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22/04/23
Résumé:  Des vacances à Ré dans les années 60 avec mes cousines. On commence par jouer au docteur et puis...
Critères:  fffh jeunes cousins vacances plage forêt caresses pénétratio init
Auteur : Roy Suffer  (Vieil épicurien)            Envoi mini-message
Cousines

Du plus loin que je me souvienne, nous allions en vacances à l’île de Ré. Pourquoi ? Je n’en sais trop rien. On m’a expliqué par la suite que les toubibs de l’époque conseillaient le bord de mer pour les enfants, qu’on avait trouvé l’endroit sympa et pas trop cher. Je pense pour ma part que ce dernier argument avait peut-être été le plus prégnant. Eh oui, l’Île de Ré dans les années soixante d’abord était vraiment une île, sans pont, et y séjourner restait abordable pour le petit peuple, vu qu’elle était habitée des mêmes gens, pêcheurs, agriculteurs, ou un peu les deux, avec quelques commerçants et artisans, des gens comme nous. Et beaucoup, pour arrondir les fins de mois, louaient des hébergements de vacances aux quelques téméraires acceptant de s’isoler avec eux.


La qualité de ces logements était à la hauteur des exigences des estivants de l’époque, très basse. On cherchait plus un endroit pour faire dormir la petite famille et lui donner la becquée qu’un logement de « standinge » avec vue sur mer et tout le confort « modairneu ». Tout simplement parce qu’on ne pouvait pas se payer l’hôtel ni le restaurant. En somme, il ne fallait pas dépenser plus qu’à la maison, sauf le loyer qu’on avait économisé toute l’année en privilégiant les patates et les pâtes.


C’est ainsi que nous occupions quelque chose qui avait dû être une grange, ou plutôt un bâtiment hippomobile, vestige de l’époque des moteurs à crottin. Car on retrouvait à gauche la grande double porte qui devait abriter la carriole, l’actuelle pièce à vivre, ensuite l’écurie avec ce genre de porte coupée en deux à l’horizontale s’ouvrant sur la cuisine, et enfin un espace qui avait dû être une forge pour ferrer les chevaux, seul endroit muni d’un conduit de cheminée et transformé en deux chambres. Le grenier devait permettre de stocker le foin et la paille, immense « dortoir » avec un escalier extérieur sur la droite. Un joli petit puits était carrément encastré au tiers du mur, avec un évidement en alcôve assez chouette, un trottoir pavé de pierres courait tout le long de la façade. Cet ensemble d’environ quinze mètres sur cinq se trouvait au fond du jardin des propriétaires dont il faisait l’angle, servant sur son grand côté de clôture avec le voisin et de l’autre avec un chemin qui passait entre de nombreuses parcelles potagères.


Je pense que c’est à cause du vent que toutes ces parcelles étaient clôturées de hauts murs d’environ deux mètres. Une porte de bois donnait sur ce chemin qui menait directement à la mer, un kilomètre plus loin. Les propriétaires avaient aménagé ce bâtiment à moindres frais. Le sol était recouvert d’un linoléum verdâtre, les murs barbouillés d’un badigeon jaunasse, au grenier c’était un plancher sommaire de sapin grisâtre.


Le tableau pourrait paraître déplorable et désespérant. Mais sous le soleil et avec la proximité de la mer, c’était quasiment le paradis, pour deux mois entiers ! Par quel miracle ? Ma mère avait un frère, également marié et papa de trois filles, mes cousines. Aussi, en prenant les uns leurs vacances du quatorze juillet au quinze août et les autres du quinze août au quinze septembre, nous les mômes pouvions y passer toutes les vacances. Deux mois au bord de la mer, de quoi se refaire une santé, c’est du moins ce que nos parents espéraient. Pour moi, enfant unique qui avait « cassé le moule » en sortant, c’était réjouissant d’avoir trois copines de jeu. Parfois, ça l’était moins, je l’avoue, et les crêpages de chignons n’étaient pas rares. Bien sûr, pour transporter tout ce petit monde avec armes et bagages, il fallait les deux voitures, une Simca P60 et une Dauphine, au début comme à la fin. C’était un peu pénible pour nos pères, mais c’était aussi l’occasion pour les couples de s’y retrouver ensemble quelques jours.


Tant que nous avons été petits, nous dormions au rez-de-chaussée, dans la chambre laissée libre par le couple au boulot. Mon père ou mon oncle mettaient le grand lit debout contre un mur et les mamans alignaient les quatre petits lits de toile côte à côte. Je n’ai guère de souvenirs de cette époque, ils me l’ont racontée. Puis vint le moment, assez rapidement, où le lit de toile ne convenait plus qu’à la petite dernière, les trois autres avaient besoin de couchettes plus grandes. On passa aux lits pliants, cadres métalliques avec une toile tendue par des brides de caoutchouc. Unique endroit pour les installer, le grenier, c’est ainsi qu’on l’appela « le dortoir ». Il y faisait une chaleur épouvantable, directement sous les tuiles, malgré le courant d’air entre la porte laissée ouverte et la fenêtre donnant sur le chemin. Quand on ajoute à cela la tombée tardive de la nuit en été, rien n’aidait à notre endormissement. C’était le cirque tous les soirs, et j’en ai certains souvenirs. D’abord, il y avait le clan des trois grands et la « petite » nous servait de souffre-douleur. Mireille était l’aînée de presque deux ans, Francine et moi étions du même âge et Catherine subissait nos persécutions, ayant encore deux ans de moins. Du haut de ses huit ans, Mireille faisait la fière, mais nous étions deux de six ans à lui tenir tête. Elle crut bon de se ranger à nos côtés. La pauvre Catherine, à quatre ans, subissait nos sarcasmes : « t’es trop petite… t’es trop bête… tu sais même pas lire… » et son seul refuge était de brailler à pleins poumons jusqu’à ce qu’un adulte monte à sa rescousse.


Un des défauts du plancher du grenier était que ça n’était pas un parquet, avec des lames rainurées et emboîtées, mais simplement des planches juxtaposées. Pendant des années, les poussières et déchets de paille et de foin s’étaient accumulés entre ces planches, formant presque des joints que le plus soigneux des balayages ne pouvait éliminer. Aussi en lâchant quatre loustics excités sur ce plancher, en dessous c’était une pluie permanente de poussières diverses. Les parents envisagèrent plusieurs solutions, poser de la moquette au grenier, coller du papier entre les poutres en bas… Et surtout faire quelque chose pour que les enfants aient moins chaud. Oui, mais… comment faire des travaux dans une maison qui ne vous appartient pas ? Sûr que les propriétaires accepteraient, mais ils seraient bien capables de le louer ensuite plus cher, voire à d’autres, l’année suivante. Quand ils se retrouvèrent tous les quatre adultes au quinze août, un pont de quatre jours, leurs discussions allèrent bon train. Le troisième jour, ils semblaient d’accord, et mon père et mon oncle allèrent ensemble voir les propriétaires. Les mamans étaient nerveuses, ils ne revenaient pas, elles nous firent dîner. Le jour déclinait quand ils rentrèrent, sérieusement éméchés. Ils se marraient comme les baleines du phare, se tapaient dans la main levée, vacillant au moindre geste. Je n’avais jamais vu mon père ni mon oncle, ronds comme des queues de pelles.



Moi j’étais triste, je rêvais de monter enfin dans la R 10 que mon père voulait acheter. Une voiture neuve, qui sent bon, et bien mieux que la Dauphine… Les mamans étaient contentes aussi, elles allèrent même chercher la bouteille de pineau au frais, dans le seau au fond du puits, et ils burent encore une tournée. Moi, je ne voyais pas la différence entre acheter cette maison ou l’occuper comme maintenant, l’important était d’y être. Ce que je voyais surtout, c’est qu’on avait perdu une voiture dans l’histoire. Je me suis endormi très vite, très triste.


À dater de ce jour mémorable vint le temps des vaches maigres. On nous expliquait en toutes occasions qu’il fallait économiser pour la maison de Ré. Terminées, les petites gâteries des vacances, les petits sachets de berlingots, les petits ballons à gonfler ou les beignets sur la plage. C’était tartines de confiture maison pour tout le monde. Quant à Noël, ce fut Noël a minima. Je reçus royalement un pull-over neuf, tricoté par maman, et une orange. Les adultes, eux, étaient toujours en plein délire, se retrouvant chaque dimanche pour tirer des plans sur la comète. Au printemps, mon père changea tout de même de voiture. En fait, il échangea sa Dauphine en parfait état pour une R6 un peu rouillée et cabossée, mais tellement plus pratique pour transporter du matériel, surtout avec la galerie. Et mon oncle, dans le même temps, troqua sa P60 contre un break Peugeot 403 tout aussi pourri. Les adultes sont vraiment bizarres parfois. Mais il fallait bien ça pour emporter tout le matériel, les caisses à outils, les perceuses et scies circulaires, les pelles et les pioches et un tas d’autres outils encombrants. Pire, les mamans emportèrent même une machine à coudre et des ballots de tissus. Elles avaient conservé leurs vacances en décalé comme à l’habitude, alors que nos pères avaient tous deux pris le mois d’août complet pour pouvoir travailler ensemble. Pour économiser, ils rentrèrent avec une seule voiture après avoir déposé familles et chargements, et firent de même fin août. C’est ma tante qui, au quinze septembre, nous ramena tous les six.


