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Temps de lecture estimé : 26 mn
12/02/24
Résumé:  Après une enfance malheureuse (bibliothèque rose) et un mariage raté, Sophie va-t-elle enfin pouvoir vivre sa vie?
Critères:  #historique ffh forêt campagne soubrette
Auteur : Amateur de Blues            Envoi mini-message
Le bonheur de Sophie

Par un bel après-midi, le jeune Charles de Ségur, alors âgé d’à peine cinq ans, jouait au bord de l’étang noir tandis que Charlotte, sa nourrice et Jane, la jeune Anglaise qui tentait de lui apprendre les rudiments de la langue de Shakespeare papotaient un peu plus loin dans l’herbe. Charles se penchait inconsidérément depuis la berge pour tenter de débloquer à l’aide d’un petit bâton son voilier qui venait de se coincer dans les roseaux. Évidemment, il tomba. L’eau à cet endroit n’était pas très profonde, mais suffisamment pour que le bambin ne puisse reprendre pied. Il cria et battit des bras, mais sans aucune efficacité. Ces dames se levèrent en panique et appelèrent au secours. C’est tout ce qu’elles pouvaient faire, ne sachant nager ni l’une ni l’autre. L’étang noir était loin du château et le petit garçon aurait certainement péri si un bûcheron qui travaillait en bordure du bois voisin n’avait entendu les appels désespérés.


François savait nager, lui, car dans sa jeunesse il avait été corsaire au service du roi. Il arriva en courant, plongea sans même enlever ses bottes et ressortit aussitôt avec le môme dans les bras. Il n’avait après tout de l’eau que jusqu’à la taille. Le seul dommage qu’avait subi le jeune comte était la frayeur qu’il avait eue. Il fallait aussi qu’il se change au plus vite pour ne pas prendre mal. Tout le monde rentra donc au château, François marchant à grandes enjambées, le jeune Charles ruisselant sur ses épaules, les dames trottinant derrière lui en réfléchissant à la manière de présenter l’aventure à la comtesse pour échapper au renvoi.


Arrivé au château, il y eut un peu de confusion, chacun s’expliqua, la comtesse faillit se trouver mal et François qui avait laissé sa cognée dans le bois s’éclipsa. Le lendemain, toutefois, un valet frappa à sa porte pour lui annoncer que la comtesse voulait le remercier elle-même de son acte de bravoure et qu’il était convié au château en début d’après-midi. Ce fut un peu la panique dans sa masure aussi, car l’invitation était plutôt exceptionnelle. Sa femme défroissa et repassa son unique costume de drap noir, lui enfila une chemise qui lui serrait le cou et cira ses chaussures. Il se rasa de près et gagna le château.


À l’heure dite, il se présenta sur le perron et un majordome le guida jusqu’au petit salon où l’attendait la comtesse, confortablement installée dans une boudeuse, un plateau avec tasses, café et biscuits, installé devant elle.



François était resté debout à l’entrée de la pièce et regardait ses chaussures. Il regardait aussi l’épais tapis qu’il foulait et remerciait sa femme d’avoir si bien nettoyé ses vieux souliers.



Madame de Ségur s’était levée, comme mue par un ressort et elle se tenait bien droite, face au bûcheron qui la dominait d’une tête. Elle était livide et respirait difficilement, comme si elle manquait d’air.



Le soir venu, François pénétra dans le château de Ségur par la petite porte indiquée. Quand il poussa la porte des appartements de la comtesse, il la trouva debout au pied de son lit, vêtue d’une chemise de nuit en soie et enveloppée dans un grand châle de laine. Elle avait dénoué ses longs cheveux qui cascadaient sur ses épaules et s’entourait de ses bras comme pour échapper à une intrusion qu’elle n’aurait pas souhaitée. Elle se savait pourtant prête à recevoir un homme en elle. Jamais elle n’avait été aussi excitée à l’idée d’un coït. Mais en même temps, elle était terrorisée, ayant peur de tout dans cette situation qu’elle n’aurait jamais cru possible.


François s’approcha lentement, sans rien dire. Quand il fut devant elle, il prit lentement, mais fermement ses poignets dans ses mains puissantes et il desserra l’étau de ses bras pour les réunir à nouveau dans son dos. Ensuite, il lui prit le menton dans une main et l’embrassa à pleine bouche. Madame de Ségur n’avait jamais été embrassée comme ça. Une langue épaisse et chaude la pénétrait sans ménagement, fouillant sa bouche, le bras libre de l’homme l’enlaçant et la serrant contre son corps dur. Elle se sentit si molle et faible ainsi tenue qu’elle crut défaillir.


