Hum… Que c’est agréable ! Les premiers beaux jours, il fait encore soleil quand on sort du bureau, les jupes ont remplacé les pantalons, les débardeurs, les anoraks, les filles sont belles, parfois. Cravate roulée dans la poche de mon veston, je m’offre une petite flânerie dans le centre-ville, il y a du monde aux terrasses, la vie est belle… ou presque. J’ai l’impression de revivre après un divorce long et douloureux, toujours trop long même s’il n’a duré qu’un an, toujours douloureux parce que quelque part, c’est un échec, une erreur, un « accident de la vie »…
- — Jérôme ? … Jérôme Rezzin ?
C’est moi qu’on appelle, une voix féminine. J’arrête instantanément ma déambulation et fais demi-tour. Une grosse touffe de cheveux noirs crépus assise à une table de café, des lunettes teintées sur un nez épaté, lèvres épaisses et peau mate. Oui, je la connais et la reconnais.
- — Françoise ? C’est toi ? C’est bien toi… Comment vas-tu ? Que deviens-tu ?
Elle se lève pour me claquer deux bises, toute souriante. La nana assise en face d’elle me serre la main.
- — Ça alors, Jérôme, disparu des écrans radars depuis si longtemps. Le hasard fait bien les choses.
- — Je trouve aussi. Premiers beaux jours, envie de prendre l’air après une longue journée de labeur et des mois d’hiver. C’est plus agréable que de partir et revenir dans la nuit.
- — C’est sûr, moi aussi, je préfère ça, la preuve. Tu bosses dans le secteur ?
- — Oui, pas très loin, ma boîte est rue de la Pompe.
Sur ce, l’autre fille se lève, fait deux bises à Françoise, me serre de nouveau la pince en disant :
- — Je vous laisse…
- — Désolé, je vous ai interrompues.
- — Non, non, pas de soucis, on se voit tous les jours, on travaille ensemble…
Du coup, je m’assois à sa place et je commande. Nous bavardons, nous bavardons, les verres se suivent et se ressemblent. Je lui narre mes déboires, elle me raconte les siens. La nuit tombe et nous trouve toujours en grande discussion, un peu éméchés. Je déclare une petite faim, au moins pour éponger ce qu’on vient de picoler. Elle me chuchote :
- — Pas ici, c’est dégueulasse, j’ai déjà essayé.
- — Alors, allons ailleurs, dis-je en réglant l’addition.
- — Écoute, il y a Mario, un Italien qui fait des pizzas à tomber dans la rue d’à côté, mais il n’a que trois tables, ce sera plein. Si ça te dit, on les fait faire et on va les manger chez moi, j’habite à deux pas.
- — C’est parti ! Je vais nous trouver du rosé ou du Chianti pendant l’attente…
Son appart est un petit T1 bis, petit couloir avec un grand placard, petite cuisine, petites chiottes et petite salle de bain, grande pièce à demi séparée en deux, living-chambre. Mais quand le rideau est ouvert, ça donne une impression d’espace. Balcon sur un parc, pas désagréable. C’est loué avec garage en sous-sol et accès à la piscine. Petit, mais pas si mal. Les pizzas sont effectivement délicieuses, le vin aussi.
- — Je me souviens lorsqu’on sortait des TP de biologie, tu avais une blouse bleu marine, les mains dans les poches, ça te faisait un cul… sublime !
- — Ah ben ouais, j’ai pas changé sauf que je ne porte plus de blouse. Ce sont mes origines martiniquaises par ma mère, et je finirai sûrement comme elle, très grosse, hélas ! Mais je ne pensais pas que tu regardais mon cul à l’époque. Je croyais que tu n’avais d’yeux que pour Ghislaine.
- — C’est vrai qu’elle était canon et qu’on était bien copains. Mais en fait, c’est Julie, sa sœur aînée qui était dans ma section, qui me l’avait confiée avant de partir en prépa. On se connaissait bien et je veillais sur elle, au point que beaucoup, même des profs, croyaient qu’on était ensemble.
- — Ouais, surtout elle…
- — Comment ça ?
- — Ben Jérôme, elle était folle amoureuse de toi !
- — Gigi ? Non… Tu rigoles ?
- — Mais pas du tout. On était très copines, tu sais, et on se faisait des confidences. Elle était persuadée que tu attendais qu’elle ait fini ses études pour filer le parfait amour.
