n° 22437 | Fiche technique | 14235 caractères | 14235 2411 Temps de lecture estimé : 10 mn |
28/05/24 |
Résumé: Homme ou femme? | ||||
Critères: fh | ||||
Auteur : Landeline-Rose Redinger Envoi mini-message |
Qu’y a-t-il après les rudesses de l’amour physique ? Après le sexe. Le corps se plaît aux jeux du sexe. Le mien s’en délecte. Sans ma petite culotte, le petit butin saisit par le vigoureux barman, sans elle, je me sentais dans l’avènement d’une liaison. Une forme d’inachèvement des choses ; il m’est jouissif de savoir que mes aventures ne sont pas closes. Je jouis du sexe en devenir.
Lorsque revenant de mes emplettes avec Pedro, je garais ma Mini au garage, j’avais encore devant moi le défilé des sexes qui m’avaient prise. Le petit air frais qui balayait la rue au sortir de mon garage, laissait à mes cuisses un second contentement. Qu’un hardi passant y glisse subrepticement une main, qu’un suborneur s’apprête à me retrousser, me laissait porter mon regard lointainement dans la rue. Mais non, personne ce soir.
Souillé me direz-vous, n’est pas confortable ; mais pour qui connaît l’effort, qu’il fut de travail, sportif ou sexuel, un seul délicieux remède : l’eau.
Sous la douche coule les excès du corps. La sueur se confond, et s’étale en mélange indissociable aux jus des chairs. Arack de corps d’hommes. Ma bouche se gargarise aux gerbes fines de l’eau, sperme, salives, mélange filant dans la bonde. Quelques effluves visqueux sur la peau de mes cuisses. Être neuve, être nouvelle au monde, vierge en somme. Voilà qui je suis quand lavée, séchée, parfumée, raffermie, je reprends le cours du quotidien. Le temps, l’allégresse et la légèreté font que passent sur le corps les caresses, les lanières, les griffes, les stigmates du sexe consenti. J’aime que mon corps soit toujours nouveau, j’aime que rien ne donne à voir ce qui fût, tout comme si chaque homme pouvait se targuer d’être le tout premier à me prendre, me bousculer, me basculer. Que ma bouche accueille en son abri vermillon son sexe comme une grande exclusivité, que mon sexe soit un corridor humide où l’on pénètre en pionnier en défricheur. Que s’ouvrent mes fesses sur le fourreau où l’on entre avec l’ardeur d’un combattant, d’un explorateur de terra incognita.
Voilà ce que rend l’eau à mon corps, voilà la pureté sans cesse renouvelée. La virginité des putains.
Pourtant, lavée, cernée par une eau de rose, combien est rude la lutte contre le désir des pores de la peau exsudant, du sexe vibrionnant.
Mais… mais il n’est pas venu le temps du repos, non vraiment pas.
Le parvis toujours en mouvement de la Tour Eiffel était à la fois un endroit sûr et le risque aussi d’y être interpellée pour attentat à la pudeur, outrage aux bonnes mœurs, un truc dans le genre. J’entendais le claquement sec de mes talons hauts tout comme s’il était capable de couvrir l’entrecroisement incessant des touristes. Pour tout vêtement je n’avais que mon trench-coat qui me couvrait jusqu’au-dessous des genoux. Si mes seins étaient comme des arcs bandés ce n’était pas dû au seul fait de la fraîcheur de la nuit. Vingt-et-une heures en automne, fut-t-il aussi doux que celui que nous avions en cette saison, laissait un avant-goût de l’hiver à venir et un arrière-goût de l’été finissant. Sur le parvis, comme convenu, j’ai marché afin que l’on me repérât, talons rouge quatorze j’étais pour sûr identifiable.