Quand il eut assez fouillé, il se recula d’un pas pour la regarder, lui enlevant brusquement le châle qui la couvrait. Elle était vulnérable ainsi, elle le savait. Ses seins pointaient sous la soie, son ventre tendait le tissu et la rondeur de ses hanches ne pouvait pas échapper à l’homme qui l’étudiait. Pourtant, elle restait les bras dans le dos, le cœur affolé, à attendre son verdict.



Comme elle ne semblait pas réagir, il ajouta :



Il y eut un instant suspendu, la comtesse fixant François avec un air un peu perdu puis, lentement, elle passa la chemise par-dessus sa tête et se retrouva nue devant lui.



Alors il s’avança et enlaça sa partenaire. Il l’embrassa à nouveau à pleine bouche, prit ses fesses charnues à pleines mains, ses grosses mains calleuses sur sa peau de comtesse et sans prévenir, il la souleva et la porta à travers la pièce. Il ne donna pas l’impression de faire le moindre effort, il l’avait soulevée comme si elle ne pesait rien, elle qui se sentait parfois si grosse, mais dans ses bras, elle était légère et c’était agréable. Le bûcheron la déposa doucement sur le grand lit, comme si elle était précieuse. D’un baiser, il l’allongea et d’une pression de la main, il écarta ses cuisses blanches.


Madame de Ségur le regardait différemment maintenant. Elle était attentive à ce qu’il faisait et elle attendait la suite avec impatience. Il ne lui vint pas à l’esprit de resserrer ses cuisses, pas du tout. Il l’avait voulue ainsi et c’était ainsi qu’elle acceptait de s’exposer. Elle était déjà son amante. François s’agenouilla entre ces belles cuisses bien grasses et les parcourut avec ses lèvres. La comtesse trembla. Elle ne savait pas si elle avait froid ou peur ou si le plaisir l’envahissait, mais elle fermait les yeux et elle tremblait, tandis que le visage rasé de frais de son employé s’approchait dangereusement de son intimité humide. Car elle se sentait très, très, humide, la comtesse et même trempée comme elle ne l’avait jamais été.


François sortit sa grosse langue et commence à lécher les lèvres intimes de sa patronne. Puis il la glissa dans la fente juteuse et commença à laper comme un chien. « C’est parce que c’est un bûcheron, pensa alors la comtesse. Il fait l’amour comme les animaux de la forêt. C’est une vraie bête. Mais pourquoi mon Dieu est-ce que ça me fait autant d’effet ? Est-ce que je suis une bête moi aussi ? ». Personne ne l’avait jamais léché avant ce jour et elle n’avait donc aucun point de comparaison. Et puis soudain, ce fut comme si un volcan jaillissait en elle. Elle crut même un instant qu’elle était en train de mourir, mais elle ne mourut pas. Elle avait découvert le plaisir.


François s’était redressé et sans rien dire, il ôta sa chemise. Il avait un torse musclé et poilu qui plut beaucoup à Madame de Ségur qui avait rouvert les yeux après son orgasme. Rien à voir avec la poitrine blanchâtre de son vilain mari. Puis l’homme défit la cordelette qui tenait son pantalon et se retrouva nu devant elle, une énorme queue bien dure dressée devant son ventre. Encore une chose qu’elle n’avait jamais vue, son mari officiant toujours dans le noir, et sous les édredons qu’il accumulait parce qu’il avait froid.


Le membre viril la pénétra avec une facilité déconcertante. Du moins pour elle, car le bûcheron ne semblait pas déconcerté. Il était tout à son affaire, la besognant avec ardeur. Il la secouait tant que ses petits seins sautillaient gaiement en cadence. « C’est un bûcheron, pensait-elle en rythme avec les coups de reins de son amant, c’est un bûcheron. » Et effectivement, il grognait bestialement en s’enfonçant dans sa chair moite comme lorsqu’il était au travail, seul dans la forêt, comme autrefois quand il était à la manœuvre et qu’il hissait les voiles avec ses camarades. C’était un bon travailleur et madame de Ségur ne tarda pas à avoir un nouvel orgasme, puis un autre. « Ne va-t-il jamais s’arrêter ? pensait-elle avec admiration. Il va me rendre folle. » D’ailleurs, elle le dit :



Finalement, le bûcheron s’arrêta un instant, toujours fiché en elle comme une carotte dans le potager. Il la regarda avec intensité, son visage si près d’elle qu’elle pouvait voir les poils noirs dans ses narines. Il respira fort un instant, puis il dit :



Elle s’était installée en travers du lit, dans une position qu’elle n’aurait jamais osé prendre la veille encore, même seule. Elle tendait son cul vers lui, écartant naturellement les cuisses pour lui laisser le passage. François s’installa aux commandes de ce nouveau vaisseau. Le cul était gros et bien fendu, il était satisfait.