- — Ben ça… tu me la coupes… Mais en y repensant… C’est vrai qu’on était souvent ensemble… Elle me prêtait son scoot, je lui prêtais ma chambre en ville quand elle ne rentrait pas chez elle pour le week-end…
- — Eh oui ! Et puis tu veillais sur elle, au bal de promo, dans votre atelier théâtre. D’après ce qu’elle m’en disait, pour elle c’était tout tracé. On lui avait fourni une sorte de « paquet cadeau » : la fac et le prince charmant pour la couver, avec la bénédiction de la frangine et de la famille.
- — C’est vrai que j’étais de la même promo que sa sœur aînée et que j’étais allé la voir pendant les vacances. Une fille que j’estimais beaucoup, Julie, et c’est là que j’avais fait la connaissance de Ghislaine et des parents. Des gens très bien et qui m’avaient aussi trouvé très bien, d’après Julie. Je ne sais pas ce qu’elle est devenue…
- — Ben, c’est simple. Elle est partie parce qu’elle avait réussi le concours de Sciences Po. Maintenant, elle est chef de service dans un Conseil Régional.
- — Ah, pas mal. Je l’estimai, mais je n’étais pas attiré par elle, elle avait un côté garçon assez prononcé et puis pas très drôle, une bosseuse…
- — Ghislaine aussi est une bosseuse.
- — Oui, mais elle était tellement jolie, tellement féminine contrairement à sa sœur. Ça passait mieux.
- — Et pourquoi tu n’as jamais rien tenté avec elle ?
- — Oui, pourquoi ? … Je crois que d’une part, je m’étais engagé à veiller sur elle, pas à la dévergonder, et puis trois ans d’écart quand on n’en a que vingt et un, ça compte. C’était comme ma petite sœur.
- — Pourtant, elle, elle y croyait. Je peux te dire que quand elle a appris que tu te mariais, le ciel lui est tombé sur la tête. Elle n’a pas compris et elle nous a fait une méchante dépression. Elle avait été admise en STAPS, puisqu’elle rêvait d’être prof de gym, mais on a bien cru qu’elle allait tout plaquer ou au moins perdre son année. Mais c’est une bosseuse. Elle s’est accrochée et a réussi, de peu, mais réussi.
- — Heureusement pour elle. C’est bizarre, parce que durant tout ce temps, je ne pensais jamais à elle et je ne la revoyais jamais. Je ne l’ai toujours pas revue, du reste.
- — Pourtant, elle parlait toujours de toi, comme si vous vous étiez quittés la veille. Je pense qu’elle croyait que tu attendais qu’elle ait terminé pour réapparaître, que tu préparais votre vie future en bossant et qu’un carrosse allait venir la chercher le jour de sa sortie avec son diplôme. Alors, apprendre que le prince charmant se mariait avec une autre, la pilule a été dure à avaler.
- — Mais attends, un peu de réalisme, aussi. On ne sortait pas ensemble, on ne couchait pas ensemble, on ne s’est même jamais embrassés et encore moins dit « je t’aime » ni fait de quelconques promesses.
- — Je sais, c’est même ce que je lui ai dit pour essayer de la remonter : pas de promesses, pas de trahison. Mais c’était dans sa tête, comme un rêve, une certitude fantasmée. Bon, et nous, on fait quoi, là ? On baise ?
- — J’étais partant avant notre conversation, mais ce que tu me dis là m’a complètement déstabilisé. Et depuis, elle s’est mariée ?
- — Tu rigoles ! Si tu ne l’as pas sautée, alors elle est aussi vierge qu’au jour de sa naissance. Elle ne s’en est toujours pas remise. Non, elle bosse comme une folle, prof de lycée, clubs sportifs des élèves le mercredi, cours du soir pour les fessiers des mamans et piscine pour les vieux. À ça, tu rajoutes son entraînement personnel, jogging quotidien, muscu, aïkido… Le reste du temps, elle est sous la douche ou elle dort. Pas facile de la choper. Tu veux que j’essaye ? Elle passe me voir environ une fois par an.
- — Oui, je veux bien, ce serait sympa. Mais ne m’annonce pas, elle serait fichue de ne pas venir.