Plus besoin de tout déménager, nous laissions l’essentiel des affaires « chez nous ». Le grossiste en matériaux de La Pallice dut faire un mois d’août exceptionnel, car ils y allèrent aussi souvent que le bac le permettait. Ce fut d’abord essentiel pour les mamans, de la laine de verre entre les chevrons du toit, des bandes agrafées, recouvertes par du contreplaqué mince. Il faut avouer qu’il fit nettement moins chaud, surtout avec le courant d’air. Ensuite, on nous mit une moquette dans tout le dortoir. C’était plus agréable pour marcher pieds nus et pour se rouler par terre, ou lire à plat ventre, ou jouer… Ensuite, on entendit la perceuse, la pioche et de grands coups de marteau pendant plusieurs jours. Les mamans nous emmenaient à la plage à pied pour ne pas « traîner dans le chantier ». Enfin un soir, les deux beaux-frères présentèrent fièrement leur œuvre : une porte nouvelle fermait le fond du couloir du rez, et s’ouvrait sur… de vraies toilettes, avec siège et chasse d’eau. Jusque-là, il fallait aller dans une cabane de bois sous l’escalier et ce n’était vraiment pas agréable. Enfin, ils recommencèrent avec le contreplaqué et en mirent des plaques sous les poutres de tous les plafonds du bas. Ils les peignirent en blanc et firent de même avec les murs. Leur dernière semaine de vacances, ils se reposèrent un peu, allèrent quelques fois à la plage et surtout prirent quantité de mesures, firent des croquis, consultèrent les mamans qui, elles, piquaient, cousaient et installaient des rideaux coquets aux fenêtres.


Les travaux reprirent l’été suivant, selon la même formule. J’avais dix ans, mais Mireille ne m’avait pas attendu, elle en avait déjà douze et devenait un peu méprisante avec moi, m’appelant sans cesse « p’tit con ». Tant pis, je préférais de toute façon sa sœur, je la trouvais beaucoup plus jolie, et puis elle, au moins, elle avait mon âge. Cette fois, nous ne pouvions plus ignorer les activités de nos pères. La cloison de la cuisine était tombée, le linoléum du sol arraché, il se préparait de grandes choses. Quatre jours durant, merci au ciel de nous avoir aidés sur ce coup-là, il fallut manger dehors midi comme soir, la table étant sortie sur le trottoir. Seul l’un des hommes avait accès à la cuisine, l’autre lui passant le matériel par la fenêtre. Quand enfin l’accès redevint autorisé, le changement était stupéfiant : ils avaient réuni la salle et la cuisine et carrelé ce grand espace des mêmes tommettes flammées, à peu près de la couleur des tuiles. Ça donnait une impression d’immensité incroyable. Ils finirent en aménageant la cuisine en « cuisine américaine », avant-gardiste à l’époque. Les mamans s’étaient mises d’accord sur le fait que, dans leur enfance à la campagne, la cuisine était la pièce principale de la maison, la pièce à vivre, ou la cuisinière pouvait converser tout en préparant le repas. Comme ici elles n’allaient pas faire de la « grande cuisine », les odeurs ne seraient pas un problème. Il leur fallait avant tout des placards, des plans de travail, un évier et une gazinière. L’espace gagné était considérable tout en gardant la même surface au sol, et la convivialité s’en trouvait renforcée. Les papas ne prirent même pas une semaine de repos, ils se dépêchèrent de coller du papier peint dans les chambres des adultes avant de repartir tous les deux au boulot.


Dans les longs mois qui nous séparaient des vacances ultérieures, il se trouve que la R6 rendit l’âme et… mon grand-père aussi. Pas le grand-père commun avec mes cousines, le père de mon papa. Il était déjà veuf, je n’avais pas connu cette grand-mère. Mon père fut triste, j’étais triste de voir mon père triste. Alors nous sommes partis dans le Nord en train, pour les obsèques. Des gens que je n’avais jamais vus m’ont embrassé comme du bon pain, j’en avais les joues collantes. Ce n’était pas les vacances, pourtant il fallut y rester huit jours « pour régler les affaires ». Je n’aimais pas la maison de mon grand-père. Je la trouvais… prétentieuse, tarabiscotée, avec des sculptures partout qui me faisaient un peu peur, sur la façade comme dedans. Et puis il avait un tas de vieux meubles compliqués, alors qu’il y en avait de si beaux, si simples, sur le catalogue du Bon Marché. Pour rentrer, on a utilisé la voiture du grand-père, qui est devenue celle de mon père. Il a dit que ça tombait bien, je le trouvais aussi. La grosse Mercédès était rudement plus confortable que la R6 !


Curieusement, cette année-là j’ai eu un sacré Noël : un vélo et un poste à transistor. Un vélo comme j’en rêvais, un « routier », rouge métallisé avec des pneus blancs et un guidon de course, un dérailleur avec cinq vitesses. J’ai tout de suite utilisé mes petites économies pour lui ajouter un compteur de vitesse avec totalisateur kilométrique, le bonheur. Et mes trois cousines ont eu des vélos aussi, verts avec trois vitesses, offerts par mon père. Tous les trois étaient de la même taille, vu que Mireille et Francine n’étaient pas très grandes, la plus grande des trois étant la plus jeune, Catherine. Il paraît que ces beaux engins étaient pour l’île de Ré. Quand juillet est arrivé, nous étions tout excités de retrouver notre « résidence secondaire ». Oh là là ! Bien des choses avaient changé en notre absence. Une haie de thuyas avait été plantée pour bien nous séparer de l’ancien propriétaire. La façade était d’un blanc éclatant et des volets avaient été posés à toutes les fenêtres qui, jusque-là, n’en avaient pas. Ils étaient peints en bleu, normal pour l’endroit. À l’intérieur aussi, les transformations étaient visibles. Au rez-de-chaussée, un grand buffet-vaisselier trônait dans la salle ; maman s’extasia devant une salle d’eau tout aménagée. Elle caressa longuement la cabine de douche et le lavabo avec un sourire béat. Pour nous les mômes, ce fut le choc. Plus de « dortoir ». La porte s’ouvrait désormais sur un long couloir avec plein de portes : toilettes, salle d’eau avec douche, trois chambres à gauche et une quatrième au fond. En voyant les lits, j’ai cru reconnaître celui dans lequel j’avais dormi chez mon grand-père, trois lits de cent vingt et un lit de cent quarante pour la chambre du fond qui était plus grande de la largeur du couloir. Il y avait même dans chaque chambre une petite table et une chaise rococo qui devaient provenir du même endroit. En revanche, pas d’armoires, sûrement trop hautes, mais des placards en sous-pente dans les chambres et tout le long du couloir, côté mur borgne. La moquette avait aussi été changée. En fait, on nous expliqua que, pour pouvoir monter les cloisons, il avait fallu renforcer le plancher, et donc tout changer. Mireille voulait la grande chambre évidemment, nous, on s’en foutait un peu. Au final, c’est mon oncle qui trancha :



Et il ajouta en posant une main sur l’épaule de mon père :



Il repartit bosser jusqu’au quinze août. Finis les chantiers des deux beaux-frères, désormais des artisans œuvraient en notre absence. Bon, il y eut quand même une occasion de bricoler pour fermer le dessous de l’escalier afin d’en faire une remise pour les vélos, les cannes à pêche et les jeux de plage. Privilège de mes quatorze ans, c’est moi qui aidais mon père et, une fois peinte en blanc en cinq couches, notre remise avait fière allure et s’intégrait très bien à la maison sans la dénaturer. Les vélos nous apportèrent un grand souffle de liberté. On était à la plage si vite, que nous avons bientôt eu envie d’aller en visiter d’autres. Notre plus grande sortie, avec pique-nique et tout, fut d’aller jusqu’au phare des Baleines. Mireille avait beau être l’aînée, il n’y avait que Catherine pour suivre mon rythme. Il est vrai que son aînée avait bien grossi, et pas seulement des seins et des fesses comme Francine, toujours la plus jolie. Catherine avait beaucoup grandi, d’au moins dix centimètres et sa poitrine était maintenant bien formée. La complicité que j’entretenais avec Francine grandissait à chaque vacance et nous étions devenus presque inséparables, faisant à peu près tout ensemble. Nous discutions souvent dans ma chambre, qu’elle trouvait très agréable avec juste raison.



Au petit déjeuner, rien ne transparaissait de nos jeux érotiques encore bien innocents, tout semblait normal. Nous sommes allés à la plage, mon oncle apprenait la natation à Catherine, Mireille faisait fondre sa graisse au soleil et Francine et moi nous avons nagé jusqu’à un ponton flottant, un parquet de bois sur des bidons, amarré là pour pouvoir plonger à marée haute.



