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Temps de lecture estimé : 24 mn
25/04/10
corrigé 12/06/21
Résumé:  Suite à leur stage, Roméo et Flora sont tous deux promus à un poste à responsabilité ; leur directeur leur demande de recruter une secrétaire. Ça pourrait bien être Lisa...
Critères:  nonéro théatre humour québec -théâtre
Auteur : Gufti Shank            Envoi mini-message

Série : Roméo et Juliette - La nouvelle Eloïse

Chapitre 02 / 05
Roméo et Juliette - La nouvelle Eloïse - Acte II

Les personnages principaux :


Juliette

Cassandra : la meilleure amie de Juliette


Roméo

Eloïse : la meilleure amie de Roméo ; elle vit avec Juliette et Roméo

Siriac : le meilleur ami de Roméo et le petit ami de Cassandra


Flora : une collègue de Roméo

Daphné : la sœur de Flora


Marcel : le patron de Roméo et Flora


Les personnages secondaires


Conrad : un employé de l’entreprise où travaillent Roméo et Flora




LA NOUVELLE ELOÏSE



Résumé de l’acte I : Eloïse est partie pour un long voyage de quatre mois à travers toute l’Amérique. Juliette et Roméo se languissent de son absence et comptent les jours avant son retour. Flora continue régulièrement de tenter de séduire Roméo, qui résiste péniblement aux avances de la jeune femme. Tous deux sont envoyés une semaine en stage à l’étranger, au grand désespoir de Juliette.

Quand Eloïse revient enfin, Siriac ne la reconnaît qu’à peine ; elle a beaucoup changé physiquement, mais est plus belle que jamais. Lors d’une soirée de retrouvailles entre amis, Eloïse avoue qu’elle n’a pas résisté quatre mois sans sexe et a craqué pour un jeune homme.

Le lecteur apprend finalement qu’en fait d’avoir craqué pour un jeune homme, Eloïse a enchaîné les expériences sexuelles débridées ; mais également que Roméo a succombé à Flora pendant son stage et que Juliette elle-même a trouvé du réconfort dans les bras d’une autre femme pendant l’absence d’Eloïse.




Acte II, scène 1

Samedi 26 mai, 10 h 35

L’appartement de Juliette et Roméo

(Personne)



(Les gémissements mêlés des trois voix d’Eloïse, Juliette et Roméo proviennent de la chambre voisine. Leur rythme va croissant pendant un instant. Un hurlement saccadé de Juliette couvre alors les autres voix, avant de s’éteindre dans un râle. Les deux autres séries de cris s’achèvent bientôt en longues plaintes de plaisir.)


(Un silence. La porte de la chambre s’ouvre. Eloïse entre, nue.)


Eloïse : Aaaaah, ça m’a drôlement manqué, ces petits réveils sympas…


(Elle traverse la pièce et sort vers les toilettes. Roméo entre, également nu, le sexe encore quelque peu gonflé. Il bâille vastement, se gratte entre les jambes et sort vers la salle de bains. On entend le bruit de la chasse d’eau. Eloïse revient.)


Eloïse : Roméo, je te laisse préparer le petit-déj ?


(Roméo revient, vêtu d’un peignoir. Il bâille encore.)


Roméo : Tu crois ?


(Elle l’embrasse.)


Eloïse : T’es un amour… Je vais réveiller Juliette, je crois qu’elle s’est rendormie…


(Roméo la regarde en souriant. Eloïse glisse une main entre les pans du peignoir de Roméo, jusqu’entre ses cuisses.)


Eloïse (caressant quelque peu Roméo) : Si jamais t’as encore un peu la pêche, tu nous rejoins ?


(Elle l’embrasse encore puis sort vers la chambre sous les yeux amusés de Roméo.)






Acte II, scène 2

Samedi 26 mai, 13 h 40

L’appartement de Juliette et Roméo

(Personne)



La voix de Juliette (provenant de la chambre voisine) : Bon, allez, on se lève, quand même ?






Acte II, scène 3

Samedi 26 mai, 16 h 20

Le salon de Flora

(Flora, Daphné)



(Les deux jeunes femmes sont attablées et discutent, une tasse de thé à la main.)



Daphné : Et du coup, tu vas monter en grade ?

Flora : C’est ce que j’ai cru comprendre. Visiblement, d’après ce que m’a dit mon chef, Roméo et moi allons être promus en ressources humaines et management.

Daphné : Tous les deux ?

Flora (ravie) : Oui !

Daphné : C’est curieux. Ou alors, ils vous ont fait faire le stage à tous les deux, mais ils ne vont en garder qu’un… Si ça se trouve, tu seras sous les ordres de Roméo…

Flora : Ou l’inverse ! Mais non, je crois pas. Le responsable des ressources humaines part en retraite, et comme la boîte s’agrandit, c’est possible qu’ils veuillent deux personnes pour le remplacer.


(Un silence. Elles boivent quelques gorgées de thé.)


Flora : On va peut-être bosser dans le même bureau, Roméo et moi…

Daphné : Ouais, autant dire que vous allez pas bosser souvent…


(Flora rigole.)


