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Temps de lecture estimé : 23 mn
22/06/07
Résumé:  Entre rêve érotique et délire mystique, il se produit d'étranges rencontres sur le Chemin de Compostelle.
Critères:  f fh fhh inconnu religion voyage amour cérébral revede fmast pénétratio init mélo délire -initiatiq
Auteur : Olaf      Envoi mini-message

Série : Ultreia

Chapitre 01 / 07
La rencontre

Je ne ferme jamais ma porte à clef. Je sais, c’est une mauvaise habitude, mais elle me vient de mes années de jeunesse, passées à bourlinguer et à dormir là où je trouvais de quoi poser mon sac. Après avoir maintes fois profité d’une maison laissée ouverte par son propriétaire, il me semble normal de rendre la pareille à quelqu’un de passage. D’autant que j’habite tout près de Saint Guilhem le Désert, sur le Chemin de Compostelle. Les âmes en peine et les corps épuisés à qui offrir l’hospitalité ne manquent donc pas. Je trouve sympathique de pouvoir ainsi rencontrer des gens nouveaux, passer un moment en leur compagnie, sans contrainte.


J’ai bien sûr vécu quelques déconvenues, à cause de sagouins qui ont cru malin de profiter de ma confiance et de repartir en douce après m’avoir piqué quelque objet ou un peu de fric. Au début, je me suis énervé, puis je me suis dit que mes vraies richesses n’avaient aucune valeur marchande et que personne ne pouvait me les prendre. Dès lors, autant continuer à les faire fructifier en partageant ce qui est dans mon cœur, en échange de quelques tranches de vie et d’un sourire reconnaissant. Le reste n’a pas vraiment d’importance.


A part ma sieste, rituel sacré dont rien ne peut me détourner depuis que j’en ai découvert les bienfaits. Dès la fin du repas de midi, je me déshabille et m’allonge à même le sol, en été, ou sur un divan, en hiver. Qu’il fasse chaud ou froid, ma carcasse s’adapte à la température ambiante et se fait rapidement oublier. Je plonge dans un profond sommeil, musarde une vingtaine de minutes dans les sphères secrètes de mon subconscient, puis reviens à la réalité, régénéré. C’est un vrai régal de se remettre au travail avec une énergie pareille.


Sauf le 28 mai dernier, où j’ai été tiré du sommeil bien avant l’heure prévue par mon horloge interne. J’ai d’abord perçu un bruit régulier, pareil au couinement d’une machine mal huilée, qui semblait provenir de la pièce à côté de celle où je m’étais endormi. Encore à moitié dans les vapes, j’ai tenté de résister et de reprendre le cours de mes rêves. Peine perdue, le bruit ne faiblissait pas. En outre, aucune machine n’était sensée fonctionner à cet endroit. Je tendis donc l’oreille, et crus percevoir quelque chose d’humain dans ce bruit, comme un sanglot, ou un soupir de souffrance retenue. Quelqu’un se serait-il réfugié chez moi, qui se sentirait mal ou aurait besoin d’aide ? Sans me douter de ce qui m’attendait, je me levai d’un bond et déboulai dans le salon, nu comme un vers.




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Là, surprise, je découvre en face de moi, enfin plus exactement sous mes yeux, un gars et une fille allongés par terre, qui copulent avec une joyeuse insouciance. Les sacs à dos sont jetés dans un coin de la pièce, leurs habits jonchent le sol, en témoignage de leur impatience à consommer leur union. L’homme ne laisse voir que son dos et ses fesses, qui montent et descendent vigoureusement au rythme de son plaisir croissant. La femme, couverte par son mâle, se laisse faire, les yeux fermés, la bouche entrouverte. Elle exhale des petits cris à chaque pénétration.


Le bruit de machine provenait probablement de la superposition de ses gémissements et des râles de son étalon. Il faut dire qu’il ne se ménage pas. D’où je me trouve au sortir de ma chambre, je peux voir sa puissante queue entrer et sortir de la vulve distendue de la fille. Il la chevauche en missionnaire et l’écrase contre le sol. De son côté, elle a enroulé ses jambes autour de sa taille et suit le rythme tant bien que mal. Entre les fesses de l’homme apparaissent deux boules gonflées, remontées jusqu’à la garde. Il est visiblement prêt pour le grand saut.