Tout avait commencé par cette soirée entre voisins, mensuelle et conviviale. Soirée gaufres, crêpes, raclette, mexicaine, la thématique variait et les hôtes tournaient. Pour celle-ci, deux couples voisins et moi. Si Lucas savait de moi, mes escapades furieuses comme il les nommait, pour autant sa vie et sa philosophie semblaient être tout autre. Donc, j’étais la voisine cool, sympa et la vie s’arrêtait là. Sur fond sonore un cantique, nous échangeons dans une forme de désinvolture.
Je ne me rendais pas chez mes voisins-amis, autrement qu’en jean et baskets, chemise ou pull ample. J’aimais cette aisance. Olivier, un érudit, m’abreuvait d’ouvrages philosophiques, de peinture, cinéma, enfin sa vie.
J’avais radicalement, déontologiquement, marqué une frontière virtuelle entre ma vie débridée et les petites soirées voisins-amis.
Si mon dernier livre s’était plutôt bien vendu en ligne, par pudeur ou décence nous n’en parlions pas entre nous. Et ce fut justement par lui que je poursuivis mes escapades avec la rage du désir chevillé au corps. Si j’avais pu à loisir lire, les commentaires outrés, furieux, enjoués de mes lecteurs, j’avais tout à fait oublié l’endroit même du roman où je laissais au lecteur mon véritable mail. Des semaines s’étaient écoulées depuis sa mise en ligne.
Ainsi, revenue un peu pompette, mais je n’ai qu’à traverser la ruelle- la petite alarme de mes mails me fit un signe. Un admirateur qui posait ainsi les choses.
Par nature je ne suis pas crédule. Le roman reste le lieu de toutes les audaces et le vôtre n’en manque pas. Aussi bien votre plume est le prolongement de cette vie goulue ou le fantasme littéraire d’une femme, ou d’un homme peut-être. Mais faisons fi des convenances, aussi je vous propose d’abord une rencontre épistolaire après nous aviserons.
Cher ami lecteur, que je fusse cet homme que vous soupçonnez, gagerait sûrement d’un talent supérieur à se glisser dans les moindres recoins de la féminité. Il en est me direz-vous. Aussi mon goût du plaisir n’a d’égal que l’intensité du désir. Que notre relation soit virtuelle certes, mais par expérience je me lasse de cela. Alors jouons, ami. Ou amie ? Pour que de bonnes bases soient établies entre nous, de façon ludique car j’aime le jeu, vous pourrez sans doute, directement de vos yeux voir que mon corps est bien celui-là même que tout homme a pu à loisir caresser, lécher, baiser.
Oups ! Je dirais que vous êtes cash !
Eh bien soyez donc sur le parvis de la Tour Eiffel demain à vingt-et-une heures et observez-moi sans même vous approcher ou m’aborder. Le jeu commencera selon mes règles.
Mais comment donc vous reconnaître ?
Cela, mon ami, reste votre problème.
Depuis les tragiques évènements qui ont endeuillé Paris, les militaires patrouillent, armés et harnachés, comme un bataillon de guerriers. Si ce n’est que la cause de leur présence est dramatique, je dois dire que je ne suis pas insensible à leur allure martiale. Mais pour l’heure il me faudrait jouer de prudence, les costauds ne rigolent pas avec les petits amusements des filles dévergondées.
Il y a dans tout va-et-vient des foules, des vagues et des apaisements. Que mon internaute me distingue foulant les dalles lui sera sans doute aisé. Aisé, car il me cherche. Talons aiguilles rouge-coquelicot sur dalles claires, un contraste qui n’échappe pas à l’œil affûté. Vingt-et-une heures n’est pas non plus l’heure d’abondance. Même si Paris en ce lieu ne se repose guère. Pour le jeu, j’ai laissé échancrer mon trench sur mes cuisses et sur ma poitrine ; autant dire qu’une seule boutonnière reste en accroche. Ma bouche tressaute un peu, ma peau frémit. Mes petits allers-retours durent et je pense que pour mon ami la cible est repérée. Contre le parapet qui supporte la descente des grandes marches, j’ouvre largement mon trench, les jambes en compas. Mon corps est entièrement dénudé. L’écartement de mes jambes ne laisse aucun doute sur ma féminité. A quelques pas de là, passent une grappe de nippons, puis les vaillants treillis.
