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Temps de lecture estimé : 6 mn
04/01/24
Résumé:  Une demande en mariage autour d’un diner presque parfait.
Critères:  fête aliments exercice délire
Auteur : Cuisinier            Envoi mini-message
Recettes pour un repas de fête

Elle arrive…


Il faut que tout soit parfait. Aujourd’hui, je demande à la femme de ma vie sa délicieuse main. Pour me présenter sous mon meilleur jour, il me faut des arguments forts. On répète à l’envi que les femmes gardent les hommes par l’estomac (ou le sexe). Et pourquoi ne serait-ce pas l’inverse ?


Alors, je vais chercher de l’inspiration pour la fêter galamment et de manière gourmande… Je me plonge dans mes livres de recettes, je sors donc mon tablier…


Qui sait, si elle me dit oui, peut-être conjuguerons-nous le verbe aimer à tous les temps et dans toutes les positions, à tous les âges de notre vie ? Je rêve. Il n’est pas temps de m’égarer. J’ai du pain sur la planche.


Premier ouvrage de référence : The naked cook. Cela me semble de circonstance. Il me faut une cuisine innovante, audacieuse et aussi un petit peu érotique.


Je me lance dans la confection de mille délicatesses.



Un cocktail pour commencer ? Il y en a tant et certains avec des noms tellement évocateurs… Royal Romance pour ma White Lady ? Sex on the Beach and Paradise ? Monkey Gland contre Pussyfoot ?


Pour les mises en bouche, j’ai plusieurs idées.


Tout d’abord, il me faudra effeuiller lentement, méthodiquement, cette belle batave jusqu’à la mettre à nu en abandonnant chacune de ses parures sur un canapé. Les rondelles de pomme d’amour ajouteront la couleur de l’interdit sur tant de splendeur naturelle. Sur cet écrin lascif, je compte dévoiler d’une caresse délicate l’indécence nacrée d’à mon sens, le plus beau des coquillages : la jolie moule poilue odorante à la senteur marine iodée. Un zeste de fantaisie et une pincée libertine aux boutons de rose constitueront certainement les tout premiers préliminaires de ce repas envoûtant.


Parallèlement, la mignonne petite bouchée à la reine appelle pour la couronner, ma dodue crevette rose artistement décalottée, turgescente et noyée dans un soupçon de la sauce lubrique de ma belle Hollandaise. Un tel spectacle ne peut qu’éveiller les sens. Il me faut impérativement répéter ce chef d’œuvre débauché des hors-d’œuvre dépravés pour porter l’excitation à son comble.


Ceci dit, j’aime aussi la chair animale et cette splendide rosette devant moi appellera certainement aussi mes lèvres empressées. Je veux pimenter cette rencontre polissonne et la rendre encore plus excitante en combinant la douceur vorace de ma truffe chaude dans la fraîcheur de la touffe rasée de la belle cressonnière.


Pour varier les plaisirs, mon humble bâton de berger aux noix tendrement enveloppées sera aussi alors certainement englouti avec voracité.


Ici, au salon, le champagne, ce jouissif, s’impose ! Les bulles de Bergères-lès-Vertus brut 1969 à dix degrés, pétilleront sur ma flûte givrée et feront étinceler ses beaux yeux de mille lueurs fauves et prédatrices. Avec un peu de chance, je pourrai cueillir à la commissure de ses lèvres vermeilles une ou plusieurs gouttelettes rondes égarées en territoire interdit avec une fraise gourmandine à partager.


Pour l’entrée, j’ai pensé, avec des yeux de maquereau, glisser mon anguille sensuelle dans sa raie en lubrifiant cette dernière d’un filet d’huile vierge en première pression à froid. Mais pourquoi ne pas sauter de ces petites fesses si appétissantes de grenouille sur un feu épicé au curry paillard ? Ou encore n’envisagerais-je pas un lent pétrissage d’une ravissante poitrine en la dressant soit par une gelée royale aux lactaires soit par le baiser torride des braises sur cette gorge si tentante ? J’hésite encore…


Si je joue du poisson, je veux contempler ma convive avec un pas si sage Gros Plant au cépage Folle Dame. Avec des cochoncetés, juste un Pinot noir dans l’île de Beauté s’impose. Comme eau, il est manifestement l’heure de la Saint-Amand.


