n° 23159 | Fiche technique | 13460 caractères | 13460 2256 Temps de lecture estimé : 10 mn |
27/06/25 |
Présentation: Un moment de lecture peut apporter de nombreux bienfaits inattendus. | ||||
Résumé: Un moment de lecture peut apporter de nombreux bienfaits inattendus. | ||||
Critères: #transport fh inconnu train fdomine piquepince | ||||
Auteur : GerryJames Envoi mini-message |
Le livre était mauvais, c’était indiscutable. La couverture m’avait attiré au kiosque de la gare. « La philosophie des Lumières nous éclaire-t-elle encore ? » s’interrogeait un bellâtre pensif sur une reliure couleur. Les rides de son front laissaient croire à une certaine profondeur de réflexion, qui, après la lecture laborieuse des vingt premières pages n’émergeait toujours pas.
Heureusement le train était doucement sorti de Paris au travers d’un paysage lentement bucolique, dans une fin d’après-midi au soleil larmoyant. La lumière vibrait encore sur ces terres repues de chaleur. Mon regard divaguait bienheureux dans ce ciel d’été fatigué alors que les villages s’égrainaient maintenant en accéléré. Puis, comme deux oiseaux dans une collision céleste, je heurtais le regard furtif de mon unique compagnon de fortune dans ce compartiment première classe Paris – Brive. Plutôt jeune et menue, peut-être étudiante sur le tard, coiffée à la garçonne, elle portait une suite de boucles d’oreilles sur le haut des lobes. Ses cheveux ras formaient un duvet brun le long de sa fine nuque pour retomber en mèches sauvages sur un regard d’un bleu sombre, où je décelais la petite flamme dansante de la malice.
D’où était-elle ? Où allait-elle ? Vers quel destin ce train l’emportait-il ? Dans la précipitation de leur fuite, mes yeux s’entravèrent encore sur un discret tatouage qui indiquait « rêve toujours » en italique sur le haut de son décolleté, sans que l’on puisse déterminer s’il s’agissait d’un appel au rêve ou d’un avertissement pour les regards indiscrets. À moins que ce ne soit un appel à l’autodérision, car sa poitrine semblait modeste et d’ailleurs parfaitement invisible malgré deux boutons dégrafés.
Je souris malgré moi, car tout en elle indiquait le paradoxe de la jeunesse, un questionnement de l’être. Habillée d’un jean clair savamment déchiré au niveau des genoux, laissant pleurer quelques fils, et d’une chemise d’un bleu clair un peu fané, elle soignait le style insolent d’une gamine insaisissable. Alors, son regard plongea droit dans le mien comme si je venais de lui barrer la route.
Je ne rêvais pas. La voix qui m’invectivait était pourtant tiède et réconfortante, comme celle d’une amie m’aidant à me relever d’un mauvais pas. La jeune femme exultait clairement dans l’antagonisme et les faux-semblants.
Ignorant la provocation, je pris un peu de hauteur et m’enquis avec détachement :
Pris de court par ses piqués incisifs, je ne voulais sembler ni surpris ni mal à l’aise. Voilà un bon exercice pour te faire respecter sans trop en faire, me dis-je. Mais ma voix avait déjà répondu, hâtivement et sans la gravité dont j’aurais aimé l’affecter.
J’allais de nouveau répondre trop vite quand un sourire illumina pour la première fois son visage, comme pour dire « mouche ! » lui conférant soudain une douceur insoupçonnable quelques secondes plus tôt. Elle était redevenue la gamine espiègle et ses yeux brillaient maintenant avec bienveillance. Elle nous avait amenés là où elle le souhaitait, imposant à l’étranger que j’étais une domination souriante. Et là encore elle maniait le paradoxe dans le verbe, s’adressant à un homme de deux fois son âge comme à une copine de fac, mais dépréciant instantanément mes commentaires sur un livre qu’elle n’avait pas lu, avec un jujitsu verbal, mêlé de candeur et grâce qui eurent aussitôt raison de ma carapace.
Avait-elle un fardeau sur la conscience et cherchait-elle à s’épancher d’une situation personnelle après quelques détours pour la forme ? Étais-je en train de passer le test d’une écorchée vive qui me trouvait finalement sympathique, et qui bientôt allait m’interroger sur ce qui lui tenait réellement à cœur ? À moins que je ne sois en train de réussir brillamment le concours de l’idiot du wagon, tourné en bourrique par une androgyne à la peau lisse et légèrement tatouée. Non, décidément, je tombais dans un narcissisme ridicule. Sa recherche d’emploi devait tout simplement l’encourager à explorer toutes les pistes disponibles. Le destin a des chemins invisibles et peut-être allait-elle arriver au douloureux sujet de la quête de son devenir.