J’ai garé ma Mini-Cooper en contre-bas sans trop de difficulté. Descendant les marches pour la rejoindre, je ne résiste pas au plus creux du passage des touristes, à quitter mon trench, oh ! quelques secondes pour exhiber mon corps entièrement nu. C’est un sentiment qui m’exalte dont je suis en fait peu coutumière. La nudité hors des lieux dédiés, est une joie dont la contrainte de temps est un élément supérieur du plaisir.
Je rabats sur moi les pans de mon trench et retrouve ma voiture. En appui contre mon siège, je reprends doucement un souffle régulier, car cette petite épreuve a fait changer mon rythme.
Je rejoins mon quartier rue de Convention et ma ruelle Santos.
Emmitouflée dans mon survêt’ molletonné, je ne me laisse pas emporter par une rétrospective de ma soirée. Enfin c’est du moins ce que je croyais.
Un coup d’œil à mes mails ; des pièces jointes. Cinq, six clichés plutôt de bonne qualité, un professionnel peut-être. Une forme de rafale de ma prestation de ce soir sur le parvis. Trench échancré, trench ouvert, sexe apparent, poitrine tendue. Puis nue dans les marches et pour clore la série, mes cuisses largement apparentes dans ma voiture, avant et après mon exhibition. Oh ! Je fais travailler ma mémoire. Un homme, casquette et toutou ? Non pas lui, un jogger rapide, une fille et son boy-friend, bon je capitule. Ah ! Mon doigt dans le creux de mon sexe, ça j’avais omis, lui non !
Ah ! Vous êtes une vraie fille, une vraie jolie femme, quel corps et quelle audace. Bravo pour la bravoure !
Mais alors, qu’en est-il de vous ?
Si j’en juge à ce que j’ai vu ce soir, si je m’en tiens à cette biographie chaude – que j’ai lu d’une main- de vous, alors voilà maintenant ma proposition.
Neuf heures du matin. Je sautille sur le pavé de l’impasse Santos, échauffant mon corps entièrement voué à la fraîcheur de l’automne. Puis Lucas et Emma sortent à leur tour. Olivier se fait un peu attendre. Pour joindre le parc G. Brassens, il faut quelques minutes et si le groupe est d’humeur, nous descendons par la voie verte en aisance respiratoire. Notre petite équipe de joggers est plutôt à la hauteur des vingt kilomètres de Paris, que nous préparons.
Emma avait ouvert ma porte, et qu’elle ait vu mes Pigalle et mon trench à l’entrée ne faisait pas l’ombre d’un doute. Mais je me trouve ridicule à m’évertuer à cacher mon côté sexy-girl. Bien souvent Emma avait un petit sifflet moqueur, ou envieux me voyant sortir en tailleur strict et talons hauts. Bref, quelque chose à cacher Landie ? Une petite honte qui monte ?
Allons, allons ma fille ne rougit pas soliloquais-je en courant à ses côtés.
Les garçons avaient pris un peu d’avance, mais la courtoisie les faisait revenir vers nous et continuer de concert. Pour autant un petit saut du temps me ramenait par instant à la soirée de la veille.
J’aimais me savoir transportant mon petit secret tout chaud, mais pas plus que Lucas, Emma, mes amis bien sûr avaient les leurs. Une vie ne suffit pas à notre frénésie.
Nos échanges aidés par la lecture de ma biographie avaient, je le pense, favorisé une liberté de ton et réduit grandement les codes habituels de la bienséance. J’aimais qu’il en soit ainsi. Ce ne fut donc pas autrement que le soir venu, je me rendis avenue Gabriel dans le 8ᵉ et garais ma Mini à quelques mètres du studio du même nom. Pareillement à la première rencontre, nue sous mon trench-coat, j’attendais avec ce petit supplément agréable de laisser glisser le désir vers le plaisir. Que je fusse une femme ne laissait planer aucun doute, mais en somme, et ce fut-là la teneur de notre dernier échange :
Si je suis une femme, qu’êtes-vous donc ?
