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Temps de lecture estimé : 24 mn
17/01/25
Présentation:  Amie lectrice, ami lecteur, que l’esprit de Lewis Caroll continue à enchanter nos regards d’enfant s’émerveillant de tout et d’un rien !
Résumé:  En panne d’inspiration, une auteure entreprend un voyage initiatique où elle est confrontée à quatre épreuves mystérieuses. À travers ces défis symboliques, elle découvre les clés pour écrire son prochain roman et pour façonner sa destinée…
Critères:  #fantastique #personnages
Auteur : Maryse      Envoi mini-message

Concours : Récit d'après 4 images imposées
Les 4 cartes de la destinée

Vous retrouverez le règlement de ce concours ici.




Loin, très loin, dans un ailleurs sublimé


Quelque part dans l’immensité du multivers, par-delà les galaxies, se tenait un comité des Célestes Eminences (CE). Ces entités aux capacités cognitives fabuleuses avaient exploré toutes les dimensions parallèles, résolu l’ensemble des paradoxes temporels et déchiffré l’intégralité des mystères de l’univers. Ayant tout trouvé, l’ennui menaçait leur existence éternelle.



Patrix était réputé pour son imagination sans borne et son talent à écrire des récits captivants. Il avait à son actif plus d’histoires que le cosmos ne comptait d’étoiles.



La proposition éveilla la curiosité de l’assemblée. Certes, Patrix avait toujours des idées surprenantes, mais ses œuvres étaient si nombreuses que tous se demandaient s’il restait encore quelque chose à imaginer.



Il se tut un instant, laissant planer le suspense.



La proposition provoqua des remous. L’idée faisait peu à peu son chemin.



Un murmure d’assentiment parcourut le comité avant que les Célestes Éminences acquiescent unanimement. L’idée d’incorporer un électron libre dans le jeu leur plaisait ; un grain d’incertitude, un facteur d’incohérence rendraient la partie bien plus excitante.


Et c’est ainsi qu’Alice, sans le savoir, devint la pièce maîtresse du jeu le plus farfelu que l’univers ait jamais connu.




Chapitre 1 : Alice et les Cartes Mystérieuses


Alice ouvrit brusquement les yeux. L’incrédulité la pétrifia, en découvrant ce qui l’entourait : l’endroit était bien trop psychédélique pour être vrai ! On aurait dit une espèce de… bibliothèque vivante. Les murs semblaient faits de papier, les étagères bougeaient d’elles-mêmes et les livres flottaient dans l’air, s’ouvrant et se fermant sans cesse. Elle n’avait aucune idée de ce qu’elle faisait là ni même de qui elle était. Sa mémoire était aussi vide qu’un… aquarium sans poisson rouge qui nage en rond !


Tout ici défiait la raison, même les idées qui lui venaient à l’esprit, se dit-elle en s’efforçant de rester rationnelle. Rien de tout cela ne pouvait être vrai.


Elle se pinça le bras, espérant se réveiller. Mais la légère douleur qu’elle ressentit lui prouva qu’elle ne rêvait pas. L’inquiétude déferla en elle. Elle aurait voulu fuir. Mais pour aller où ? Cet endroit absurde n’offrait aucune issue.


Un miroir accroché au mur lui fit un clin d’œil éblouissant. Elle s’approcha prudemment, sentant sa raison vaciller.



Le miroir éclata de rire avant de révéler une image plus réaliste : une femme avenante, aux cheveux châtains mi-longs, encadrant un visage aux traits doux et harmonieux. Sa silhouette féminine se dessinait sous un caraco noir aux bretelles fines, dévoilant le haut de sa poitrine ronde ainsi que ses épaules et ses bras joliment galbés.



Mais cette apparence presque familière ne suffisait pas à la rassurer : elle n’arrivait toujours pas à savoir qui elle était ni ce qu’elle faisait là.



Toujours sous le choc, elle balaya la pièce du regard et remarqua quatre cartes en lévitation qui se mirent à luire pour attirer son attention. Quelle ne fut pas sa surprise, en constatant que chacune d’elles la représentait :


* La première, allongée sur un lit, une main posée sur un livre ouvert.

