Un texte très dialogué et fort soft qui explique la progression d’un couple, mais pas que…
L’occasion fait le larron.
Bonne lecture : )
Première conversation – Jeu spécial
Depuis la fin de leurs études, afin de garder contact, Magalie (la rousse) et Isabelle (la blonde) ont l’habitude de déjeuner ensemble environ tous les quinze jours dans une cafétéria, avec parfois des déficiences dans cet emploi du temps. Parfois, elles s’invitent mutuellement chez elles.
Les deux femmes n’ont pas le même rythme de vie : Magalie est mariée avec deux jeunes enfants, quant à Isabelle, elle est restée célibataire, ne se privant pas en matière d'hommes, même si parfois le succès affectif n’est pas franchement au rendez-vous.
Comme Isabelle l’avait soupçonné, Magalie a quelque chose à confier à son amie :
- — Au fait, Isa, tu connais la dernière lubie de mon mari ?
- — Non, mais je vais le savoir !
- — Lui et moi, on joue parfois à la pute et son client !
- — Hein !?
Fière de son effet, la rousse enchaîne :
- — Je t’explique : une fois les enfants couchés, je m’habille en pute, et Jérémy joue les clients.
- — Ah bon ? Et alors ?
- — Ben, le client en veut pour son argent !
- — Quel argent, Magalie ?
- — Ben, ce qu’il me donne avant de me baiser.
Tout en découpant son pavé mariné, Isabelle s’étonne :
- — Parce qu’il te paye vraiment ?
- — Ah oui, avec de vrais billets qu’il laisse bien en évidence sur la table de chevet.
- — Ah OK, mais après, il les reprend.
Relevant le menton, Magalie assène :
- — Ah non, pas du tout ! Je les garde, j’ai gagné ce fric avec mon cul !
- — Est-ce bien légal ? C’est pas du proxénétisme déguisé ?
- — Écoute Isa, Jérémy et moi sommes mariés sous le régime de la communauté. Donc son argent, c’est le mien, et vis-versa. Et puis, entre mari et femme, c’est pas du proxénétisme, il me semble.
La blonde essaye de comprendre :
- — Vu sous cet angle… Et c’est quoi l’intérêt de tout ça ?
- — Il se lâche à fond ! Et moi aussi ! C’est comme si nous étions deux autres personnes. Comme je te l’ai déjà dit : il en veut pour son argent.
- — Qu’est-ce que tu veux dire par là ?
La rousse fronce les sourcils, ayant quelques difficultés à vouloir bien exprimer sa pensée :
- — Comment dire ? … On dirait un autre homme, comme si j’étais une autre femme. Aaah, je ne sais pas trouver les bons mots…
- — Je crois avoir compris le truc, Maga… C’est pas toi et c’est pas lui, c’est ça ?
- — Oui, c’est ça… Tu vois, quand nous jouons, car c’est finalement un jeu, j’ai vraiment l’impression de faire l’amour avec un autre homme, même si en réalité, il s’agit bien de mon mari.
- — En clair, tu le trompes sans le tromper.
- — Euh… oui, c’est ça.
Isabelle continue sur sa lancée :
- — Je parie que c’est la même chose pour ton mari : il doit avoir l’impression de s’envoyer en l’air avec une autre femme, bien qu’il le fasse avec toi.
- — Je suppose… Je ne lui ai jamais posé la question, et lui non plus. On s’était mis d’accord là-dessus, sauf s’il y avait vraiment un problème entre nous. Mais rien à y redire, aussi bien pour lui que pour moi. Je pense que nos jeux sont quelque chose à part de la réalité, oui, un univers parallèle.
- — Bah, si ça vous convient comme ça…
Finissant son assiette, Magalie reconnaît :
- — Oui, ça nous convient. Je trouve que, globalement, c’est positif, même si parfois, c’est un peu rude, je l’avoue.
À ces paroles, Isabelle s’inquiète :
- — Il ne te tape pas, au moins ?
- — Tu veux rire ? Je ne me laisserai pas faire ! Non, Jérémy devient plus… comment dire… macho… viril… il se lâche. Remarque, moi aussi, je me lâche, je me relâche joyeusement !
- — Ça vous fait une parenthèse dans votre vie de parent, c’est ça ?
Posant sa fourchette, la rousse avoue :
- — J’adore mes enfants, mais entre nous, il y a une vie avant les enfants et une autre vie pendant les enfants ! C’est fou ce que c’est prenant, un gosse. Alors, imagine quand t’en as deux, et rapprochés !
- — Bah, dans vingt ans, tu auras aussi une nouvelle vie après les enfants !
