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Temps de lecture estimé : 15 mn
03/10/00
Résumé:  Un soir d'hiver et de froid, Philippe amateur doué de piano, entend de la musique jazz provenant d'un bar. Il décide d'entrer prendre un verre...
Critères:  fh caférestau intermast pénétratio
Auteur : Jean Rolle  (Jean Rolle, écrivain débutant)      

Série : Philippe et Marie

Chapitre 01 / 03
Philippe et Marie 1 : la rencontre


Vers cinq heures, la pluie glacée qui tombait depuis le matin se transforma peu à peu en neige comme la nuit tombait. Le froid descendait les rues tandis que les réverbères s’allumaient les uns après les autres, baignant l’obscurité d’une lueur orangée. En sortant de la mairie, à sept heures passées, Philippe s’emmitoufla dans son épais manteau. Au sol, la neige s’était déposée en tapis blanc, ça et là encore détrempé. Dans quelques heures, tout aurait gelé. En se dirigeant vers son hôtel, les bruits assourdis de la circulation, les flocons qui descendaient dans la lumière des phares et des réverbères adoucissaient la sensation de froid humide qui s’infiltrait encore par intermittence dans l’ouverture de son col et lui donnaient l’impression d’être dans un cocon.


Sa réunion ne déboucherait probablement sur rien. Architecte, il avait soumissionné son projet pour la rénovation du complexe sportif de la ville. Mais tout au long de l’entretien, le directeur de l’équipement n’avait quasiment pas desserré les lèvres, tandis que le jeune adjoint du maire, chargé de l’urbanisme, n’avait cessé de lui parler du projet de l’architecte japonais, un de ses concurrents. À l’évidence, le choix était déjà fait avant son arrivée, une signature internationale devait probablement être préférée pour des raisons de prestige. Bah, il avait l’habitude, et l’inverse s’était produit quand il avait eu le contrat de la gare de Séoul, alors qu’un projet coréen lui semblait objectivement meilleur que le sien.


Philippe pressa le pas vers son hôtel. La neige détrempée et glacée s’insinuait dans ses chaussures, et ses pieds s’engourdissaient douloureusement. Les rues étaient illuminées par les décorations de Noël des magasins, une profusion de guirlandes dorées, d’ampoules clignotantes, de branches de sapin. Le hall de l’hôtel, surchauffé et brillamment éclairé, lui fit ressentir plus fortement l’humidité qui avait pénétré tout son corps. Ses bagages avaient été livrés depuis l’aéroport le matin. Le concierge lui remit sa clef d’une voix effacée, professionnelle. Après s’être changé, il se dirigea vers le bar de l’hôtel, Il n’avait plus faim après les canapés servis à la fin de la réunion. Celui-ci était semblable à des milliers d’autres, avec les mêmes clients, des hommes seuls en costume sombre, l’attaché-case au pied, le portable à portée de main. Quasiment personne ne parlait, chacun cherchant à se décompresser après une journée de travail, un peu perdu dans une ville inconnue.


Du comptoir il vit que la neige s’était arrêtée. Comme rien n’exigeait sa présence ici, il allait en profiter pour revisiter la place centrale qu’il n’avait plus vu depuis de nombreuses années, quand il faisait encore des voyages d’architecture. Il se souvenait d’une grande place carrée, cernée par des immeubles imposants un peu sombres, de style néo-hellénistique, et un petit square central avec deux ou trois arbres chétifs. Lorsqu’il arriva, il faillit ne pas la reconnaître. Elle était devenue piétonne, les immeubles avaient été ravalés récemment et resplendissaient dans l’éclat de leurs pierres blondes, les colonnades et les sculptures soulignées par des projecteurs enchâssés dans le sol. Le tapis de neige sur les pavés démultipliait la lumière, transformant l’ensemble en véritable joyau.