* La seconde, assise sur l’herbe en train de contempler un lac.

* La troisième, dans une foire agricole près d’un bœuf tirant une charrette.

* La quatrième de dos, marchant vers un cottage en briques rouges.


Alice fronça les sourcils. Que signifiaient-elles ? Était-ce une blague ? Un jeu bizarre ?


Tandis qu’elle s’interrogeait, une étrange sensation s’empara d’elle. C’était comme si les cartes tentaient de la reconnecter avec quelque chose d’enfoui en elle. Seraient-elles des fragments de souvenirs enfouis ? La clé de son amnésie ? Peut-être qu’en les décryptant, elle retrouverait ce qu’elle avait perdu : sa mémoire, son identité, son monde ?


Un grincement soudain la fit sursauter et elle releva la tête. La bibliothèque se tordait sur elle-même, une étagère s’inclinait. Un livre tomba à ses pieds avec un « plop » sonore. Intriguée, elle lut le titre : « Les Jeux du Pays des Merveilles pour les Nuls : Vade-Mecum pour Héroïnes Amnésiques ».


Stupéfaite, Alice ouvrit le livre. La première phrase se mit à resplendir : « Bienvenue dans le jeu, Alice. Tu as été choisie pour être la Joker dans une partie épique supra-galactique. À toi de jouer ! ».


La seconde phrase était encore plus déconcertante : « Retrouve ta mémoire avant les autres, sinon tu en seras à jamais privée ! ».


Alors qu’elle s’apprêtait à prendre connaissance de la troisième, les pages se mirent à défiler d’elles-mêmes, les lignes à onduler et les mots à s’éparpiller, rendant la lecture impossible.


Un vieil ouvrage au cuir usé flotta discrètement vers elle, avant de lui murmurer à l’oreille :



Au même moment, le manuel magique se referma puis s’envola, la laissant seule et démunie.


Le découragement s’abattit sur elle. Comment pourrait-elle s’en sortir sans souvenir ni aide pour la guider ? Les livres en apesanteur retombèrent comme une pluie torrentielle sur ses épaules. La bibliothèque se mit à tournoyer tel un vortex qui avalait tout sur son passage. Elle devait réagir, reprendre l’initiative. Dans un réflexe de survie, elle tendit les bras pour s’agripper à quelque chose, n’importe quoi, pourvu qu’elle ne soit pas aspirée. Ses doigts se refermèrent sur les cartes. La première de la pile était celle qui la représentait assise près du lac en train de méditer…




Loin, très loin, dans un ailleurs sublimé


Dans leur infini, les Célestes Éminences, en pleine effervescence, analysaient les premières réactions d’Alice, plongée dans les affres du doute et de l’incompréhension. Elles échangeaient fébrilement, affinant à la vitesse de la lumière leurs algorithmes probabilistes pour pronostiquer le futur vainqueur du jeu cosmique qui ne faisait que commencer.


L’enjeu était de taille : qui, parmi Patrix, Morbilia, Luxor et Cérébra gagnerait cette partie ? Les quatre avaient engagé une créature dans laquelle chacun avait insufflé une part de son essence.


Patrix misait sur l’inspiration sans limite de Chapolax. Même privé de mémoire, celui-ci brouillerait toute logique et subvertirait les règles pour l’emporter. Comment aurait-il pu en être autrement, alors que l’avenir n’est qu’une construction de l’imagination ?


Morbilia comptait sur l’instinct agile et créatif de Dinah. Tel un chat, cette dernière saurait retomber sur ses pattes en toute circonstance avant de triompher grâce à ses pirouettes et volte-face inattendues.


Luxor avait placé sa confiance en Lumen, qui n’avait pas besoin de souvenirs pour réagir comme la foudre. Comment son champion pourrait-il ne pas franchir la ligne d’arrivée en premier ?


Cérébra était convaincue qu’avec ses capacités d’analyse exceptionnelles, Sophiana pouvait faire abstraction du passé pour résoudre les énigmes du présent et surmonter l’absence de mémoire. Qui d’autre qu’elle pourrait gagner ?