Indépendamment du choc que cela me fait de voir deux humains baiser à même le sol de ma maison, je dois reconnaître que cette cavalcade est fort bien menée. Ils ont probablement dû s’exciter mutuellement au cours de la matinée, jusqu’à perdre le rythme et surtout le goût de la marche. J’imagine la fille, tanguant des fesses devant son compagnon, tout au long du chemin pierreux et raide des Fenestrettes. Combien de fois a-t-il tenté de la saisir au vol, pour la plaquer contre son membre impatient ? Combien de fois lui a-t-elle échappé, jusqu’à ce qu’il arrive enfin à s’emparer d’elle, hors d’haleine, suant à grosses gouttes, pour la peloter sans ménagement, à la mesure de son envie ?


A-t-elle eu pitié de lui, avait-elle encore un reste de désir au fond du ventre, après une nuit torride entre ses bras ? D’une manière ou d’une autre, elle a bien dû se laisser séduire, se prendre à son jeu jusqu’à ce que, n’y tenant plus, ils se précipitent sous le premier couvert venu, chez moi en l’occurrence, pour apaiser leurs sens exacerbés.


Un dernier regard jeté sur le couple me permet de distinguer sur eux les secousses caractéristiques de l’explosion finale. Ils devraient conclure prochainement. Je m’éclipse dans la cuisine et me sers une tasse de café. J’essaie même de me concentrer sur le travail que j’ai à accomplir cet après-midi. Pourtant, sans chercher à écouter ce qu’ils font, je ne peux manquer d’entendre une courte série de grognements qui caractérise la fin du rut chez le mâle humain. Etrangement, la femme ne semble plus manifester autant d’enthousiasme que son partenaire. Elle se contente de l’encourager mollement, jusqu’au moment où, de toute évidence, il se lâche en elle en proférant un chapelet d’onomatopées salaces.


Après cela, tout redevient calme, mis à part le souffle puissant du bonhomme qui s’est probablement effondré sur le corps qu’il vient de posséder. J’en profite pour déguster mon breuvage avec sérénité. Trois gorgées plus tard, je réalise que la respiration du gars devient de plus en plus profonde et régulière, qu’elle basculerait même dans le ronflement. Mon énervement d’avoir été sorti sans ménagement de ma sieste fait place à de l’hilarité. Quel mufle, ce type, quel nul de laisser ainsi sa compagne insatisfaite, dans une maison inconnue et de s’endormir comme une masse sitôt son plaisir consommé.




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Soudain, elle apparaît nue dans l’encadrement de la porte. Petite, les cheveux châtains clairs, bronzée de partout, elle est belle et surtout souriante. Nue, sans complexes ni pudeur, elle vient vers moi la main tendue, ses seins frémissant à chaque pas. Avant que j’aie le temps de mieux l’observer, elle m’interpelle, comme si nous nous connaissions de longue date.



Je fais semblant de ne rien entendre. La situation est déjà assez compliquée sans qu’elle en rajoute une couche. Surtout qu’elle se met maintenant à faire le tour de la table, probablement pour mieux admirer les ustensiles anciens qui ornent les murs, me laissant tout loisir d’admirer les pointes de ses seins encore dressées de désir, son ventre tout rond, sa jolie toison, puis ses fesses rebondies et ses cuisses musclées dès qu’elle me tourne le dos.



Avant que je n’aie le temps de lui répondre, elle vient s’asseoir sur mes cuisses. Je sens sa chaleur contre ma peau, je vois ses seins à quelques centimètres de ma bouche, il y a son odeur aussi, et le son de sa voix tout près de mon oreille. Je me retiens de poser mes mains sur elle. Si je la touche, je vais perdre pied. Elle sens ma crispation, prend mon visage entre ses mains et m’observe longuement, une lueur très douce au fond des yeux. Soudain, elle pose un léger baiser sur le coin de mes lèvres, presque amical, qui désamorce la situation.



Elle me serre contre sa poitrine, comme un ami qu’on quitte sur un quai de gare, puis se relève et va finir son verre de lait. Après quelques instants de réflexion, elle m’explique en quelques mots ce qu’elle attend de moi. J’ai trop envie de profiter encore un peu de sa présence pour refuser.