- — Vingt ans, c’est lointain, quand même ! En attendant, on décompresse à notre façon…
Puis les deux amies passent à un autre sujet. Elles ont tant à se dire, car dès le départ, elles ont convenu de ne pas se téléphoner, sauf pour les urgences, afin d’avoir plein de choses à raconter lors de leurs déjeuners en tête à tête…
Deuxième conversation – Tarification
Une fois de plus, Magalie et Isabelle déjeunent en face à face, dans un coin assez isolé. Avide d’en savoir plus sur un certain sujet, Isabelle demande :
- — Alors, Maga, ça donne quoi, vos petits jeux ?
- — J’en suis très contente. D’ailleurs, nous avons étendu le jeu de la pute et du client.
Interdite, Isabelle ouvre de grands yeux :
- — Étendu, comment ça ? Tu te prostitues à d’autres hommes ?
- — T’es folle ou quoi, Isa ? Non, non, mon mari a pondu une feuille de tarification que nous appliquons.
- — Que tu appliques quand ?
- — Quand les enfants ne sont pas dans nos pattes, bien sûr.
- — C’est logique, mais je ne comprends pas bien ton histoire de feuille de tarification.
Posant sa fourchette, Magalie explique :
- — Je te donne un exemple : Jérémy a envie d’une pipe, eh bien, il paye cash, et hop, je lui fais.
- — Il te paye pour faire ce genre de truc ?
- — Pas toujours, seulement quand c’est… euh… hors de la chambre à coucher, quand il a une envie subite, dans nos jeux, quoi…
- — Si je comprends bien : si Monsieur a envie que tu le suces, il te siffle, il te refile un billet et toi, tu t’agenouilles pour lui faire son affaire ?
- — C’est grosso modo le mode opératoire.
Entendant cette réponse, Isabelle tique un peu :
- — C’est pas un peu… euh… super-macho ?
- — C’est juste un jeu, Isa. Nous savons faire la différence entre ce type de jeu et la vie réelle. D’ailleurs, depuis que nous pratiquons ce jeu de la pute, Jérémy est plus détendu, moi aussi, ça va mieux entre nous deux.
Isabelle glousse en catimini :
- — Tu m’étonnes ! Ton homme s’offre carrément les services d’une putain à domicile ! Mais au fait, tu fais quoi de tout cet argent ?
- — Je me fais plaisir, et parfois, j’achète des trucs coquins avec. Par exemple, Jérémy est à moitié fou quand je mets des porte-jarretelles ou des hauts talons. Idem pour les redresse-seins, j’en ai acheté un pour la première fois, la semaine dernière. Mon homme était carrément dingue, hihi !
- — En clair, le fric qu’il te donne, il en profite lui aussi.
- — Oui, souvent, mais pas toujours.
Intéressée, la blonde demande :
- — Et cette feuille de tarification, elle propose quoi ?
- — Bah, il y a de tout…
- — Des sucettes, si j’ai bien compris.
- — Oui, ça vaut dix points.
- — Dix points ?
- — Pour simplifier, un point, ça équivaut à un euro. On n’aime pas trop parler de vrais sous…
Isabelle hausse des sourcils :
- — C’est pas cher ! Si c’était ton véritable métier, t’aurais du mal à en vivre !
- — Je sais, mais il s’agit de mon mari.
- — C’est lui qui a fixé les tarifs ?
- — Non, on l’a fait à deux.
- — Et c’est quoi le plus cher ?
La rousse réfléchit un peu :
- — Hmm… parmi les plus chers, tu as la sodo…
- — Ah OK… Tu fais ça, toi ?
- — Pas toi ?
Surprise, la blonde ne s’attendait pas à ce retour de bâton :
- — Euh… ça dépend avec qui…
- — Moi, ça va, Jérémy sait bien s’y prendre, même si la première fois qu’on l’a fait, je n’étais pas très chaude pour qu’il passe par là.
- — Ça lui arrive souvent de te demander une sodo ?
- — T’es indiscrète, Isa !
Faisant fi de cette réponse, Isabelle insiste :
- — Alors ?
- — Si tu veux tout savoir : hier, sur le canapé…
- — Ah oui…
- — Encore heureux que mon homme n’a pas lésiné sur le lubrifiant, sinon je ne pourrais sans doute pas m’asseoir aujourd’hui !
- — Ah ce point ?
- — Il y est allé de bon cœur, le salaud ! Un vrai marteau-piqueur ! Mais de temps en temps, ça fait du bien par là où ça passe !