A côté de ce qui devait être la salle de concert, s’il se souvenait bien, un bar avait ouvert. De sa porte s’échappaient quelques bouffées de musique, et en s’en rapprochant Philippe reconnut un morceau de Monk. Surpris d’entendre du jazz, en plus une pièce exigeante pour les auditeurs, il pénétra à l’intérieur. L’atmosphère était très sombre, un plafond laqué noir, des murs recouverts de lattes de pin et d’acajou alternées, au sol une moquette gris foncée. L’éclairage provenait de petits halogènes éclairant des photos en noir et blanc de jazzmen et d’instruments. À sa droite se dressait un petit bar en acajou recouvert de cuivre doré derrière lequel trônait un homme âgé, à l’allure de colonel anglais à la retraite. Quelques clients, en majorité d’un certain âge, étaient assis dans de profonds fauteuils en cuir bordeaux, devant des tables basses massives. Au fond de la salle, sur une petite estrade, un grand piano demi ouvert était occupé par une pianiste habillée tout en noir.


Voilà pourquoi il ne reconnaissait pas l’interprétation, c’était elle qui jouait. Pourtant, vu la qualité, il aurait juré que c’était l’enregistrement d’un très grand artiste. Autour du piano, les clients étaient plus nombreux, dans un silence religieux. Philippe se rapprocha, cherchant à distinguer ses traits. Ce devait certainement être une artiste connue, et pourtant il n’arrivait pas à se souvenir avoir déjà entendu ce phrasé dans les nombreux festivals et concerts auxquels il avait assisté. Ses longs cheveux sombres descendaient jusqu’à mi-dos, dissimulant en grande partie un visage fin, presque maigre. Ses yeux étaient le plus souvent fermés, sauf par instants où les prunelles noires jetaient alors leur feu vers les touches de l’instrument. Elle devait avoir entre trente et trente-cinq ans.


Le barman s’approcha en silence derrière Philippe et lui indiqua une place libre à deux mètres de l’estrade, tout en prenant sa commande. Avant qu’il n’ait pu lui demander le nom de la pianiste, celui-ci s’était déjà éclipsé. Installé au fond de son fauteuil, il ferma les yeux pour mieux écouter. Il se croyait à Montreux, jusqu’à présent le festival où il avait été le plus ému. Bon pianiste amateur, jamais il n’atteindrait cette qualité de jeu, cette expression puissante, masculine, liée à une technique impitoyable. À la fin du morceau, les applaudissements parcoururent toute la salle, prolongés, tandis que son Perrier arrivait. La pianiste se leva et disparut pendant quelques instants par un rideau sombre derrière le piano. Le barman, Trevor, effectivement il était anglais, lui confia :

" C’est un professeur de piano de notre conservatoire. Elle vient parfois jouer chez nous, je pense pour se détendre. Mais je ne crois pas qu’elle joue en concert, en tout cas pas à ma connaissance."


Après quelques minutes, elle revint s’asseoir sur le tabouret et parcourut l’assistance des yeux. Son regard fixe était brûlant, d’une intensité presque inquiétante. Sur la droite de Philippe, un homme d’une soixantaine d’années leva le bras et dit :

" Mademoiselle, voulez-vous nous jouer le troisième nocturne de Chopin, s’il vous plaît ?"

Elle répondit:

" De votre part, cela m’aurait étonné que vous ne le demandiez pas. Vous le voulez à chaque fois. Vous ne voulez pas entendre autre chose pour une fois ?"

Il s’inclina :

" Dans ce cas, je laisse à d’autres le choix de l’œuvre."

Une femme à sa gauche cria presque :

"Alors l’appassionato de Beethoven, vous la faites si bien !"


D’un sourire, la pianiste accepta et posa les mains sur le clavier. Après quelques secondes de silence, les notes montèrent du piano, profondes, maîtrisées. Philippe se voyait, enfant, vingt-cinq ans auparavant, quand il avait entendu pour la première fois cette sonate à Pleyel, jouée par Arrau. Bien que le jeu fut différent, il retrouvait cette expressivité pleine, ronde, comme celle qui l’avait tant ému la première fois. Depuis, il avait bien grandi, il faisait près d’un mètre quatre-vingt-dix, mais la musique le ravissait tout autant à trente-cinq ans qu’à dix. Trop exclusif probablement, il ne s’était jamais marié ni même n’avait eu de relation prolongée, au désespoir de ses parents et de quelques-unes unes, n’ayant jamais trouvé celle qui partageait avec la même intensité ses passions pour l’architecture et la musique. Quoique Laurence, elle aurait pu être parfaite si elle ne s’était pas plainte à de nombreuses reprises de ses exercices matinaux au piano, une heure quotidienne de gammes et de répétitions. Et pourtant c’était son jeu qui l’avait séduite un soir de Noël où il avait joué plusieurs heures chez des amis.