Nous passons dans le séjour, où le type dort toujours à poings fermés à même le sol. Elle l’enjambe à hauteur de sa taille et se met à se caresser tout en le contemplant de haut en bas. Au début, elle effleure à peine ses seins, puis elle dessine des petits cercles du bout des ongles sur ses mamelons excités, de plus en plus fortement, allant jusqu’à les pincer sans ménagement, ce qui la fait rougir d’aise.


Pendant ce temps, sans cesser de la regarder, je m’agenouille à la tête du gars. Je pose mes mains sur son torse, le bout de mes doigts juste à hauteur de ses tétons. À peine l’ai-je touché qu’il se réveille en sursaut. Il réalise immédiatement que quelque chose ne tourne pas rond. Debout juste au-dessus de son ventre, il voit sa belle, jambes écartées, quelques gouttes de rosées perlant déjà à l’orée de sa fente, pendant que derrière lui, un inconnu s’amuse à titiller une de ses zones sensibles.


Tout cela lui semble inconcevable, il doit y avoir une machination. Il commence par s’exclamer qu’il n’a pas marché tout ce temps pour se laisser branler par un mec, qu’il la veut elle et seulement elle, et que de toute façon…


Elle ne lui laisse pas le temps de poursuivre.



Pour indiquer clairement sa détermination, elle joint immédiatement le geste à la parole et commence à plier ses jambes pour approcher son ventre de la tige du gars qui continue de grossir sous l’effet de l’émotion. Elle prend tout son temps pour descendre, savourant l’effet qu’elle fait à son homme. Finalement, elle se met à genoux et vient placer sa vulve juste au-dessus de lui, de manière à effleurer son membre de ses lèvres intimes.

Elle me regarde alors, à la manière d’un chef d’orchestre attirant l’attention de ses musiciens avant un passage difficile. Je glisse mes mains le long du torse de l’homme et recommence à titiller ses mamelons. La réaction ne se fait pas attendre, sa tige gonfle encore un peu plus et vient s’immiscer entre les lèvres de la fille. Comme sous l’emprise d’un réflexe inné, le type lance son ventre en avant, espérant s’enfoncer d’un coup en elle et la convaincre par la seule grâce de sa turgescence d’accepter une nouvelle chevauchée sans fioritures. Malheureusement pour lui, couché sur le dos, il n’est pas en bonne position de négociation. Elle esquive l’assaut d’un simple mouvement du bassin, qui fait glisser le corps étranger hors de son ventre. Il essaie de la saisir aux hanches, l’implorant de le reprendre en elle.



Le gars comprend qu’il n’a pas d’autre alternative. Devant l’énormité de l’effort à fournir, il commence par fermer les yeux. Il doit se dire que ça lui évitera de savoir de qui vont venir les attouchements les plus agréables. Peut-être craint-il même de devoir remettre trop de choses en question à la fois ?


Sur un clin d’œil de la belle, je reprends mes caresses sur le torse et le ventre du gars. Après un bref moment de retenue, je réalise que je pourrais même prendre plaisir à ce jeu. Sa peau est extrêmement douce, et plus il s’excite de ce que je lui offre, plus elle devient chaude. Son membre gonfle à nouveau. La fille le laisse alors progressivement reprendre place en elle. Il semble avoir compris la leçon et ne tente plus aucun mouvement inconsidéré.


C’est elle qui donne le rythme maintenant, très lent, sous forme d’un léger balancement du bassin. Assise sur son homme, elle semble détendue et heureuse. Tout en elle montre le plaisir qui commence à l’envahir. Je frôle légèrement le ventre de l’homme, qui offre la même caresse à sa compagne. Elle ronronne doucement, laisse échapper un gémissement au moment où il s’approche de sa toison et de sa petite tige raidie. Je remonte alors le long de ses flancs, sous les aisselles, pour retourner sans hâte sur sa poitrine effleurer ses mamelons. Il suit fidèlement mes traces sur le corps de sa belle, dont la respiration devient plus rapide. Elle s’empale un peu plus profondément sur sa trique, visiblement enchantée d’être à nouveau écartelée par le large bâton de chair.


