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Temps de lecture estimé : 12 mn
07/08/24
Résumé:  Je n’étais pas en avance pour mon âge, loin s’en faut.
Critères:  fh hplusag init
Auteur : Liane      Envoi mini-message

Projet de groupe : Les premières fois
Des débuts difficiles

Mon visage ingrat, je le tiens de ma mère, et mon corps rachitique, de mon père. Le mélange des deux a accouché d’un gnome sans attrait, rachitique et difforme. Difficile à supporter, surtout lorsqu’on est une femme. Même si la notion de beauté est somme toute relative, objectivement je suis plutôt vilaine. Après en avoir souffert pendant près de cinquante ans, j’ai fini par m’accepter et, aujourd’hui, je le vis plutôt bien. Comme j’aime à le répéter, j’ai la laideur épanouie. Cela ne m’a pas empêché d’avoir un mari, trois merveilleux enfants et de connaître également quelques aventures coquines.


Puberté et adolescence ont été dramatiques. Lorsque j’étais gamine, je planquais les miroirs, espérant ne jamais avoir à croiser mon regard dans une glace. Et, les quelques transformations physiologiques qui suivirent n’ont fait qu’empirer ce dégoût de moi-même.


Question garçons, ma jeunesse fut un désert immense. Passé un certain âge, je me suis complètement repliée sur moi-même. Je préférais rester seule, dans mon coin, je ne fréquentais personne et, quand je sortais, je rasais les murs, dans l’espoir de ne croiser âme qui vive. Lorsqu’il me fallait enfin rentrer (bien obligée !) dans les salles de classe, je percevais immédiatement l’expression ironique et moqueuse de certains élèves. Non seulement j’étais différente, mais mon attitude un peu bizarre contribuait également à ma mise à l’index. Quant aux autres de mes condisciples, ils m’octroyaient une parfaite indifférence, j’étais pour eux transparente, quantité négligeable, j’ai toujours eu beaucoup de mal à me faire des copines, encore plus à les conserver. Piètre consolation, je comblais ma solitude en lisant beaucoup, j’avais du temps pour moi, je me réfugiais dans les bouquins.


J’avais vu pousser sur moi cette paire de seins horribles, mollusques oblongs propulsés vers le sol, beaucoup trop gros pour mon buste squelettique. J’avais vu apparaître ces touffes de poils noirs qui s’épaississaient, çà et là, aux quatre coins de mon anatomie, et qui me donnaient l’aspect d’une vraie guenon. Les autres attributs de la féminité étaient restés étrangers à ma petite personne : des fesses ultraplates, des cuisses maigrelettes, des hanches beaucoup trop étroites et un visage androgyne, je ressemblais plus à un homme, qui se serait fait greffer une poitrine molle et disproportionnée, qu’à une vraie femme. Pour autant, je n’ai jamais remis en cause mon genre et encore moins mon sexe, c’est vrai qu’à l’époque, on ne se posait pas ces questions-là ; peut-être est-ce à cause de mon éducation, mais je me suis toujours sentie femme attirée par les hommes, hétérosexuelle dans l’âme.


Je maudissais souvent ma génitrice, avec en tête le souvenir de la fois où, encore toute petite, une de mes camarades de maternelle m’avait demandé pourquoi ma mère avait de la moustache… Maman n’était pas féminine pour deux sous, elle ne connaissait pas la pince à épiler et se pomponnait avec parcimonie. Son manque de grâce n’était pas étranger au fait qu’elle se soit mariée avec un nabot. Quel couple, celui de mes parents, les jours où je me sentais un peu moins monstrueuse, ils me donnaient vraiment la honte. Mais la plupart du temps, je restais confinée dans le dégoût de ma petite personne.


Avec le recul qui est le mien, je suis certaine qu’il devait y avoir aussi un problème hormonal derrière mon absence de féminité et qu’en toute logique, j’aurais dû suivre un traitement. Mais, à l’époque, autant que je le sache, aucun médecin ne l’a proposé à mon entourage, de même que je n’ai eu droit à aucun psy pour m’aider à démêler mon anxiété. Je suis restée isolée durant de longues années avec un mal-être profond qui m’a rendue profondément malheureuse. Mes parents bossaient tout le temps et s’occupaient très peu de moi ; je n’ai pas souvenir de gestes câlins envers moi, ils ne savaient pas exprimer leurs sentiments. Ceci dit, je n’avais pas à me plaindre, je ne manquais de rien au niveau matériel !