Elle eut la mauvaise idée, en croisant sa grande sœur dans le couloir, de lui dire qu’elle allait écouter de la musique dans ma chambre, moi qui avais LE transistor. Les trois filles ont rappliqué, en chemises de nuit, assises sur mon lit. On écoutait le Top-50, le déferlement du rock et des nouvelles variétés qui balayaient d’un coup la musique de nos parents. Ma chambre était à l’opposé de celle des adultes, ma fenêtre ouverte donnait sur le chemin désert, on ne dérangeait personne. L’emmerdant, c’est que les deux frangines ne décollaient pas non plus. Enfin, Catherine abandonna en bâillant et Mireille la suivit de près en ordonnant à Francine d’aller se coucher. Elle me glissa à l’oreille :



Elle est revenue, on s’est caressé encore, elle est repartie vers une heure du mat’. L’île de Ré c’est bien, mais nous aurions rêvé d’une île déserte, sans les frangines ni les parents. Un jour, j’ai proposé d’aller visiter Saint-Martin et le bagne de Vauban, la chanson de Ferré.



Nous sommes partis avec nos sandwiches et nos serviettes de bain. Il fallait bien visiter Saint-Martin pour pouvoir raconter, à midi, c’était fait. Casse-croûte et retour par le Bois-Plage, parce que, comme le nom l’indique, il y a plein de bois. Et à cette époque, des kilomètres sans âme qui vive. Petit sentier sablonneux au milieu des pins, un endroit très tranquille pour étaler nos serviettes et se faire de multiples caresses de plus en plus affirmées. Elle m’a dit que les gens qui se faisaient du bien, normalement, s’embrassaient sur la bouche et avec la langue. On a essayé, et c’était bon, surtout nus et collés l’un à l’autre. Vers dix-sept heures, il a fallu penser à rentrer, à peine une heure de vélo, mais il ne fallait inquiéter personne. Ils n’étaient pas encore revenus de la plage, seule la porte de nos chambres n’était pas verrouillée, alors on s’est encore embrassé à pleine bouche en se caressant, un peu seulement, de crainte d’être surpris.


Ce qui devait arriver arriva. C’était pourtant un jour tranquille, mais un jour de pluie. Les parents étaient sortis faire des courses, qu’est-ce que ça mange quatre ados ! Mireille la bosseuse travaillait ses points faibles, bouquins sortis, Catherine la rêveuse bouquinait elle aussi, mais un roman à l’eau de rose. Francine en avait profité pour se glisser discrètement dans ma chambre. Au début, on s’est juste embrassés. Puis de fil en aiguille, nos mains ont dû s’égarer, je ne me souviens plus très bien. La chose dont je me souviens bien, c’est que nous n’avions pas fermé la porte à clé. Erreur ! Quand on a frappé puis ouvert sans attendre de réponse, nous étions enlacés nus sur le lit, Francine sur moi, nous embrassant à pleine bouche.



Debout en un éclair, Francine nue comme un ver la rattrapa par le bras dans le couloir. C’est là que je mesurai l’ascendant de la cadette sur son aînée.



Écarlate, Mireille obéit pourtant, extrêmement gênée de s’asseoir près de moi, nu également et toujours en pleine érection.



Je n’en revenais pas, c’était surréaliste. Francine prise en flagrant délit et c’était Mireille qui pleurait. Sacré caractère, ma cousine. J’avais cependant franchement débandé, muet, assis à la tête du lit. Maintenant, c’est Francine qui consolait sa sœur. Elles se sont serrées dans les bras l’une l’autre, et elle lui parlait tout doucement, très gentiment.



Allais-je répondre non, même si Francine, a priori, me suffisait amplement ? Et puis Mireille me semblait beaucoup moins jolie. Mais bon, c’était ça ou le tribunal parental. Alors… C’était vrai, Mimi était moins bien faite. Pourtant, il y avait des points de ressemblance. Leurs seins étaient très comparables, bien gros, bien fermes. Sauf que Mireille avait le tronc en « bonbonne », exactement comme sa mère, pratiquement cylindrique des épaules au bassin, ses seins semblaient tournés vers l’extérieur et très écartés, alors que ceux de sa sœur tiraient droit devant, bien parallèles. Ses membres étaient également plus empâtés, ainsi cuisses et ventre se rejoignaient en un « Y » dissimulant totalement sa foufoune et une partie de son pelage léger. Mais la peau était la même, très douce et agréable à caresser. L’expérience accumulée avec Francine me fut bien utile pour éviter toute maladresse, et très vite, très très vite, Mimi décolla pour une destination inconnue. Et Francine ponctuait mes caresses avec ses petites remarques, insistant sur le plaisir innocent de ces doux contacts.



Le joli trio ! Voilà que Francine me branlait pendant que je roulais des pelles à sa frangine. On aurait tout vu ! Et de lui expliquer l’instant d’après comment il fallait mettre la langue, pendant que moi je tétais ses gros nichons en caressant son minou. L’issue ne fut pas longue à venir. Les grosses cuisses se mirent soudain à vibrer et Mireille lâcha une bordée de cyprine.



Les voilà donc toutes les deux installées autour de moi, Francine guidant sa sœur pour caresser ma bite avec ses seins. Mireille fut surprise par le premier jet et s’en mit un peu partout, tandis que Francine léchait mon ventre jusqu’à la dernière goutte. Quand sa sœur s’enfuit prendre une douche, elle me confia :



Elle y est revenue, ô combien. Beaucoup moins prudente que Francine, elle ne cessait de m’attirer dans les coins pour me rouler des pelles en me mettant la main au panier. Au point que j’ai dû la recadrer vigoureusement, c’est notre petit secret à tous les trois qu’elle mettait en danger. Et donc les vacances se terminèrent par des soirées top 50, et dès que Catherine regagnait sa chambre, ses deux frangines quittaient prestement leurs chemises de nuit, verrouillaient la porte et se disputaient mes caresses.


Le retour au lycée et à la vie normale fut un choc. Passer de deux ou trois éjaculations par jour à plus rien du tout, si ce n’est une petite masturbation sans saveur de temps en temps, c’était un vrai motif de déprime et je me réfugiai dans le travail. À la grande surprise de mes parents, mes résultats scolaires furent les meilleurs depuis longtemps. Malgré tout, dans cette grande usine qui m’accueillait depuis la sixième, je pris soudain conscience que si j’y restais, je n’aurais jamais mon bac. Je ne sais pas qui s’en foutait le plus, des élèves ou des profs. Mais à l’évidence, que le fait d’apprendre un tant soit peu quelques leçons dans des matières clés et faire risette sans mettre le bordel dans les autres me propulse du ventre mou aux avant-postes, ce n’était pas sérieux. Une administration débordée, des élèves trop nombreux et trop disparates, entre les petits sixièmes de onze ans et les grands de terminale de dix-huit, ça ne pouvait pas fonctionner correctement. Un jour, je vis une annonce au tableau d’affichage : « Inscription au concours d’entrée à l’École Normale ». Ah ça, ça me plaisait bien. J’avais eu de bons maîtres, et le devenir à mon tour me tentait bien. J’ai pris un dossier, mes parents étaient à la fois étonnés et tourneboulés. Ça signifiait partir en internat pour quatre ans, quitter le cocon familial, ce qui ne me déplaisait pas non plus. Certes, il me fallait un trousseau, mais les études, la nourriture et l’hébergement étaient totalement gratuits, un vrai avantage pour une famille modeste. Mon père signa le dossier. Il ne me restait qu’à obtenir le concours d’entrée qui donnait automatiquement le brevet.


Il y eut quelques week-ends et les fêtes de fin d’année pour réunir la famille, mais il était bien difficile de pouvoir s’isoler un moment hors des yeux des parents ou de Catherine avec l’une ou l’autre de ses sœurs. Qu’elles nous semblaient loin ces prochaines grandes vacances ! C’est à la faveur de cette réflexion dépitée que me vint une idée farfelue. Je dis un soir à mes parents que la maison de l’île de Ré était très agréable, mais qu’on en profitait bien peu, alors qu’on pourrait aussi y passer les petites vacances, et même la semaine des fêtes de fin d’année durant laquelle les parents ne travaillaient en général pas.



Message bien reçu, mais, l’argument qui tue : il n’y a pas de chauffage dans cette maison. Et même à Ré, il fait frais en hiver, frais et humide, intenable sans chauffage. Et puis nous étions trop jeunes pour y rester quinze jours seuls. Dommage… Mais le ver était dans le fruit, il suffisait de lui laisser faire son œuvre. Je crois que les deux couples en ont parlé entre eux pour avoir saisi quelques bribes de conversations :



Pour mon anniversaire, j’ai eu un Teppaz avec quelques 45 tours, le pied ! Sauf les disques qui étaient un peu « pour tous les goûts », genre Aznavour que ma mère adorait, des valses viennoises qui plaisaient à mon père et pour moi Sheila, « l’heure de la sortie ». Moyen, moyen, cependant j’ai vu mes parents pousser la table pour valser, c’était la première fois que je les voyais danser. J’ai couru acheter deux ou trois disques avec mes petites économies, à mon goût, qui était alors très rock.