Si elle avait réfléchi à l’image qu’elle donnait d’elle-même, elle ne se serait certainement pas trouvée parfaite, mais elle était incapable de réfléchir et la satisfaction de son amant était désormais son seul objectif. Celui-ci recommença à la pénétrer, plus loin peut-être encore que dans l’autre position, avec des coups de reins encore plus puissants. Et voilà qu’il se remettait à bûcheronner, la pilonnant avec la régularité d’un horloger suisse et la puissance d’un canon. C’était bon, très bon et elle recommença à jouir, ne sachant plus rien de l’endroit où elle se trouvait ni du temps qui passe. Si son mari était entré à cet instant dans la chambre, elle s’en serait moquée ou alors, oui, mieux, elle lui aurait demandé de bien regarder pour prendre des leçons.


François la tenait par la taille qu’elle avait encore assez fine, ses grosses mains qui faisaient presque le tour de son ventre, ses deux pouces posés au creux de ses reins et ses grands doigts qui lui pressaient l’abdomen. De temps en temps, une main s’envolait pour empoigner sa chevelure et alors elle se sentait vraiment jument avec son cavalier qui se tenait à sa crinière. Il aurait pu la baiser ainsi pendant des heures, elle ne s’en serait pas lassée, mais les meilleures choses ont une fin et son bûcheron n’était qu’un homme, avec son foutre qui voulait sortir de lui pour ensemencer la terre.



Aussi, vaincu, il sortit doucement son membre de la vulve brûlante qui l’abritait et éjacula tout son jus sur le dos de sa maîtresse, de grandes rasades qui le secouait tout entier au passage. Sophie de Ségur sentait le foutre gluant et chaud la recouvrir entièrement. Comment allait-elle cacher cela à sa femme de chambre ? Mais tant pis, elle était épuisée et quand l’homme derrière elle eut fini son affaire et qu’il tomba comme un arbre abattu par la foudre sur le lit à ses côtés, elle s’allongea à son tour contre lui, tout contre lui parce qu’elle le voulait encore, malgré l’épuisement. Elle admirait comme elle n’avait jamais admiré personne, sa force, sa science du sexe et son audace.


Ils respirèrent en silence de concert, leurs cœurs battant à l’unisson puis le bûcheron se redressa sur un coude et regarda sa conquête.



Du menton, elle désignait la queue de son amant qui reposait, gluante et molle, sur son ventre poilu.



François n’eut pas le temps de répondre qu’elle plongea sur sa queue, l’empoigna avec sa petite main blanche et la prit en bouche. Le bûcheron grogna et elle se sentit encouragée. Il y avait encore du sperme et des sucs sur le gland et la comtesse de la veille aurait sûrement trouvé cela immonde, mais la Sophie de ce soir s’en délecta. Et très vite, comme par magie, comme François l’avait annoncé, ce qui rehaussa encore la confiance qu’elle avait en lui, son membre viril redevint tout à fait viril, avec son gros gland rouge prêt à l’action.


Il y eut une nouvelle séquence de baise torride, mais je ne vous la raconte pas, car vous allez vous lasser. Toujours est-il qu’ils étaient encore dans les bras l’un de l’autre quand ils virent le jour pointer derrière les rideaux.



Le comte de Ségur était rentré au château, mais c’est à peine s’il put parler à sa femme. Elle lui battait visiblement froid et comme il se sentait coupable, il n’insista pas. Il apprit le danger qu’avait couru Charles et le sauvetage qui avait eu lieu.



Là-dessus, la comtesse lui tourna le dos sans répondre et il resta là à la regarder s’éloigner. Il pensait plus ou moins à elle, mais c’est le corps d’une autre, une jeune actrice parisienne, qui s’interposa dans son esprit. Sa femme ignorait certainement à quel point cela avait été un sacrifice de revenir s’enterrer en province auprès d’elle.