Brisant aussitôt ma rêverie, elle se mit à disserter sur ses études de design, accomplies sans passion, son appétit insatiable de voyages, et de son manque de moyens financiers pour réaliser ses rêves. Ses mains allaient et venaient meublant l’espace entre nous. Sa peau si fine faisait ressortir le rouge vif de ses lèvres et ses yeux clairs qui toujours plongeaient dans les miens quand elle ponctuait ses phrases. Elle aimait provoquer avec lyrisme, citant Houellebecq et Amandine Petit dans une même phrase. Sa chemise davantage entrouverte alors qu’elle s’agitait n’offrait toujours aucune ébauche de poitrine à mon regard incontestablement distrait, et j’écoutais avec plaisir ses réflexions sans pourtant parvenir à me fixer sur leur contenu. J’étais plutôt à l’écoute entière de son être, de ses mouvements, de sa chantante diction, de ses couleurs et de sa chaleur humaine maintenant embrasant notre atmosphère.
Je me réveillai sec. Et ma voix encore une fois s’empala sur un piteux :
Ce fut tout ce que je pus articuler. Honteux, tout mon corps s’emballa comme sous une averse glacée, mais cette fois, ma tête prit de justesse le dessus. Elle ne devait pas tomber dans de tels extrêmes. Ni moi ! C’était ridicule ! Elle me dévisageait toujours, puis ses yeux descendirent lentement, suivant les formes de mon corps jusqu’à mes pieds tapotant le sol, ne laissant aucun pli échapper à son regard brillamment amusé.
Puis elle clarifia narquoise :
Et puis elle attendit en silence, sans sourire, avec toujours au fond des yeux cette imperturbable bienveillance. J’étais interdit. Elle proposait de m’acheter. Ce scénario ne figurait pas dans mon imaginaire pourtant débridé. Elle se leva. Mon corps était figé dans une excitation contradictoire avec mon état d’âme. Elle s’assit face à moi, sur mes genoux, et m’embrassa tendrement sur les lèvres. Puis je sentis son haleine caresser mes oreilles et mes paupières. Elle se délectait de la commissure de mes lèvres, et passait en revue chaque pore de mon visage, le faisant pivoter du bout des doigts fins, avec rires et baisers. « A kiss is a lovely trick designed by nature to stop speech when words become superfluous », a dit Ingrid Bergman.
Puis elle tira le rideau du compartiment :
Je déboutonnais ma chemise, elle me l’ôta. Puis, résolue, elle me fit lever, déboucla ma ceinture et sortit mon sexe en érection qu’elle avala goulûment après avoir lâché :
Alors, je posais mes mains noueuses sur sa fine chevelure. Cette nuque menue maîtrisait mon corps par son rythme onduleux alors que des canaux de plaisir inconnus s’ouvraient le long de mes jambes. Je tressaillis, comme subitement rempli d’une sève nouvelle.
Je voulus lui ôter sa chemise, mais elle écarta ma main :
Elle me fit asseoir, enleva mes chaussures et mon pantalon. Ses yeux plongèrent à nouveau dans les miens. Un univers de malice scintillait dans les siens. Je lui appartenais complètement. Elle le savait. C’était comme elle voudrait. Je ne connaissais même pas son nom. Elle saisit de nouveau mon pénis.
Elle déboutonna son jean qui aussitôt tomba à ses pieds. Elle ne portait pas de sous-vêtement, et j’eus tout juste le temps d’apercevoir une fine toison, car elle poussa mon cou de sa main droite, renversant ma tête vers le dossier du siège, puis me maintint en place. Il ne lui restait que sa chemise. Je la voulais nue, et fis mine de défaire un bouton, mais, à nouveau, elle fit « non » de la tête.
Son regard toujours plongeant devint impénétrable. Elle enfonça doucement son ventre sur mon sexe dressé comme un monument à l’amour, et nos chaleurs se mêlèrent dans un échange doux et liquide. Elle se laissait pénétrer lentement alors que ses cuisses s’écartaient avec des vacillements du corps.
Ses yeux maintenant levés vers le plafond. Et mon sexe procéda doucement au plus profond, la remplissant bientôt complètement, alors qu’elle montait et descendait en silence, les mains crispées sur ma nuque. Puis elle me fixa. Je sentais son plaisir par tous mes sens. Nous n’étions plus qu’un dans l’avalanche de nos corps. L’alchimie nous fusionnait. Le plaisir se dessina puis se figea sur ses lèvres et son souffle monta avec le mien.
Elle s’appuyait toujours sur moi, tantôt pressant mes épaules, tantôt étranglant mon cou, ou tirant mes cheveux quand des soubresauts la prenaient. Elle lâcha un premier râle de jouissance.
Un orgasme violent la secoua. L’épicentre était cet espace créé à deux et qui disparaît soudain quand le désir est satisfait. Cet espace que l’on peut temporairement confondre avec celui de l’âme, tant la jouissance est intime, mais qui n’est pourtant qu’animalité pure. Quand il jouit, l’humain se sent enfin exister dans son sang et son corps. Cette conscience humaine est prodigieuse, mais fugace. Et la sérénité créée reste tout autant éphémère. Elle m’embrassa alors avec une bonté infinie, comme si je venais de résoudre l’équation quadratique de sa vie. Puis elle défit sa chemise qui tomba à même le sol. « Rêve toujours » était devenu mon rêve de toujours. Ses petites pointes surmontées de tétons rouge vif fortement érigés, revigorèrent mes ardeurs. Ses seins étaient fermes et menus, je les embrassais avec passion.
Et elle se retourna. Ses fesses se présentèrent à ma bouche et je n’en oubliais aucun recoin. Je léchais avidement chaque orifice offert alors qu’elle appuyait ses bras sur le siège d’en face, avec des petits cris d’oiseau, et après un nouvel orgasme, elle se pressa gentiment vers mon visage jusqu’à nouveau m’emprisonner contre le dossier.
Et ma langue entra comme elle le souhaitait, avec des allers-retours précipités, pendant que mes mains tenaient fermement ses cuisses en place, les pétrissant comme de l’argile. Je pris fermement possession de son cul avec ma langue et la maîtrisait maintenant avec des mains revanchardes. Elle jouit dans des trémoussements violents, qui se succédaient sans prévenir. Puis elle s’assit sur mes genoux. Sur le bas de son dos, à hauteur du maillot, un autre tatouage disait « ton regard m’appartient ». J’en profitais pour à nouveau caresser les pointes de ses seins qui me rendaient fou.
Et elle baissa ses fesses, jusqu’à s’empaler sur mon sexe, son petit cul montant et descendant à son gré, maintenant, avec le dessein évident, mais me trompais-je, de me faire exploser en elle.
Elle maintenait une cadence musclée, ferme irrésistible, et je sentais monter en moi l’animal ; je m’agrippais à son ventre, à sa chatte, à ses tétons de vestale.
Et elle continua, son petit cul blanc enserrant mon sexe de plus en plus fort alors que je tentais de mordre le duvet de sa nuque.
Elle jouit à nouveau, cette fois, mon flot gicla longuement au plus profond d’elle par saccades tièdes.
Nos sexes trempaient dans l’ivresse de la jouissance, nous flottions comme des ombres de nous-mêmes. Je la sentais emplie de moi, de milliards de moi, ses mains appuyées sur les miennes et sa tête renversée sur mon épaule, nos deux corps liquéfiés dans la sueur et les sucs de l’amour. Nos souffles étaient maintenant calés dans la douce cadence du decrescendo amoureux.
Elle souffla :
Et puis :
L’annonce de l’arrivée prochaine de Brive interrompit ma réponse. Mais elle m’empêcha de m’habiller immédiatement, serrant mon corps nu de toutes ses forces contre le sien. Les pores de nos peaux s’embrassaient à leur tour dans une fusion inachevée. Le bruit de pas dans le couloir m’inquiétait. Elle s’en foutait.
Je m’absentais rapidement à la salle de bain avant que le train n’entre en gare, histoire de dissimuler un peu l’émoi du voyage, mais quand je revins, elle n’était plus là. Dans mon livre de philo à 18 euros, il y en avait cinquante de plus et un petit mot griffonné à la hâte « dans douze mois, même jour, même heure, même compartiment, mais meilleur livre. Aucun retard toléré. »