J’aurais sûrement pu faire de grandes études, car les profs s’entendaient généralement pour dire que j’étais intelligente et plutôt douée en classe. Pas étonnant, avec un père ingénieur et une mère qui enseignait en université et qui était chercheuse à ses temps perdus. Mais les problèmes psychologiques eurent raison de mon assiduité, bien avant que je ne puisse vraiment briller. Une longue dépression suivit, durant laquelle je restai enfermée entre quatre murs, à broyer des idées noires… jusqu’au jour où, n’en pouvant plus, je me décidai enfin à aller voir une psychologue sans en parler à mon entourage, ils n’auraient pas compris de toute façon. Ce n’est qu’à partir de ce moment-là que je parvins à casser le cercle vicieux qui m’entraînait sans cesse un peu plus vers les abîmes. Je dois reconnaître que cette thérapeute me sauva la vie, car j’étais prête à commettre l’irréparable ; mais cela se fit au détriment des maigres économies que j’avais héritées de ma grand-mère.


Très rapidement, pour poursuivre ma psychanalyse, il fallut que je me trouve un travail, cela faisait aussi partie de la catharsis. J’avais commencé par mettre des fromages en boîte dans une des laiteries de la ville, puis avais été éplucheuse de légumes chez un traiteur, avant de me retrouver femme de ménage dans un hôtel minable… j’ai accumulé plusieurs petits boulots, que j’exerçais souvent sous anxiolytique, pour être en mesure de tenir le choc.

À l’âge où la plupart des jeunes filles vivent des histoires d’amour, je pleurais des nuits entières en maudissant mon triste sort, surtout lorsque, dans la journée, j’avais croisé dans la rue un couple en train de se bécoter et que cela m’avait bien foutu les boules.


Quelque chose me manquait, c’est indéniable, mais j’avais l’impression de ne pas y avoir droit : un baiser ou une caresse, tous ces délices m’étaient refusés, j’en crevais pourtant d’envie.


Ma première expérience sexuelle fut particulièrement minable. Cette année-là, je venais d’avoir vingt-quatre ans et m’étais inscrite pour faire les vendanges. Je me suis très vite aperçue que le viticulteur qui nous employait me faisait des avances. C’était un ivrogne bedonnant, au visage buriné par le soleil ; il devait avoir la cinquantaine bien tassée, mais cela ne l’empêchait pas de tourner autour des petites jeunettes. Pourquoi avait-il jeté son dévolu sur moi ? Parce que nous n’étions que trois vendangeuses cette saison-là et que les deux autres filles étaient venues accompagnées de leurs copains, il n’avait donc guère eu le choix. Éconduit par mes comparses, il s’était rabattu sur moi. Plusieurs fois, il m’avait glissé une main aux fesses, profitant du fait que j’étais en train de vider mon panier dans la hotte et, dès que nous retrouvions seuls, il en tirait parti pour me lancer des allusions salaces que je comprenais à peine. Indiscutablement, c’était un vieux cochon, mais c’était aussi la première fois qu’on s’intéressait aussi clairement à mon anatomie. Encore vierge et proche de coiffer Sainte-Catherine, j’avais envie d’essayer depuis pas mal de temps… pour de ne pas mourir idiote, comme on dit. Alors, pour une fois qu’un homme manifestait un peu de désir envers moi, je me suis laissé « convaincre ».


Le dernier soir, à la tablée, j’ai picolé plus que de raison, histoire de me donner du courage. Après le repas, j’ai traîné dehors avec les hommes et, dès que l’occasion s’est présentée, je me suis arrangée pour me retrouver à l’écart avec mon « prétendant ». Celui-ci a immédiatement sauté sur l’occasion pour m’entraîner dans le caveau le plus proche.


Je titubais parce que j’étais à moitié paf, je tenais à peine sur mes cannes. Je crois que j’ai éclaté de rire quand il a baissé mon pantalon et ma culotte. Je devais avoir l’air grotesque à glousser comme une dinde ; très empruntée aussi, car quand il a sorti son sexe, je n’ai rien su faire d’autre que le regarder bêtement. Voyant que je n’étais ni douée, ni décidée à le satisfaire avec ma bouche, il m’a fait me retourner et m’a demandé de me pencher contre une barrique. Je n’ai pas attendu longtemps avant qu’il ne me prenne par-derrière, à la hussarde, sans précaution particulière. J’étais à peine humide. J’ai serré un peu les dents sous la force de ses coups de reins, puis j’ai pris mon mal en patience pendant qu’il me tamponnait. Je me sentais souffrante, pas tant parce que mon amant avait déchiré ma membrane et que les frottements ulcéraient un peu mes chairs, mais beaucoup plus à cause des à-coups répétés qui mettaient à mal mon estomac et me donnaient de plus en plus envie de vomir.


