n° 13598 | Fiche technique | 18750 caractères | 18750Temps de lecture estimé : 14 mn | 08/12/09 |
Résumé: Retour sur les années passées. Dans le premier chapitre, j'ai commencé un voyage par le présent. Aujourd'hui, je commence à regarder loin en arrière. | ||||
Critères: nonéro | ||||
Auteur : Nicolas (bientôt 60 ans, épicurien, un peu rêveur) Envoi mini-message |
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Dans le premier chapitre, j’ai commencé un voyage par le présent. Aujourd’hui je commence à regarder loin en arrière.
2 - Hier déjà !
Père acceptable, c’est probable, mais est-on jamais sûr de rien ?
Père tout court, au moins au sens biologique du terme, je le suis. Deux fois, le choix du roi.
Garçon d’abord, fille ensuite. De cette paternité, double et voulue, je ne suis ni fier ni honteux. Mes enfants sont beaux, intelligents, mais comme tous les enfants vrais (et non ceux qui se déguisent en adulte dès le plus jeune âge), contestataires, rebelles, n’en faisant qu’à leur tête, sachant tout avant de l’avoir appris, ne travaillant que le strict minimum pour ne pas échouer à leurs examens.
À peine caricaturale, cette description m’enchante et me désole à la fois. Elle m’enchante car je suis convaincu que ce sont de vrais enfants, et qu’ils vivent avec fougue et passion ce qui m’a peut-être le plus manqué, à savoir une jeunesse de jeunes. Et non une pâle imitation de la vie des adultes, où tout est réglementé, encadré, prédéfini et prédigéré. Ils font leurs expériences et de temps en temps ça leur saute à la figure.
Dans ces moments-là, papa S.A.M.U. est là, et tout en bougonnant et râlant « si on m’avait écouté on n’en serait pas là » il transporte à l’hôpital le plus proche, console, réconforte, panse les plaies du corps et de l’âme. Bien évidemment il ne fait que tenir sa place et ne doit en attendre ni merci, ni reconnaissance. À la limite, il peut même être gratifié d’un « si tu ne voulais pas le faire, personne ne t’y obligeait ». Mettons cela sur le compte d’une certaine pudeur qui les empêche d’être eux-mêmes, et de se laisser aller à des démonstrations affectives qui ne sont pas dignes de leurs personnalités bien affirmées. Mais, sacré nom, comprendront-ils un jour que la tendresse et l’amour n’ont rien de déshonorant, et que même un « vieux » peut pleurer, s’émouvoir, se laisser aller à être lui-même, sans pour autant tomber de son piédestal, ni déchoir de son rang si durement gagné et si difficile à conserver.
Parfois je me dis qu’ils sont plus vieux que nous leurs parents, mais bien sûr ce n’est pas le cas. Un de leurs problèmes est cette volonté d’être un dur comme on en voit chaque jour à la télé, capable d’affronter les pires situations, quel que soit leur état physique et moral. Ces faux hommes (ou fausses femmes) que leur montrent les étranges lucarnes chères au Canard Enchaîné, sont bien s
ûr plus forts que les parents et méritent plus le respect et l’admiration. J’en veux pour preuve l’histoire arrivée à un ami, qui, pour ne pas manquer l’anniversaire de son fils âgé à l’époque de seize ans, est rentré d’une traite de Bordeaux à Paris en plein hiver, et alors que l’autoroute n’était encore qu’un vaste chantier. Neuf heures de conduite avec le minimum d’arrêts avaient eu raison de sa résistance et, arrivé à la maison, il avait eu droit au super coup de barre qui l’avait assis dans le canapé, demandant grâce et quelques minutes de repos afin de se refaire une santé. Au grand étonnement de son fils qui ne comprenait pas qu’il ne puisse pas de suite l’emmener au cinéma comme promis. Car enfin les héros de nos chers petits sortent indemnes des pires accidents et prennent tout juste le temps de s’épousseter avant de foncer vers de nouvelles aventures, bien plus épuisantes qu’une séance de cinéma.
