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n° 21590Fiche technique26890 caractères26890
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Temps de lecture estimé : 18 mn
06/03/23
Présentation:  Cette collection est née d’une gageure : révéler les confidences échangées entre deux complices dans une exhibition virtuelle satisfaisant les penchants de chacune.
Résumé:  Un après-midi de signatures dans une discrète librairie pour lecteurs avertis, et ce qu’il s’en suivit.
Critères:  ff fplusag inconnu cérébral revede confession -lesbos
Auteur : Dyonisia  (Souvenirs et confidences…)      Envoi mini-message

Collection : Marie-Chantal
Flirt

Un après-midi de signatures dans une discrète librairie d’ouvrages légers et érotiques. Une auteure dédicace son recueil récemment publié de nouvelles destinées aux amateurs du genre. Les chalands groupés autour d’elle sont des habitués, masculins, pour la plupart, et quelques représentantes de l’autre sexe. Parmi celles-ci, une toute jeune femme qui s’approche timidement de la table et s’exprime à voix basse.



Une demi-heure plus tard, l’auteure et sa lectrice sont attablées dans un petit bar proche de la librairie.




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Une dizaine de jours après, dans l’appartement de l’auteure.


Dring !




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Un mois se passe avant un nouvel appel.



Elles continuent à discuter sur des projets de récits : le cadre à mettre en place, le profil de l’héroïne, les situations envisageables, les alternatives possibles, les scènes d’initiation ou d’expérimentation, les sentiments et les sensations à traduire, l’enchaînement des découvertes et de leurs effets, et les détails à ne pas oublier, « en dansant, tout poil peut devenir visible, vous comprenez… »




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Un soir, ou plutôt une nuit, au bout de trois ou quatre jours :




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Le surlendemain, dans une colocation étudiante :




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Boîte vocale de Marie :

« Bonjour, ma puce, c’est Chantal. Je ne suis pas chez moi ces quelques prochains jours. Mais je vous embrasse, sur la joue entre autres, pendant que votre main s’égare, en attendant de revenir. Agréable journée, ma douce Marie. Bisous »



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La semaine suivante, un appel impatient au domicile de l’auteure :




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Boîte vocale de Chantal :

« Bonjour ma chérie. Je crois que j’ai enfin un premier jet pour l’histoire de mon héroïne. Ça se passera dans les douches ! C’est court et pas forcément ce que j’avais en tête, mais c’est déjà un essai. Je vais relire demain pour être certaine. J’aimerais en savoir plus sur votre week-end ! Et j’espère trouver moi aussi des amies comme Colette, et sa Chantal. Êtes-vous contente de votre puce, ma chérie ? »


Boîte vocale de Marie :

« Bravo ! C’est une bonne nouvelle d’apprendre que votre héroïne prend une douche… Sans rire, bravo pour vous être lancée, ma puce, et encore plus pour votre prudence critique. La concision d’un texte est plutôt un gage de qualité. Mon week-end a été peut-être une source d’inspiration pour une prochaine nouvelle, mais j’ai peur de vous avoir négligée… Je vous embrasserai partout où vous voudrez pour me faire pardonner. »



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Les entretiens téléphoniques se poursuivent et deviennent peu à peu un rituel. Chaque soir, un appel à l’initiative de l’une ou de l’autre reprend le fil du dialogue interrompu la veille. Les cérémonieuses « Madame » et « Mademoiselle » avaient été très vite oubliées au bénéfice des prénoms. Ceux-ci ont maintenant disparu, « Ma chérie » et « Ma puce » les remplacent. Le badinage amical tourne à la relation affectueuse.


Les conversations portent toujours sur la difficulté d’écrire et les conseils pour la vaincre. Les hésitations et les doutes de l’une se frottent à l’expérience pragmatique de l’autre.



Mais à ces considérations techniques s’ajoute toujours aussi un échange libertin de moins en moins réservé. Chacune le prend en plaisanterie, mais s’en émeut également.




