n° 22543 | Fiche technique | 13351 caractères | 13351Temps de lecture estimé : 9 mn | 26/07/24 |
Résumé: L’entraineur utilise des méthodes révolutionnaires pour entraîner ses coureuses. L’une d’elle sort du cadre, mais pourquoi ? | ||||
Critères: ff collègues | ||||
Auteur : Myhrisse Envoi mini-message |
Projet de groupe : Fantasme olympique |
Cyréna leva les yeux sur Derwan. L’homme aux cheveux courts poivre et sel ronchonnait, tournant rapidement les pages posées sur la table blanche de la salle de travail inondée de soleil. Ses yeux effleuraient à peine une page qu’il passait à la suivante. Il fouilla dans son fatras pour recommencer son manège, non sans marmonner des paroles qu’elle ne comprit pas.
Cyréna avait l’habitude, depuis le temps, de gérer l’entraîneur.
D’habitude, ce « chef » suffisait à l’adoucir. Pas une ride d’agacement ne disparut sur son front. Sa contrariété devait vraiment être énorme.
Cyréna lui lança un regard interrogatif.
Une grimace dégoûtée l’empêcha de finir le mot. Qu’un misogyne comme lui ait pu demander à entraîner une équipe féminine, cela dépassait Cyréna et pourtant, elle devait admettre qu’il était un excellent entraîneur. Jamais il ne s’était montré entreprenant avec une de ses protégées. Jamais il n’était entré « par erreur » dans les vestiaires.
Les femmes, ça ne valait pas les hommes, selon lui. Il le répétait à longueur de journée mais ça tombait bien : dans leur discipline, elles ne se battaient qu’entre elles et Derwan tenait à les amener loin, très loin.
Cyréna fronça les sourcils et blêmit. Amandine ? C’était qui, Amandine ? Il y avait une Amandine dans l’équipe ? Depuis quand ?
Cyréna ouvrit de grands yeux ahuris. Comment cette perle avait pu lui échapper ? Amandine… Amandine… Non vraiment, ce prénom ne lui disait rien. Elle ne put s’empêcher de rougir de honte. Heureusement Derwan, très contrarié, ne sembla pas s’en rendre compte.
Cyréna attrapa délicatement les documents éparpillés devant l’entraîneur. Elle observa les graphiques, parcourut les courbes, déchiffra les tableaux. La conclusion fut limpide : Derwan avait raison. Cela n’avait aucun sens. Aucun lien visible entre les résultats et quoi que ce soit.
La culpabilité de Cyréna monta encore d’un cran. Parfois, le lien n’a rien de physique. Il est mental. Peut-être que cette « Amandine » ne voyait ses parents que rarement ou s’engueulait avec son copain avant chaque mauvaise session. Or c’était le rôle de Cyréna de s’occuper du côté social.
Derwan ne pouvait pas et ne voulait pas devenir le confident de ses athlètes. Cyréna, malgré son âge, ne restait dans l’équipe que pour cela : écouter les états d’âme et ainsi aider l’entraîneur dans son travail. Ancienne championne, elle galvanisait également les troupes et dispensait de bons conseils mais Derwan attendait d’elle une réponse… qu’elle ne possédait pas.
Mais qui était Amandine ? Aucune photo sur les documents. Même pas un nom de famille. Logique. Derwan travaillait ainsi. Cyréna se trémoussa de malaise.
Cyréna se leva et sortit. La gorge nouée, il lui semblait trahir celui qui, au fil des années, était devenu un ami. Certes, Derwan était misogyne et macho, mais il voulait vraiment le meilleur pour ses filles. Elle ne pouvait le lui reprocher. Cette fois, c’était de sa faute à elle si cette « Amandine » obtenait des résultats aussi disparates.
D’un pas décidé, elle traversa les couloirs administratifs pour retrouver les installations sportives. Quelques filles s’échauffaient. D’autres bavardaient. Deux ou trois couraient.
Il était prévu qu’elle passe les troupes en revue avec Derwan afin de monter le plan d’attaque. Les JO approchaient à grands pas. Ils étaient censés prendre leur décision dans la matinée. Cyréna tenta de masquer sa gêne et d’un ton désinvolte, elle lança :
Elle ne pouvait pas se trouver devant elle, car elle connaissait le prénom de toutes les filles actuellement dans la salle d’entraînement.
Fathia admit sa défaite d’un geste. En boîte ? Elle était présente hier soir au club ?
D’habitude, Cyréna aurait réagi au terme « ancêtre » pour la désigner. Surnom affectueux donné par les filles, elle ne l’appréciait guère et se faisait donc souvent charrier là-dessus. Cette fois, Cyréna ne broncha pas. « Mandy ». Voilà tout ce qui comptait. Voilà pourquoi « Amandine » ne lui disait rien. Personne ne l’appelait ainsi.
Mandy était une jeune athlète blonde au corps sculpté pour la course. Cyréna se souvenait de sa présence au club. La blonde avait beaucoup dansé sans jamais flirter, beaucoup bu sans jamais accepter un contact avec quiconque.
En revanche, pas moyen de se souvenir d’une performance de Mandy. Douée ? Elle l’était. Les résultats sur le papier ne mentaient pas. Pourtant, Cyréna ne se rappelait pas l’avoir vu briller une seule fois.