À moitié rigolarde, Isabelle hoche la tête :
- — À ce tarif, je me demande quelle sera la suite !
- — Ah ça ! Quand on met son doigt dans l’engrenage…
Puis sans se concerter, elles se mettent à pouffer gaiement.
Troisième conversation – Vidéo
Une fois de plus, les deux amies déjeunent ensemble, mais cette fois-ci l’intervalle a été réduit à une semaine, à la place de deux. Marjorie est en train d’expliquer à son amie la direction que prennent ses petits jeux spéciaux :
- — Et puis le soir où nous avons déjeuné toutes les deux, Jérémy a filmé nos petits jeux, mais en masquant soigneusement nos visages lors du montage, afin de publier la vidéo sur le web.
- — T’as fait ça !?
- — T’inquiète, on ne nous reconnaît pas. Idem pour le décor qui était plongé dans la pénombre. Donc pas de problème. De plus, on s’était habillé dans la mode des années trente, c’est fou ce que ça peut te changer ! Tiens, regarde !
Magalie montre une photo qui semble fort ancienne sur laquelle une femme de très mauvais genre aguiche un bonhomme plutôt patibulaire. Isabelle semble néanmoins dubitative :
- — C’est vrai que ça vous change tous les deux… vous avez franchement mauvais genre comme ça ! J’espère pour toi que tu ne seras pas reconnue ! Et donc, cette vidéo ?
- — Eh bien, on a eu de bons retours…
- — Ah bon ?
- — Et donc, on en a fait une autre, il y a deux jours. Et on envisage de continuer sur notre lancée.
- — Ah carrément ! L’appétit vient en mangeant, à ce que je vois.
Se souvenant parfaitement de cette première séance, Magalie en salive presque :
- — Eh oui… Je dois reconnaître que c’est excitant de se savoir filmé, puis de se regarder plus tard. C’est dingue, j’arrivais pas à croire que c’était bien moi. Sans parler des compliments venant de plein d’inconnus, même si ces commentaires sont parfois très crus. Mais ça me fait un étrange effet jouissif de savoir que des tas de bonhommes se paluchent sur nos vidéos…
- — T’as des idées bizarres, toi !
- — Faut le vivre pour le comprendre…
Isabelle semble un peu dépassée :
- — Si tu le dis… Donc t’es toujours cette histoire de pute et de client ?
- — Oui, c’est le topo de base, mais en variant les décors. On s’est même amusé une fois à le faire dans un véritable quartier mal famé !
- — Tu cherches les ennuis, toi !
- — Honnêtement, on ne le refera plus. J’en ai presque fait dans ma culotte, tellement j’ai eu la trouille !
- — Parce que tu avais quand même mis une culotte ?
- — Pas toujours, Isa, pas toujours, hihihi…
Elles se mettent à rire, puis elles abordent le sujet du boulot, pour la blonde comme pour la rousse.
Quatrième conversation – Application
Deux semaines plus tard, après s’être saluées et avoir échangé des banalités, la pulpeuse rousse s’adresse fébrilement à son amie :
- — Eh, Isa, tu sais quoi ?
- — Non, mais tu vas me le dire.
- — À cause des vidéos que nous avions faites, nous avons été contactés par diverses personnes, souvent des sites un peu spéciaux.
Isabelle affiche un large sourire :
- — Je me doute que tu n’as pas été contactée par des sites de tricot et de macramé !
- — C’est ça, rigole !
- — OK, et ensuite ?
Magalie regarde autour d’elle, puis sortant son smartphone, elle se penche sur son amie :
- — Dans le lot, il y avait un club privé très sérieux pour les gens du coin. Attends, il faut que je te fasse voir leur application sur mon Android. Ah, voilà… Attends…
- — Ça m’a l’air très sécurisé, ton truc. Deux mots de passe ? Eh bé !
- — Ça l’est, c’est vraiment un club très privé. Ah, voici mon profil…
Isabelle se penche sur le petit écran :
- — F038 Lili ? Tu es la femme numéro trente-huit ?
- — Je ne sais pas si je suis la trente-huitième femme, mais je sais que, grosso modo, il y a actuellement moins de cinquante personnes inscrites. C’est très privé, confidentiel et fortement qualitatif. Pourtant, il paraît que ça existe depuis au moins dix ans. Mais il faut dire qu’il y a une grosse sélection à l’entrée.
Isabelle s’empare du smartphone :
- — Fais voir ta fiche… tu te fais appeler Lili ? Pourquoi pas, mais tu ne l’as pas cherché loin, ce pseudo !
La blonde continue l’exploration de la fiche :
- — Uuuh, faudrait pas que ta famille tombe dessus !