Cela dit je leur ai donné tout ce que je pouvais et sûrement pas tout ce qu’ils souhaitaient.
Mais je plaide non coupable, mon travail (tiens ça me rappelle quelque chose de vécu, ça) et tout bêtement la vie m’en ont empêché. Pour ma défense je dirais qu’ils ont une mère remarquable, qui, si elle n’a pas pu me remplacer, car un père est irremplaçable, a sûrement fait tout ce qui était en son pouvoir, et même plus pour que cette absence ne se fasse pas trop sentir.
Donc père passable, voisin acceptable, je pense être ce que l’on appelle un individu socialement intégré.
Cette histoire d’un individu socialement intégré, je vais essayer de vous la conter, à ma manière, avec ma mauvaise foi habituelle, et si parfois vous trouvez que je n’ai pas toujours le beau rôle, c’est bien entendu parce que c’est un roman.
Ne cherchez donc pas à savoir de quel village de la Beauce je viens à Paris tous les jours, ni dans quel lycée de la Corrèze j’ai poursuivi avec un entrain modéré mes chères études. Ces lieux ne sont qu’imaginaires. Et si en fin de telle ou telle page vous êtes persuadés que c’est bien de vous (mon voisin, ma collègue…) dont il s’agissait dans les lignes que vous venez de finir, ce n’est peut-être pas faux. Allez donc voir votre voisin, demandez-lui de vous dédicacer cet ouvrage. S’il le fait de bonne grâce, remerciez-le, il vous aura conféré une célébrité que bien des collègues de bureau, atelier ou usine vous envieront.
Si par contre il vous envoie plus ou moins fermement promener, en termes plus ou moins courtois, vous pourrez toujours vous consoler en vous disant que la description du voisin normal que je faisais plus haut s’applique bien à ce f…. c.., et que vous, au moins, n’êtes pas comme cela.
Maintenant si c’est votre voisine qui vous demande cette dédicace, faites comme vous l’entendez.
3 - Avant hier
Né avec le début de cette deuxième moitié de siècle, je fais partie de ces enfants nés sur la « grande échelle » chère à Debré, ou encore de ceux que l’on classe dans les enfants du baby-boom, encore appelés les enfants d’après-guerre.
De la jeunesse de mes parents je n’ai pas su grand-chose, sinon quelques anecdotes racontées comme cela en passant, toujours à propos d’un ou d’une autre. Peut-être n’y avait-il rien à dire, peut-être que ce qu’ils ont vécu dans leur enfance ou leur adolescence a été occulté par les années difficiles de la période 39-45. Rien en tout cas ou presque n’a filtré de cette période.
Provinciaux d’origine, ils sont, comme beaucoup de ceux de leur génération, montés à Paris après leur mariage. Cette émigration, ce grand chambardement comme disent les Cajuns, les a amené dans la capitale en pleine période de restriction. C’est de ce moment-là que datent mes premiers souvenirs. Peu nombreux, ceux-ci sont tous des traces plus ou moins précises de bons moments.
Nous habitions en ces temps-là un arrondissement de Paris dont j’ai complètement oublié duquel il pouvait bien s’agir. 12e ? 13e ? Plus probablement aucun de ces deux-là. Mais cela a-t-il une grande importance ? Ce dont je me souviens parfaitement par contre, c’est de cette ambiance bon enfant qui régnait dans le quartier.
Trois commerçantes en particulier ont profondément marqué mon jeune esprit : la boulangère, la crémière, la mercière.
Je me souviens de la boulangère pour l’odeur de sa boutique et son sourire permanent.
Cette petite bonne femme avait le privilège de vivre sa journée dans l’odeur de pain frais et de viennoiserie chaude. Je pense aujourd’hui qu’il faut chercher là la raison de sa bonne humeur constante et de sa joie de vivre. J’ai gardé d’elle l’image d’une jeune femme, blonde, dont le visage était entouré de longues et lourdes nattes dorées comme les pains qu’elle vendait. Elle avait du reste un pain dont les entailles de la croûte rappelaient ses nattes.