J’essaie de lire sur le visage de la femme, sur les infimes tressaillements de son corps ce qu’elle pourrait désirer de plus. Elle s’abandonne entièrement à mon bon vouloir, relayé scrupuleusement par son homme. La situation est totalement irréelle, mais semble particulièrement jouissive pour la femme qui choisit maintenant de changer de position et de s’allonger à côté de son homme. Le jeu des miroirs devient difficile pour moi, si je veux continuer à dicter le rythme et la nature des caresses.


Je m’agenouille alors entre leurs cuisses, de manière à pouvoir stimuler aussi bien les attributs du gars que l’intimité de la fille, tout en ne me refusant pas quelques escapades sur les fesses musclées de l’homme. Mais au moment où nos gestes se font plus précis, où nos souffles s’agitent, où nos queues bandées se montrent plus impatientes, au moment où la fille exprime sans équivoque son désir d’être pénétrée, tout s’arrête.


Enfin, surtout ma sieste. Vingt minutes ont passé depuis que je me suis assoupi et je me réveille comme chaque jour au même moment. En une fraction de secondes, je reprends pied dans la réalité, nu à même le sol de ma chambre, une trique monstrueuse entre les jambes, témoin rigide de ce que je viens de rêver.




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Fait étrange, un bruit régulier semble provenir de la pièce à côté, tout comme au début de mon rêve. Je tends l’oreille et crois percevoir quelque chose d’humain dans ce bruit, comme un sanglot, ou un soupir de souffrance retenue. Quelqu’un se serait-il réfugié chez moi, qui se sentirait mal ou aurait besoin d’aide ? Sans me douter de ce qui m’attend, je me lève d’un bond et déboule dans le salon, nu comme un vers.


Là, surprise, je découvre en face de moi, enfin plus exactement sous mes yeux, une fille allongée sur le canapé du salon, jambes écartées, une cuisse posée sur le dossier, qui se caresse fougueusement. Son sac à dos est jeté dans un coin de la pièce, sa robe légère est à peine dégrafée en témoignage de son impatience à satisfaire son envie.


Elle a les yeux fermés, la bouche entrouverte. Elle exhale des petits cris à chaque glissement de son majeur sur son clitoris, qui deviennent des râles au moment où elle enfonce ses doigts entre ses cuisses pour faire monter son plaisir d’un cran.


Indépendamment du choc que cela me fait de voir une fille profiter de ma maison pour se caresser en pleine journée, je dois reconnaître que la scène ne manque pas de charme. La visiteuse n’est pas vraiment belle, son visage est même assez quelconque. Mais il émane d’elle une incroyable sensualité. L’imminence de la jouissance la rend même terriblement attirante, désirable. Si je ne redoutais pas de l’effrayer, je me glisserais entre ses cuisses pour accompagner ses gestes de quelques baisers, puis de discrets lapements du bout de la langue.


Voyageant seule sur le Chemin, elle a probablement succombé au balancement de ses hanches et aux secousses que ce genre d’exercice physique provoque dans les entrailles intimes. Rien de tel que la marche sur une longue distance pour laisser vagabonder son esprit et libérer progressivement ses fantasmes. Il y a quelque chose d’infiniment érotique dans le pèlerinage, quelque chose qui ressemble à la redécouverte d’un mouvement primitif, d’un balancement animal, dont les effets sont incontrôlables. Il n’y a rien de plus débridé, lorsqu’on ne maîtrise pas parfaitement ses émotions.


Un dernier regard jeté sur la femme avant de m’éclipser dans la cuisine me permet de distinguer sur elle les secousses caractéristiques de l’explosion finale. Elle devrait conclure prochainement. En attendant, je me sers une tasse de café. J’essaie un instant de me concentrer sur le travail que j’ai à accomplir cet après-midi. Pourtant, même sans écouter ce qu’elle fait, je ne peux manquer d’entendre enfin une courte série de râles, caractéristiques d’un feu d’artifice orgasmique.


Après cela, plus rien ne bouge dans la pièce à côté. J’en profite pour déguster mon breuvage avec sérénité, en me demandant si elle ne va pas se rhabiller, le rouge de la honte au front, et s’enfuir sans demander son reste.




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La voir apparaître nue dans l’encadrement de la porte me rassure. Petite, les cheveux châtains clairs, elle s’arrête sur le seuil, visiblement embarrassée. Par l’échancrure de sa robe, je peux admirer son corps qu’un reste de pudeur lui fait maladroitement couvrir de ses mains. Après un instant d’hésitation, voyant que je ne me prépare pas à me jeter sur elle, elle se détend et vient vers moi la main tendue, ses seins frémissant à chaque pas.



