Une Histoire sur http://revebebe.free.fr/
n° 22546Fiche technique16043 caractères16043
2768
Temps de lecture estimé : 12 mn
27/07/24
Résumé:  Un jour à la naissance du printemps, qui sait ce que réserve la vie ?
Critères:  cérébral revede délire
Auteur : Jane Does      Envoi mini-message
Sous un ciel de printemps

Sept mars… douze heures vingt-sept !


Une guêpe ou un frelon ? Comment faire la différence, alors que la piqûre surprend Annabelle ? En tout cas, ça ressemble sans doute à cela. Et une sorte de voile vient clore les yeux de la jeune femme. Zut alors ! Ce n’est vraiment pas de chance, juste au début du printemps, sous un beau soleil qui fait revivre l’ensemble du parc. Une guêpe ou un frelon ? Mince alors, un immense trou noir, puis un nuage avec des cloches qui vibrent, qui tintent dans le silence…



— xXx —



Six mars… Vingt et une heures dix !


Pierre vient de rentrer. Emma va aller se coucher, Annabelle l’enveloppe dans un drap de bain. À cinq ans, la gamine appelle son père.



Le père attrape la fillette emmaillotée dans l’immense serviette, et tel un fétu de paille la soulève alors que sa mère finit tout juste de lui mettre son pyjama. Un énorme éclat de rire entraîne sur les deux visages adultes des risettes de connivence.



Le père avec l’enfant dans les bras se dirige vers la chambre où le petit lit attend le minuscule bout de femme en devenir. Cinq ans déjà, et tous ces mois sont autant de bonheur pour un couple qui s’entend à merveille. Quelques minutes plus tard, Annabelle pose ses lèvres sur le front de la gamine et un smack sonore éclate dans la chambre.



Sur la pointe des pieds, la brune de vingt-six ans sort de la chambre de l’enfant. Sur le pas de la porte, elle s’arrête, scrute Pierre qui, assis sur un siège proche de la tête de la couche commence sa lecture. Un si long chemin entre elle et lui… oui ! Un amour que chaque jour renforce, et la goutte de celui-ci qui ferme ses paupières sous les mots doux de son papa. Lui imperturbable, le livre grand ouvert entre ses grandes mains, suit les lignes noires qui font sombrer la petite dans un sommeil d’où elle ne devrait sortir que demain…


« Va voir comme se porte ta mère-grand, car on m’a dit qu’elle était malade, porte-lui une galette et ce petit pot de beurre. Le Petit Chaperon rouge partit aussitôt pour aller chez sa mère-grand, qui demeurait dans un autre Village. »


Lorsqu’il revient sur la pointe des pieds vers le salon où Annabelle est installée, tout semble endormi dans la maison.



Pierre se tasse contre le dossier du long divan alors que sa compagne, elle, s’y allonge de tout son long. Sa nuque se pose sur les cuisses de ce père qui respire doucement. Annabelle ne dit plus un mot, ferme seulement ses paupières, attentive au moindre bruissement de l’air qui l’entoure. Qu’il est doux, qu’il est bon d’être aussi heureuse dans une existence où tout coule de source ! Une paume de main masculine très délicatement vient d’abord lisser le front de son visage détendu. Puis elle se fraye un chemin parmi les mèches brunes qui tombent en cascade autour de l’ovale de sa bouille. Il sait si bien lui donner par cette caresse mille frissons.


À quel moment la femme alanguie devine-t-elle ce qui fait de lui un homme si viril ? Sous sa nuque, Annabelle sait bien que son mari a envie d’elle. Une autre idée lui monte dans le crâne, sans qu’elle ne la justifie d’aucune manière. Envie d’elle ? Ou simplement envie de faire l’amour ? Si c’était une autre femme qu’elle, là, dans cette position, sur ce canapé… banderait-il aussi ? Réflexion idiote, bien entendu, puisqu’elle ne sera jamais vérifiable. Et c’est bien cette simple pensée qui amène un drôle de rictus sur les lèvres de la jeune femme. Pierre l’a-t-il seulement entrevue, cette risette furtive ?


Mais même s’il l’aperçoit, comment pourrait-il en deviner les origines ? De plus, la main trop douce, trop chaude aussi continue de marquer son territoire en s’envolant littéralement, traçant désormais les courbes, les volumes du visage de son épouse. Les doigts, pour un moment assez long, se baladent sur ses lippes, provoquant dans ce corps étalé une sensation de bien-être. Le câlin digital insistant est tellement évocateur. Des tas de souvenirs remontent en boucle dans cette frimousse qui adore être dorlotée de la sorte. L’étape suivante est déjà plus espérée qu’attendue. La patte se dirige vers le menton à la peau fine.