Philippe émergea brusquement de ses souvenirs quand les derniers accords s’évanouirent des mains de la pianiste. Un peu perdu, il applaudit avec les autres spectateurs. Il finit son verre d’un trait et en recommanda un autre à Trevor, quand un homme corpulent demanda :

" Je crois que tout le monde ici aimerait vous ré-entendre dans la fantaisie de Schubert"

Tout autour de lui, les autres lui firent écho.

" Alors il va falloir me trouver une deuxième partie, parce que ça n’a pas changé, c’est toujours un morceau à quatre mains depuis la dernière fois" Ne voyant personne bouger, Philippe dit d’une voix un peu nouée :

" Mademoiselle, si vous n’avez personne d’autre, je veux bien essayer, je l’ai apprise il y a quelques années."

Se retournant vers les autres spectateurs, il leur déclara :

" J’espère que vous ne m’en voudrez pas trop, je suis certainement très loin du niveau de Mademoiselle."


D’un regard bienveillant, elle lui fit signe de s’asseoir à côté d’elle. Il s’installa tant bien que mal sur le tabouret qui était bien trop près de l’instrument et trop haut, réglé pour elle qui ne devait pas mesurer plus d’un mètre soixante-cinq. Rapidement, il fit jouer ses doigts, heureusement pas trop raides, et installa ses mains à quelques centimètres des touches, tout en se repassant mentalement la partition, les quelques doigtés délicats de l’accompagnement. Il espérait seulement que le tempo ne serait pas trop lent, on aurait risqué d’entendre un peu trop les inévitables erreurs de rythme. Elle lui jeta un coup d’œil rapide et attaqua les premiers accords. Dieu merci, elle avait compris ses hésitations et calqua elle-même son rythme sur le sien. Après quelques mesures, Philippe se sentit beaucoup plus assuré, toute l’œuvre lui revenait maintenant comme s’il l’avait jouée la veille. Les phrases se répondaient naturellement, les contacts furtifs entre leurs épaules et leurs hanches permettaient d’accorder leur jeu presque à la perfection, et elle se permit même d’aborder les pires difficultés avec une froide audace, certaine de sa réponse.


Les dernières notes plaquées, les applaudissements redoublèrent. Philippe, le visage rougi mais heureux et fier, se retourna vers elle:

" Merci beaucoup, j’ai rarement eu autant de plaisir à jouer ce morceau." Se dressant vers le public qui s’était amassé entre-temps, elle dit en riant :

" Vous n’avez pas honte, vous voulez me piquer mon poste ! Et bien, Monsieur le faux modeste, vous allez jouer un petit moment à ma place. Pour une fois je pourrai écouter au lieu de jouer."


Pris au piège au milieu des rires, il s’installa au centre du tabouret, le régla enfin à sa taille et attaqua par pur orgueil les premières études de Liszt. Du coin de l’œil, il vit qu’elle avait compris qu’il jouait pour elle, à la moue éloquente qu’elle lui fit. Il avait mis des années à surmonter les doigtés infernaux, les pièges innombrables qui foisonnaient dans ces pièces, qui avaient fait pleurer d’écœurement des générations d’élèves pourtant très doués. Elle s’était accoudée au piano, presque en face de lui, et son regard ne le quittait plus. Il sentait ses yeux noirs le fixer avec intensité, il sentait presque leur chaleur sur sa peau. Maintenant quelques gouttes de sueur commençaient à perler sur son front à mesure que le tempo s’accélérait encore et encore. Rien ne pouvait plus l’atteindre, son corps se réduisait à ses mains qui volaient sur le clavier. Il ne voyait plus rien, la salle avait cessé d’exister pour lui, seul par moment le visage de la pianiste s’affichait de manière fugace au-dessus des touches. Écrasant l’accord final, il se rejeta en arrière, épuisé.


Après une seconde de silence, les applaudissements fusèrent de la salle, le ramenant à la réalité. Il avait joué presque une heure sans s’arrêter, enchaînant les études comme dans un rêve. Elle s’approcha de lui, lui essuya le front et le serra aux épaules en lui murmurant :

" C’était merveilleux".