Quelques « cochonne », « vicieuse » et « salope » plus loin, j’ai senti un liquide chaud et visqueux s’écouler dans mon ventre. Il est évident que, pour ma part, je n’avais pas joui, loin de là. Mais je n’étais plus vierge, c’était mieux que rien !


La seule chose dont je me rappelle ensuite, c’est que le viticulteur a eu le toupet de me reprocher de lui avoir caché ma virginité, tout ça parce qu’il avait un peu de sang sur son pantalon… Il a conclu par un « T’es moche mais baisable » qui m’a bien réconfortée, avant de me demander de me rhabiller dare-dare, parce qu’il n’avait surtout pas envie que quelqu’un nous surprenne ensemble.


Je suis ressortie de la cave avec le foie complètement en vrac, et j’ai dégueulé tripes et boyaux dans les bosquets en me disant « Si c’est ça l’amour, ça ne vaut vraiment pas le coup ». Cela m’a en tout cas permis de désacraliser les hommes et les relations sexuelles en général. Un coït animal, rien de plus, pas grand-chose, en fait, j’avais déjà vu deux chiens l’un sur l’autre, c’était kif-kif : inutile d’en rêver, mais inutile d’en avoir peur. Je me suis enfin sentie mature et déjà presque normale.


Cette aventure, pour peu reluisante qu’elle fût, réveilla des désirs jusqu’alors en sommeil. Je naviguais un peu sur des sites web spécialisés, à commencer par Doctissimo, pour en apprendre un peu plus sur les réalités du sexe et sur les techniques à appliquer, pour ne pas me retrouver un jour face à une bite sans savoir comment m’y prendre. De fil en aiguille, je me mis à me masturber, chose que je ne faisais jamais auparavant.


Avec ma psychologue, c’était pareil, je parlais de plus en plus de choses sexuelles, elle devait d’ailleurs me prendre pour une véritable obsédée, vu que j’insistais lourdement. Je lui confiais surtout les fantasmes que j’avais glanés ici ou là sur la toile, et que je m’appropriais. Étaient-ce réellement les miens ? J’en doute ! Ma libido n’était de fait que virtuelle ou limitée à quelques titillements sur ma perle dans l’obscurité de ma chambre. Curieusement, je ne lui ai jamais parlé de mon déniaisement avec le paysan, non pas que j’en eus honte, mais c’était mon petit jardin secret, elle n’y avait pas droit.


Au bout de quelques semaines, je sentis ma thérapeute se détacher imperceptiblement de moi. Elle semblait plus lointaine, moins compatissante, indifférente à mon malheur et surtout hermétique à mes délires. Loin de me calmer, cela m’incita à faire de la surenchère pour la choquer. J’en devenais carrément vulgaire, mais cette femme guindée restait imperturbable.


Un jour où je lui avais raconté, tout au long de la séance, que je rêvais d’aller dans le vestiaire des hommes, à la fabrique de produits laitiers où je travaillais à nouveau, et de me donner en pâture aux ouvriers, elle me demanda simplement pourquoi, puisque j’en avais tellement envie, je ne cherchais pas à concrétiser. Cela jeta bien sûr un froid, de longues minutes de silence durant lesquelles je ne trouvai pas grand-chose à rétorquer, hormis le fait que, laide comme je l’étais, personne ne voudrait de toute façon de moi.



Pour la punir, j’ai « séché » les séances suivantes. Je pensais qu’elle allait me téléphoner pour me rappeler à l’ordre. Mais rien, aucune nouvelle ! Comme il était pour moi hors de question de faire amende honorable, j’ai préféré continuer à snober ma psy. À bien réfléchir, cette thérapie ne m’apportait pas grand-chose. En plus, cette coincée du cul venait de me donner la clef : « Arrêter de pleurnicher et agir », je n’avais plus qu’à mettre en application.


Un an s’était écoulé depuis ma défloraison, et toujours rien, pas de petit ami, pas même un amant de passage, le vide complet, j’avais beau esquisser des sourires, me maquiller légèrement et m’habiller un peu plus sexy, aucun homme ne s’intéressait décidément à moi. Les rares qui avaient tenté une approche s’étaient désistés au dernier moment.


Était-ce pour cette raison que je m’étais de nouveau inscrite pour les vendanges chez mon viticulteur préféré ? Qu’est-ce que j’espérais, à part repasser à la casserole ? Cela avait été tellement nul, cette première fois, fallait-il que je sois conne !