Daphné : Et au stage ? T’as couché avec lui ?

Flora : Ouaaaiis ! Comme jamais ! Ça faisait plusieurs mois qu’il me résistait, mais là, il s’est rattrapé !

Daphné (souriant) : Et c’était bien ?

Flora : C’était top ! C’est incroyable, mais j’éprouve avec lui bien plus de plaisir qu’avec n’importe qui d’autre…

Daphné : C’est pas un peu psychologique, ça ?

Flora : Comment ça ?

Daphné : Eh ben justement le fait de savoir qu’il te résiste habituellement… et puis aussi qu’il partage sa vie avec deux filles super canons…

Flora : Tu les trouves canons, ses deux greluches ?

Daphné : Ben quand même, faut reconnaître qu’elles sont bien foutues et qu’elles sont plutôt mignonnes.

Flora : Mmmouais…


(Un silence.)


Flora : En tout cas, ça m’a donné l’impression d’une semaine de vacances.

Daphné : Et alors ? tu vas encore essayer de le piquer à ses copines ?

Flora (pensive) : J’sais pas…






Acte II, scène 4

Lundi 28 mai, 9 h 10

Le bureau de Marcel, sur le lieu de travail de Flora et Roméo

(Roméo, Flora, Marcel)



(Marcel est assis dans le fauteuil du chef d’un côté du bureau. Flora et Roméo prennent place face à lui.)



Marcel : Alors, jeunes gens, comment s’est passé ce stage ?

Flora (enchantée) : Très bien ! C’était formidable !

Roméo (plus mesuré) : Ça a été.

Flora : Oh, Roméo, fais pas ton bougon ! C’était bien, non ?

Marcel : Ça ne s’est pas bien passé, Roméo ?

Roméo : Euh… si, d’un point de vue professionnel, très bien. Mais…

Marcel : C’est l’essentiel ! J’ai déjà reçu le rapport du formateur, ce matin ; lui aussi est content de vous. Aussi, comme je vous le disais, je souhaite que vous intégriez les ressources humaines. Jean-Claude part en retraite à la fin du mois prochain ; ça vous laisse un mois avec lui ; je veux que vous appreniez tout ce qu’il sait et que vous mettiez au mieux en application tout ce que vous avez découvert la semaine dernière.


(Un silence. Flora est ravie. Roméo ne bronche pas.)


Marcel : Pour finir, vous participerez à un autre stage d’ici trois mois, pour achever votre formation à ce poste.

Flora (posant une main sur la cuisse de Roméo) : Tu entends ? C’est super !

Marcel : En revanche, pour ce prochain stage, je ne pourrai pas me passer de vous deux en même temps. Vous irez chacun votre tour.

Flora (subitement déçue) : Ah…

Roméo : Monsieur le directeur…

Marcel : Oui ?

Roméo : Est-ce que vous remplacerez réellement Jean-Claude par deux personnes ou est-ce que l’un de nous deux doit s’attendre à ne pas être maintenu à ce nouveau poste ?

Marcel : Ne vous inquiétez pas, Roméo. Comme vous le savez, l’entreprise est en pleine expansion. Nous avons doublé notre masse salariale en cinq ans. Jean-Claude est plus que dépassé, actuellement. Et d’autre part, j’attends plus de vous que simplement le remplacer : je veux que vous fassiez également de la prospective, et probablement du recrutement. Deux postes, ce ne sera pas du luxe, croyez-moi.


(Un silence.)


Marcel : En fait, ce sera même trois postes : vous aurez besoin d’une secrétaire.

Roméo (étonné): Une secrétaire ?

Flora : Et pourquoi pas un secrétaire ?


(Marcel et Roméo la regardent curieusement.)


Marcel : N’importe, vous vous débrouillerez. De toute façon, ce sera votre premier travail : recruter quelqu’un de compétent à ce poste. Vous dirigerez vous-mêmes les entretiens d’embauche, et Jean-Claude vous assistera.


(Un silence. Flora et Roméo digèrent les informations.)


Marcel : Vous avez des questions ?

Flora : Oui : notre salaire ?

Marcel (souriant) : Vous ne perdez pas le nord, Flora, hein ? Eh bien, je vous augmente de cinq cents euros.

Flora (faussement déçue) : C’est tout ?

Marcel : Nets.

Flora (théâtrale) : Pensez à Roméo, monsieur, qui a deux bouches à nourrir…

Marcel : Vous avez eu un enfant, Roméo ?

Flora : Non, mais il fait ménage à trois.

Roméo (mal à l’aise) : Mais arrête, Flora !

Marcel (rigolant) : Allez, va pour six cents. Par contre, je dois vous prévenir, vous pouvez dire adieu à vos horaires de bureau. Réfléchissez, et dès que vous aurez pris votre décision, informez m’en.

Flora : C’est tout réfléchi : j’accepte et vous remercie de votre confiance.

Marcel : Bien. Et vous, Roméo ?

Roméo (hésitant) : Eh bien… c’est très intéressant… et je suis très honoré de cette proposition…


(Un silence.)