- — D’ac, on lui fait la surprise. File-moi ton portable…
Je rentre chez moi assez bouleversé par ces révélations auxquelles je ne m’attendais pas du tout. Ghislaine était classée dans les bonnes copines du passé, peut-être avec un petit regret de ne pas l’avoir « sautée », comme dit trivialement Françoise, parce que c’était une très jolie fille, mais sans plus. Une copine que l’on a plaisir à revoir et qu’on apprécie, mais de là à imaginer qu’elle était amoureuse de moi, son « grand frère », au point de s’en rendre malade… Des images me reviennent. Cette représentation de théâtre dans un petit patelin où l’on produit du vin ; après le spectacle, on nous avait offert un dîner sympa, mais un des jeunes locaux, un peu bourré, la collait un peu trop. Elle était venue s’asseoir sur mes genoux pour s’en débarrasser et on avait fini le repas comme ça, une bouchée pour toi, une bouchée pour moi… Et puis cette soirée de bal de promo, j’étais aussi organisateur et elle ne m’avait pas quitté, n’avait dansé qu’avec moi. On avait fini la nuit au sommet d’une tour du centre-ville pour contempler la ville endormie. Elle portait une cape marron avec une capuche, mais malgré cela, elle se serrait contre moi, j’avais mis ça sur le compte de la bise hivernale… C’est vrai que dans les affres de ma séparation, j’avais plusieurs fois pensé à elle, à sa franchise simple et directe. Pourquoi ne s’est-elle donc jamais déclarée ? Pour elle, ça devait tomber sous le sens. Comme quoi il ne faut jamais omettre de dire les choses clairement, ça aurait pu changer nos vies.
Dans la semaine qui suit, je reçois un texto de Françoise. Rendez-vous chez elle pour le déjeuner le samedi en huit. D’accord, j’apporte le vin. J’arrive trop tôt, j’ai un trac d’adolescent. Six ans ont passé, j’ai été meurtri, elle aussi, comment allons-nous vivre ces retrouvailles ? M’aime-t-elle encore ? Puis-je à mon tour en tomber amoureux ? Ou pas… Je donne un coup de main à Françoise pour mettre le couvert, ouvrir le vin. La sonnette tinte. Je reste campé devant la porte-fenêtre du balcon, interdit et tendu. La voix que je reconnais, les « r » qui ne sont pas roulés, mais très prononcés ;
- — Alors, cette surprise ? Tu t’es trouvé un nouveau chéri ?
- — Moi, non. Mais qui sait si tu ne serais pas intéressée…
- — Ha-ha-ha ! Tu rêves.
Elles entrent. Je me retourne. Bon sang, elle n’a pas changé. Longue silhouette fine, grand cou, épaules dégagées, petite robe printanière et fleurie aux courtes manches ballon.
- — Bonjour Ghislaine.
- — Oh non… pas possible… mon Dieu…
Heureusement que le canapé se trouve juste à côté de la porte, elle tombe assise sur l’accoudoir en cachant son visage dans ses mains.
- — Hé, la belle ! Tu vas pas nous faire une syncope, s’exclame Françoise ?
- — N… on, non.
Ghislaine se reprend et se relève, vient à ma rencontre, les yeux ruisselants. Je lui fais deux bises, elle se serre contre moi. C’est émouvant, délicieux malgré ses joues toutes mouillées.
- — « Pitain » c’est pas possible . Jérôme… mon Jérôme…
- — Yes ! C’est bien moi. Comment vas-tu, ma petite sœur de cœur ?
- — Je sais pas, je sais plus… je rêve ou je cauchemarde ? Tu vas disparaître ?
- — Nan ! Je suis bien là, juste pour toi. Pour te voir, te revoir, te retrouver. Grâce à Françoise.
- — Moi, j’y suis pour rien. Il avait juste peur que tu ne veuilles pas le revoir…
- — Il aurait mérité que je le fasse attendre autant qu’il me l’a fait. Mais bon, perdre encore six ans, ça aurait été trop bête.
Le déjeuner se passe sans vraiment exister, malgré les efforts de Françoise qui n’existe pas non plus. Nous nous tenons par les yeux, comme chantait si bien Brel dans « Orly ». Le temps de remercier notre hôtesse et nous nous retrouvons à marcher le long de la rivière en nous tenant par la main, comme autrefois dans le campus. C’est bon. Six ans de moins. Toutes douleurs oubliées. Regain de fraîcheur et de jeunesse. Je ne marche pas, je flotte au-dessus du sol. La petite copine qui me tient la main a mûri cependant. Son visage allongé et son sourire enfantin à fossettes n’ont pas changé, pas plus que les petites mèches frisottées échappées de son éternelle queue de cheval. Mais les traits sont plus affirmés, la poitrine plus forte, les muscles plus dessinés sur les bras comme sur les jambes. Elle est vraiment bien balancée, taille fine, buste court et très en « V », parfait ovale des hanches, fesses très pommées sur des jambes longues et puissamment musclées. Superbe. Elle frissonne, la fraîcheur de l’eau. Je lui mets mon veston sur les épaules, elle sourit :
- — Toujours aussi attentif et prévenant.