Simple et efficace, j’avais aimé qu’il le fût.
Jean, sweat à capuche, lunettes sombres. Petit arrêt devant ma voiture. Je fais descendre la vitre ? Sans doute avait-il planifié jusqu’à ce détail. Son sexe vif sur son jean ouvert. Un sexe dur et long que ma main caresse. J’ai peu de facilité à refréner l’envie prodigieuse de sucer un sexe d’homme. Approchant mes lèvres ourlées et vermillonnes, je couvre le gland et le taquine de ma langue. Mais…mais sans mot, sans gémissement sans l’esquisse d’un halètement l’inconnu empoigne son sexe et rabat les pans de son jean puis file. Je suis décontenancée presque fâchée. Furieuse. Je voudrais derechef rompre la convention tacite qui nous unit et courir derrière lui. L’agonir. Mais quand je sors de ma voiture, rien ni personne. J’ai dû sucer un fantôme.
Vous êtes gourmande et impatiente !
Impatiente je l’étais, ma main tremblait sur la souris de mon ordinateur.
…gourmande et impatiente.
La pièce jointe laissait clairement voir sa queue et mes lèvres sur son gland.
Je suis un homme, vous êtes une femme. Jouons encore un peu, non ?
Vous êtes beau joueur, je suis peut-être mauvaise perdante.
Fâchée ? Croyez en la vertu de l’attente, ne pas précipiter les choses est l’exquise douleur du retardement.
Ah ! Que non, mon ami, chacune de mes sorties se doit d’être la fête des corps. Et puis que n’allez-vous donc mêler la vertu quand le sexe se fait fugacité, multiplicité, chair vivement pénétrée. Vous m’avez mal comprise dans le texte. Je ne suis pas bouche fardée pour l’effleurement d’un sexe, non monsieur, moi on m’engouffre, on me nourrit, on me noie. Et n’en déplaise à la vertu, je suce goulûment, je lape et je lèche comme une chienne. N’intellectualisons pas ce qui n’est qu’animalité. Quand trois cerveaux cogitent, quatre bites emplissent mes orifices. Vous avez choisi le mauvais camp, alors prenez le temps que vous voudrez prendre, mais sans moi.
Bon, vous l’aurez compris ce petit internaute prétentieux qui joue du mystère, m’a quelque peu irritée.
Souvenons-nous en parallèle, de la lamentable histoire que j’avais eue avec ce non moins prétentieux et pédant Joueur Pharisien, dont l’égo dépasse le sommet de la Tour Montparnasse.
Je suis jeune, n’est-ce pas ? Mon corps cultive la tonicité et reste accueillant sans réserve à toutes catégories d’hommes sans distinction de classe.
Or, un internaute étriqué et qui me semble inextricablement prisonnier de la toile, n’est à mes yeux qu’un briseur de temps, un philosophe n’est pas un homme de chair. Voilà je suis furieuse sans entièrement comprendre la petite explosion qui bouscule ainsi mon corps, et cette violente envie de punir ce Virtual-man pour qui un pied dans le réel semble un gouffre à franchir. Bon, je me calme, je me détends. Je cours.
Je suis en érection et j’écris cette missive d’une main, ma chère salope urbaine et vous ?
Vous vous écoutez écrire et cela m’insupporte, alors rangez votre bite et votre couteau et retournez presto au fourneau de maman. Et je ne suis pas votre salope, pas plus urbaine que campagnarde ! Adieu !
Va te faire baiser sale pute !
Oh ! Je vous l’avais dit, j’aurais dû l’agonir à coups de talons aiguille à la première rencontre ! Je prends ou me fais prendre par vingt-cinq Pedro plutôt que de céder une parcelle de ma peau à ce gougeât intello !
Douche presque froide et après-midi canapé. Homeland.
Thé et flan avec Emma. Je me détends, je me retrouve.