Tandis qu’il se levait d’un pied hésitant, guidé par elle, les spectateurs lui serraient les mains dans un brouhaha indistinct de félicitations. Le barman fit retentir une cloche tout en criant :

"Closing time !"

Elle s’était assise à côté de lui et lui tenait la main pendant que les clients quittaient le bar.

"Vous avez un talent impressionnant, comment vous appelez-vous ?"

"Philippe, Philippe de Welle, et vous ?"

"Marie Altdorfer. Je suis professeur au conservatoire ici. Mais vous, vous êtes professionnel ?"

"Non, amateur seulement. Dans la vie je suis architecte."


Trevor arriva en face d’eux et dit d’une voix enjouée :

" Ah, mes deux génies sont là. Vous devez avoir faim et soif, ne bougez pas, je vous apporte tout ce qu’il faut."

" Trevor, ce Monsieur s’appelle Philippe de Welle, il est architecte."

"Ah oui, je vois, vous participez au concours pour la rénovation du centre sportif. Alors, vous êtes l’heureux élu ?"

"Non, je ne crois pas, je pense que se sera plutôt le projet japonais."

"Dommage" dit-il en s’éloignant.

Marie se pencha vers Philippe et lui glissa en pouffant:

"Je crois que vous lui avez tapé dans l’œil et l’oreille. C’est un fou de musique, il est capable de partir à l’autre bout de l’Europe pour un seul concert. Et comme il est gay…"

"Moi pas"

"Je m’en étais aperçue toute seule, et certainement lui aussi. Je vous ai quand même entendu jouer."

"Vous pensez que je vous draguais ?"

"Peut-être, en tout cas vous jouiez pour moi. C’était charmant" répliqua-t-elle en riant et lui tapotant la main.


Trevor revint avec un plateau recouvert de sandwichs, de fruits confits, de tartelettes, et une bouteille de champagne. Tout en grignotant, ils évoquèrent leur apprentissage du piano, les professeurs, les examens, les concours jusqu’au conservatoire de Paris. Philippe, qui n’avait pu le réussir dans la bonne classe, s’était orienté vers des études plus classiques, tout en admettant qu’il n’aurait probablement pas supporté de courir le cachet ou de devenir professeur, par manque de patience envers les débutants. La bouteille de champagne s’était rapidement vidée, et il se sentait devenir euphorique.


Il s’installa devant le clavier et se lança dans de vieux rags de la Nouvelle Orléans. Comme toujours, il s’agissait d’aller de plus en plus vite tandis que les autres essayaient de vous perturber. Marie n’arrêtait pas de le chatouiller, glissait des glaçons dans son col ou s’asseyait à côté de lui et essayait de jouer en même temps le même air, mais plus vite encore. Trevor, assis un peu à l’écart riait aux éclats. Entre deux hoquets, il leur déclara qu’il allait se coucher et qu’ils n’auraient qu’à claquer la porte derrière eux quand ils auraient terminé.


A ce moment là, Marie avait réussi à expulser Philippe du tabouret. Courbée sur le clavier, les coudes écartés, elle essayait d’empêcher que ses mains ne se plaquent sur les touches. Il tentait de lui chatouiller les aisselles, mais rien ne l’arrêtait. Pour se venger, elle ruait en arrière et son dos venait cogner son torse, ses cheveux dégageant à chaque fois leur parfum jusqu’à ses narines. Lors d’une ruade un peu plus appuyée, ses mains dérapèrent et se trouvèrent de chaque côté de la naissance de ses seins, sentant à travers la robe la couture du soutien-gorge. Il allait les retirer quand elle lui dit d’une voix un peu plus rauque:

"Tu triches, tu vas vraiment me déconcentrer avec ces méthodes."

Encouragé, il laissa ses mains, les glissant légèrement sous sa poitrine tandis qu’elle restait collée contre lui. Il en profita pour lui glisser quelques baisers furtifs dans la nuque, à travers ses cheveux. Elle s’était arrêtée de jouer et tournant à moitié sa tête vers lui, sa bouche à quelques centimètres de la sienne, dit :

"Il faut y aller, sinon on va faire des bêtises."

Se levant tous deux, ils refermèrent le piano, éteignirent les dernières lumières et sortirent.