- — Je t’emmène jusqu’à mon nichoir ?
On reprend nos voitures, elle me suit sur une demi-douzaine de kilomètres, un village en campagne périphérique. La maison est récente, d’apparence classique. D’abord, elle s’extasie sur la vue, il est vrai que c’est une des rares collines du secteur. Mais quand j’ouvre, c’est le choc. Je suis ravi, c’est exactement l’effet que je cherchais. Au point qu’elle ressort jusqu’au bord de la terrasse pour vérifier la « normalité » de la maison. Le couloir d’entrée est ponctué d’ogives arabesques de plus en plus petites, débordant partiellement sur les combles par une voûte décroissante. Le couloir de huit mètres paraît en faire cinquante avec un miroir en fond. Revêtement de sol unique en comblanchien poli, plafonds tendus blanc cassé brillant, miroirs bronze sur les murs, toutes les portes à galandage s’effaçant dans l’épaisseur des cloisons. C’est vraiment cette impression d’immensité que je recherchais, et c’est réussi.
- — Waouh : Pitain, mais c’est un palais !
- — Non, juste une maison un peu trafiquée façon Jérôme.
- — Et ta femme, enfin ton ex-femme, a quitté ça ? Elle est folle !
- — Non, elle ne l’a pas connu, j’avais juste acheté le terrain.
- — Tu veux dire que… y a jamais eu de femme ici ?
- — Sauf la femme de ménage, une fois par semaine quand je suis au boulot.
- — C’est marrant, mais… ça me plaît encore plus.
- — À moi aussi. Il manquait une œuvre d’art dans ce décor, je crois que je l’ai trouvée.
- — Hé ! Ça ressemble à un compliment, ça, plaisante-t-elle en rosissant.
Je dois tout lui expliquer, tout lui faire visiter, elle ne tarit pas d’exclamations, même dans les toilettes où je la laisse faire son pipi. Elle vient me retrouver au salon, m’attrape un bras et nous campe devant l’un des miroirs.
- — Grand frère, p’tite sœur, on fait une belle paire, quand même…
- — Ce pourrait être un beau couple, même…
- — Ahhh ! Voilà un mot qui sied à mon oreille ! Oui, je trouve aussi que nous formons un beau couple. Je l’ai toujours trouvé, du reste.
- — C’est ce que Françoise m’a révélé. Pourquoi ne m’as-tu rien dit il y a six ans ?
- — Pourquoi ? Je ne sais pas, je pensais que ça allait de soi. Et puis tu étais l’aîné, le maître du jeu en quelque sorte. Moi, j’essayais juste de faire et d’être ce que tu souhaitais. S’il fallait attendre, j’attendais ; être patiente, je l’étais. En aucun cas, je ne pouvais douter de toi, de notre avenir ensemble. Et puis crac…
- — Eh oui, crac ! C’est terrible comme les mêmes situations peuvent être ressenties de façon différente. On t’avait confiée à moi, en quelque sorte, et je veillais sur toi comme sur un trésor, avec d’autant plus de complaisance que tu étais absolument adorable. Jamais tu ne montrais le sale caractère décrit par ta sœur. En somme, je la remplaçais avec une affection fraternelle, sans même imaginer que tu puisses ressentir autre chose pour moi.
- — C’est bête de ne pas se parler, dire les choses que l’on ressent. Pudeur liée à l’éducation, je suppose…
- — À bien y repenser, je ne suis même pas sûr que je ne t’aurais pas rejetée. Non pas parce que tu ne me plaisais pas, mais parce que j’aurais eu le sentiment de trahir mon engagement envers ta famille et aussi, quelque part, d’abuser de toi et de la situation.
- — C’est drôle ce que tu dis, parce que c’est exactement ce à quoi j’ai pensé quand nous avons été séparés. Je me suis dit « il laisse de la distance, du temps, que chacun ait conscience qu’il n’est plus mon chaperon, et puis il reviendra me chercher ». La chute n’en a été que plus dure.
- — Je comprends, j’en suis désolé. Je n’ai jamais souhaité te faire ni du mal ni de la peine. Mais c’est fait, on ne peut pas revenir dessus. Oublions tout ça et tournons-nous vers l’avenir.
- — Tu as raison. Regardons à nouveau ce joli couple dans le miroir. Crois-tu qu’il ait un avenir ?