Avant que je n’aie le temps de lui répondre, elle vient s’asseoir sur mes cuisses. Je sens sa chaleur contre ma peau, je distingue ses seins à quelques centimètres de ma bouche, il y a son odeur aussi, et le son de sa voix tout près de mon oreille. Je me retiens de poser mes mains sur elle. Si je la touche, je vais perdre pied et j’ai l’impression que ce n’est pas ce qu’il nous faut à l’instant. À vrai dire, je ne suis pas sûr qu’elle soit prête à s’offrir maintenant, que l’envie qui doit encore tarauder son ventre me soit vraiment destinée. J’aimerais d’abord la découvrir, peut-être pourrions-nous vivre quelque chose de très beau, si nous nous en laissons le temps.


Elle sens ma crispation, prend mon visage entre ses mains et m’observe longuement, une lueur très douce au fond des yeux. Soudain, elle pose un léger baiser sur le coin de mes lèvres, presque amical, qui désamorce la situation.



Elle me serre contre sa poitrine, comme un ami qu’on quitte sur un quai de gare, puis se relève et va finir son verre de lait. Après quelques instants de réflexion, elle m’explique en quelques mots qu’en vérité elle ne sait plus très bien ce qu’elle veut. Que trop de choses bouillonnent en elle, trop de désirs différents, trop d’histoires inachevées qui la torturent.



Je la prends par la main et la conduis dans ma chambre. J’achève de la déshabiller et nous nous allongeons dans mon lit, étroitement enlacés, sans bouger. Un peu d’elle entre en moi par la chaleur de sa peau, par la tension de ses bras qui me serrent fort, par la pression de ses seins contre mon torse, par le frémissement de ses hanches contre mon ventre. Un peu de moi entre en elle de la même manière. Nos corps s’habituent l’un à l’autre, se reposent l’un contre l’autre. Nous nous apprivoisons, à mi chemin entre le désir naissant et le bonheur d’être simplement bien ensemble. Des images traversent nos esprits, qui se correspondent, nous communiquons en silence.


Le temps passe, nous voguons dans une sorte de léthargie, pansant nos plaies et nos bosses par le seul bienfait de la tendresse qui nous unit. Ce que cette fille me fait vivre est unique, je découvre entre ses bras le bonheur de partager un moment d’exception avec une inconnue, qui me fait entièrement confiance. Une inconnue qui est en train de s’offrir beaucoup plus intensément qu’en me laissant la pénétrer et m’anesthésier de plaisir entre ses cuisses. Nous passons en vérité l’après-midi à faire l’amour sans aucun geste érotique.


Epuisés par l’intensité de ce que nous vivons, nous finissons probablement par nous endormir. La nuit est en tout cas tombée au moment où je m’éveille à nouveau, le corps chaud de ma visiteuse étroitement imbriqué dans le mien. Je ne peux plus distinguer les traits de son visage. Je sens en revanche son souffle régulier contre ma peau, je m’enivre de son odeur, sans bouger. Il me semble même arriver à percevoir les battements de son cœur contre mon flanc.


Une secousse involontaire de mes bras la réveille. Elle reprend contact avec le réalité en posant un long baiser sur mes lèvres.



Je caresse ses cheveux, son visage. Alors, enfin, elle commence à parler. Par bribes, d’abord, puis plus longuement. Elle m’offre ses pensées, ses souffrances, ses échecs, ses espoirs. Et surtout ce qui l’a poussé à se lancer sur le Chemin de Compostelle. De mon côté, je lui parle de mes années à l’armée, en Afrique du Nord, de mes voyages qui les ont suivies, de ce qu’ils ont changé dans ma manière de voir le monde.


Elle me raconte les hommes qui ne restent pas dès qu’ils comprennent qu’ils n’obtiendront rien d’elle la première nuit. Je lui parle des femmes que j’ai perdues pour ne pas avoir su aller au-delà de mes peurs, au nom d’une étrange vision de mon indépendance.