Le mercredi, la comtesse se fit conduire en cabriolet chez le bûcheron. L’attelage quitta le château par la grande allée, tourna à droite pour longer le hameau où vivaient la plupart de ses gens, fermiers, valets, lavandières et autres chaudronniers. Puis ils empruntèrent un mauvais chemin, plus étroit qui parvenait à l’orée du bois devant une petite maison de terre, au toit chaumé. C’est là que vivaient François et sa famille. Madame de Ségur ne voulut pas que le palefrenier l’attende, à l’étonnement de celui-ci. Elle l’assura que le bûcheron avait une carriole et qu’il la raccompagnerait.

Comme elle allait frapper à la porte, celle-ci s’ouvrit toute seule et elle se trouva face à une femme de son âge, ce à quoi elle ne s’attendait pas du tout.



Sophie de Ségur fit quelques pas timides à l’intérieur de la masure. Son cœur battait à toute vitesse, car elle se sentait prise au piège. Si le cabriolet avait été encore là, il est sûr qu’elle aurait filé. Dans la pièce où elles se retrouvèrent toutes les deux, il y avait un gros fourneau, une solide table en bois et quelques chaises malingres. Marie la fit asseoir sur une de ces chaises et proposa de la tisane que la comtesse accepta, car elle ne savait pas que faire d’autre.


La femme de François prépara la tisane dans un grand pot en grès et revint s’asseoir face à sa propriétaire.



La conversation prenait un tour inattendu qui déroutait la comtesse. Elle tenta de détourner la conversation.



Les deux femmes se regardèrent un moment, chacune cherchant probablement à comprendre ce que ressentait vraiment l’autre. Puis Marie se leva de table, déplaçant les bols de grès pour se donner une contenance.



La comtesse de Ségur se leva péniblement de sa chaise. Elle était tremblante, mais elle se dirigea vers la pièce que lui indiquait la femme de François.



Dans la chambre, Marie aida la comtesse à enlever sa robe et ses dessous. Celle-ci se laissait faire, un peu molle, perdue dans ses pensées.



Quand la comtesse fut nue, elle entra vite dans le lit et se cacha sous les draps épais et rêches. Marie commença alors à se dévêtir.



La comtesse n’avait jamais touché une femme, ni même eu l’idée de le faire, mais elle n’avait jamais non plus été nue dans un lit avec personne. Sa compagne était chaude et toute proche. Ses grands yeux noirs la regardaient avec attention. Alors elle avança une main, effleura un téton. Puis elle s’enhardit et posa ses deux paumes sur la chair chaude et vivante qu’on lui offrait.


Il y eut ainsi un moment très silencieux, très doux. Les mains de Sophie s’enhardissaient, Marie fermait les yeux et se laissait faire, les deux femmes respiraient un peu plus vite et sentaient l’humidité les gagner. Finalement, un doigt de la comtesse finit par se poser comme une libellule sur le bouton caché de son employée.



Quand François entra dans la chambre, un peu plus tard, les deux femmes avaient disparu sous le drap et il entendit gémir et supplier.

« Ne t’arrête pas ! Oui ! Oui ! Continue ! » disait quelqu’un. C’était assez excitant et il se débarrassa au plus vite de ses vêtements pour rejoindre les baiseuses dans le lit. Sa queue déjà raide fit merveille et fut fêtée comme il se doit.

De l’avis de chacun des trois participants à cet après-midi récréatif, ce fut la meilleure expérience sexuelle de leur vie. Il y eut d’autres fois, à trois ou à deux, mais jamais ce ne fut aussi intense, aussi humide et aussi nouveau que cette première fois. Quand la comtesse prit le chemin du retour, à pied parce que la carriole qui devait la ramener était un mensonge, il faisait nuit. Elle avait les jambes flageolantes qui la portaient à peine, mais pourtant, jamais une promenade nocturne ne lui avait paru aussi belle. Les étoiles lui parlaient de François, les criquets de Marie. Il fallut les hurlements d’un loup pour lui faire finalement accélérer le pas et rentrer au château.


Le comte de Ségur, cet agaçant petit bonhomme qu’elle n’avait jamais aimé et qu’elle aimait encore moins maintenant qu’elle savait ce qu’était l’amour, ne se décidait pas à repartir à Paris. Aussi, elle devait toujours inventer de nouveaux mensonges pour parvenir à voir ses amis. Parfois, elle partait à cheval pour une promenade solitaire. En fait, elle rejoignait François là où il travaillait et il la baisait debout, appuyée contre un arbre. Quand elle entrait dans les écuries et qu’elle voyait la vulve de sa jument, toujours elle rougissait. Le bûcheron continuait à l’appeler « ma petite jument » et elle adorait ça.


