salua, ce jour-là, le roi d’une façon très cavalière, sans prendre la peine de descendre de son cheval, comme l’exigeait l’étiquette, ce qui ne fit qu’énerver le roi davantage. Furieux de l’affront que lui faisait cet homme qui le faisait notoirement cocu, le roi lança le prévôt de Paris Tanguy du Chatel et ses hommes à sa poursuite. C’est ainsi que Louis de Bosredon fut arrêté et jeté à Paris dans les terribles cachots du Châtelet. À plusieurs reprises, il sera soumis à la question devant le roi. Ses biens furent confisqués par le roi Charles VI et le père du condamné fut obligé de faire le nécessaire pour les remettre au roi. Bosredon aurait été longtemps retenu à Montlhéry, garrotté et enchaîné avant d’être noyé secrètement dans la nuit du 14 juillet 1417, enfermé dans un sac de cuir solidement cousu, lesté de pierres, avec pour inscription « laissez passer la justice du roi » !
Puis, sur ordre de son époux, ou plutôt du nouveau dauphin, le futur Charles VII, Isabeau dut partir pour Blois, puis pour Tours avec seulement quelques dames et serviteurs. Plus de confort, de mets délicats, de robes somptueuses et surtout, plus d’amants ! C’est plus que la reine ne put accepter ! C’est à ce moment-là qu’eut lieu le retournement d’alliances en faveur des Bourguignons, qui la font libérer.
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Si Isabeau a laissé une si mauvaise image, c’est que, comme pour Messaline, Théodora ou Aliénor d’Aquitaine, les sources viennent de ses détracteurs. Isabeau n’était certes pas parfaite. Elle était une femme cupide, versatile sur son comportement et ses choix politiques, mais on n’avait jamais appris à la petite princesse bavaroise à vivre avec un roi fou, faire l’arbitre pour les deux familles les plus puissantes du royaume, ni à gérer une guerre qui a duré cent seize ans.
Peut-on néanmoins tenter de réhabiliter Isabeau de Bavière ? Question provocatrice ! L’image d’Isabeau de Bavière, antithèse de Jeanne d’Arc, est terrible et la cause semble entendue. La condamnation est unanime, du fait de ses débauches proverbiales, mais surtout du fait du rôle politique qu’elle a joué, passant, y compris physiquement, d’Orléans à Bourgogne et entretenant donc la guerre civile. Les turpitudes d’Isabeau ont alimenté les doutes sur la légitimité du Dauphin Charles, affaiblissant gravement la cause des Valois. Elle est surtout celle qui a endossé le traité de Troyes de 1420 et qui donc a « vendu la France aux Anglais ».
Tout cela est vrai et rend donc a priori vaine toute tentative de réhabilitation. La réalité est un plus complexe. Ce n’est pas Isabeau qui a lancé la querelle des Armagnacs et des Bourguignons, qui n’avaient pas besoin d’elle pour s’écharper. Au contraire, en la mettant dans leur lit, Louis d’Orléans, puis Jean sans Peur, se sont servis d’elle. Doit-on ajouter que ce n’est pas Isabeau qui est responsable du désastre d’Azincourt, plus grande défaite française de la guerre de Cent Ans ? C’est là qu’avait été durablement anéantie une bonne partie de l’armée et de la chevalerie françaises, ce qui conduisait un monde aussi superstitieux à penser qu’entre les Valois et les Plantagenêt, Dieu avait fait son choix, que la guerre était perdue. Il faut ajouter la faute politique et morale du Dauphin Charles, qui laisse assassiner, lors de l’entrevue de Montereau (1419) le Duc de Bourgogne, Jean sans Peur. Il rendait ainsi impossible et pour longtemps, toute réconciliation entre Armagnacs et Bourguignons. On peut aussi rappeler que les concepts de nation et le patriotisme n’étaient pas complètement formés en cette fin de Moyen-âge. La guerre de Cent Ans était au départ une querelle de succession, les rois d’Angleterre réclamant l’héritage de Philippe le Bel, en tant que descendants de la « louve de France », Isabelle, fille du roi de fer. Il ne s’agit pas d’exonérer Isabeau de ses responsabilités, juste de les relativiser et de les placer dans leur contexte.