- — Ça dépend…
- — De quoi ?
- — Pour cela, il faudrait être sûrs que tu me plaises et que je te plaise.
- — Et alors ? Je ne te plais pas ?
- — Je ne sais pas encore. Difficile d’acheter sans voir ou même sans essayer. Peut-être que ces vêtements dissimulent une difformité cachée…
- — Quoi ? Tu voudrais peut-être que je me déshabille là, maintenant ?
- — Ma foi, pour être certain que tu es bel et bien l’œuvre d’art qui convient à cette maison, ça me paraît indispensable…
- — Mais tu es un odieux profiteur ! Et les voisins ?
- — Il n’y en a pas et de toute façon les vitres font miroir, on ne voit rien de l’extérieur.
Elle va vérifier et, convaincue, en deux temps, trois mouvements, elle se débarrasse de sa petite robe et de ses dessous très sobres, en coton confortable et efficace.
- — T’es quand même gonflé. Tu abuses de ta position de « grand frère ». Pudique comme je suis, il n’y a bien que toi pour m’obliger à ça. Alors ?
- — Un, je ne t’ai obligée à rien. Deux, tu es véritablement superbe et je ne regrette pas que tu te sois sentie obligée. Trois, il est temps de vérifier l’effet produit, notamment en palpant les courbes de cette superbe sculpture vivante, ajouté-je en laissant ma main courir de son épaule à ses fesses.
Sans me faire prier, je me mets à mon tour en tenue d’Adam sous son œil amusé. Elle rigole moins quand mon braquemart dilaté gicle de mon boxer au garde-à-vous. Je reprends place auprès d’elle, je referme sa menotte sur mon érection en lui demandant de bien serrer. Quel délice !
- — Oh pitain ! C’est énorme… Et c’est ça qui doit rentrer entre mes cuisses ? Ça le fera jamais…
- — Ne t’inquiète pas, c’est un endroit conçu pour laisser passer la tête d’un bébé. Alors ça… mais on verra plus tard. Je dois vérifier que de ton côté ça fonctionne aussi. Voyons voir ce petit minou… Hummm ! Mais c’est tout mouillé !
- — Ben, depuis que je t’ai vu. Quand tu m’as dit que mes joues étaient mouillées, j’ai failli te répondre qu’elles n’étaient pas seules. Vois ma culotte, elle est à tordre.
- — C’est bien, désir réciproque. Hum… et tes seins ! Ils ont grossi, non ?
- — Oui et non. En fait, j’ai toujours eu des seins assez modestes, mais ce sont mes pectoraux, au-dessous, qui ont gonflé à force d’entraînement.
- — Oui, et c’est ça qui donne ces si jolis seins qui tiennent merveilleusement bien. J’y goûte si tu permets…
- — Ohhh… oh Jérôme… mon Jérôme… depuis le temps… tant d’envie… oh que c’est bon…
Puis ma bouche retrouve enfin la sienne, une main sur un sein, l’autre sur son mont de Vénus couvert d’un duvet ras, un doigt sur son clitoris. Sa main se cramponne frénétiquement sur ma queue, elle gémit dans ma bouche. Il est temps de conclure, je la guide vers la chambre.
- — Jérôme… je veux bien, mais… faut que je te dise… je ne sais rien de l’amour… Tu vois, j’ai un corps très docile et je lui fais faire un tas de choses sans me poser de questions, escalade, plongée, ski, VTT… Mais là, j’ai la trouille ! Je ne sais rien et ça me fait peur…
- — Tu as confiance dans ton corps, donc.
- — Oui.
- — As-tu confiance en moi ?
- — Oh oui ! Tu as raison. Je te fais confiance et je me laisse faire.
- — Voilà. Promis, on prendra le temps qu’il faudra et je serai aussi doux que possible.
- — Merci, t’es mon amour… depuis toujours.
- — C’est ça qu’il fallait me dire il y a six ans, on aurait gagné du temps.
- — Je sais, c’est ce que les copines m’ont dit. Tu m’aurais attendue, dis ?
- — Peut-être, je ne sais pas. On ne refait pas le passé. Et c’est peut-être mieux ainsi. Tu sais, moi comme les autres, je n’avais qu’une seule envie, celle de me vider les gonades, vite et mal. Résultat, mon ex s’est tirée avec le premier venu qui avait un peu d’expérience et qui lui a donné ce que je ne savais pas lui offrir.