Finalement, elle se met à évoquer les choses plus difficiles, comme la perte d’un ami proche. Une douleur que j’ai moi-même partagée avec mon meilleur ami, Benoît, dont le frère a péri noyé. Nous parlons de bien d’autres choses encore, plus légères celles-ci, nous amusant de constater que nos mères s’appelaient toutes deux Aude et que nous venons presque de la même région.


Quelque chose de très fort se produit entre nous. Plus le temps passe, plus j’éprouve de tendresse pour cette femme, qui semble faire face à l’existence avec un incroyable courage. Elle paraît ressentir de semblables élans à mon égard. De plus en plus souvent, elle pose sa main sur ma poitrine, ou se blottit contre moi, en narrant un épisode plus intime de sa vie. La douceur et la chaleur de sa peau me troublent. Captivé par nos échanges, je ne réalise d’abord pas l’effet que ce contact sensuel me fait. Mais au moment où la clarté du jour naissant me permet de mieux percevoir les formes de son corps, plus rien ne retient mon excitation.

Il suffit que sa cuisse vienne se glisser entre les miennes pour qu’elle découvre ce qu’elle provoque en moi. J’ai peur de l’effaroucher, de casser le fil ténu qui nous a unis tout au long de la nuit. Il n’en n’est rien. Elle se redresse au contraire sur notre couche, jette au loin la couverture qui nous protégeait et, à genoux contre ma hanche, se laisse admirer, faisant offrande de ses seins qu’elle empaume avec une incroyable sensualité.


Son visage est empreint d’une grande sérénité, d’une certaine détermination même. À ce qu’elle m’a confié, je suis le premier à qui elle s’offre de la sorte, les autres rencontres de sa vie n’ayant donné lieu qu’à de brèves étreintes sans réel abandon. Je ne doute pas qu’elle se sente enfin prête à franchir une étape décisive dans sa vie amoureuse. Comment répondre à ce désir immense ? Comment lui offrir tout ce qu’elle attend sans m’engager entièrement dans une relation ? Suis-je prêt à cela ? Suis-je prêt à cela avec elle ?


Perdu dans ces pensées existentielles, à l’instant où peut se produire le plus beau comme le plus douloureux entre nous, je suis complètement désarçonné par la question qu’elle me pose.



Elle pose vivement sa main sur ma bouche, m’empêchant de continuer.



Je la regarde attentivement, espérant découvrir la moindre trace de déraison sur son visage qui m’autoriserait à la repousser. Je n’y trouve rien de cela. Elle semble au contraire illuminée par le bonheur, par la certitude d’avoir trouvé celui qu’elle cherchait, par qui elle pourrait enfin donner un sens à son existence. Je suis subjugué par cette foi. Pire, je me mets moi-même à douter. Qui suis-je en réalité ? D’où vient que je vive ici et maintenant ? Quelle main a guidé ma vie jusqu’à ce jour ? A quoi notre rencontre est-elle due ?



Tout se bouscule dans ma tête, je ne sais plus à quoi me raccrocher, je perds le peu de certitudes que j’avais encore. Elle ne me laisse pas le temps de réagir. D’un mouvement souple, elle vient s’asseoir sur mon ventre, sa vulve déjà humide légèrement posée contre mon sexe gonflé. Elle prend une fois encore mon visage entre ses mains et m’embrasse goulûment. D’abord avec tendresse, puis d’une manière de plus en plus excitante. Elle me fouille de sa petite langue chaude, me pénètre de toute la force de son désir, tout en caressant ma poitrine des pointes durcies de ses seins. Penchée sur moi, elle avance un peu son bassin et me fait glisser le long de son puits d’amour. Ses attouchements me font violemment bander et il lui est facile, en reculant son giron, de me placer juste à l’orée de sa vulve.


Elle se soulève alors un peu, de manière à me regarder dans les yeux tout en me faisant entrer plus profondément dans son intimité. Je suis submergé par la tendresse que j’éprouve pour elle. Tout mon être aspire maintenant à m’unir à elle, comme son corps le demande, comme chacun de ses mouvements nous pousse irrémédiablement à le faire. La chaleur de son ventre autour de mon membre me donne des sensations d’une incroyable intensité. Je m’efforce toutefois de ne pas bouger, la laissant s’emparer de moi au rythme qui lui convient.