Juillet, retour à Ré enfin, auréolé de mon succès. J’étais admis à l’entrée de Normale et, par la même occasion, le diplôme du brevet m’était délivré d’office, le concours étant considéré comme plus difficile. La maison était un peu envahie par les entreprises, car mon idée avait fait son chemin. Un jeune artisan astucieux nous installait le chauffage. Plus de ballon d’eau chaude, mais une petite chaudière à fioul grosse comme la machine à laver qu’il livra par la même occasion. Les mamans battaient des mains. Le garçon était astucieux parce qu’il réussit à installer ses tuyaux de façon presque invisible, en passant dans les placards de sous-pente. Tout était très discret, comme la chaudière. Le seul problème, c’était la cuve. Il nous dit qu’il fallait ici environ 1 500 litres par an en habitant toute l’année. Mais dès qu’on lui expliqua qu’il y aurait au maximum trois périodes de quinze jours de chauffe, plus l’eau chaude en été, alors il opta pour une petite cuve de six cents litres qu’il fourra sous l’escalier, bien au fond de notre abri à vélos. Sympa, il alla jusqu’à piocher le sol pour la caler le plus loin possible et dégager le maximum d’espace de rangement, avec juste une petite trappe d’alimentation découpée dans notre parement de bois. Super !


Ici aussi, mon Teppaz donna du bonheur, ici aussi on poussa la table contre le mur et les parents dansèrent leurs valses et leurs tangos, et nous nous essayions au rock et au twist.


Mireille était plus affamée que jamais. Je crois qu’elle avait envie de reprendre la main sur sa sœur, vexée sans doute de ne pas avoir été la première. Alors un jour où nous étions allés tous les trois à Saint-Martin sous le prétexte de trouver un disque de Presley, nous fîmes un arrêt dans le petit bois habituel. J’appréciais vraiment cette double tyrannie de mon sexe. Mireille en profita pour me chevaucher et frotter son sexe sur le mien jusqu’à l’orgasme, le sien d’abord, le mien ensuite. Francine n’eut plus qu’à éponger mon plaisir à grands coups de langue sur mon ventre. Mireille retrouvait sa superbe et son statut d’aînée grâce à ce simulacre d’acte sexuel. Je craignais que Francine ne décide d’en faire autant, et ainsi que je devienne l’enjeu d’une rivalité entre frangines. Il n’en fut rien, du moins pas tout de suite.


Catherine avait encore grandi, laissant ses aînées douze bons centimètres au-dessous d’elle. Ses formes s’affirmaient et, de plus en plus, j’avais l’impression de voir en elle une Francine « étirée ». Même poitrine arrogante, même postérieur large et pommé, même taille fine et membres bien plus déliés. Elle conservait cependant cet air mi-triste mi-absent qui la rendait diaphane, évanescente, mais quelque part intéressante. Alors que nous la suivions à bicyclette quelques mètres en arrière, je fixais son cul serré dans un short presque trop petit, dodelinant sur la selle au rythme des coups de pédales. Le plus fascinant, ce n’était pas le cul en lui-même, assez semblable à celui de Francine, mais cette taille ultra-fine qui s’articulait au-dessus donnant naissance au « V » long et musclé de son buste.



Elle se retourna pour voir si nous suivions, et le mouvement de rotation de ce torse mince mit soudain en valeur sa superbe poitrine. Belle image engrangée dans ma mémoire.


Tout s’était organisé pour que nous venions aux petites vacances et je jubilais. Il y eut cependant quelques hics. D’abord, ce fut le calendrier des vacances scolaires, pas du tout pratique. Cinq jours à cheval sur deux semaines à Toussaint, râpé. Noël, c’est avec les parents, février comme Toussaint. Restait Pâques, du quatre au dix-huit avril, mais les grandes vacances étaient avancées au trente juin avec reprise le dix septembre. Ça n’allait pas du tout ce nouveau calendrier. Même les parents allaient devoir changer leurs dates de vacances pour juillet et août entiers. Ajoutons à cela que Mireille potassait son bac et l’histoire était pliée. On aurait juste droit à la semaine des fêtes, avec les parents…


Et c’est exactement ce qui se passa. C’est vrai que cette semaine en hiver était très agréable, mais bon, avec les parents majoritairement à la maison à cause du temps moyen-moyen. La question ne se posait même pas pour les vacances de Pâques, Mireille révisant, on n’allait pas faire deux voyages pour les trois autres… Eh bien, son bac, elle l’a raté. De peu, mais raté. Je ne raconterai pas les larmes, qui contaminèrent toutes les femmes de la famille. J’ai dit à mon père :



Sympa, la confiance régnait. Mireille avait une session de rattrapage en septembre, juste avant la rentrée. Donc, pas de vacances pour Mireille, restant bosser avec sa mère à la maison. Il est vrai que Francine et moi avons passé de très bons moments, et à son tour, désormais sans rivale, elle m’offrit des moments partagés d’érotisme délicieux, Mais honnêtement, ces vacances étaient un peu gâchées. Pour rien puisque Mireille ne réussit pas à convaincre le jury. Il y avait dans l’air quelque chose de pesant, d’anormal, comme un grand calme avant la tempête… Tu parles, dix mois plus tard, tout pétait dans les facs parisiennes et la France semblait plongée dans le chaos. « Sous les pavés, la plage » qu’ils disaient, ben gardez vos pavés et laissez-nous notre plage, parce que si ça continue on ne pourra même pas y aller. Ouf, en juin c’était terminé, le bac, ou un semblant eut lieu avec une immense mansuétude qui permit à Mireille de l’obtenir avec mention. Assez bien, mais mention tout de même. Direction Ré !


Ça aurait pu être bien, mais… Un, Mireille (toujours elle) s’était inscrite en classe prépa pour faire une école de commerce. Une sorte de bagne, disait-on, mais pas celui de Saint-Martin, où il fallait bosser, bosser et bosser encore… Alors les parents n’ont eu qu’une idée, qu’elle commence à bosser tout de suite ! Et comme Francine et moi allions à notre tour subir les épreuves du bac à la fin de l’année, même combat. Ils nous ont même un peu confinés ensemble, puisque nous étions censés suivre le même programme. Nous eûmes quand même droit au petit bal local du 14 juillet, au feu d’artifice du 15 août et le reste du temps quasi-enfermement. Heureusement que cette année-là mon père acheta un salon de jardin et un parasol, ce qui nous permit de réviser un peu dehors. Mireille, elle, noircissait des tonnes de fiches, à croire qu’elle avait dévalisé la papeterie du coin. Avec Francine, nous révisions aussi d’autres choses plus « scientifiques », l’anatomie par exemple, essentiellement le matin parce que ma chambre était fraîche. Mais il fallait rester prudents, car les parents ne sortaient que pour les courses ou accompagner Catherine à la plage de temps en temps. Catherine se retrouva donc totalement isolée, mais ne semblait pas s’en plaindre. Elle traînait ses rêveries de sa chambre aux chaises longues, un bouquin à la main et des lunettes de soleil sur le nez. Elle semblait absente, dans son monde. L’après-midi, tout l’étage était étouffant, seule Mimi arrivait à tenir et descendait dîner, rouge comme un homard plongé dans l’eau bouillante. Le week-end, tout de même, nous avions le droit d’aller piquer une tête. Je ne sais pas quel rôle ont joué ces vacances dans mes résultats à l’examen, mais je dois avouer qu’il n’a pas dû être neutre. Les bouquins, par exemple. Nous en avions une liste à lire. La liste de Francine, dans un lycée de jeunes filles, n’était pas la même que la mienne. Alors on s’est échangé les bouquins et on a lu le tout. Ce qui ne nous a pas fait de mal, puisque c’était la dernière fois que le français se passait en épreuve terminale, pour Catherine ce serait en fin de première. On lui léguera nos bouquins sans regret.


J’ai eu le bac sans problème, avec même une petite mention « bien ». Francine l’a eu aussi, mais mention « très bien ». Normal, elle bossait plus que moi. Par la magie de l’École Normale, mon compteur de retraite démarra le jour de mes dix-huit ans, ce qui me fit sourire. La retraite ? Dans une éternité de trente-sept ans et demi… Mais l’important était que, dès la prochaine rentrée, je serais payé. Peu, mais payé. Neuf cent soixante francs par mois, une fortune ! Là-dessus, je devrai retirer le loyer d’une chambre en ville, cent quatre-vingts francs, et le prix de la cantine de l’E.N., cent soixante francs. Il allait me rester six cent vingt francs, rien que pour moi ! Dans la foulée, je passai mon permis, et ça, c’était mon cadeau de réussite au bac offert par les parents. C’est dire que nous ne sommes partis pour Ré que le quatorze juillet. J’ai eu le droit de conduire la Mercédès sur une centaine de kilomètres, c’était autre chose que la R8 sur laquelle j’avais appris. Qu’est-ce que c’était lourd et dur ! Les cousines non plus n’étaient pas arrivées. Mireille n’était pas à Aubagne, mais au bagne, elle a passé des concours, mais n’a été reçue que dans une boîte privée très chère, hors de portée des moyens de mon oncle, qui voyait arriver avec horreur les études supérieures de Francine. Elle voulait faire médecine, ils faisaient les démarches pour lui trouver un hébergement pas trop cher et régler les formalités. Ça avait l’air idiot, mais moi je ne coûtais rien à mes parents depuis trois ans, et en plus ils n’auraient même plus besoin de me donner de l’argent de poche. Au final, on ne va passer véritablement que quinze jours ensemble à Ré tous les huit, les impératifs de préparation de rentrée des uns et des autres démarrant dès le quinze août.