Dehors le froid était maintenant devenu très vif et Philippe enserra la taille de Marie contre lui, comme pour lui éviter de glisser sur le sol gelé. Il marchèrent quelques instants sur la place déserte, en silence. Devant un immeuble à la porte massive en fer forgé, elle s’arrêta et se tourna vers lui :

"Je suis arrivée…"

Avant qu’elle n’ait eu le temps de terminer sa phrase, il se pencha vers elle et déposa ses lèvres sur les siennes. Surprise, elle mit quelques secondes à entrouvrir sa bouche, lui rendant son baiser. Puis:

"J’allais te proposer de monter prendre un verre au chaud."

Se dégageant à demi de ses bras, elle fourragea dans son sac et sortit ses clefs pour ouvrir la porte. Philippe la garda enserrée contre lui pendant qu’ils entraient tous deux et l’embrassa de nouveau alors qu’ils se trouvaient dans le hall. Cette fois-ci, elle entoura son cou de ses bras, se suspendant presque, le baiser se prolongeant plusieurs minutes. Un peu essoufflée, elle le prévint :

"Ne fais pas trop de bruit, mes voisins sont du genre soupe au lait."

Ils montèrent les escaliers, s’arrêtant presque à chaque marche pour s’embrasser, se déshabiller, se caresser. Arrivés devant l’appartement, la veste de Philippe ne tenait plus que par une épaule, son manteau seulement retenu par une manche, les cheveux de Marie avaient perdu depuis longtemps leur aspect bien coiffé.


Dans le couloir, elle lui prit la main et l’entraîna presque en courant vers le salon où elle le jeta sur un canapé. Marie s’assit sur le ventre de Philippe et batailla avec sa cravate tandis qu’il essayait fiévreusement de descendre la fermeture éclair de sa robe. Parvenu à ses fins, il découvrit son torse et admira ses seins, prisonniers d’un soutien-gorge en satin blanc bordé de dentelle. Peu volumineux, leur pointes se dessinaient pourtant nettement à travers le tissu brillant et il se dressa à demi pour les happer avec sa bouche. Il sentit à travers les bonnets leur fermeté un instant avant qu’elle ne s’écrase contre lui, le recouchant presque brutalement sur le canapé. D’une main il essayait de dégrafer la fermeture du soutien-gorge, l’autre courant le long du mollet de sa jambe libre, glissant contre la soie, tentant de remonter l’ourlet du bas de la robe. Elle avait maintenant déboutonné sa chemise et glissait ses mains de chaque côté de son ventre pour sortir les pans coincés dans son pantalon. Se redressant, elle fit tomber le soutien-gorge d’un mouvement d’épaule, un bonnet restant accroché sur une des aréoles érigées. Il se tortilla en finissant d’enlever sa chemise et lança ses mains vers ses cuisses, finissant de transformer la robe en chiffon enroulé autour de sa taille. Ses bas luisaient, magnifiant des jambes fines et musclées. L’érection de Philippe était douloureuse, coincée dans son pantalon entre les cuisses de Marie. Elle dégrafa sa ceinture, le libérant partiellement, puis lui prit les mains et le tira vers elle.

"Viens, mon lit est plus confortable."

Une fois debout, il la prit dans ses bras, la souleva du sol comme elle s’agrippait à son cou et la porta vers la chambre qu’elle lui indiquait, la robe tire-bouchonnée faisant une traîne sur le sol.


Il la déposa sur le lit et acheva de lui ôter sa robe et ses escarpins. Elle se trouvait devant lui, allongée sur le dos, les cheveux étalés autour de son visage, les joues un peu rouges, ses seins pointant vers le plafond. Elle se rassit et agrippant son pantalon, le descendit d’un geste, entraînant le caleçon avec lui. Son sexe pointait vers elle, agité de légers battements. L’agrippant par les fesses, elle l’entraîna à sa suite sur le lit. Tombé à côté d’elle, il parcourut son corps de ses mains, de sa bouche, caressant, embrassant tout ce qu’il pouvait atteindre, de ses seins à son ventre, titillant les aréoles, glissant sa langue dans son nombril, jouant avec les globes de sa poitrine. Ses mains couraient sur la soie des bas, jouaient avec la lisière de peau nue à leur sommet, sentant la chaleur qui se dégageait dans l’intérieur de ses cuisses. À dessein il retardait le moment de plonger vers son sexe encore protégé par une culotte en satin blanc, tournoyant autour d’elle, frôlant son mont de vénus. Marie s’attardait sur son dos, glissait ses mains le long de sa colonne vertébrale, descendant jusqu’à ses fesses, éprouvait leur fermeté avant de rejoindre son ventre, nouer ses doigts dans les poils frisés de son torse, exciter les mamelons eux aussi érigés. Puis elle redescendait en suivant la ligne des muscles tendus jusque vers son sexe qu’elle évitait encore pour jouer avec les testicules, éprouvant le velouté de leur peau.