Chapitre 2 : Alice et le Lac-Miroir


Alice se retrouva plongée au cœur de la carte qu’elle tenait en main. La sérénité du lieu tranchait singulièrement avec le tumulte dont elle venait de s’échapper par magie. Ici, tout semblait apaisé, d’une douceur presque irréelle.


Confortablement assise sur un épais tapis d’herbe verte, les jambes repliées, les genoux relevés, le buste légèrement en arrière sur ses bras tendus, elle contemplait pensivement le lac qui s’étendait devant elle. Malgré la brise légère qui caressait son visage, aucune ride ne venait troubler la surface de l’eau.


Un son répétitif, presque un murmure, parvint à ses oreilles. Elle tourna la tête sur la droite et s’aperçut qu’il provenait d’un arbre majestueux. Celui-ci secouait ses branches, dont le bruissement régulier évoquait le battement d’un métronome… comme un tic-tac perpétuel. Un brusque éclat de lumière lui fit tourner la tête de l’autre côté.


À quelques pas d’elle, sur sa gauche, une créature étrange ressemblant à un chat, ou plutôt à une chatte, se tenait debout, penchée en avant. Vêtue d’une robe longue qui changeait constamment de couleur, elle semblait se contempler dans l’eau. Son chapeau, orné de petits miroirs, reflétait les rayons du soleil dans toutes les directions.


Après les événements incroyables qu’elle venait de vivre, plus rien n’aurait dû la surprendre et, pourtant, Alice resta bouche bée. À la fois perplexe et méfiante, elle se mit à l’observer. Peut-être qu’en s’associant, pourraient-elles éclaircir plus facilement ce qui se passait dans cet univers insensé, s’interrogeait-elle.


Tandis qu’elle s’approchait non sans circonspection, l’ahurissante inconnue tourna son museau dans sa direction.



Ainsi se nommait-elle Alice, songea-t-elle. Le nom ne lui disait absolument rien.



Si Dinah n’avait pas de mémoire, comment se faisait-il qu’elle connaisse son nom ? se demanda Alice. On est plus à une énigme près, se dit-elle avant de chasser ce paradoxe de sa tête.


Intriguée, elle se pencha au-dessus du lac pour voir ce qui s’y passait. À son grand étonnement, son reflet n’apparut pas.



Surprise, elle recula.



La question fit écho en elle. Alors qu’elle méditait sur le sens de ces mots, l’onde se figea et son reflet se dessina progressivement. Son visage était le même que celui que lui avait renvoyé le miroir moqueur. En l’observant, elle réalisa que ce qu’elle voyait n’était qu’une fraction infime de ce qu’elle était réellement… Une minuscule part d’une Alice qu’elle ne connaissait pas encore.



Et soudain, tout s’illumina : elle comprit que, pour avancer, elle devait cesser de se concentrer sur les illusions extérieures pour commencer à explorer ses propres pensées et émotions. En se recentrant sur elle-même, elle ressentit une force intérieure croître, une force qui ne dépendait de rien d’autre que de sa propre volonté.


Voulant partager sa découverte avec Dinah, elle la chercha du regard. Celle-ci avait disparu. Seuls les miroirs de son étrange chapeau gisaient sur le sol. Venant de partout et de nulle part, la voix de la chatte se fit entendre, pleine de malice : « Merci Alice. Tu m’as bien aidée, mais je dois te laisser, car il faut que je retrouve la mémoire en premier ! »




Loin, très loin, dans un ailleurs sublimé


Captivées, les Célestes Éminences observaient la scène. De brefs éclairs crépitaient au-dessus d’eux, preuve de leur intense concentration.



Morbilia ajouta avec une énergie contenue :



Luxor murmura, en observant pensivement la sphère lumineuse entre ses mains :



Enfin, Cérébra, analysait la partie avec une froide réflexion.




Chapitre 3 : Alice et le Taureau de la Peur


Après l’épisode du lac, Alice marchait sans savoir où elle allait. Avançait-elle ou errait-elle en cercle ? Le doute l’assaillait. N’avait-elle pas appris que les apparences pouvaient être trompeuses ? Peut-être se mystifiait-elle en suivant ce chemin incertain.