- — Oh, pas de risque !
- — Rhooo, y a même des photos de toi en petite tenue.
- — On n’appâte pas les mouches avec du vinaigre…
- — Qu’est-ce que tu essayes de me dire ?
Magalie regarde une fois de plus autour d’elle :
- — Je reprends au début. On a dialogué avec eux, puis on a pris rendez-vous le lendemain avec deux responsables, un couple. Ça s’est bien passé, le feeling était au top. Alors ils nous ont expliqué ce qu’était exactement ce club privé : un cercle fermé entre initiés.
- — Un cercle privé de quoi ?
- — De jeu de rôle pour adultes consentants, en quelque sorte… en circuit fermé pour éviter les problèmes, si tu vois ce que je veux dire.
Tout en continuant à consulter la fiche de son amie, Isabelle demande :
- — Et tout le monde joue le jeu ?
- — Il y a des tests médicaux à faire…
- — Sont pointilleux, tes gus ! Remarque, ils ont raison.
- — C’est visiblement très sérieux. Nous sommes pris à l’essai, mais normalement, ça devrait le faire.
Isabelle demande quelques précisions :
- — Je ne comprends pas bien l’idée générale de ce club, c’est une sorte de catalogue, c’est ça ?
- — Oui, c’est ça, grosso modo. Tu as des profils, des fiches, des conseils, des suggestions, des scénarios, des lieux, etc. Comme tout est contrôlé, normalement, tu ne risques rien. De plus, de temps à autre, ils organisent des repas thématiques.
- — C’est un club local, disais-tu ?
- — Oui, ça reste limité à un rayon de cent kilomètres, et encore. Je dirais plutôt soixante-soixante-dix à la louche.
- — Et donc, tu peux piocher des idées, c’est ça ?
Magalie reprend son smartphone, puis après quelques manipulations, elle affiche une page composée de diverses petites vignettes :
- — Oui, il y a même un répertoire d’endroits pour assouvir certains fantasmes. Regarde, t’as deux boulangeries, une boucherie, trois restaus et j’en passe.
- — Oui, je vois ça… Ah, un vieux moulin ? Oui, c’est pas mal, tout ça !
- — Là, deux usines désaffectées, trois fermes, diverses maisons pas piquées des vers, des apparts, des bureaux… ah oui, là, une hutte pour chasseurs ! Jérémy et moi, on a déjà repéré des endroits amusants…
- — Eh bien, bons futurs amusements, ma chérie !
- — Merci !
Puis elles triquent joyeusement.
Cinquième conversation – Mauvais film
Quinze jours plus tard, alors qu’Isabelle est déjà sur place, un peu à l’écart comme de coutume, Magalie arrive, plateau en main, toute fébrile, pour venir s’asseoir face à son amie :
- — Oh, il m’en est arrivé une bien bonne, Isa ! Avant, faut que je te dise que notre inscription au club a été validée.
- — Tant mieux pour vous deux. Alors, c’est quoi que c’est que t’as à me raconter ?
Assez excitée, la nouvelle arrivée s’installe face à son amie :
- — Ben voilà : jeudi, j’étais à l’hôtel avec un client, quand soudain…
La coupant dans sa phrase, Isabelle s’exclame :
- — Comme ça, à l’hôtel avec un client !?
- — Je veux dire : à l’hôtel avec un inscrit qui jouait le rôle d’un client.
- — Attends, attends ! T’es en train de me dire que t’as couché avec un autre homme que ton mari ?
- — Lui couche bien avec d’autres femmes, des inscrites elles aussi.
Sidérée, les bras ballants, sa voisine accuse le coup :
- — Eh bé !
- — Bon, je te le fais comme nous y étions.
Jean-Philippe et moi étions en train de faire ce que nous avions à faire, quand soudain la porte s’ouvre violemment, laissant entrer quatre policiers en uniforme, événement qui n’était pas du tout prévu dans le scénario ! Pas des acteurs, des vrais flics.
Le plus grand s’exclame d’un air triomphant :
- — Haha ! On vous tient en flagrant délit !
Toujours en train de me prendre en levrette, ses mains fermement rivées sur mes hanches, Jean-Philippe demande placidement :
Le flic s’empare d’une liasse de billets posée sur le chevet :
- — Ah oui ? Et c’est quoi, ça !
- — Ça ?
- — Prostitution !
Très flegmatique, toujours fiché en moi, mon client répond :
- — Ah oui ? Regardez mieux ces billets…
- — Ils ont quoi ces billets… Hein !? C’est quoi ce bins !?