Toujours croustillant et chaud, ce pain a sûrement été à l’origine de mes premiers émois sensuels. En le portant serré contre moi il me communiquait sa chaleur, son odeur, et son toucher un peu rêche était pour moi comme la plus délicieuse des caresses. Maintenant, je pense que ce pain était comme un trait d’union entre cette première femme de ma vie (après ma mère) et moi. Je suis persuadé que, enfant, je n’ai jamais imaginé que les autres avaient droit au même pain, donné avec le même sourire, et en tiraient le même plaisir, les mêmes sensations. Je ne lui ai jamais adressé la parole autrement que pour lui acheter son pain délicieux, comme ma mère me l’avait appris en disant « bonjour madame, s’il vous plaît madame, merci madame, au revoir madame ». Mais aujourd’hui encore, lorsque je croise, dans la rue ou dans une des nombreuses occasions que procure une vie professionnelle bien remplie, une jeune femme blonde avec des nattes longues et lourdes, il me vient aux narines une odeur de pain chaud. Ces jeunes femmes blondes avec des nattes longues et lourdes j’en ai peu connu, mais à chaque fois l’odeur fraîche et un peu acidulée de leur corps a tout de suite été associée à celle de la farine de froment.
La crémière, elle, était d’un tout autre genre. Femme grande et charpentée, elle m’avait marqué par sa grande taille, sa voix douce et chaude, mais aussi et peut-être surtout par sa forte poitrine et ses cheveux roux. Ce contraste entre le blanc quasi chirurgical de la boutique, de sa tenue, de beaucoup des produits proposés et sa chevelure flamboyante reste pour moi aujourd’hui encore un émerveillement. Cela me fait penser à ces couchers de soleil en hiver, après une journée froide et sèche, lorsque l’air du soir est pur. Sur le paysage enneigé, le lent déclin de cette grosse boule rouge orangé, qui petit à petit colore le ciel en ce rouge si particulier annonciateur de beau temps pour le lendemain, me ramène à cette boutique ou se déplaçait sur un fond tout aussi immaculé, une belle chevelure rousse dont les reflets dans les faïences blanches du mur ne pouvaient qu’être annonciateurs de bonnes nouvelles. Associée à cette crémière, il y a l’odeur caractéristique des laitages, odeur fraîche, acidulée, odeur de propre, odeur de femme une fois encore. Je n’ai jamais eu l’occasion d’aimer une rousse, et je dois dire que cela me manque un peu. Je suis sûr que je retrouverais auprès d’elle cette sensation de sérénité vespérale, cette sensation de frais. Mais j’ai encore le temps de vérifier cela.
La mercière était elle d’un tout autre genre. C’était une petite grand-mère qui déjà à l’époque devait avoir la plus grande partie de sa vie derrière elle. Aujourd’hui lorsque j’évoque son souvenir, c’est l’image d’une petite pomme un peu grise un peu rouge qui me vient à l’esprit.
D’elle je garde aussi le souvenir des boîtes de coton à broder qu’elle me donnait lorsqu’avec ma mère nous entrions dans sa boutique pour quelques achats auxquels le temps confère comme une sorte de mystère. Ces boîtes, vides, me servaient de jouets. Telles qu’elles, elles étaient camions ou voitures que je lançais dans le couloir de l’appartement. Lorsque ma mère avait le temps, elle en découpait quelques-unes qui devenaient, grâce à la magie de ses doigts habiles, personnages, animaux, maisons, tout un paysage dans lequel je m’enfonçais pour y vivre des aventures dont bien sûr le héros sortait toujours vainqueur.