Marcel : Mais ?

Roméo : Mais… je sais pas trop… je crois que j’ai besoin de réfléchir… Je vous donne ma réponse demain matin.

Marcel : Entendu. Flora, vous passerez à mon secrétariat signer votre nouveau contrat puis vous irez retrouver Jean-Claude.

Flora : Okay. Merci.


(Elle se lève. Roméo aussi.)


Marcel : Attendez, Roméo.


(Flora sort.)


Roméo : Oui ?

Marcel : Je ne comprends pas vos réticences, Roméo. Vous êtes un bon élément, vous faites un excellent travail, vous savez que je suis content de vous ; vous voici face à une belle promotion et vous paraissez hésiter ?

Roméo : Euh… c’est-à-dire que… mes réticences ne sont pas du tout professionnelles, mais bel et bien relatives à ma vie privée.

Marcel : Ah… dans ce cas, je n’y peux rien. Réfléchissez, si vous voulez, mais pas trop longtemps ! Et prenez la bonne décision !

Roméo : Je vous donne ma réponse demain matin, monsieur.

Marcel : À la première heure ! Mais dites-moi, ça a l’air rudement compliqué, votre vie privée…


(Roméo soupire profondément.)


Roméo : Si vous saviez…


(Un silence.)


Roméo : Allez, je retourne travailler. Merci encore, monsieur.

Marcel : Vous me remercierez demain, je l’espère.


(Roméo se dirige vers la porte. Marcel agite un dossier.)


Marcel : Ah, dites à Flora de repasser me voir aussi vite que possible, j’ai oublié de lui remettre ceci.


(Roméo sourit et sort. Marcel se cale en arrière dans son fauteuil et déboutonne son pantalon.)






Acte II, scène 5

Lundi 28 mai, 20 h 40

L’appartement de Juliette et Roméo

(Juliette, Roméo, Eloïse)



(Tous trois sont attablés et achèvent de dîner.)



Roméo : Et du coup, je sais pas quoi répondre. D’un côté, il y a la progression de carrière, un renouveau dans mon boulot, une importante augmentation. D’un autre côté, il y a les horaires et…

Juliette : Et être tout le temps dans le même bureau que cette salope !

Eloïse : Sans compter la chaaaarmante secrétaire que tu ne vas pas manquer de choisir…


(Roméo soupire.)


Roméo : Voilà… C’est pour ça que j’ai pas dit oui. Parce que je savais que vous alliez me prendre la tête. J’étais sûr que vous alliez me faire chier. Moi qui espérais trouver les deux femmes de ma vie fières de moi, de ma réussite professionnelle…


(Un silence.)


Eloïse : Tu veux qu’on se mette à pleurer ?

Roméo : Bon, mais pour le coup, la secrétaire, y a pas que moi qui vais la choisir ; on va être trois à décider, si ce n’est quatre : ça m’étonnerait que le chef nous laisse faire tout seuls directement.

Juliette : C’est censé nous rassurer : ton chef obsédé, ta collègue salope et un type qui s’en fout puisqu’il se barre en retraite…


(Un silence.)


Roméo (avec un sourire) : Alors, d’un autre côté, si je dis non, Flora devient ma supérieure hiérarchique… Je serai obligé de lui obéir…

Juliette (ennuyée) : Ah merde !

Eloïse : Oui, ça pue, ça…


(Un silence.)


Roméo (amusé, se levant) : Bon, eh ben, réfléchissez. Moi je vais boire un coup avec Siriac pour fêter ma promotion…

Juliette : Ta promotion ?! Parce que ça y est, c’est décidé ?

Eloïse : Et tu nous laisses tout débarrasser et ranger toutes seules ?

Roméo (rigolant) : Bah, quand j’aurai six cents balles de plus, on prendra une femme de ménage…

Juliette : C’est ça ! Une secrétaire, une femme de ménage… pourquoi pas un harem !

Roméo : Et encore… tu oublies Flora !


(Juliette grogne et lui lance sa serviette en pleine tête. Roméo rigole et commence à débarrasser la table.)






Acte II, scène 6

Mardi 29 mai, 18 h 50

Le salon de Flora

(Flora, Daphné)



(Les deux jeunes femmes sont assises dans le canapé et discutent.)



Daphné : Et alors ? qu’est-ce qu’il a répondu ?

Flora : Bah il a dit oui, évidemment. Je ne sais pas pourquoi il a pas dit oui directement… Sans doute à cause de ses greluches…

Daphné : Ou à cause de toi…

Flora : Tu parles ! Il peut pas se passer de moi ! Il est comme moi…

Daphné : Justement. Pour se passer d’un truc dont on est dépendant, il faut plus jamais y toucher…

Flora : Mouais… enfin pour ce qu’il me touche… Deux ou trois coups par-ci par-là…


(Un silence.)


Flora : Tu sais quoi ? J’ai couché avec personne depuis Roméo vendredi matin.

Daphné : C’est vrai ? Eh ben… tu vieillis…

Flora : