n° 22981 | Fiche technique | 7742 caractères | 7742 1347 Temps de lecture estimé : 6 mn |
23/03/25 |
Présentation: Cette collection revisite ces archétypes intemporels de façon plus ou moins érotique, entre tension et abandon. | ||||
Résumé: Un bistrot, trois piliers de comptoirs, une grande gueule… et Chloé. | ||||
Critères: #théâtre #humour #pastiche #société #nonérotique #vengeance #personnages | ||||
Auteur : L'artiste (L’artiste) Envoi mini-message |
Collection : Les clichés ont la vie dure |
Un comptoir, trois mecs un peu chargés, un ego qui mousse plus vite qu’un demi-pression… et voilà un cliché servi bien frais.
Être sexiste, c’est croire que ta bite donne le tempo, alors qu’elle connaît même pas le refrain !
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Il y avait des soirs comme ça, où le bistrot du coin devenait le trône d’un roi autoproclamé. Et là, c’était Aldo. Bien campé sur son tabouret, une main agrippée à son Pastis, l’autre virevoltant dans de grands gestes, il régnait sur la conversation. Et quelle conversation !
Autour de lui, ses fidèles sujets – Dédé et Rico – déjà un peu ivres opinaient du chef, l’œil brillant de bière et de complicité.
Les anecdotes grasses fusèrent, et Aldo, galvanisé, leva son verre en signe de triomphe.
Les regards admiratifs de ses potes l’encourageaient à poursuivre. Et il aurait continué, encore et encore, s’il n’y avait pas eu ce regard, brûlant, fixé sur lui depuis le bout du comptoir.
Assise devant un ballon de vin rouge, Chloé suivait ce grand moment de philosophie masculine d’un air fasciné. Gardant un calme olympien, elle but une dernière gorgée, reposa avec lenteur son verre qui claqua malgré tout sur le bois verni, puis se leva. Ses talons sonnèrent le glas de cet échange de haute volée, tandis qu’elle s’avançait, verrouillée sur sa cible.
Les trois compères la regardèrent. Aldo, flatté, s’adossa au bar, bombant le torse. Elle s’approcha encore, puis, du bout des ongles, effleura sa main.
Aldo eut un frisson de plaisir, puis ricana :
Aldo rougit comme une pivoine, tout en jetant un regard jouissif à ses potes.
Elle se cambra légèrement, minaudant, mais ne recula pas.
Aldo faillit défaillir.
Elle pianota rapidement un message.
« Alice, ramène-toi au bar. J’en ai trouvé un gratiné. »
Aldo but une longue gorgée, comme pour masquer la fine pellicule de sueur qui commençait à perler à la racine de ses cheveux.
L’homme piégé plongea sans hésiter les yeux dans le décolleté profond qu’elle lui offrait, et ne put s’empêcher d’émettre un léger sifflet admiratif.
Elle le fixa, un sourire carnassier aux lèvres, puis ajouta, d’une voix basse et sucrée :
Du bout de l’index, elle joua avec les poils de son torse qui dépassaient du col de sa chemise.
Aldo déglutit, sans pour autant décrocher son attention de la poitrine généreuse de Chloé, mise en valeur par une cambrure étudiée qu’elle accentua, ses lèvres à peine entrouvertes.
Elle lui offrit en retour un regard de biche brûlant.
Aldo se redressa d’un coup, tel un général sur le champ de bataille.
Dédé, les joues rouges d’alcool et d’excitation, tenta une imitation hasardeuse :
Et alors qu’Aldo s’apprêtait à renchérir, Chloé posa un doigt sur ses lèvres.
Ding, ding.
La clochette du bar tinta. Même le mousseux dans la bière de Dédé s’arrêta de pétiller.
Une femme. Pas très grande. Élégante. Des talons de juge d’instruction. Un regard à faire taire une chorale de rugbymen.
Mais à mesure qu’Alice approchait, son sourire se figea. Un battement de cils. Une étincelle de doute. Puis…
Aldo releva la tête… et blêmit à son tour.
Chloé, elle, resta un instant sans voix… les observant chacun leur tour.
Dédé coinça un rot. Rico tenta de se fondre dans le mur. Aldo se décomposa.
Alice le fixa, des éclairs dans les yeux.
Puis, elle se tourna vers sa copine :
Alice inspira, profondément. Puis sa voix claqua plus qu’un fouet dans une écurie.
Il ouvrit la bouche, puis la referma, puis l’ouvrit de nouveau. On aurait dit une carpe sous anxiolytiques.
Chloé pouffa. Rico se fit tout petit et regarda ses pieds. Dédé hoqueta.
Alice attrapa le téléphone d’Aldo. Il paniqua.
Elle mit le haut-parleur. Le message vocal qu’elle lui avait laissé plus tôt résonna dans le bar :
Mon nounours adoré, n’oublie pas de brosser Pistache, il a des nœuds au popotin. T’as du saumon vapeur dans le frigo. Pense à faire la vaisselle. Gros câlins. Ton petit chaton.
Explosion de rires générale. Sauf, évidemment, du couple en crise.
Plus un bruit. Silence absolu. Même le Match PSG – l’OM diffusé sur l’écran géant se mit en pause.
Vindicative, Alice conclut, enfonçant le clou :
Et elle tourna les talons.
Chloé leva son verre, hilare :
Dédé se prit la tête entre les mains. Rico éternua dans sa bière. Aldo, résigné, trinqua aussi.