Au fur et à mesure que la confusion embrouillait ses pensées, une brume de plus en plus épaisse l’entourait, amoindrissant ses perceptions. Parfois, des images floues et des bruits indistincts surgissaient brièvement, comme des réminiscences oubliées. Le tic-tac incessant qui résonnait dans sa tête accentuait son marasme. Pour s’occuper l’esprit, elle pensa aux quatre cartes mystérieuses. En visualisant celle de la foire, une sensation de vertige la saisit. Tout vacilla, puis s’éclaircit : elle se retrouva au milieu de la scène.


L’air était chargé d’odeurs champêtres, le soleil radieux. Des barnums colorés et des stands ornés de drapeaux délimitaient une place centrale où un bœuf tirait une charrette sous le regard d’un paysan en bleu de travail. Des passants, certains avec des enfants, observaient la scène joviale.


Soulagée, Alice se détendit. Mais alors qu’elle avançait, elle remarqua que tout était figé : aucun son, rien ne bougeait comme si le temps lui-même s’était arrêté. Avant qu’elle puisse y réfléchir plus longtemps, Dinah apparut comme par enchantement et lui tendit un petit miroir, un sourire énigmatique aux lèvres.



Avant qu’Alice ne puisse répondre, Dinah disparut aussi soudainement qu’elle était apparue. Au même moment, un lapin de la même blancheur que la tente derrière laquelle il se cachait surgit. Son pelage était iridescent et ses longues oreilles luminescentes semblaient capter les rayons de soleil. Il paraissait effrayé.



Le lapin frissonna peureusement en jetant des regards craintifs dans tous les sens.



Elle jeta un regard en coin à l’animal placide. Aussitôt, celui-ci se mit à trembler pour changer d’apparence. Sa silhouette se déforma, pour révéler un taureau monstrueux aux yeux flamboyants et aux cornes effrayantes. Une bête dangereuse ! La panique l’assaillit et elle réalisa que tous les gens présents étaient paralysés par la peur.



Lumen secoua la tête en signe d’ignorance.



Alors que la bête se préparait à s’élancer, cornes baissées, Alice se souvint du miroir. Ce cadeau, de prime abord anodin, pourrait les aider.



Le lapin acquiesça, ses oreilles plus brillantes.



Elle leva le miroir et, captant un faisceau de lumière, le projeta directement dans les yeux pleins de fureur. L’animal rugit de douleur. Il secoua la tête, cherchant en vain à retrouver la vision.



Ils s’élancèrent dans un chemin adjacent, échappant à la bête. Derrière eux, le taureau meugla une dernière fois avant de retrouver lentement son apparence de bœuf.


Soulagée, Alice, reconnaissante, remercia le lapin.



Lumen sourit, ses longues oreilles luisant de plaisir.



Après un clin d’œil complice, Lumen se dématérialisa en un foisonnement scintillant avant de disparaître définitivement, laissant Alice seule, mais plus déterminée que jamais : sa quête venait de franchir une nouvelle étape.



Loin, très loin, dans un ailleurs sublimé


Patrix éclata d’enthousiasme, illuminant l’espace d’un arc-en-ciel éblouissant :



Morbilia, toute en demi-clarté, s’enorgueillit :



Luxor, perplexe, jouait avec des rayons enchevêtrés :



Cérébra, dans un halo clair-obscur, conclut :




Chapitre 4 : Alice et le Cottage des Souvenirs


Sur le point de se remettre en route, un chemin de lumière s’ouvrit devant elle. Persuadée que Lumen l’avait tracé pour la guider, elle s’y engagea sans hésiter.


Alors qu’elle marchait, le tic-tac resurgit, s’intensifiant à mesure qu’elle avançait. Ce tic-tac qu’elle avait entendu pour la première fois près du lac, comptait-il le temps restant ? À chaque battement, le sentier devenait plus éthéré, se recouvrant de ronces et d’ombres inquiétantes. Perdue et désorientée, Alice trébucha sur une racine et tomba à genoux.