Isabeau, comme avant elle Messaline, symbolise l’appétit de luxe, la soif du plaisir et l’esprit de lucre de la Cour, une sulfureuse, une insatiable, qui n’a cessé de faire fantasmer les hommes et les femmes au cours des siècles. Mais Isabeau ne vivait pas au temps de Messaline, mais au Moyen-âge, époque où l’Église imposait sa morale. Faut-il rappeler le terrible châtiment, un siècle auparavant, des princesses adultères de la tour de Nesle ?
Isabeau est aussi, comme Cléopâtre, Messaline ou Théodora avant elle, un symbole de l’ambition féminine, et c’est aussi ce qu’on lui reprocha. Elle a utilisé ses charmes pour son propre plaisir, mais aussi, à des fins politiques.
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Alors que le royaume de France, dans ces années 1420, n’avait jamais été aussi près de tomber dans l’escarcelle de l’Angleterre, une prédiction transportée par une rumeur populaire, alimentée par la belle-mère de Charles VII, Yolande d’Aragon, duchesse d’Anjou, s’étend peu à peu sur tous les territoires de ce malheureux royaume :
Une catin perdra la France,
Une vierge la sauvera,
L’une de l’autre sortira !
Isabeau et Jeanne d’Arc ont incarné cette prophétie, en étant l’antithèse l’une de l’autre. Il s’agit même d’une « fake news » de l’histoire : nombre d’historiens et d’érudits ne purent admettre qu’une petite paysanne illettrée, comme Jeanne, puisse lever une armée, rencontrer le roi à Chinon, le reconnaître dans une foule d’inconnus, alors qu’il avait quitté ses habits royaux, puis partir à la guerre et en remontrer aux plus vaillants chevaliers de l’époque. Non, l’adolescente n’aurait pu réaliser ces exploits que si elle avait été elle-même une princesse de sang royal. En l’occurrence une demi-sœur du roi Charles VII, fille adultérine de la reine de France, Isabeau de Bavière, et du duc Louis d’Orléans et qu’on avait « cachée » à Domrémy. Préparée et entraînée à sa future tâche par l’entourage du monarque, elle aurait été le fer-de-lance d’un vaste mouvement de reconquête, porté par le halo de mysticisme entourant la fable « des voix divines ». Une chose est certaine, au-delà de cette légende : l’influente Yolande d’Aragon a soutenu Jeanne d’Arc et compris tout le parti qui pouvait être tiré de la Pucelle, de ses voix et de la réalisation de la fameuse prophétie.
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Pour ceux et celles qui voudraient aller plus loin :
• Dans son ouvrage « Dans le lit des reines : les amants » (Perrin, 1984) Juliette Benzoni a consacré un chapitre à Isabeau de Bavière.
Les ouvrages sont nombreux au sujet de celle qui restera dans l’histoire comme une épouse infidèle, une mère dénaturée, une reine félonne. Parmi eux :
• « Histoire des Reines de France : Isabeau de Bavière » par Philippe Delorme (Pygmalion, 2003)
• « Isabeau de Bavière » par Jean Verdon (Taillandier, 1981)
• « Isabeau de Bavière – Reine de France » par Inès Nollier (Editions du Rocher, 1996)
• « Isabeau de Bavière » par Marie-Véronique Clin (Perrin, 1999)
• « Les amours d’Isabeau de Bavière. Vivre ses plaisirs » par Jocelyne Godard (Le sémaphore, 2002)
À signaler également le numéro 14 (février-avril 2022) de la revue « Les Mystères de l’histoire » dont le titre est « Isabeau de Bavière, mère indigne, épouse infidèle, reine cupide ? »
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À suivre (8) : « La reine Margot, la comploteuse libertine »