La boutique où cette femme nous recevait était elle aussi un terrain de jeux. Pas très grande selon mes souvenirs, elle offrait toutes sortes de cachettes, de coins et recoins, et surtout il y planait comme une sorte de mystère. Imaginez, vous avez environ cinq ans, peut-être un peu plus, et aussi haut que puissent porter vos yeux, ce ne sont que tiroirs en bois blanc patiné par le temps, avec sur des porte-étiquettes des inscriptions que vous ne pouvez bien entendu déchiffrer. Ou encore, punaisés sous la poignée de ces tiroirs à trésors, des bouts de rubans, des accessoires de vêtement dont vous n’avez aucune idée de l’utilisation que l’on peut en faire. Il y avait aussi des cartons mystérieux, marqués d’un petit bateau aux voiles blanches, dont vous n’avez su que beaucoup plus tard ce qu’ils contenaient. J’y ai vu là les premiers échantillons de cette lingerie féminine, que j’aime tant aujourd’hui, sans que cela ne provoque à l’époque chez moi la moindre curiosité ni le moindre émoi. Que de temps perdu, et comme j’aimerais pouvoir maintenant que je sais quels trésors ces accessoires sont destinés à mettre en valeur, retrouver cette situation privilégiée qui fut la mienne à l’époque.
Ma mère, qui ne travaillait pas à l’extérieur, ce qui ne veut pas dire qu’elle ne faisait rien, venait souvent dans cette boutique, et tricotant ou brodant passait quelques heures en grande conversation avec cette dame. Je ne sais ce qu’elles pouvaient se raconter, mais cela me donnait l’occasion de profiter d’un autre terrain de jeux que mon habituel couloir, et cela suffisait à mon bonheur.
Ma mère bien sûr est la première des femmes dont il me souvient. Elle était pour moi la douceur, la nourricière, la consolatrice dans ces moments de grand chagrin dont les sanglots vous étouffent, mais aussi et surtout l’autorité, celle qui devait être obéie quel que soit ce qu’elle demandait. Il faut dire que les choses ne devaient pas être simples pour elle, avec un mari (mon père), absent six jours sur sept, toujours par monts et par vaux, chez ses clients. Enfin, c’est ce que je retrouve dans mes souvenirs, car je pense qu’il devait rentrer tous les soirs, mais lorsque nous étions couchés ma sœur et moi. Mais je n’en suis pas sûr.
Jamais elle ne se plaignait de la vie qu’elle menait, en tout cas pas devant nous ou pas dans des termes dont je puisse me souvenir, faute de les avoir compris sur le moment. Avait-elle une vie difficile ? Je n’en sais rien, j’imagine qu’elle devait elle aussi subir le lot quotidien des mères de cette époque, partagées entre les enfants, le ménage, les repas, les lessives sans machine, comme la vaisselle, attendant le soir le retour de son compagnon. Ce qu’était sa vie de couple est pour moi un mystère, et le restera sûrement éternellement. Mais peut-être est-ce mieux comme cela.
Autre femme, ou plutôt promesse de femme, ma sœur. Elle fut pour moi peut-être le meilleur professeur es « fémininerie », si je peux me permettre ce néologisme. C’est auprès d’elle que j’ai appris beaucoup de choses concernant les femmes, pendant le peu de temps que nous avons passé ensemble durant notre enfance. Que l’on se rassure, à la lecture de ce qui précède, on pourrait être tenté de croire que nous avions une âme bien noire. Non, rien de tout cela, à part les petites séances de touche-pipi normales entre enfants aux jeux innocents, nos relations ont été tout ce qu’il peut y avoir de platoniques. Ce qu’elle m’a appris à propos des femmes tient en peu de mots. Même si cela peut être lourd de conséquences dans une vie d’homme. « Les femmes font de toi ce qu’elles veulent », c’est le meilleur résumé que je puisse faire de son enseignement. L’expérience m’a prouvé que ce résumé était le bon.