Levant les yeux, elle distingua alors, émergeant de la pénombre, le contour d’un cottage en briques rouges, flanqué de deux tourelles encadrant la façade à pignon pointu. Un balcon surplombait l’entrée, son garde-corps en fer forgé représentait des plumes d’écriture entrecroisées. Les fenêtres aux bordures blanches et disposées avec symétrie conféraient au bâtiment une impression de calme et d’ordre. Patiné par le temps, il dégageait un charme désuet.


En s’approchant, Alice ressentit comme un appel intérieur, à peine perceptible, mais insistant. Avait-elle d’autre choix que de s’y rendre ? Bien qu’hésitante, elle se dirigea vers le perron en pierre, dissimulé par un arbuste touffu.


Dès qu’elle franchit la porte, une lumière douce l’enveloppa. L’atmosphère était feutrée, emplie d’un nuage diaphane aux reflets bleutés. L’air, chargé d’une odeur de vieux papier et de cire fondue, rendait le lieu à la fois apaisant et mystérieux. Le silence régnait, troublé seulement par un léger bruissement de pages tournées. Soudain, une voix posée se fit entendre.



Elle tourna la tête et aperçut une silhouette vaporeuse entourée de lettres évanescentes qui glissait en suspension dans l’air. Son visage aux traits humains resplendissait de sagesse. Son corps métamérisé rappelait celui d’une chenille géante, mais avec des contours vagues et fondus.



Alice fronça les sourcils, tentant de saisir ce que cela signifiait. Alors qu’elle s’apprêtait à poser une question, Sophiana la coupa gentiment :



Celle-ci se figea brusquement lorsqu’un petit tourbillon rose pâle, probablement un souvenir, se mit à s’agiter, percutant ses voisins et semant le désordre autour de lui.



Sa teinte violacée trahissait l’ampleur de son désarroi. Elle semblait dans l’expectative la plus complète. Alice, poussée par un instinct inné, attrapa délicatement la légère volute turbulente entre ses deux mains et la berça doucement. Alors qu’elle la serrait doucement contre elle, elle ressentit une vague de chaleur, comme une manifestation de tendresse oubliée. Une fois cette dernière calmée, elle la laissa glisser entre ses doigts entrouverts.



La teinte de Sophiana passa progressivement du violet au bleu pâle, traversant successivement toutes les nuances, signe de l’intensité de sa réflexion rationnelle, dépourvue de toute émotion.



Sophiana guida Alice à travers les couloirs sinueux du cottage, remplis d’images animées, translucides et floutées, des scènes révolues, parfois en partie effacées.


Elle finit par s’arrêter devant une porte entrouverte d’où émanait une lumière douce.



Alice prit une profonde inspiration avant d’avancer. La pièce était remplie de flocons argentés flottant dans les airs. Lorsqu’elle en toucha un du bout des doigts, il éclata en une myriade d’images et de sons. Chaque fois qu’elle tentait de les saisir, ils se dissipaient. Son désappointement grandissait, et avec lui, le découragement qui la poussait à renoncer.



Alice se concentra. Petit à petit, un tableau imprécis se constitua. Elle se revit, plongée dans la lecture d’un grimoire aux pages jaunies par le temps. Celui-ci capta toute son attention. Avec ses symboles cabalistiques, ses enluminures dorées et ses illustrations énigmatiques, il semblait détenir des secrets capitaux.



Alice fronça les sourcils. Elle s’accrocha à cette réminiscence, cherchant à en percer le sens. Mais les images se brouillèrent, ne laissant derrière elles qu’un sentiment d’urgence.



L’image d’elle-même, allongée sur un lit, lisant le mystérieux grimoire, apparut. Elle comprit alors que la prochaine épreuve l’attendait, une épreuve au cœur de ses souvenirs.



Loin, très loin, dans un ailleurs sublimé


Patrix s’embrasa d’excitation, et l’espace tout entier frissonna sous l’impact de sa joie sidérale :



Morbilla, pensive, faisait lentement tournoyer des noyaux de planète phosphorescents entre ses doigts.