- — Mouais, possible. Mais on aurait aussi pu apprendre ensemble…
Caresses, baisers, découverte du corps de l’autre. Le sport à haute dose a du bon. Déjà, les seins, c’était mieux que pas mal. Mais les jambes… je n’ai jamais vu de jambes aussi parfaitement fuselées, aussi musclées tout en restant longues et fines. Quant aux fesses, dures comme deux ballons de hand gonflés à bloc. Je lui broute longuement la minette, elle jouit. Et chez elle, l’orgasme est une explosion de puissance à tout casser. Elle veut me rendre la pareille, je lui apprends à me sucer. Elle apprend vite. Beauté jusque dans ses moindres recoins, corps parfait, boules qui roulent sous la peau au moindre mouvement et infinie douceur quand elle est relâchée. Petit duvet brun sur les bras et les jambes, juste de quoi accentuer légèrement son bronzage de sportive. Seuls le short et les seins sont blancs. Elle atteint deux fois l’orgasme rien que par mes caresses, sa peau est couverte d’une sueur légère, sa chatte coule d’abondance. Bonheur de m’étendre sur elle et de présenter mon pénis à l’entrée de son étui à plaisir. Je la rassure en murmurant à son oreille, elle soupire et se laisse aller, petit obstacle qui stoppe ma progression, alors c’est elle qui jette son bassin sur mon dard et se déflore elle-même. J’atteins le fond de ce vagin serré et je m’immobilise. Moment d’éternité où ma verge palpite dans son vagin tout neuf qui palpite aussi.
- — Ça y est ? C’est fait ? Pas si méchant… Oh chéri, je suis enfin une femme, ta femme.
Moi, je ressens l’extraordinaire sensation d’être là où je dois être, qu’au fond tout cela était écrit, je ne sais pas où ni par qui, mais inéluctable et inévitable. Et une sérénité totale m’envahit, un sentiment d’accomplissement, une plénitude qui exacerbe mon plaisir jusqu’au paroxysme. Je ne baise pas, je fais l’Amour à mon amour, à la femme de ma vie. La suite est somme toute assez banale avec deux autres orgasmes et une éjaculation sur son ventre plat. Douche. Dîner sympa en peignoirs, entrecoupé de caresses et de baisers, promesses d’une soirée torride si son petit vagin fraîchement meurtri le supporte. La sportive est forte, il le supporte, elle en redemande, elle adore ça.
Le dimanche matin, après un réveil en fanfare durant lequel elle constate qu’elle voit mes petites fesses sur elle dans le reflet du plafond tendu. Nous visitons le sous-sol, mon petit potager, puis nous faisons une promenade dans la campagne où elle repère, ravie, plein de circuits possibles de jogging. Déjeuner copieux de produits frais et locaux, puis sieste « crapuleuse ». Je l’invite à prendre elle-même son plaisir à califourchon sur mon dard, sa tonicité fait de ces longs moments des chevauchées fantastiques et éperdues, alternants instants de sauvagerie et moments d’infinie tendresse. Pour changer un peu, nous testons également une petite levrette. Oh, ça va loin ! Quel cul, Ghislaine, large, ferme, puissant, quelle magnifique cambrure qui en glorifie l’orbe parfait, et quelle avidité qui le lance à son rythme sur mon mât de beaupré jusqu’à l’explosion libératoire ! Nous nous aimons ainsi jusqu’au soir. Heure pour elle de repartir.
- — Jérôme, c’est un déchirement total de te quitter. De vous quitter, toi et ce palais où je meurs d’envie de vivre. Mais je dois y aller. Dès demain, je fais les démarches pour demander ma mutation pour ici.
- — Mais ce n’est pas la période, c’est trop tard…
- — Je sais. Mais je vais essayer quand même. On manque de profs de gym un peu partout. Je suis bien notée et je vais tenter ma chance malgré tout.
- — Et… rapprochement de conjoints, ça ne pourrait pas aider ?
- — Sûrement que si. Mais…
- — Alors je t’épouse.
- — Tu ferais ça ? Ohhh ! …
- — Il suffit juste d’un mois, moins peut-être, le temps de la publication des bans, mais on peut tricher. Pas besoin de grosse cérémonie ni de grand tralala, on fera la fête pendant les vacances.
- — Non, rien que toi et moi, c’est suffisant.
- — Et deux témoins…
- — Oui, Françoise et ma sœur, par exemple…
Je reste seul, fatigué et pensif. Le bonheur tient parfois à peu de choses. Une rencontre inopinée à une terrasse de bistrot, un passé mal compris, et tout cela débouche sur un avenir radieux qui aurait pu ne jamais exister.