J’ai donc assez vite quitté le giron maternel et ses douceurs pour me retrouver en pension, au grand air, à environ une heure de route de Paris (à l’époque), la qualité de l’air de la capitale ne convenant guère à ma constitution a priori peu robuste (où ce bon vieux toubib de famille avait-il été chercher ça ?). Pension provinciale, tenue par des « Bons Pères » où les seules jupes que nous pouvions contempler étaient des soutanes ou des habits sacerdotaux. Fermement encadrés par nos mentors, soumis à un règlement probablement pas plus dur qu’ailleurs, mais peu agréable pour des enfants de sept à dix ans, j’ai commencé là l’apprentissage de la vie en collectivité, avec tout ce que cela suppose de contraintes et de frustrations. Loin de l’amour et de la tendresse de mes parents, peu pour ne pas dire pas du tout préparé à ce genre de vie, je ne peux pas dire que j’ai été un modèle de sagesse ni d’assiduité au travail. À cette époque, pas de longs week-ends qui m’auraient permis de rentrer chaque semaine dans ma famille. Je restais donc un bon mois dans ce relatif isolement entre deux visites à Paris. Chaque fin de mois en effet, nous rentrions chez nous, pour ceux qui n’habitaient pas trop loin, avec en poche le carnet de notes et d’appréciations à faire signer par les parents.
Compte tenu de mon assiduité scolaire, ces passages à la maison n’étaient pas toujours aussi enchanteurs qu’ils auraient dû l’être, il faut bien avouer qu’ils étaient parfois même un peu tendus.
À cette situation déjà peu facile s’ajoutaient les tensions dues aux modifications que les uns et les autres devaient apporter à leurs habitudes, afin pour les uns d’accueillir celui qui revenait, et pour l’autre de se couler dans un autre moule disciplinaire et social que celui dans lequel il avait l’habitude de vivre.
Comme chaque cellule, qu’elle soit biologique, familiale ou sociale, ma famille évoluait, se modifiait et s’agrandissait à son rythme. Ce qui n’allait pas sans me poser de nombreux problèmes, car j’étais souvent de fait exclu des événements, du plus bénin au plus important. Même si pendant mes périodes d’absence, j’étais tenu au courant par des courriers réguliers, ces événements me prenaient toujours au dépourvu lorsque de retour à la maison, j’étais confronté à leur matérialité. La naissance d’un frère ou d’une sœur fut pour moi des non-événements, n’ayant pas été confronté à la réalité de la chose.
Contrairement à beaucoup de mes camarades, je n’ai pas été gardé par une nounou, voisine, grand-mère, débarquée en plein milieu de la nuit, plus ou moins ensommeillée, au moment où ma mère partait pour la maternité. De plus, n’ayant que peu vu ma mère enceinte et n’ayant que très peu eu à subir les effets de ses grossesses, je ne pouvais pas me sentir ni impliqué, ni concerné par la chose. Avec mes autres frères et sœurs, sans dire qu’ils me sont étrangers, il n’y a pas eu cette complicité que j’avais avec ma cadette.
De plus, lorsque nous étions tous réunis, ma position d’aîné se transformait très vite en corvée. « Tu comprends, ils sont petits, cède donc sur ceci, ou sur cela » « Tu es l’ainé, tu dois montrer l’exemple » « serre-toi un peu que les petits s’installent comme il faut », etc. Comment ne pas considérer « les petits » comme des empêcheurs de tourner en rond ? Et puis, quand on est grand, on se débrouille tout seul ? Allons-y, débrouillons-nous. Pour frustrante qu’elle fût, cette expérience a forgé mon caractère indépendant. « Débrouillons-nous » devint mon maître mot. Mais ce « débrouillons-nous », pour salutaire qu’il soit dans bien des cas, mérite une explication de ses règles, un mode d’emploi. Ayant pris goût à cette indépendance, je n’ai pas vu l’utilité de demander comment on s’en servait, de peur, probablement de la perdre. Je pense que si j’avais consulté qui de droit, père, mère, autorité morale telle que professeurs ou confesseur (si, si c’était obligatoire d’en avoir un !), les choses eussent été différentes. Mais, bon. Les choses ont été ce qu’elles ont été et il est trop tard pour revenir en arrière.
Je me suis donc forgé seul ma ligne de conduite et même lorsqu’elle n’était pas complètement compatible avec celle du groupe dans lequel j’évoluais, c’était la mienne et j’y restais fidèle. Ce qui n’a pas toujours facilité mes rapports avec les autres, qu’ils soient camarades de pensionnat, enseignants, parents ou peu importe qui.