Luxor, jouant avec une petite boule de lumière pure qui apparaissait puis disparaissait entre ses paumes comme une illusion, renchérit :



Cérébra observait l’avancée du jeu cosmique avec un détachement tout analytique. Sa voix basse semblait se fondre dans le silence du cosmos.



Elle marqua une brève pause avant d’ajouter plus doucement encore :




Chapitre 5 : Alice et le Grimoire de la Révélation


Allongée sur le côté, le buste relevé en appui sur un coude, la paume supportant son visage, Alice s’escrimait pour décrypter le Grimoire que sa seconde main maintenait fermement ouvert sous ses yeux harassés.


Régulièrement, sans pouvoir l’empêcher, une page se tournait inexorablement comme pour lui rappeler que le compte à rebours avait commencé, accroissant d’autant sa peur de ne pas être au rendez-vous de sa destinée.


Malgré ses efforts désespérés, ses prières muettes et ses injonctions silencieuses, le livre refusait de se dévoiler. Les mots étaient excités comme des puces : ils s’éparpillaient et se dérobaient lorsqu’elle tentait de les lire.


Pourtant, depuis ses premières découvertes dans la bibliothèque vivante, jusqu’aux rencontres invraisemblables avec des personnages dont elle ne comprenait pas encore le rôle, tout la poussait vers ce livre à la fois mystérieux et ésotérique dont elle n’avait pas encore trouvé la clé de lecture. Tout ce qu’elle avait vécu, chaque épreuve traversée, tournait dans sa tête comme un puzzle impossible à assembler.


Elle visualisa la dernière carte, celle qui la représentait, lisant ce maudit Grimoire. L’image l’obsédait. Elle dégageait une quiétude contrastant singulièrement avec la tourmente qui l’agitait.


Le Grimoire semble se jouer de moi, se lamenta-t-elle découragée. Serais-je condamnée à errer indéfiniment dans ce monde absurde ?


Se levant pour remettre de l’ordre dans ses pensées, elle remarqua une coïncidence : le lit qu’elle venait de quitter était identique à celui de la carte. Était-ce un signe ?


L’idée d’un engrenage tournant sans fin, comme un mouvement perpétuel, s’imposa à son esprit…


L’étrange tic-tac résonna soudain dans l’air. Elle pivota sur elle-même et découvrit avec stupéfaction un personnage extravagant qui portait un haut-de-forme orné de plumes et recouvert de montres à gousset. Ses vêtements changeaient de texture et de motif à chaque tic-tac.



Il éclata de rire, sa veste se bariolant de teintes dissonantes. Il attrapa son couvre-chef qu’il agita au-dessus de la tête en chantonnant et en dansant :


« Tic-tac, faut-il marcher droit,


Tic-tac, ou bien virevolter,


Qui sait ? Tout est à oser ! »


Trop épuisée pour s’amuser de ce spectacle, Alice le supplia d’arrêter.



Chapolax agita les bras d’un geste pompeux.



En un tour de main, il fit apparaître une nuée de clés flottantes qui se rassemblèrent en une seule gigantesque. Puis, soudain, son visage changea d’expression.



Alice, presque machinalement, suggéra :



D’un geste solennel, Chapolax fit s’ouvrir le Grimoire dans un tourbillon de pages volantes. Puis, d’un claquement de mains, il fit apparaître les trois autres créatures.


Dinah s’approcha la première, ses yeux sombres et imprévisibles plus doux que jamais, en tenant entre ses mains un fragment de miroir, scintillant comme une étoile.



Le fragment se joignit au grimoire, fusionnant avec lui et illuminant une page qui devint toute blanche.


Lumen, en un éclair, disparut de sa place et se rematérialisa devant elle, ses longues oreilles luminescentes captant les derniers rayons de lumière filtrant à travers les vitraux de la pièce.



Un autre fragment, cette fois teinté d’or, rejoignit le grimoire, effaçant l’écriture d’une autre page.


Sophiana, toujours aussi nébuleuse, glissa doucement vers elle, en tenant une plume d’écriture.



Elle tendit la plume à Alice, qui l’accepta avec reconnaissance.