Séjour bref, on est loin des deux mois de notre enfance. Mais séjour ô combien mémorable. Car Mireille avait décidé de ne pas mourir idiote, et surtout de ne plus continuer à passer pour une cruche auprès de ses copines de prépa. C’est dans le petit bosquet du Bois-Plage qu’elle me grimpa dessus en me demandant, l’air grave :



Alors elle souleva ses grosses fesses, redressa mon pénis déjà bandé et se laissa coulisser lentement dessus. Francine observait ça avec intérêt et applaudit quand sa sœur triomphante se rengorgea, le cul calé contre mon ventre.



La suite fut un peu plus chaotique par manque partagé d’expérience. Mais au final, lorsque ma queue prestement sortie de la levrette s’épancha sur ses fesses, tout le monde semblait content. Je ne sais pas jusqu’à quel point Mimi avait apprécié, parce qu’elle n’y revint pas du séjour, soumise, disait-elle à l’impérieuse nécessité de bosser. Elle laissa ainsi le champ libre à Francine à qui l’exemple de sa sœur avait donné de furieuses envies. Toujours très complices, nous décidâmes de procéder autrement et d’aller jusqu’à Saint-Martin pour acheter des capotes. La fleur de Francine fut ainsi cueillie dans des conditions bien différentes. D’abord, nous n’étions que tous les deux, ensuite l’attraction sensuelle qui nous liait depuis longtemps induisit des ébats très amoureux, débouchant sans surprise sur de violents accès de plaisir partagé. Quand les parents sonnèrent la fin de la récréation, ce fut un véritable déchirement pour Francine et moi. Je la vis pleurer de chagrin et de regret pour la première fois.


De retour au bercail, je fis les petites annonces. Mon premier investissement serait une dedeuche ! J’ai rencontré le banquier, je pouvais obtenir jusqu’à cinq mille francs de prêt en remboursant deux cent trente francs par mois pendant deux ans. Si toutefois mon père m’autorisait, car je ne serai majeur qu’à vingt et un ans. Mon père examina le dossier :



Ils furent emballés. C’est vrai qu’elle était en parfait état cette 2CV 6 gris vert, intérieur de tissu vert… On eut beau soulever les tapis de sol en caoutchouc, pas de rouille et le couple un peu âgé, très sympathique, nous garantit l’avoir achetée neuve et qu’elle avait toujours couché sous la grange. Alors mon père fit un truc incroyable. Il sortit son carnet de chèques et dit au Monsieur :



Merci papa ! J’étais rouge et le sang tapait dans mes tempes et mes oreilles. J’ai suivi la Mercédès qui roulait prudemment, au volant de mon « bolide », le bras à la portière vitre levée. Qué bonheur !



Un salaire, une bagnole, j’avais des ailes. J’étais un « grand », un adulte, ou presque…


Mon premier trimestre de formation professionnelle fut assez ennuyeux. Beaucoup de bla-bla, histoire de l’enseignement depuis Périclès, psychologie de l’enfant, psychopédagogie… Beaucoup de supposés, peu de certitudes. Le plus intéressant, c’était sans aucun doute les séquences en classe, dans les écoles d’application. On voyait vraiment comment les maîtres traitaient un sujet. Observation puis co-animation, pour les exercices notamment, puis prise en main de la classe pour une séquence. J’aimais ça. Pas ou peu de boulot après les cours, quelques recherches, quelques fiches… et surtout sorties avec les copains : bistrot, ciné, flipper, baby-foot… C’était cool ! Oui, mais je faisais gaffe à la dépense. J’avais vraiment envie d’avoir un bon appareil photo, un vrai, un pro, un reflex avec des objectifs interchangeables et notamment un gros télé pour piquer les oiseaux nombreux à Ré. Donc je faisais des économies, deux cent cinquante francs par mois placés sur mon livret, et dans un an j’aurai mon Nikon F. Au point que, pour les fêtes, je montai sagement dans la voiture familiale sans prendre ma deuche. Hé, un plein c’était vingt francs ! En plus, j’avais fait des petits cadeaux à tout le monde, mais j’en reçus également. Cependant, l’atmosphère était assez pesante. Du côté de l’oncle et la tante, ça tirait financièrement. Mireille semblait toujours être en train de voler du temps à son travail et craignait de ne pas y arriver, Francine sentait bien qu’elle peinait à suivre, et s’aperçut que lorsqu’on n’était pas « du sérail », c’est à dire issu du milieu médical, les chances étaient minces de passer en deuxième année. Pour Catherine, mes parents et moi, en revanche, tout semblait aller fort bien. On essaya de les distraire, mais ce qu’il leur aurait fallu, c’était une thérapie. C’est un peu ce qui se passa. Il ne faisait pas très froid, alors nous allions marcher jusqu’à la plage, dans les dunes, quelques kilomètres. Les deux messieurs parlaient ensemble, les dames aussi et moi je me cognais alternativement Mimi et Francine qui me livraient leurs doutes et leurs angoisses. Avec mes notions toutes fraîches de psycho, j’essayais de leur redonner un peu d’espoir et d’entrain. Un jour enfin je me retournai vers Catherine :



Ouf ! Ce qui s’appelle un jugement sévère, mais somme toute réaliste. Quand on ne sait pas quoi répondre, on se la ferme. Je me la suis fermée.


En février, même si les congés étaient courts, c’était l’occasion de les revoir à la maison, mes parents invitaient. On discuta de tout et de rien, et je mis sur la table les vacances de Pâques, et mon intention d’aller passer quinze jours à Ré en profitant des grandes marées. J’emmènerai qui voudrait, espérant : un, que Mireille ne viendrait pas ; deux, que Francine sauterait sur l’occasion. Gagné et raté !



L’affaire était pliée, j’irai donc seul ou avec un copain. Mais surprise du jour :



Tout le monde éclata de rire, vu que la « p’tite » était plus grande que sa mère et ses deux sœurs. C’était dit, elle viendrait. J’avoue avoir eu un peu de mal à me faire à cette idée. Certes, dans le genre pas emmerdant, Catherine était le prototype. Mais, justement, je ne savais pas trop ce qu’elle pensait ni rien du cheminement qui l’avait amenée à sauter ainsi sur l’occasion. On verrait bien, elle n’était pas dangereuse et plutôt très jolie, avec des nichons et un cul d’enfer. Si les copains me voyaient partir avec elle, ils en baveraient de jalousie.


Vacances le vendredi soir, nous partîmes le samedi matin. Le temps était convenable sans plus, la deuche aimait la fraîcheur, puisqu’elle n’avait pas de radiateur, elle ronronnait comme une chatte qu’on caresse. À quinze heures, nous étions sur le bac et une heure après dans la maison. Ça sentait un peu le « hareng fermé », j’aérai en grand, le temps d’ouvrir l’eau, l’électricité et d’allumer la chaudière. Cathy avait un grand gilet sans forme dans lequel elle s’enroulait en téléphonant aux parents, elle avait un peu froid. Dès que l’eau fut en température, je mis le chauffage à fond et fermai les fenêtres. Je montai au premier fermer les radiateurs, inutile de tout chauffer, on utiliserait les chambres de nos parents respectifs. Les mamans nous avaient préparé à chacun un menu complet pour deux en comptant large, on avait de quoi bouffer pendant deux jours ! Ce fut elle qui se chargea de préparer le repas, on dîna tranquillement en écoutant la radio. Quand on eut terminé, elle se leva et quitta son gilet pour débarrasser et faire notre petite vaisselle, il faisait maintenant bien chaud. En jean et pull moulant, elle était vraiment bien gaulée, et avec un cul impressionnant, par sa taille certes, mais surtout par l’ovale parfait de ses hanches. Je voulus l’aider :



Le temps d’enfiler mon caban, de prendre mes clopes et mon briquet, elle était déjà dehors avec moi, enroulée dans son grand gilet.



Je pris ma valoche et j’entrai dans la chambre de mes parents, je la posai sur le lit et commençai à ranger mes frusques. Elle entra également… avec sa valise.



J’étais devant une obstination absolue, sans négociation ni échappatoire possible. D’ailleurs, je n’avais absolument aucune envie de m’échapper. Juste que ça me tombait sur la caboche quand je ne m’y attendais pas, ça ne se passait pas du tout comme j’avais imaginé, je n’étais plus le maître du jeu. Et j’avais une boule de pétanque dans la gorge. J’allai boire un verre d’eau. Soudain une voix derrière moi :



Je ne parvenais pas à détacher mes yeux de cette beauté nue et… je ne savais même plus où regarder. Tout était… splendide, magnifique, incroyable… J’hallucinais, il devait y avoir des trucs pas nets dans ma clope. Ces seins, ce cul, ces hanches, ce ventre plat avec… oui, une plaque de chocolat qui apparaissait de temps à autre, ces membres longs, déliés, avec les muscles qui se dessinaient selon ses mouvements… même le dos passait du lisse absolu aux boules qui roulaient sous la peau de façon impressionnante.