Sans cesser de me pistonner, Jean-Philippe fait remarquer à juste titre :
- — À ce que je sache, des billets de 45 ou 90, ça n’existe pas… De plus, il s’agit de zeuros avec un Z doublement barré et non d’euros. Sans oublier qu’il est rare que des billets affichent des scènes olé-olé !
- — Mais c’est quoi, ces billets ?
- — Des faux billets, genre Monopoly, bien sûr ! Aucun pays au monde ne les accepte.
Contemplant à nouveau la liasse, le policier semble perdu :
- — Mais…
- — Madame est ma maîtresse, et nous ne détestons pas les jeux de rôle, comme jouer au client et à la prostituée. Je ne crois pas savoir que la législation empêche les couples de faire mumuse de cette façon.
- — Eh bien, c’est bien imité ! On jurerait que… aussi bien pour les billets que pour vous deux…
Ses mains toujours accrochées aux hanches de la fausse prostituée que je suis, sans oublier de me pistonner avec son engin en pleine forme, Jean-Philippe explique sereinement :
- — Non, Madame n’est pas une pute professionnelle. Tout au plus, elle s’accorde du bon temps.
- — Habillée comme ça ?
- — Attendez, pour jouer à la pute, il convient de s’habiller en pute. Elle n’allait quand même pas s’habiller en dame patronnesse !
Le policier grimace :
- — Euh… c’est sûr…
- — Je ne sais pas qui vous a tuyauté, mais il s’est largement planté ! Si vous voulez bien refermer la porte en sortant. Merci d’avance.
Ce que les quatre intrus ont fait ensuite.
Le récit achevé, Isabelle est partagée entre consternation et fou rire :
- — Attends, attends, tu étais en train de te faire tringler par un autre homme que ton mari, quand quatre flics ont débarqué, croyant surprendre une prostituée en plein boulot ?
- — Ben oui.
- — Ton Jean-Philippe, c’est un sacré ! Et il a continué à te besogner durant tout ce temps ?
- — Ben oui.
Sous l’œil étonné de Magalie, Isabelle se met à rire. Puis après quelques secondes, elle se calme :
- — Excuse-moi, c’était nerveux ! Mais avoue qu’on aurait dit un mauvais film !
- — Pas faux, Isa, mais le gros problème est que je jouais dedans malgré moi, à quatre pattes et en cuissardes, en train de me faire papatouiller, maquillée comme pas possible, avec quatre spectateurs pas prévus ! Et des flics en plus, des vrais ! J’ai bien cru que j’allais me retrouver en prison !
- — Hihihi, je vois le tableau…
- — Je ne rigolais pas, ce jour-là !
Isabelle demande :
- — Et vous faites ça avec du faux fric ?
- — C’est exigé par le club, c’est pour éviter les problèmes. Je ne peux pas leur donner tort, vu le tour qui nous est arrivé. Mais après, tu t’arranges…
- — Oh-oh… je vois ça d’ici…
Magalie s’empare de son téléphone qu’elle met bientôt sous le nez de son amie :
- — Tiens, je vais te faire voir à quoi ressemble Jean-Philippe… Voilààà…
- — Ah oui, en effet ! Même si ce n’est pas mon genre, je peux comprendre qu’on puisse aller faire des cochonneries avec lui dans une chambre d’hôtel. Oui, il est bien foutu…
Tout en farfouillant son smartphone, Magalie sourit :
- — Pas ton genre ? Et celui-là ?
- — Fais voir ? Oui, un peu plus, mais sans plus…
- — OK, OK… et celui-là ?
La réaction est immédiate :
- — Là oui ! Oh putain, ça existe vraiment des hommes comme ça ?
- — S’il est sur l’appli, c’est qu’il existe, il n’y a pas de faux profils. Oui, Robert n’est pas mal, je l’ai vu au moins une fois, lors d’une soirée thématique. Mais ce n’est pas trop mon genre.
Fébrile, Isabelle tend le bras :
- — Donne-moi ça que je regarde mieux ton Robert ! Merci… Ah oui, tout à fait mon type ! Là oui, j’écarterais volontiers mes cuisses !
- — Oh la vilaine !
- — Tu peux causer, toi ! Avec ton club, t’y vas de bon cœur !
- — Tu n’as qu’à t’inscrire…
- — Merci pour cette proposition, mais je ne me vois pas m’envoyer en l’air avec trente-six gugusses, alors que j’ai déjà du mal à conserver un seul bonhomme. Je dois être maudite avec les hommes.
Magalie fait remarquer :
- — Disons que t’as la fâcheuse manie de flasher sur des hommes mariés et donc pas très libres.