Enfin Philippe plaqua sa main sur le sommet du sexe de Marie, devinant le contour des lèvres renflées avant de glisser ses doigts sous l’élastique de la culotte. Elle écarta inconsciemment les cuisses quand elle sentit un doigt inquisiteur s’insinuer dans ses replis, se mouiller de sa liqueur et se darder sur son clitoris. Alors seulement elle attrapa la verge et la pressa fortement contre son ventre, la faisant coulisser sur sa peau. De sa bouche elle cherchait celle de Philippe, le fouillant de sa langue, lui mordant les lèvres, entrechoquant leurs dents. N’y tenant plus, il tira violemment sur sa culotte, la descendit jusqu’au genoux tandis qu’elle se cambrait pour la laisser passer sous ses fesses. D’un battement de jambes elle l’expédia à l’autre bout de la chambre et attira Philippe sur elle. Se saisissant de son sexe, elle le promena un temps entre ses lèvres luisantes, jusqu’à son clitoris, avant d’un coup de rein le faire pénétrer en elle. Plaquant ses mains contre ses fesses, elle l’enfonça tout au fond en gémissant sourdement, ressentant par tous ses replis le membre palpitant. Le fourreau brûlant qui enserrait Philippe faillit le faire éjaculer immédiatement. Il resta immobile un instant, le temps de s’habituer à cette sensation puis commença à aller et venir en elle, limité par les jambes de Marie qui lui entouraient les reins, fermement agrippées autour de lui, presque douloureusement. Tous deux haletaient, cherchaient leur souffle avant de ressouder leurs bouches. La sueur collait leurs poitrines, écrasées l’une contre l’autre. Les cheveux de Marie, trempés, étaient collés sur leurs visages. De ses mains il les écarta pour mieux la voir, se noyer dans son visage. Elle disait des mots sans suite, incompréhensibles. Son vagin ruisselait autour de lui, il le sentait couler le long de ses bourses comme ses mouvements devenaient plus rapides et moins contrôlés. Elle le serrait de plus en plus entre ses cuisses, gémissant presque continuellement, et il sentit monter en lui une onde de chaleur irrépressible qui éclata dans son sexe. Il éjacula longuement au moment ou le vagin se contracta autour de lui, tandis que Marie criait en détendant brutalement les jambes. Épuisé, il ne bougea plus, blotti dans ses bras, ne sentant pas les ongles plantés dans la chair de son dos. Son érection ne diminuait pas, même s’il se sentait complètement vidé, incapable de faire le moindre mouvement. Marie parcourait son visage de baisers, le berçant contre elle. Rarement il avait éprouvé autant de plaisir en faisant l’amour, il se sentait devenir amoureux, il ne voulait plus jamais la quitter. Il en était là quand le sommeil le prit brutalement. Marie rabattit les draps sur eux, Philippe encore emboîté en elle, et le berça doucement.


Deux heures plus tard, il se réveilla, la tête enfouie contre son cou au milieu de ses cheveux. Sa jambe reposait sur le ventre de Marie qui dormait profondément, un bras posé sur son épaule. Son bas-ventre était collant de leurs sécrétions mêlées. Un instant il eut envie de prendre une douche et de s’enfuir comme un voleur, mais il n’osa pas bouger, la chaleur de son corps l’attirant comme un aimant. De plus, il ne voulait pas quitter ce visage sculpté par les raies de lumières qui filtraient à travers les volets. Pour la première fois de sa vie il décida de rester jusqu’au matin après avoir fait l’amour, et se rendormit.


A suivre…