C’est à cet instant que la seconde main entre en action. Elle aussi se fait plus pressante, moins inerte. De son côté, elle découvre, en remontant les longs tifs bruns, une oreille parfaitement ourlée. Entre pouce et index, le lobe s’en trouve pincé, ce qui comme toujours rend folle Annabelle. Cette sensibilité inouïe de l’endroit, Pierre le connaît par cœur et sait parfaitement la mettre en condition. Il est conscient qu’elle ne peut jamais résister plus de quelques secondes, à ce supplice amoureux, et que son impatience féminine va lui être bénéfique.


Passé ce stade, elle ne sait plus maîtriser son envie et… le « grand méchant loup » va pouvoir n’en faire qu’une bouchée, de l’agnelle offerte. Il déloge prestement les boutons d’un chemisier qui emprisonne encore sa poitrine, laquelle monte et descend de plus en plus précipitamment. Au rythme de la câlinerie et de l’effet que ceux-ci lui font, un premier soupir fend le silence du salon. N’y tenant plus, la femme fait un quart de tour, pas pour échapper à ce qui la rend dingue, non ! Juste pour que les pattes habiles trouvent dans son dos à demi dévêtu un autre terrain de jeu. Et qui sait… pour que le fermoir du soutien-gorge dissimulant ses seins soit plus accessible ? Cette fois, c’est bien sur la bouche de Pierre que se dessine un vrai sourire.


La soirée débute par des jeux de mains et de langue, des baisers brasiers qui enflamment tout sur leur passage. Annabelle fait l’amour, avec amour. Ça dure une bonne partie de la soirée, lui comme elle espérant sentir les premiers signes de jouissance chez son partenaire. Un plaisir qu’ils veulent partager jusqu’à l’ultime seconde. Effleurements, attouchements, bises sexuelles et autres délices pleuvent et se succèdent, faisant monter crescendo une température qui embrase les sens. Fête des doigts qui vont et viennent, redécouvrant ce qui chaque fois est pourtant si différent. Qui d’elle, de lui, a le frisson qui entraîne inexorablement elle et son complice dans un déchaînement de sensations renouvelables à l’infini ?


La pénétration ne devenant à force de jouer qu’accessoire, et l’aboutissement suprême de cet amour qu’ils se prouvent une fois de plus. Les soupirs, les gémissements sont là, qui résonnent dans la pièce quasiment close et plus rien ne paraît exister que ce bonheur d’être là, à s’aimer aussi fort, aussi tendrement. Nus, sans plus aucune pudeur, les amants demeurent enfin immobiles, savourant les derniers spasmes de cette vague qui vient de déferler dans deux corps qui n’en faisaient plus qu’un. Long silence où désormais il n’y a plus que cette femme pelotonnée dans les bras de son homme.


Et la patte masculine qui lisse de nouveau la rondeur d’un sein, ou l’arrondi d’une épaule. Personne ne veut bouger, personne ne tient non plus à rompre cet instant si magique qui suit l’acte lui-même. Non ! Annabelle est si bien contre la muraille de cette poitrine. Quant à Pierre, il ne cherche pas à la retenir ni à la faire fuir. Ils sont là, soudés par cet amour qui les noue, les rend invulnérables, loin de toutes les attaques ou tentations extérieures. Les lèvres de son mari reviennent à la charge, dans de délicieux bécots sonores qui claquent sur la peau sensible du visage de la jolie brune.


Charme finalement rompu par la voix mâle de Pierre.




— xXx —



Sept mars… Une heure trente !


Les draps sont frais dans lesquels se glisse le corps gracile de la belle brune. Annabelle s’étire, et tapote son oreiller, se cale et écoute les bruits de la nuit. Dans la chambre contiguë, Pierre est sûrement penché sur la goutte d’amour, perdu dans des rêves inaccessibles pour l’un comme pour l’autre. Ce sont les semelles des chaussons de son mari qui dans le noir absolu lui indiquent son retour. Lui s’assoit sur le bord du lit, soulève la couverture, créant ainsi un léger courant d’air.



La main frôle un sein qui se tient si près de son bras. Et puis lentement, mais sans préliminaires cette fois, il attire le corps de sa femme contre lui… l’embrasse goulûment sur la bouche et guide sa main vers ce qui a déjà repris une forme convenable…



Et sans un autre mot, elle soulève son corps, enjambe celui de Pierre et se redresse lentement. La menotte qui n’a pas lâché l’éperon de chair la guide vers cet endroit d’elle qui quelques minutes plus tôt les réunissait, dans l’intention évidente de recommencer l’opération. Et une fois engagé, le sexe de son homme dans l’étui de velours, elle se laisse glisser, assise sur lui. Un ouf bref, et l’intromission se fait sans aucune douleur. Il faut dire que le lieu est passablement lubrifié par les jeux précédents. Annabelle remue la croupe, monte et descend sur l’épée, et ses paumes en appui sur la poitrine masculine, elle se déhanche à grand renfort de gémissements. Combien de temps dure cet assaut charnel ?