Pour moi également, ce furent certainement les plus belles vacances de ma courte vie et, avec le recul, elles le sont toujours. Elle a bénéficié de toute l’expérience accumulée avec ses frangines, enrichies par quelques copines éphémères. J’avais appris toutes leurs sensibilités, tous leurs goûts sensuels. Et puis il y en eut bien d’autres, puisque nous étions totalement seuls et libres, et aussi grâce à sa taille qui autorisait facilement l’amour debout. Vierge, elle l’était… presque. Quand je me suis étonné de ne pas trouver la petite membrane qu’on appelle hymen, elle me dit :



Elle l’a eue, autant que j’ai pu. Trois, quatre, cinq fois par jour, et parfois plus, jusqu’à épuisement. Évidemment, nous étions prudents, et très vite nous sommes allés acheter des capotes, pour aller au bout de l’acte et du plaisir. Merveilleux. La veille du départ, nous sommes allés à la marée qui était assez importante. Nous avons ramassé tout ce que nous avons pu, et à cette époque, la mer était généreuse et surtout peu pillée. Coques, moules, huîtres, palourdes, pétoncles, mais aussi des crevettes grises, des araignées de mer et même un tourteau. On a tout fait cuire, sauf les huîtres, jusqu’à pas d’heure, avec beaucoup de thym et de laurier piqué dans un jardin et quelques oignons achetés à l’épicerie. On en a mangé un peu et on a emballé le reste, alibi de vacances réussies. Sur la route du retour, à peu près à dix kilomètres de l’arrivée, Cathy m’a fait arrêter dans un petit bois. Elle a dégrafé mon pantalon et m’a sucé délicieusement, comme je lui avais appris à le faire, jusqu’à ce que j’éjacule dans sa bouche.



Elle a pleuré, puis s’est ressaisie très vite. Fille étonnante, d’une incroyable maturité. Les parents ont adoré nos fruits de mer.



Elle m’a écrit quelques lettres, me racontant sommairement ce qu’elle faisait et, sans trop de détails précis, évoquant les souvenirs de nos vacances, me disant qu’elle me gardera toujours dans son cœur. Mais une relation épistolaire, si elle n’a pas de réponse, car mes lettres auraient pu tomber entre les mains de ses parents, s’étiole vite avec le temps. Je terminai mes courtes études en juin et j’eus une nomination pour la prochaine rentrée dans un trou de campagne, classique, je m’y attendais. Il me fallut envisager l’achat d’un minimum de mobilier pour équiper mon logement de fonction que la mairie s’engagea à « rafraîchir » pendant les vacances. Achat de l’appareil photo repoussé… À la surprise générale, grâce à sa ténacité et à son boulot, Mireille fut reçue à l’une des écoles de commerce convoitée, quarantième sur quarante, mais reçue. Francine se planta encore, terminée la médecine, elle se réorienta vers la pharmacie. Sur l’île devenue « à la mode », on trouva qu’il y avait de plus en plus de monde et cette invasion nous agaçait, on ne se sentait plus « chez nous ».



On profita de la deuche décapotée pour faire de chouettes balades tous les quatre, durant les quinze jours que nous y passâmes en commun. Mais la magie était perdue. Je n’avais plus du tout envie de Mireille qui, de toute façon, était ailleurs, sur un nuage, et se rengorgeait à tout bout de champ de sa réussite. Chiante ! Francine était à l’inverse déprimée, ne pouvant faire ce qu’elle souhaitait. J’en avais beaucoup moins envie depuis mon expérience avec Catherine. Elle, elle n’avait plus l’exclusivité, donc elle se renfermait dans son mutisme. Tout juste me surprit-elle lors d’une baignade en me faisant une fellation partielle sous l’eau ! Lorsqu’elle refit surface :



J’aurais souhaité qu’elle reste avec moi jusqu’au début septembre, mais le refus fut catégorique, elle devait anticiper et commencer à travailler le bac. Au final, je suis rentré aussi. J’ai investi mon nouveau logement, j’ai donné quelques coups de pinceau aux endroits que les employés municipaux n’avaient pas faits ou mal faits, et j’ai préparé ma première rentrée.



Catherine a eu 19 au bac et mention très bien, et on ne l’a vue avec ses parents et ses frangines, très occupées aussi, que quatre jours autour du quinze août. Tout ça parce qu’ils avaient des paperasses à signer. Cette fois, j’étais assez grand pour avoir des explications.



Voilà, une page se tournait, terminées les vacances avec les cousines. Il était temps d’aller voir ailleurs…


Mireille a épousé un de ses copains de Sup de Co., un garçon très gentil, fils unique également. Ils vont reprendre l’entreprise du beau-père qui bat de l’aile.


Francine, ne voulant pas être en reste, a épousé aussi un copain de promo, futur pharmacien, mais issu d’une famille aisée. De là à imaginer un calcul de sa part… mais non, mais non, je suis vraiment mauvaise langue.


Catherine a brillamment obtenu le concours d’entrée au CREPS. Boursière, tout se passait bien malgré la difficulté de cette formation, à la fois intellectuelle et physique. Elle a joué de malchance : rupture du tendon d’Achille huit jours avant le passage de son examen de professorat de gym. Excellentes notes à l’écrit, mais aucune en pratique, donc recalée et six mois minimum avant de reprendre cet entraînement de haut niveau. Donc très peu de chances de retrouver la masse musculaire, la souplesse et le niveau nécessaires pour repiquer l’année suivante. En plus, elle a perdu sa bourse. Dégoûtée, une fois remise, elle s’est fait embaucher par une école privée.



Dix ans plus tard


J’ai fini par épouser une très jolie collègue institutrice, envoyée par la providence dans un poste double à la campagne. Les distractions étant rares et la belle peu farouche, nous avons vite trouvé des occupations distrayantes. Ce mariage fut une grande joie pour mes parents. Ils étaient moins réjouis cinq ans après lorsque j’ai divorcé. Ben oui, elle était très jolie, un peu trop peut-être, ou disons que je n’étais pas le seul à l’avoir remarqué. J’étais alors revenu sur les lieux de mes crimes d’étudiant, à l’École Normale où j’étais chargé de l’audiovisuel. N’effectuant plus de face-à-face pédagogique, ou très peu, mon temps de travail était passé logiquement de 27 à 39 heures. Ce n’est rien treize heures de plus par semaine quand on fait quelque chose qui plaît. Mais, comme a expliqué au juge l’avocat de mon épouse, ce sont treize heures où le couple n’existe plus, l’une est libre, mais sans l’autre. Et ce temps, il fallait bien l’occuper. Le juge a éclaté de rire, je m’en suis bien tiré, elle a eu l’intégralité des torts. Juste deux ans et des milliers de francs perdus ! Quand j’ai pu me refaire la cerise, j’ai terminé à mon goût la maison dont nous avions lancé ensemble la construction.


Mireille et son mari ont bien redressé l’affaire du beau-père. Et puis il a suffi d’un gros client qui mette beaucoup de temps à payer, en l’occurrence l’État, d’un petit incendie dans un entrepôt et d’un autre client, un promoteur qui a fait faillite, et soudain tous les efforts furent réduits à néant. Liquidation judiciaire, dépression, le mari de Mireille s’est suicidé. Moins d’un an après, elle refaisait sa vie avec un triple connard, l’exact opposé du défunt, un copain rencontré lors de sorties en boîte. La soudaineté de ce remariage m’a beaucoup dérangé. Y avait-il quelque chose entre eux avant ? Ce quelque chose aurait-il joué un rôle dans le suicide ? Je ne le saurai jamais.


Francine également a fait faillite. Eh oui, une pharmacie. Ce n’est pas rare, surtout dans les petits patelins. Il suffit qu’un médecin parte ou prenne sa retraite sans être remplacé, et le chiffre d’affaires dégringole. Et lorsqu’il passe en dessous des charges, importantes, puisqu’ils avaient deux salaires de pharmaciens, c’est la faillite. Ils devaient avoir quelques économies ou une bonne capacité d’emprunt, parce qu’ils ont racheté une officine dans le Nord, région plus peuplée, et à proximité d’un hôpital et d’une clinique.


Catherine est absente des radars, elle ne fait jamais parler d’elle, comme toujours.


Je voulais m’éloigner du microcosme enseignant pour ne plus croiser mon ex. J’ai saisi une opportunité, une connaissance de mes parents qui partait à la retraite et cherchait un successeur. Je suis allé le rencontrer pour savoir en quoi ça consistait, j’ai plu, ils m’ont embauché et me voilà directeur de CFA, centre de formation d’apprentis. C’est un boulot monstrueux de complexité, très chronophage, mais passionnant. Et comme je n’ai rien d’autre à faire et que personne ne m’attend plus à la maison, je peux m’y consacrer totalement. Les apprentis ne sont pas faciles, souvent en échec scolaire ; les parents sont à l’image de leur progéniture ; les maîtres d’apprentissage sont parfois exemplaires, mais certains ne recherchent que de la main-d’œuvre à bon marché ; les enseignants sont recrutés selon les spécialités et le niveau d’études exigé, mais manquent parfois, trop souvent, de pédagogie ; les programmes et instructions viennent du ministère ; l’argent vient du Conseil Régional et des entreprises… Un superbe casse-tête, une responsabilité pesante. Moralité, je cours partout, tout le temps.