Mais non, pas du tout, tout le contraire, cette fois-ci c’était vraiment mon choix, j’y allais en connaissance de cause et savais très bien à quoi m’attendre, je me sentais libérée et, pour une fois, fière de ma décision. J’allais enfin agir.


Mais quelle déception, les premiers jours, le vieux me regardait à peine. Il faut dire qu’il avait des jeunes recrues, plus belles et plus délurées que moi, et qu’il avait la bave aux lèvres chaque fois qu’il les croisait. Malgré tous ses efforts de séduction, elles ne semblaient pas sensibles à ses charmes. Peut-être avait-il tenté quelque chose et s’était-il fait éconduire, comme ça devait être souvent le cas ? Tant mieux, car je leur aurais volontiers crevé les yeux à ces deux garces.


C’était déjà le dernier soir et j’étais bien décidée à en découdre, après tout j’étais venue pour ça. Après le repas, je traînais un peu, tandis que mes homologues rejoignaient sagement le dortoir des filles. Les hommes buvaient, parlaient fort, les discussions s’éternisaient, je n’avais surtout pas envie de me joindre à eux, d’autant que moi j’étais à jeun. J’ai préféré quitter la meute et suis allée me balader du côté de la cave où nous avions copulé la fois précédente, priant pour que le patron des céans m’y rejoigne. Nos regards s’étaient croisés et j’avais quelques espoirs. Ô temps, suspends ton vol, je commençais à désespérer quand je le vis arriver. Nous échangeâmes à peine trois mots, avant qu’il ne m’invite à rejoindre l’antre du mal.


Bis repetita, comme la plupart des hommes, il n’avait guère d’imagination. J’avais bien essayé de le sucer un peu, mais malgré mon bon vouloir, je ne devais pas être au point, car il passa rapidement aux choses sérieuses, toujours en levrette, penchée contre un tonneau. J’avais la croupe frémissante et étais fin prête pour cette saillie. Je prenais énormément de plaisir à le sentir aller et venir en moi, car j’en rêvais depuis plusieurs jours. Quoi qu’il en soit, je ne pense pas que j’aurais joui sans l’apport de mes doigts qui, glissant prestement entre mes cuisses, s’occupèrent de mon intimité. Cette fois-ci, le plaisir fut au rendez-vous et mon corps fut assailli de sensations nouvelles, très fortes et agréables. Concentrée sur mon propre plaisir, je ne le sentis même pas s’épancher en moi, il se retira et lorsque je me redressai, je constatai juste que du sperme coulait le long de mes jambes.


Il dut dire un truc comme « Toujours aussi chaudasse, tu aimes ça la queue ! », chose à laquelle je répondis de façon acerbe par « Je pensais que j’étais moche et tout juste baisable ! » en le mitraillant du regard. J’étais à moitié à poil dans cette cave glacée, mais ne faisais aucun geste pour me réajuster. Je le toisais avec un certain mépris, j’allais lui en foutre, moi, des « chaudasses ». Eh non, je n’étais pas fascinée par sa vieille queue. Piqué au vif par mon insolence, il préféra détourner la tête et remonta son pantalon sans demander son reste, il avait perdu de sa superbe.




Le gugusse ne mit pas longtemps pour me rappeler ; les vendanges à peine terminées et le raisin en train de fermenter, il me proposait déjà un rendez-vous. C’est ainsi que nous sommes devenus amants durant quelques mois. Nous nous voyions au moins une fois par semaine, en général chez moi. Manifestement, j’étais quand même un « bon coup », puisqu’il revenait souvent.


Ces parties de jambes en l’air m’ont totalement décomplexée. J’ai pris ma vie en main et, par la suite, j’ai accumulé les expériences. Les hommes ne me draguaient toujours pas, qu’importe, c’est moi qui les abordais, la plupart du temps avec succès, je n’avais plus froid aux yeux, ça les désarçonnait. Je n’avais peut-être pas un physique de star mais je savais ce que je voulais.


C’est ainsi que, quelques années plus tard, j’ai rencontré mon mari. Je me suis dit « Celui-là, il est pour moi ». Pas à cause de ses performances sexuelles, sur ce plan-là les différences entre les hommes ne sont pas vraiment flagrantes. Mais je me sentais bien en sa présence, il était calme, gentil, brillant, câlin, un brin rigolo. La suite m’a donné raison, je n’aurais pas pu faire meilleur choix.