- — À ce propos, ton Robert, il est marié ?
- — Hmm… Pas à ma connaissance…
- — Ah bon ? Mais j’ai des doutes qu’un beau mâle comme ça veuille d’une banalité comme moi.
- — Tu te déprécies, ma chérie !
La blonde grimace :
- — Changeons de sujet. T’as rien d’autres à me raconter ?
- — J’ai joué quatre fois, en incluant le coup des policiers.
- — Soit deux fois par semaine, eh bé ! Et ton mari, il ne dit rien ?
- — Lui aussi, il s’amuse… Mais curieusement, entre lui et moi, ça va mieux. Bien qu’il baise ailleurs, j’ai franchement l’impression qu’il se préoccupe mieux de moi. Remarque, moi aussi…
- — La culpabilité ?
La rousse secoue la tête :
- — Non, même pas. Tu sais, maintenant, on se parle très librement de nos écarts, comme si on racontait un film. C’est l’impression que ça me donne, comme si ce n’était pas moi. Ça doit être la même chose pour lui.
- — Tant mieux pour vous deux, car souvent, le couple explose en pareil cas.
- — Ne parle pas de malheur, Isa !
Puis assez excitée, Magalie explique à sa voisine les autres séances qui se ressemblaient néanmoins assez fortement, sauf que pour chacune d’entre elles, il ne s’agissait pas du même client virtuel.
Quelle belle santé, songe Isabelle…
Cinquième conversation – Anniversaire en avance
Huit jours plus tard, découvrant le choix de son amie, Isabelle s’étonne :
- — Tu ne prends que ça, une simple salade ?
- — T’inquiète, je ne fais pas régime, et puis elle est assez copieuse, cette salade Cæsar.
- — Si tu le dis…
Après quelques banalités, la blonde rentre rapidement dans le vif du sujet :
- — Je parie que tu as progressé avec ton club…
- — Tu ne te trompes pas, j’ai essayé d’autres scénarios…
- — Comme ?
Magalie sourit coquinement :
- — Comme le patron et sa secrétaire, par exemple.
- — Je vois le topo d’ici !
- — Et dans un vrai bureau de direction, s’il te plaît ! Et aussi le coup du plombier et de la cliente qui vient lui ouvrir en nuisette.
- — T’as franchement la forme : deux scénarios en une semaine !
Un certain sourire aux lèvres, la rousse explique :
- — Euh… c’est plus que ça : trois séances, car j’ai refait un client-pute. Sans parler des cochonneries habituelles avec mon mari.
- — Eh bé, on ne t’arrête plus !
- — L’attrait de la nouveauté. Bah, je pense que je me calmerai plus tard. Mais d’ici là, je profite.
Assez sidérée, Isabelle pose ses mains sur le rebord de la table :
- — Houtch ! Je ne sais pas si je dois m’affliger ou t’envier !
- — Les deux en même temps, peut-être !
Les deux femmes se mettent à rire, puis continuent leur discussion. Un peu plus tard, un SMS arrive sur le smartphone de Magalie qui vient juste de terminer sa salade. Alors qu’elles parlaient de cinéma, la rousse change complètement de sujet de conversation :
- — J’y songe, c’est la semaine prochaine, ton anniv !
- — Oui, c’est mardi.
- — Tu n’as rien contre que je te donne ton cadeau aujourd’hui ?
- — Euh… non… mais il ne fallait pas, voyons !
- — T’inquiète, mais c’est pas moi qui vais te le donner…
- — Ah bon, et qui ?
Soudain une grave voix masculine retentit dans le dos d’Isabelle :
- — Je crois qu’elle fait allusion à moi. Bonjour Isabelle.
Cette dernière sursaute puis se retourne. À sa grande stupéfaction, Robert se tient maintenant devant elle, un large sourire sur le visage. Totalement sidérée, elle en bafouille :
- — B…b-bonjour… R-Rob…Robert !
Amusée par le trouble évident d’Isabelle, Magalie se lève :
- — Moi, j’ai fini ma salade. Je vous laisse la place, Robert.
- — Merci, Magalie.
La rousse se poste juste à côté de son amie toujours stupéfaite et figée. Elle dépose ensuite un petit bisou sur son front :
Puis elle s’en va tranquillement, laissant Isabelle et Robert attablés face à face.
Sixième conversation – Faire faire
Presque trois semaines plus tard, toujours à la même heure, dans la même cafétéria, à la même place, mais pas le même jour de la semaine, dévorée par la curiosité, Magalie demande à Isabelle :
- — Je sais que t’as couché avec lui dès le premier jour, puisque tu me l’as téléphoné le lendemain, mais et après ?