Il n’est pas question de chronométrer ou de comptabiliser. C’est divin et elle règle comme elle l’entend la cadence de ce coït qui va fatalement les amener à se libérer à plus ou moins brève échéance. Les tremblements de tous les muscles de la belle sont le signal pour le mâle, qui lui sent monter en elle cette déferlante. Alors… il n’y a plus qu’un long râle issu de deux gorges soudées par un baiser. Sa sève à lui éclabousse la gaine en feu, sans pour autant éteindre l’incendie qui la dévore. Elle se crispe, et ses ongles se plantent dans la chair, dans un véritable festival de soubresauts impossible à réprimer.


Une pause dans le noir où deux êtres repus restent cois. Annabelle demeure allongée de tout son poids sur son mari. Quand enfin elle se force à faire un quart de tour, c’est pour regagner sa place dans la couche où le sommeil les attend. Les doigts enlacés, ils cherchent à s’endormir sans vraie envie de se désunir totalement. Les deux amants se font désormais face, front contre front. C’est l’heure du dernier baiser, ou du premier, compte tenu de l’heure matinale à laquelle il s’échange.



Il ne reste plus que les chants des murs pour faire vivre la nuit… les craquements des boiseries et les souffles réguliers de deux amoureux qui sont heureux… sans oublier également la respiration plus enfantine dans la chambre d’Emma… une maisonnée heureuse, un toit sous lequel couvent les amours les plus douces du monde.



— xXx —



Sept mars… Neuf heures !


Pierre quitte la maison et Annabelle s’apprête de son côté à faire de même. Emma est prête également pour aller chez sa nounou. Un jour ordinaire, un petit matin où le ciel se voile de moutons plus gris que blancs. Un dernier trait de rouge sur les lèvres et puis… cette fois, c’est le départ. En retard comme d’habitude pour le bureau. Le temps de déposer Emma, puis de filer vers le centre-ville. Pff ! C’est la course comme souvent le matin. En plus, ses reins douloureux rappellent à la maman brune que la nuit n’a pas non plus été de tout repos. Un sourire naît sur le coquelicot au centre de la bouille lasse.


Un salut à Nathalie, la nounou, un bisou à Emma, et l’aventure perdure. Le bureau, sa place, et c’est reparti pour une journée semblable à toutes celles des jours précédents. Le téléphone sonne sans cesse, et pourquoi diable se sont-ils tous donné le mot pour la déranger ce matin ? Les heures surchargées sont donc bien moins longues à passer. Midi… l’heure de la pause déjeuner. Mais pas question de laisser en plan ce type au téléphone qui se plaint de ce qu’il n’est pas remboursé assez vite. Faire face à la déplaisance des gens, un bon mot pour celui-là, pour rassurer, pour assurer. Et au moment de sortir pour rejoindre Pierre… où sont passées les clés de sa voiture ?


Bon… là encore, Annabelle est en retard pour le déjeuner. Pas très grave puisque de toute façon celui-ci se fait au restaurant en compagnie de son mari. Elle abrégera ou ne prendra pas d’apéro, voilà tout. La voiture se faufile dans une circulation un peu plus dense à cette heure charnière de la journée. Le feu rouge, elle s’arrête. Les piétons traversent sans hâte, et il est douze heures vingt-cinq. Il fait chaud dans l’habitacle qui est resté au soleil qui a enfin daigné se montrer dans le courant de la matinée. Alors… Annabelle ouvre sa vitre.


Le feu passe au vert… elle lâche l’embrayage. Devant elle, un poids lourd qui freine, elle aussi. Puis quelque chose, quelqu’un s’agite sur le trottoir en face. Soudain…



Douze heures vingt-sept !


Une guêpe ou un frelon ? Comment faire la différence, alors que la piqûre surprend Annabelle ? En tout cas, ça ressemble sans doute à cela. Et une sorte de voile vient clore les yeux de la jeune femme. Zut alors ! Ce n’est vraiment pas de chance, juste au début du printemps, sous un beau soleil qui fait revivre l’ensemble du parc. Une guêpe ou un frelon ? Mince alors, un immense trou noir, puis un nuage avec des cloches qui vibrent, qui tintent dans le silence…


Pourquoi toutes ces poupées dansent-elles autour de sa voiture ? Le sourire d’Emma ! Le visage de Pierre… puis les relents de cette nuit, ceux aussi savoureux des nuits précédentes… et il y a cette lumière. Éclatante sans éblouir… ses doigts touchent le soleil ? Un vrai silence, loin de toute cette agitation… le déjeuner… elle sera définitivement en retard. Un sourire… oui, c’est le dernier signe que lui laisse entrevoir la piqûre qui l’enfonce dans une nuit monumentale…