D’autres fois, elle demandait à Marie de venir dans ses appartements « pour des travaux d’aiguille délicats », disait-elle. Cela avait vexé la vieille Valentine qui avait cette charge jusque-là, mais cela permettait aux deux amies de se glisser sous un drap et de se faire mille caresses toutes plus douces et plus osées les unes que les autres.


Pour se retrouver à trois, c’était plus compliqué. Il y avait le mensonge pour le mari, les gosses à caser, les voisins à endormir par une histoire, bref, cela arriva très rarement. Et puis quelques mois plus tard, ce fut la fin. Un château, ses dépendances et son personnel est un petit monde qui vit en vase clos. Rien ne passe jamais inaperçu. Quand on aime bien les gens, on ne dit rien, mais il y a toujours une mauvaise langue qui a besoin d’une vengeance mesquine et qui dit ce qu’il a vu. Ce fut Valentine qui alla trouver le comte pour lui parler des nouvelles habitudes de sa femme. Le comte avait remarqué un certain changement chez son épouse. Cette femme intelligente, qui voyait souvent clair dans ses pensées et qui savait tourner un reproche, n’avait plus l’air de s’intéresser à ses faits et gestes. Elle était souvent absente pour des raisons qu’il comprenait mal et lorsqu’ils passaient un moment ensemble, il avait l’impression d’être transparent. C’est tout juste s’il obtenait des réponses à ses questions.


Aussi, quand Valentine lui eut exposé ses soupçons, il comprit ce qui était en train de se passer. Il n’alla pas voir sa femme. Faire une scène, l’accuser, la battre, tout cela n’avait aucun intérêt. Le comte tenait surtout à sa réputation. Parmi ses gens, on devait savoir qu’il ne se laissait pas insulter impunément. Il songea un instant à envoyer quelques hommes de main pour casser les bras et les jambes à ce bûcheron poilu comme un singe. Rien que d’y penser lui donnait la chair de poule. Comment Sophie avait-elle pu ? Enfin, ce n’était pas son problème. Son problème était ce qu’on dirait dans le peuple s’il faisait estropier ou tuer un bûcheron. La révolution était loin, mais avec les idées socialistes qui traînaient maintenant un peu partout… Il voulait surtout pouvoir retourner voir la petite Jeanne à Paris sans risquer de trouver son château à feu et à sang à son retour. Il opta donc pour un renvoi discret du bûcheron et de sa famille.


Le lendemain, son intendant frappait chez François et lui demandait d’avoir vidé les lieux dans les vingt-quatre heures et d’aller chercher du travail ailleurs. L’intendant était un petit homme tiré à quatre épingles et François le dominait de la tête et des épaules. Mais ils savaient l’un et l’autre que les gendarmes accourraient au moindre signalement de l’homme d’étude.



Pas de recommandation voulait dire que personne ne l’embaucherait dans le pays. François passa la journée à chercher un moyen d’emporter les affaires de sa famille tandis que Marie rangeait leurs maigres possessions. Leurs deux filles pleuraient parce qu’elles ne voulaient pas quitter leurs cousines. Finalement, François avait mis ses économies dans l’achat d’une vieille mule et d’une petite carriole.


À l’aube, tandis que des bancs de brouillard montant du fleuve s’accrochaient aux arbres, la famille installée sur la carriole quitta la maisonnette au bord du bois, des larmes dans les yeux des filles, François les mâchoires serrées et Marie blottie contre lui, seul rempart qui lui restait contre la misère. Ils traversèrent le hameau et arrivèrent à la grand-route, là où part l’allée qui mène au château. Une femme se tenait là, dans la brume, avec un enfant à la main et un baluchon posé à ses pieds.



François ne voulait pas. La comtesse ne se rendait pas compte, une vie de misère les attendait, une vie triste et dangereuse. Mais pendant qu’il tentait de la dissuader, Marie lui tendait la main pour l’aider à monter à côté d’elle sur le banc et Charles avait eu vite fait de rejoindre les filles à l’arrière, confortablement installées sur les ballots de vêtements de la famille. Les enfants se connaissaient. Ils avaient déjà joué ensemble pendant des heures tandis que leurs mères jouaient à d’autres jeux dans un petit salon à la porte close.