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À force de mêler badinage et libertinage, les esprits se rapprochent. Des pensées plus lestes naissent dans la tête des interlocutrices. Quand l’une avance une suggestion osée, l’autre lui répond de façon plus scabreuse. Elles se découvrent des pulsions similaires et des fantasmes communs. Elles s’offrent leur confiance et s’ouvrent aux confidences. Les plaisirs qu’elles partagent renforcent leur relation. Entre la jeune femme et la dame mûre naissent des liens amoureux.


Il suffirait d’une nouvelle rencontre pour que cette passion latente se concrétise. Elles l’envisageraient sans doute si l’éloignement ne s’y opposait. Peut-être, d’ailleurs, est-ce mieux. Leur amour platonique les exempte de toute contrainte. Elles se livrent sans retenue. Que connaissent-elles l’une de l’autre ? La voix, la couleur des cheveux, la silhouette d’un corps dissimulé sous les vêtements, la forme et la couleur des yeux pour autant qu’elles s’en souviennent. Et quoi d’autre ? Rien !


Elles ne savent rien de leurs familles ni de leurs amies, et encore moins de leurs amis. Elles ne savent rien de leurs occupations ni de leurs vies quotidiennes, hormis ce qu’elles peuvent s’en dire quand elles se parlent ou s’écrivent. Nul secret révélé ne pourra jamais être divulgué à leur entourage. Où trouver une meilleure garantie de discrétion ?


Ce quasi-anonymat est une bulle qui les protège mieux que le confessionnal ou le cabinet d’un analyste. Elles sont libres, plus libres que nulle part ailleurs. Libres d’exhiber leur corps comme leur âme, libres d’étaler leurs complexes comme leurs aspirations, libres d’avouer leurs penchants les plus enfouis, libres d’imaginer tout ce qui peut combler leurs désirs. Où trouver un plus bel espace de liberté ?


Elles s’aiment dans le virtuel, elles flirtent dans l’autoérotisme, elles n’en sont pas dupes. Personne d’autre ne peut les juger qu’elles-mêmes, et elles s’en abstiennent. Un serment tacite les lie, il exclut la trahison sans qu’il ait été utile de se jurer fidélité. Elles avaient échangé leur 06, elles s’échangent leur mail. Ces seuls fils ténus qui les unissent, elles les gardent confidentiels, et chacune est sûre de la loyauté de l’autre.


Mais désormais, à s’écouter s’ajoute se lire, leurs confessions et leurs romances érotiques prennent forme tangible. Elles peuvent s’en régaler à satiété, leurs mains en deviennent plus actives et leurs imaginations s’envolent.


Une idée un peu folle germe dans celle de l’auteure : quitte à s’affranchir de limites, ne pourrait-on les repousser au-delà d’un dialogue privé pour en faire profiter un public friand de récits sensuels ? Un récit écrit à quatre mains, en somme.


C’est fou, oui, mais follement attrayant, et terriblement excitant si sa complice partage cette folie. Malgré leur engagement de sincérité mutuelle, la « chérie » tremble en déposant son message.


« Coucou ma puce !

Hier, j’ai pensé à quelque chose en chauffant mon cul à un bon feu de bois, et je viens de relire une grande partie de nos échanges pour voir si mon idée se tiendrait.

Voici : je me disais que je pourrais écrire un récit à partir de nos messages les plus coquins, et cochons, et l’intituler «Marie-Chantal». Ça fait penser au prénom bien connu, mais ce serait un dialogue entre Marie et Chantal.

Que penseriez-vous de cette forme d’exhibition – virtuelle – de nos pensées et de nos corps ? Moi, je trouve cette mise à nu – à nues ! – excitante, humiliante, et sans risque : il n’y aurait que nous qui saurions que nous nous livrons aux regards des autres. Pour ceux-ci, lecteurs, et surtout lectrices, ce ne serait qu’une histoire parmi d’autres…

Mais je ne le ferai pas si cela vous gêne. C’est vous qui déciderez, ma puce.

Et si vous êtes scandalisée par ma proposition et que vous pensez que je suis vraiment trop vicieuse, choisissez la punition que vous me jugez mériter : je vous promets de me l’appliquer pour vous.

Bises tendres et humbles de votre chérie aimante, et un peu anxieuse. »


La réponse est rapide, verbale et claire :



Rires.