- — Je te rappelle que c’est toi qui n’as pas voulu que je te téléphone pour te tenir au courant de mes péripéties !
- — Je sais, je sais, ma grande ! C’était histoire d’avoir quelque chose à raconter pour aujourd’hui. Et rappelle-toi que, de mon côté, je suis partie dix jours en Tunisie, avec ma petite famille. Alors, raconte-moi tout, t’as couché plusieurs fois avec lui ensuite ? Ce sadique de Robert n’a rien voulu me dire, disant que je devais voir avec toi.
Isabelle rosit un peu avant de répondre :
- — Ce serait plus simple de dire quand je n’ai pas couché avec lui…
- — Ah oui ? Oh la coquine !
- — Et puis… Robert a sorti le grand jeu pour mon anniv ! Faudra que je te raconte ça une autre fois. De plus, depuis la semaine dernière, je vis presque avec lui… Robert m’a même présentée à sa famille, avant-hier.
Magalie ouvre de grands yeux :
- — Déjà !? Eh bé, c’est plus vite que le TGV !
- — Moi-même, ça m’étonne, mais je ne me plains pas.
La nouvelle petite amie de Robert regarde autour d’elle, puis elle confie à voix basse :
- — Maga, je peux te confier des trucs sans que tu ne le racontes à tout le monde ?
- — Tu sais très bien que je serais muette comme une tombe !
Isabelle regarde une dernière fois autour d’elle, puis elle confie :
- — En plus d’être devenue la maîtresse de Robert, je suis en train d’apprendre avec lui à devenir une ponygirl…
- — Hein, toi ?
- — Bien oui, moi… le lendemain de mon anniversaire, Robert m’a demandé si je voulais essayer au moins une fois. J’étais un peu surprise, et j’ai été plutôt gênée quand j’ai découvert la tenue qu’il fallait que je mette. On a fait ça dans son jardin à l’abri des regards indiscrets, il ne m’a pas forcé la main, nous avons été à mon rythme…
- — Eh bé ! C’est plus du TGV, mais de la fusée supersonique !
- — Ah ça…
Isabelle semble rêveuse. Sa voisine demande :
- — Et alors ?
- — Ben… ça m’a plu… Le fait que ce soit lui qui me mette la tenue, qu’il me dresse, puis qu’il m’essuie et me lave, une fois les exercices achevés, c’est… je ne sais pas comme exprimer… mais c’est… euh… très bon !
- — Je te comprends, je ressens quelque chose dans le genre quand je joue, moi aussi…
Les deux femmes se sourient, puis Isabelle montre en catimini une photo présente sur son smartphone :
- — Tiens, voilà ma tenue…
- — Waw ! On dirait une girl du Lido ou du Carnaval de Rio ! Toutes ces plumes ! T’es vraiment harnachée dedans, y des sangles partout, mais mine de rien, t’es encore plus nue que nue !
- — C’est vrai…
- — Et en plus, t’as des œillères et un mors ? Et c’est quoi, ces chaussures bizarres ?
- — Des chaussures fer-à-cheval. C’est un peu comme si tu étais perchée sur des très hauts talons-aiguilles ! Ça te cambre à mort les reins.
- — En parlant de reins, t’as même la queue de cheval située au bon endroit !
- — Oui, c’est un plug, et pas précisément un petit…
Les yeux brillants, Isabelle continue de raconter ses expériences :
- — Les deux autres séances se sont très bien passées. À chaque fois, j’en apprenais un peu plus et ça me plaisait toujours autant. Robert était ravi.
- — Trois séances en moins de trois semaines ? Tu fais fort !
- — Attends, tu ne sais pas tout, Maga : il y a trois jours, j’ai aussi participé à une réunion de ponygirls.
- — Ah bon ?
L’aspirante ponygirl raconte :
- — Oui, en hors catégorie, car je suis débutante. Mais d’après Robert, j’ai bien joué le jeu, il était très fier de moi. J’ai même fini deuxième lors de la course de sulky. Bon, il n’y avait pas grand monde, nous étions à cinq couples. Un des couples était d’ailleurs accompagné d’un palefrenier. Avant de mettre les pieds là-bas, j’aurais cru me sentir mal à l’aise, mais de voir ces quatre autres pouliches, ça m’a rassuré, ça m’émulait…
Magalie essaye de visualiser tant bien que mal tout ce que son amie est en train de lui confier. Elle hoche la tête :
- — Cinq ponygirls quand même… Pourtant, ça m’a pas l’air d’être un loisir très courant…
- — Faut du matériel, et surtout un sulky, ça se range difficilement dans un appart, surtout quand tu habites au quatrième sans ascenseur ! Sans oublier la camionnette pour transporter tout ça… Il paraît qu’il y en a qui se démontent…
Magalie regarde à nouveau l’écran du smartphone :
- — Déjà, rien que ton costume…
Isabelle s’empare de son verre :
- — Il faut de l’espace à l’abri des regards. C’est pour cette raison que, pour tous les pratiquants du coin, ça se passe en général dans une fermette au carré située pas très loin de chez Robert. Lui-même, il a un jardin, mais c’est limite. Mais c’est bon pour s’amuser à deux.