Interloquée, elle retourna dans le bureau du chef.
Cyréna se saisit des documents et les déchiffra, tenta de relier des faits et la vérité lui éclata au visage. Il y avait un lien ! Cyréna n’en revenait pas.
Cyréna sortit en trombe sans un mot pour l’entraîneur.
Cyréna se rendit d’un pas décidé vers le village des athlètes. Les fleurs, le soleil, le vent tiède, l’arôme de lavande, rien de tout cela n’attira son attention. Concentrée vers son but, elle ressassait, répétant une première façon d’aborder le sujet avant de l’éliminer, en tentant une autre et la trouvant tout aussi nulle. Mais bordel ! Comment poser une telle question ?
Lorsque Cyréna frappa à la porte de Mandy – la plaquette indiquait « Mandy », pas « Amandine » –, l’ancêtre n’avait toujours pas la moindre idée de la bonne manière de présenter les choses.
Pas grave. Lorsque l’intérieur de la chambre se dévoila, Cyréna se retrouva muette. Mandy, les cheveux décoiffés, le regard rouge et le front plissé de celle qu’une gueule de bois de première qualité enveloppait, apparut. Une petite culotte blanche masquait son entrejambe, mais il s’agissait là de son seul habit.
Mandy se figea et rougit intensément.
Cyréna ne sut quoi répondre. Les petits seins de Mandy pointaient et Cyréna les aurait volontiers dégustés. Son ventre plat, ses jambes longues et fines parfaites pour la course… Comment avait-elle pu ne pas remarquer une telle bombe anatomique ?
Le corps nu fut rapidement couvert d’un tissu éponge blanc, peignoir maudit masquant le paysage. Cyréna sortit de sa torpeur. Rester dans l’équipe lui permettait de se rincer l’œil. Si les filles la savaient lesbienne, elles se comporteraient différemment avec elle. Comme si l’ancêtre allait les violer ! N’importe quoi ! Cyréna connaissait sa place et était consciente de son âge et de celui des filles. Cyréna aurait presque pu être leur mère – à condition de procréer jeune. Alors certes, elles étaient toutes majeures mais de là à les dévorer, certainement pas.
Cyréna se contentait de mater et de refaire jaillir ces jolis souvenirs lors de ses masturbations quotidiennes. Sa vie d’athlète l’avait éloignée d’une vie de couple et puis elle tenait au secret alors elle s’était résignée. Derwan l’aurait virée direct s’il la savait préférer le sexe « faible ». Il aurait trouvé une excuse bidon mais Cyréna ne doutait pas de la réaction de l’entraîneur misogyne.
Cyréna fronça les sourcils. Mandy proposait un corps parfait, son idéal féminin et pourtant, impossible de la remettre en tenue moulante de course, impossible de la voir courir.
Mandy passa de tomate à coquelicot. Le teint lui allait à merveille. Mandy resta muette et figée. Cyréna la détailla puis comprit qu’elle n’en tirerait rien dans cet état.
Cyréna retrouva les filles dans la salle d’entraînement.
Après tout, la course était une activité personnelle et égoïste. On s’intéressait rarement aux performances des autres. Toutes les filles qui avaient entendu la question se mirent à ricaner. Cyréna fronça les sourcils.
Elles se lancèrent des regards entendus. Cyréna, elle, ne pigeait pas.
Cyréna en perdit toute capacité à parler. Rien n’allait dans cet échange. D’abord, les filles ne semblaient pas horrifiées à l’idée que Mandy puisse être lesbienne. Elles semblaient trouver cela normal. Ensuite, Mandy l’aurait draguée et elle n’aurait rien remarqué ? Impossible ! S’était-elle forgé un tel masque qu’elle ne voyait même plus ce qui crevait les yeux ?
Cyréna n’en revint pas. Choquée, elle sortit de la salle d’entraînement sans un mot. Ses pas la portèrent jusque devant la porte de Mandy. Elle frappa de nouveau, l’esprit vide de toute réplique charismatique.
Les cheveux coiffés serrés en chignon, basket aux pieds, elle devenait banale, passe-partout. Cyréna ne put que reconnaître la puissance du masque de la jeune athlète. Elle aussi avait appris à se cacher.
Cyréna pénétra dans la chambre, obligeant Mandy à reculer d’un pas. L’ancêtre referma la porte dans son dos.
Mandy lui permit de les voir, de les sentir, de les goûter, de les caresser, de les posséder tout entier. Cyréna lui rendit la pareille et le don ne se limita pas qu’au buste. L’expérience de l’ancêtre combinée à la fougue de la jeunesse guida le duo jusqu’au firmament.
Derwan transperça Cyréna des yeux puis ses lèvres s’étirèrent doucement.
Cyréna en suffoqua de stupeur. Derwan haussa les épaules puis lança :
Cyréna en eut les larmes aux yeux. Il savait. Il la gardait quand même. Malgré son masque, Derwan n’était pas dupe et malgré cela, il acceptait de travailler avec elle. Cyréna lui en fut immensément reconnaissante avant de redevenir sérieuse : il restait encore à monter le plan de préparation de Mandy pour les JO.