Elle m’enfonce progressivement en elle, se délectant de la pointe gonflée qui dilate les parois de son vagin. Puis, elle attend un peu, pour reprendre son souffle, caressant mon corps partout où elle peut me toucher de ses mains tremblantes. Impatient, je ne peux m’empêcher de pousser maintenant mon mandrin dans son ventre, à la recherche de sensations plus fortes, … et je butte contre un anneau de chair inviolé.


Qui est celui à qui elle croit offrir ce trésor ? Un homme, avec ses défauts et ses qualités, un être idéalisé, une aventure mystique sur le pèlerinage de sa vie ? Suis-je digne de ce qu’elle m’offre ?


Avant que je n’aie trouvé une réponse à ces interrogations, elle m’interrompt par une exclamation de joie.



Après un bref instant d’immobilité, la tête posée sur ma poitrine, elle se redresse complètement, en appui sur la pointe de ses pieds. Elle reste ainsi en équilibre, presque sans effort, le temps de prendre mes mains entre les siennes. Son visage est détendu, épanoui, superbe. Un sourire l’illumine au moment où elle relâche la tension de ses cuisses, s’enfonçant d’un coup sur mon pieu. Une légère crispation de son ventre me fait comprendre que je l’ai entièrement pénétrée. Tendu comme un arc au fond d’elle, je cherche à me retirer un peu, de peur de lui faire mal, mais elle pousse au contraire ses hanches à ma rencontre, comme si elle voulait que je reste tout contre sa matrice, jusqu’à ce que je lui aie tout donné de moi.


Elle commence d’ailleurs à aller et venir sur ma tige, m’amenant en quelques minutes au bord de l’explosion. Au moment où elle sent mes premiers spasmes contre sa muqueuse écorchée, elle pose ses mains sur mes épaules et soulève un peu ses fesses, comme pour me faire plus de place en elle. Je ne résiste pas à cette dernière caresse intime. Ma queue se met à cracher d’épaisses giclées de semence et se vide longuement au plus profond de son ventre.


Terrassé par tout ce qu’elle m’a fait vivre, je sens que je vais sombrer. Je ne suis aujourd’hui plus sûr de ce qui s’est passé à ce moment. Je me souviens seulement de ses mots d’amour contre mon oreille. Il me semble lui avoir demandé de rester près de moi. Ai-je vraiment osé dire je t’aime ? Ai-je rêvé que je prononçais enfin ces mots sans arrière-pensée ? Peut-être n’ai-je pas été assez persuasif, elle n’était en tout cas plus là lorsque je me suis réveillé. Seule trace de son bref passage dans mon existence, un petit mot posé sur une table du salon, à côté d’une bougie allumée « qui que tu sois, tu restes mon homme à jamais ! »




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La nuit vient de tomber. La quarantième nuit, après quarante jours à l’attendre. Quarante jours dans un désert amoureux et sentimental.


Guilhem,… Guilhem du désert… Quarante jours et quarante nuits de désert, la durée habituelle des stages de survie selon l’Ancien Testament ! Si les mystères des Ecritures sont la passion de cette diable de femme, la fin de mon calvaire est peut-être proche.


Je ne sais pas plus qui je suis aujourd’hui qu’hier, mais je perçois mieux combien j’ai besoin et envie d’elle. Je m’allonge sur le sofa où elle était au premier jour. Comme tous les jours et toutes les nuits depuis qu’elle est partie, une bougie est allumée. Son homme à jamais, a-t-elle dit. Je sens une boule de feu au fond de mon ventre. Je ferme les yeux, et je la revois comme je l’avais découverte, les cuisses écartées, le plaisir à fleur de peau, si seule.


Son homme à jamais ?





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(1) Saint Guilhem de Gellone, né vers 742, mort en 812, mieux connu au XIIe siècle sous le nom de Guillaume d’Orange. Cousin de Charlemagne par sa mère Aude, il devient comte de Toulouse en 790. Vaillant soldat et brillant capitaine, il lutte contre les Maures, défait les Basques, conquiert une partie de l’Espagne, puis s’empare de Barcelone en 801. Peu après, il retrouve son ami d’enfance saint Benoît d’Aniane (dont le frère est mort noyé sous ses yeux), et décide de fonder l’Abbaye de Saint-Guilhem-le-Désert suivant la règle bénédictine. Il s’y retire en 806 avec un groupe de moines. Mort le 28 mai 812, il est canonisé en 1066.