- — Et vous avez fait quoi, lors de cette réunion ?
- — Comme je te l’ai déjà dit, il y a eu une course, et aussi des exercices imposés, surtout dans la façon de trotter, d’obéir. Ensuite, il y a eu du maquignonnage, comme si on était des juments à vendre. Comme chaque acheteur vérifie la marchandise, tu te fais palper de partout !
- — Et ça t’a pas gênée ?
La blondinette boit une gorgée avant de répondre :
- — Ben non ! Ça me faisait presque plaisir, tu vois. Je sais, c’est étrange mais c’est comme ça. Puis quand tout a été fini, nos Maîtres se sont assis en rond dans des fauteuils, et… euh… nous les pouliches, nous étions entre leurs jambes… en train de les sucer…
- — Eh bé ! T’en as fait des choses en si peu de temps !
Isabelle repose son verre :
- — Ça oui ! Robert arrive à me pousser très loin, ce type me chamboule complètement ! Je commence à comprendre certaines choses… Je ne dis pas que j’irais me jeter au canal s’il me le demandait, mais pas loin !
- — Tu vas t’inscrire au club ?
- — Non, Robert me suffit. De plus, figure-toi qu’il a suspendu son inscription. Il veut se consacrer entièrement à moi ! Tu ne peux pas savoir à quel point ça m’a fait plaisir d’entendre ça !
- — Oooh le grand amour ?
À ces mots, Isabelle devient songeuse :
- — Je ne sais pas… mais ce que je sais, c’est que j’ai intérêt à bien profiter. Tant que Robert et moi sommes ensemble, ça me convient parfaitement. Il incarne plusieurs personnes à la fois pour moi : le confident, le protecteur, l’amant et aussi le dominant… Il sait jouer sur toute la palette.
- — Rien que ça ? Décidément, Robert semble être le bon numéro…
La blonde semble perdue dans une vaste rêverie :
- — Je crois bien que j’accepterais beaucoup de choses de sa part, des tas de trucs, car je sais que je serais toujours en sécurité avec lui et qu’il veillera sur moi.
- — Même s’il te prête à d’autres Maîtres ?
- — Pour l’instant, ce n’est pas à l’ordre du jour. Mais bon, la vie est parfois tellement étrange. Toi, quand tu as commencé à jouer à la pute avec ton mari, tu n’imaginais pas le faire avec d’autres autres, je suppose…
- — Euh… imaginer, fantasmer, ça m’est arrivé… mais le faire vraiment avec d’autres hommes que Jérémy, non, je ne m’en croyais pas capable.
Isabelle montre d’autres photos, dont celles prises lors de la fameuse séance avec d’autres pouliches. Magalie est à la fois étonnée et émoustillée. Puis la ponygirl en puissance confie à son amie :
- — Je crois qu’en réalité, il me fallait un homme qui me commande, qui me prenne carrément en main, tout en me devinant, et en me protégeant… Je ne sais pas comment bien exprimer la chose…
- — T’inquiète, t’as en réalité une âme de soumise, il fallait juste trouver le bon maître… Une histoire de marmite et de couvercle, comme on disait dans le temps.
- — Peut-être…
Se rapprochant un peu de sa copine, Isabelle s’attarde maintenant sur une photo qui montre une pouliche dans toute sa splendeur. Elle montre du doigt les divers anneaux que cette inconnue porte dans sa chair :
- — Robert et moi, nous en avons parlé. Peut-être que je vais me faire poser des anneaux, ça rendait vraiment bien sur les autres pouliches.
- — Des anneaux ? Des piercings, tu veux dire ?
- — Exactement, aux tétons et aux lèvres intimes. Tu vois, coucher le premier soir, jouer les pouliches, se faire poser des anneaux, y a pas à dire, c’est fou ce que les hommes sont capables de nous faire faire !
- — Et encore, ce n’est que le début !
Les deux amies se mettent à rire.