J’inviterai alors ma peut-être bientôt fiancée à passer à ma haute table de verre, débarrassée de tout linge superflu. J’avancerai son tabouret de bar. Elle me remerciera de son lumineux sourire en s’installant droite et toujours élégante ; son profil de Vénus illuminé par la lumière changeante des bougies mille fois répercuté dans le cristal. Au travers de la vitre, j’aime aussi contempler ses jambes au galbe parfait et à la carnation de porcelaine et puis, je le sais, elle aime voir mon excitation, lorsque s’avance son mignon pied mutin vers moi. Une orchidée aux fleurs phalliques indécentes nous tient compagnie dans un trio tout à fait conventionnel. Nous profitons de cet instant magique hors du temps. La voir prendre en cuiller le fruit de ma besogne est un ravissement et je devine déjà son intention de me remercier à corps perdu de tous mes efforts.


Si mon choix n’est pas arrêté pour l’entrée, je ne tergiverserai en revanche pas pour le plat de résistance. Ma leste caille sera là devant moi. Je la fleurirai alors d’un bouquet garni et la couronnerai de lauriers. Après, abandonnée à mon bon vouloir, offrant en toute impudeur à mes yeux concupiscents ses cuisses largement ouvertes, me donnant une vue plongeante sur son trou béant, je compte simplement la trousser, la fourrer, bref travailler au corps sans vergogne cette oiselle dodue. À ma mie, d’abord, je rajouterai deux, non, trois doigts de son sherry, une portion de ma célèbre langue de bœuf écarlate et enfin un maximum de chair de ma saucisse. Puis je la ferai longuement passer à la casserole, spécialement préparée pour la gueuze, à l’ancienne. Lorsqu’elle sera bien chaude, je lui servirai le coup de grâce, allongée sur mon lit de satyres puants et d’amanites rougissantes avec encore mon boudin obscène fiché dans son cul charnu. Enfin, quand elle sera à point, j’aspergerai sa peau dorée, veloutée et frémissante de longues et généreuses giclées de sauce à la diable, bien crémeuse et légèrement salée.


Après tant d’efforts, rien ne serait plus désolant que de se mettre à somnoler. J’ai prévu un passage au jardin, dans la fraîcheur ravigotante de la nuit, sous un clair de lune que je sais complice. Un somptueux châle de soie sur ses épaules impériales, tous les deux allongés sur un doux mohair, pour un moment amoureux, je veux prendre mon courage à deux mains et les yeux dans les yeux, n’admirant dans cette perfection tant aimée qu’elle, lui demander d’être ma moitié.


J’ai bon espoir que quelques minutes plus tard, elle n’arbore un brillant à l’annulaire et tous les deux des étoiles au fond du cœur.


Avant de remettre le couvert, après tant d’émotions, il me faut prévoir un entremets frais et fruité pour faire redescendre la température chez ma belle Hélène. Peut-être sur le coup de minuit, un bain de bouche enivrant avec un Saint-Amour câlin ? Ou simplement lécher voluptueusement nos Esquimaux ? Ou juste partager un soufflé glacé aphrodisiaque ?


Il sera alors temps de rentrer probablement passablement rafraîchis du jardin pour poursuivre cette nuit merveilleuse.


Qui trop embrasse mal étreint, j’ai donc décidé de faire l’impasse sur les fromages, même si j’avais envisagé les tétons (parfaits de cette chère Sainte-Agathe) prenant en sandwich ma baguette.


Au dessert, pour ma bombe, je propose de tremper mon biscuit dans un Condé couvert, à l’abricot accueillant et nappé de crème fraîche fouettée. Un appareil simple et toujours apprécié est donc mis à contribution pour notre extase commune ! En cas de faim persistante, un puits d’amour dégoulinant au miel butiné dans sa montagne ou à la confiture, qui sait, pourquoi pas de gratte-culs, sera laissé à disposition.


Après cette débauche de bonne chère, pour nous remettre de nos émotions, une eau-de-vie accompagnera les mignardises finales. Je pense qu’elle aimera présenter sur ses lèvres des bêtises à son Chéri au boudoir avant que nous ne nous reposions de nos émotions dans la chambre.



Je suis impatient que mon Amour franchisse cette porte pour notre repas en amoureux.


C’est étrange, je ne sais pourquoi, mais faire la cuisine a avivé ma sensualité.