Cette préparation de rentrée s’annonce mal. J’ai plein d’inscriptions d’apprentis, ça, c’est plutôt bien, mais je manque de profs. Prof d’anglais à temps partiel, à voir avec le lycée d’à côté. Prof de français, là j’épluche les CV et les cheveux se dressent sur ma tête. Des candidats à ce poste sont capables de faire des fautes d’orthographe dans leurs lettres de motivation ! Le tri est vite fait, j’en reçois sept, toute une journée. J’en retiens une, diplômes, tenue, charisme, il faudrait juste l’accompagner en pédagogie. Prof de gym, très peu de choix, quatre CV. Je dis à ma secrétaire de les convoquer tous, un par heure de quinze à dix-huit heures. Le premier a un passé de militaire et me déclare tranquillement :



Il en faut, c’est certain, mais pas que. Au revoir, merci. La seconde se présente en survêtement, mais avec un foulard sur la tête. Je lui demande si elle compte faire cours avec ce foulard, « absolument » me répond-elle. Je suis bien ennuyé, je ne veux pas la froisser ou provoquer un tollé de la communauté maghrébine. Pendant qu’elle m’expose ses compétences, indéniables par ailleurs, je cherche une porte de sortie.



Merci, au revoir. Le troisième est adorable, tout jeune, du lait de sa mère au coin des babines, ayant échoué de justesse au professorat, il est animateur sportif pour la commune. Expérience professionnelle ?



Le malheureux va se faire dévorer tout cru par mes petits loups. Pourtant, il n’est pas mal et pédagogiquement tient la route… J’hésite vraiment. Il faut voir le quatrième. Sophie, ma secrétaire, frappe et annonce :



Je repique le nez sur ma fiche d’entretien, à propos de ce petit jeune. Faut voir… Il n’est peut-être pas si mal. Un bruit incongru me tire de ma réflexion, un bruit de talons. C’est fou comme le cerveau travaille vite parfois. Talons ? Pas normal. Je viens de recevoir trois candidats en survêt’ et baskets, des profs de gym, quoi. Il leur manquait juste le sifflet autour du cou et le chrono dans la main. Mes yeux vont donc se fixer sur le seuil de la porte, escarpins à petits talons, et mon regard remonte… Non ! Ça alors ! Ma mâchoire tombe.



Je la raccompagne jusqu’à la porte en la regardant à la dérobée. Elle a toujours cette silhouette extraordinaire, cette poitrine agressive, quoi qu’elle en dise, cette chute de reins vertigineuse et ce cul pommé qui fait gicler sa jupe en arrière comme une robe à crinoline. Toujours sublime ma cousine, avec sa queue de cheval et ses lunettes de soleil. Et toujours ce visage juvénile à la moue enfantine, un peu boudeuse. Ça doit tenir à l’épaisseur de ses lèvres charnues. Je verrouille la porte, mets l’alarme et sors par-derrière. Mon cœur bat la chamade comme le soir où elle s’était installée dans ma chambre, ou lors de son adieu inoubliable dans ma deuche, sa bouche emplie de mon sperme… J’arrive au palais de justice, elle sort juste de sa voiture. Nous choisissons une terrasse dans une rue piétonne, un peu à l’écart.



Le bonheur me submerge en roulant tranquillement vers la sortie de la ville, vers un hameau assez proche, six kilomètres, où j’ai fait construire ma demeure. Une maison qui paraît plus petite à l’extérieur qu’à l’intérieur, parce qu’elle est très ramassée sur son tertre, en partie naturel, en partie en remblais de la terre extraite du sous-sol. Une entrée centrale en retrait d’un mètre, avec une lourde porte de chêne entourée de deux vitres, à gauche le grand living traversant avec cuisine intégrée, à droite mon bureau et au fond un dégagement qui distribue deux chambres, salle de bain et toilettes. Ce n’est pas immense au final, dix mètres sur quatorze, mais chaque espace est grand, donnant une impression d’aisance. Portail télécommandé, je roule jusqu’à l’entrée des garages, deux côte à côte, elle me suit jusque-là et se gare à côté de moi.



Je l’entends vaguement glousser derrière la porte, puis elle ressort enthousiaste.



Nous sortons par la baie, longeons la terrasse jusqu’au côté de la maison, là où je cultive une centaine de mètres carrés. Une bordure d’aromatiques, et puis salades, tomates, haricots verts, courgettes, choux, poirées… Petite production pour mes besoins personnels.



Elle se penche en avant pour ne pas se tacher et mord à belles dents.



Nous préparons notre dînette toute simple en sifflant nos flûtes et en devisant. Curieuse impression que cette connivence instantanément rétablie, comme si nous nous étions quittés hier. Et moi j’ai l’impression que la maison a trouvé sa maîtresse, la femme qui colle idéalement avec.



Je ne peux m’empêcher de siffler quand elle me rejoint sur la terrasse avec les cafés. « Nom de Zeus, Marty ! » disait le Doc dans « Retour vers le futur ». Et j’en suis là aussi, maintenant et hier, tout se mêlant dans le ravissement absolu des yeux, de l’esprit et du désir. Elle n’a pas cette beauté fade des top-modèles, jolies, mais trop maigres, porte-manteaux sur baguettes. Elle est trop puissante pour cela, trop excessive dans ses formes. C’est là que réside sa séduction, du moins pour moi, dans les excès de son corps atypique. Trop de poitrine, trop de hanches, trop de fesses, mais en même temps des membres trop longs, à la fois trop fins et trop musclés. Et en plus ce visage toujours juvénile, presque enfantin, le tout additionné devient un comble de la féminité.



Nous mêlons nos langues imprégnées de café et de vanille. Je lui pose ses dessous pour mieux palper son corps à pleine main, sans obstacle, je lui mets de la glace sur la pointe des seins pour les durcir et les lécher. Puis nous nous réfugions dans la chambre pour la déguster partout à pleine bouche et à pleine langue. Je mets plus d’une heure avant d’introduire ma queue apoplectique dans sa chatte brûlante et détrempée, alors qu’elle m’en suppliait depuis une demi-heure et deux orgasmes. Ce qui a changé, c’est sa force. Faire l’amour avec elle relève d’un corps à corps dévastateur. Et quand elle sent que mon plaisir monte, elle me prend entre ses cuisses et ses bras comme dans un puissant étau, ses talons poussant mes fesses à m’enfoncer loin en elle pour inonder ses entrailles de mon sperme brûlant. Nous rugissons de plaisir ensemble. Je n’ai jamais tenu un corps de femme tantôt si doux, tantôt si dur. Relâchée, elle est d’une douceur infinie, presque impalpable. Tendue, mon corps rebondit sur le sien tandis que ses fesses broient ma queue qui tente de les labourer. Parfois tendre, parfois violente, elle n’en demeure pas moins insatiable. En cette fin d’août, les nuits sont encore assez courtes et le ciel pâlit quand l’épuisement nous contraint à abandonner, provisoirement, cette faim dévorante qui nous soude l’un à l’autre. Elle gît près de moi, brillante de sueur, les cheveux collés, le souffle court.



Oui, la douche est grande et maintenant on passe au gel, encore plus glissant, lubrifiant idéal pour de nouvelles caresses, et ça se termine comme il se doit, ses mains sur le mur et ma queue entre ses fesses musclées. Je ne peux même pas éjaculer, réservoirs vides… Après le café, nous regardons un instant le soleil se lever et puis nous nous endormons, rassasiés, dans les bras l’un de l’autre.



Elle s’installe dans la semaine qui suit. Je fais livrer une seconde bibliothèque et une seconde table de travail dans le bureau, suffisamment grand pour les accueillir. La chambre vide devient salle de sport et elle organise ses plantes dans le living, autour du panneau de la baie le moins utilisé, une charmante composition avec des galets cachant les supports. Ça ressemble à une sorte de jardin d’hiver, moitié dehors, moitié dedans. Je n’ai qu’à ranger correctement remorque et tondeuse dans le garage pour libérer la seconde place pour sa voiture. Elle apprécie beaucoup le fait de pouvoir sortir et rentrer au sec malgré la pluie grâce aux télécommandes. Ses affaires personnelles n’étant pas excessivement nombreuses trouvent place aisément entre armoire de toilette et placards de chambre, et en cuisine on élimine tous les doublons.


La rentrée se passe assez bien, tous les manques ayant été pourvus in extremis. Pour se présenter, elle tient un discours qui étonne et marque les apprentis :



Elle fait venir des invités qu’elle présente. Un jeune homme de trente ans qui n’a plus qu’un bras valide suite à un accident de moto ; un ancien élagueur de quarante ans, demandeur d’emploi parce que son dos usé par de mauvaises postures ne lui permet plus de grimper. Elle fait un carton, les mômes se demandent d’où vient cette extraterrestre, on ne leur a jamais parlé comme ça et ils prennent soudain conscience de leur « premier outil ». Si certains profs manquent de pédagogie, ce n’est pas son cas. Elle continue de m’épater, encourageant ses collègues à quitter la salle des profs à l’heure en criant à la cantonade :



Et ça marche ! À la maison, c’est super. Tout le monde connaît cette expérience qui consiste à mettre deux vibreurs à la surface d’une bassine d’eau. Si les vibreurs vibrent à des fréquences différentes, ça ne fait pas grand-chose, ça trouble la surface et c’est tout. Mais quand les fréquences sont accordées, alors là il se forme des vaguelettes impressionnantes, qu’aucun des vibreurs n’est capable de produire isolément. Ils entrent en résonance. Nous sommes accordés sur la même fréquence, en résonance également. Il suffit de surfer sur la vague que nous avons nous-mêmes créée. En quelques semaines, il devient inutile de demander l’avis de l’autre, nous pensons la même chose. Ça s’appelle comme on veut, harmonie ou âmes sœurs. Et c’est fabuleux, au sens où la vie ressemble à un conte de fées. Et Ré dans tout cela ? Bien sûr que nous y retournons, à Toussaint, et surtout à Pâques, période culte ô combien mémorable : un vrai pèlerinage que nous n’aurions manqué pour rien au monde. Je n’ai qu’un mois de vacances en été, en gros du vingt juillet au vingt août, et nous le passons à la montagne où elle s’éclate, escaladant comme une chevrette et me laissant souvent des dizaines de mètres à la traîne.