Puis, redevenant grave, il poursuivit :



Il ouvrit sa main. Un dernier fragment, un éclat de lumière kaléidoscopique, s’éleva doucement de sa paume, dansa dans l’air avant de s’intégrer au grimoire.


Le livre, désormais complet, émit une douce lueur, et les pages se mirent à tourner d’elles-mêmes, révélant une blancheur immaculée, prêtes à être remplies.


Alice sourit, en état de grâce. Tout s’était ordonné, tout était devenu clair. Elle comprenait enfin la signification des quatre cartes et les synergies qu’elles permettaient. Tout comme le véritable sens de sa quête, ou plutôt de son pèlerinage à la source d’elle-même.


Le tic-tac s’était tu, car elle avait appris que le temps écoulé n’avait pas d’importance. Ce qui comptait vraiment, c’était ce qu’elle ferait de celui qui lui restait. Quant au grimoire, il n’avait été là que pour lui révéler que c’était à elle d’écrire son propre destin. Les pages vierges et la plume d’écriture l’invitaient à le faire, avec les dons précieux qu’elle avait en elle : l’imagination, la créativité, l’intuition et la réflexion.


Le grimoire émit un dernier éclat avant que tout ne devienne noir…



Loin, très loin, dans un ailleurs sublimé


L’euphorie était à son comble. Une agitation cosmique sans précédent résonnait dans l’univers. Un tel événement ne s’était pas produit depuis le big-bang originel ! Le dénouement du jeu avait échappé à toutes les prédictions. L’impensable devenait réalité.


Les Célestes Éminences laissaient éclater leur enthousiasme en un tohu-bohu de formes, de couleurs et de sons discordants. Des idées fusaient, se croisaient, s’effaçaient pour faire place à des concepts plus audacieux. Et pourtant, le mystère demeurait.


Patrix ne tenait plus en place.



Luxor, rayonnant d’intuition, se réjouissait. Même lui n’aurait pu prévoir une telle issue.



Cérébra, dans un calme réfléchi, conclut :



Un silence empreint de respect s’installa. Puis Patrix reprit allègrement :



Les Célestes Éminences frémirent. L’imprévu annonçait une nouvelle ère d’aventures cosmiques sans précédent !




Conclusion : le réveil d’Alice


Une douce torpeur l’enveloppait. Elle n’osait ni bouger ni ouvrir les yeux, cherchant à prolonger cet état de paisible engourdissement qui précède le réveil. Totalement détendue, elle se recroquevilla plus confortablement sous la couette, savourant cet instant de parfaite quiétude.


Alors qu’elle se laissait bercer par cette délicieuse somnolence, une voix harmonieuse et familière, presque solennelle, perça imperceptiblement le voile de sa conscience. C’était celle de Sophiana :



Les mots, telles des caresses légères, mais insistantes, la ramenèrent lentement vers la réalité. Lorsqu’elle ouvrit les paupières, la lumière douce du matin filtrait à travers les rideaux. Elle reconnut sa chambre, les murs familiers, la sensation réconfortante de son lit. Un sourire teinté de nostalgie s’esquissa sur ses lèvres tandis que les derniers fragments de son rêve se dissipaient.


Une nouvelle énergie la traversait, portée par l’excitation de sa prochaine aventure, celle qu’elle allait bientôt écrire. Elle s’éveillait avec les idées claires, impatiente de rédiger son texte pour le concours d’écriture. Ce rêve, bien plus qu’une simple illusion, lui avait offert des inspirations précieuses qui allaient transformer sa manière d’écrire.


Elle ressentait encore l’écho des émotions, des pensées et des leçons tirées de son voyage au Pays des Merveilles. Ces expériences, bien plus réelles qu’un simple rêve, lui avaient appris que l’imagination, la créativité, l’intuition et la réflexion étaient aussi des clés indispensables dans le monde tangible dans lequel elle allait s’immerger avec sérénité.


Pendant un instant, la plume d’écriture, plus rayonnante que jamais, flotta gracieusement devant ses yeux…


Avec un dernier sourire, elle se leva, pleine de détermination. Son prochain récit l’attendait… tout comme son avenir qu’il lui revenait d’écrire !