Quant aux fêtes de fin d’année, ce sont les parents qui se retrouvent à Ré, il vaut mieux éviter. La chose commence à nous peser, à tous les deux. Nous allons séparément rendre visite à nos géniteurs, le plus brièvement possible, avec ce gros mensonge par omission qui embrume notre vie, par ailleurs si lumineuse. Alors, un soir de coucher de soleil somptueux sur le Mont-Blanc, nous décidons de briser l’omerta.



Ce qui est dit est fait. Le dimanche suivant notre retour, j’invite mes parents à déjeuner. Ils voient la voiture de Catherine sans la reconnaître.



C’est vrai qu’elle a fait fort, ma Cathy. Une robe fourreau très longue, mais très légère, avec un décolleté dans le dos jusqu’à la naissance des fesses, prouvant au passage qu’elle n’a pas besoin de soutif, ce qui de toute façon se devine, tant cette mousseline taupe à rayures brillantes est fine. Bien sûr, la question fatidique arrive aussitôt :



Catherine me laisse prendre la parole d’un sourire.



Nous descendons tous les deux au sous-sol, silencieux. J’ouvre la porte de mon « sanctuaire », situé dans l’angle le plus enterré de la maison, sol gravillonné sans béton et murs isolés. Il y fait frais et la température y est quasi constante vers 12°, des porte-bouteilles tout le tour. Une grosse paluche se pose sur mon épaule :



En fin d’après-midi, lorsqu’ils prennent congé, les joues rouges et l’œil brillant, ils nous embrassent comme du bon pain en nous souhaitant tout le bonheur du monde. Nous sommes soulagés et ravis.


Avec les parents de Catherine, c’est une autre paire de manches. Comme elle l’a prévu, elle va faire les boutiques avec sa mère. Catherine est folle des drapés, horizontaux comme verticaux qui, il faut le reconnaître, lui vont à ravir et mettent en valeur ses formes époustouflantes. Elle tombe donc en arrêt devant un maillot de bain composé d’étroites bandes drapées, de lanières et d’anneaux, plus une décoration qu’un vêtement…



Catherine arrête sa voiture dans l’allée, devant la large volée de marches montant vers la terrasse.



Nous attendons les effets de cette révélation et, par prudence, nous laissons passer la période des fêtes pendant laquelle les parents se retrouvent à Ré. Pas de nouvelles, bonnes nouvelles, cependant nous sommes un peu anxieux. Oh, ce n’est pas une angoisse permanente qui nous empêche de vivre, non, mais plutôt cette petite gêne qui traîne en toile de fond et qui rend la vie moins éclatante. Pourtant, tout va si bien entre nous. Quand je rentre, parfois tard, de réunions inutiles ou du Conseil Régional, ou même simplement du boulot, je trouve ma Catherine en train de biner le jardin, de tenter une nouvelle recette ou de faire ses entraînements sportifs. Vive, tonique, gaie, ouverte, disponible, tout l’opposé de mon ex-femme qui était rivée à sa messagerie ou au téléphone et totalement inaccessible. Nous finissons par décider de les inviter tous les quatre un dimanche, les uns pouvant tempérer les autres. Pour mes parents, pas de problème, ils semblent ravis. Cathy appelle sa mère.



Ils sont bien venus. Mes parents se présentent les premiers, je les accueille et je reste à la porte puisque Bernard et Maryvonne arrivent.



Ça commence fort. Pour ceux qui le connaissent bien, comme nous, il est aussi assez épaté par la baraque, mais n’en dit absolument rien. Seul son regard erre un peu partout, parfois en plissant les yeux, d’autres en rajustant ses lunettes.



Elles se sont installées dans un coin du grand salon, un peu à l’écart, et commencent à papoter gaiement comme trois pipelettes, trop heureuses de se retrouver. Mon oncle s’est assis de façon à leur tourner le dos délibérément, pour bien montrer qu’il est fâché. Il goûte son whisky.



Mon père sourit dans sa moustache et profite également de la tournée. Puis nous passons à table, servis à l’assiette par la plus belle des hôtesses en robe… drapée, bien évidemment, lui moulant parfaitement les seins et les fesses, et suffisamment fendue pour laisser voir une de ses cuisses à chaque pas. Elle a fait fort sur le menu également. Salade de mâche composée, avec œufs de cailles, gésiers confits, roquefort et pignons de pin. Un pur délice, et elle connaît les goûts de son père.



Je m’arrête de couper, le couteau en l’air, tout le monde retient son souffle. Bernard se lève lentement et se tourne vers sa fille, le pire semble à venir et la fin du repas se joue à cet instant. Il lève la main, Maryvonne chevrote « Beeernaaard… », et… il prend Catherine dans ses bras. Ils restent un long moment ainsi tous les deux, sanglotant pour évacuer leur traumatisme commun. Ils se disent des choses à l’oreille que personne ne saura jamais, puis ils essuient leurs yeux dans leurs serviettes.



Ouf ! Tout est bien… Nous allons enfin pouvoir vivre sans la moindre gêne, aller chez les uns et les autres. Les frangines ? Elles n’ont absolument rien à dire, sinon on racontera à leurs maris comment elles ont perdu leurs pucelages. Non, mais !


Il n’y aurait plus rien à dire si… si le sort, la providence ou ce que vous voulez ne nous avait pas joué un sacré tour. Un soir au dîner, dans la conversation, Cathy lâche :



Mais au bout d’un mois, toujours pas de règle. Direction le toubib qui ne trouve rien d’anormal, ce qui le rend perplexe. Par acquit de conscience, il prescrit un test de grossesse. Je rentre de boulot et trouve ma Cathy rouge comme une pivoine, une barre de sueur sur le menton.



Le spécialiste de la foufoune faillit tomber de son fauteuil lorsqu’il lut le dossier. L’échographie montre effectivement la présence d’un embryon d’environ sept semaines.



Il paraît qu’elle est sortie de là en sautillant et en faisant des tours sur elle-même, si bien que les passants ont cru voir une folle.


Il s’appelle Benjamin et il est superbe. Quatre kilos à la naissance, avec deux yeux, deux oreilles, un nez, une bouche, cinq doigts aux mains et aux pieds. Parfaitement normal, et une voix qui sait réclamer la tétée. Catherine a des nichons énormes, deux pastèques gorgées de lait qui giclent quand arrive l’heure. Je dois mettre Popaul en vacances pendant quelque temps, parce que quand le gynéco a demandé à mon athlète de pousser, elle a poussé… Et le bébé est sorti comme un bouchon de champagne en la déchirant un peu. Ça se remettra, soyons patients. Les grands-parents sont aux anges, surtout les miens pour qui c’était inespéré, et pour moi aussi. On transfère la salle de gym au sous-sol pour aménager une jolie chambre pour Benjamin. L’employeur que je suis est un peu ennuyé, il va falloir recruter un nouveau prof de gym pour quelques mois au moins…



-ooOoo-



Fier de sa descendance et d’une succession assurée, mais surtout un peu las de gérer la maison de Ré et d’en payer les charges, mon père m’en fait donation. Il est mi-ravi, mi-furieux. Ravi parce que le notaire a réévalué le prix de la maison à… six cent mille euros ! Furieux, parce qu’il a donc dû débourser plus de vingt mille euros de frais. Je lui propose d’en payer la moitié, il refuse en me prévenant :



Je n’y comptais pas, de toute façon. Devenu son propriétaire, du coup, je regarde cette petite maison avec un autre œil. D’abord, nous y passons plus de temps, montagne et bébé ne faisant pas bon ménage, ne serait-ce que du point de vue logistique. Ensuite, il est vrai que ça fait un peu bizarre de se retrouver dans une maison ordinaire, quand on est habitué aux multiples trompe-l’œil de la nôtre. Les pièces paraissent vraiment petites. Carnet, crayon, et me voilà parti dans un nouveau délire. Il faudrait prolonger le toit pour couvrir et enfermer l’escalier, réunir les trois petites chambres pour en faire deux plus grandes, en supprimer une en bas pour agrandir l’autre et surtout la pièce à vivre. Et là, miroirs, plafond tendu, nouveau carrelage, véranda, etc. Quand mon plan est finalisé, assorti de quelques croquis, je soumets le tout à Catherine.



Voilà donc des travaux qui ne coûteront pas cher. Et après tout, elle a raison, on appréciera d’autant plus notre maison en rentrant de vacances.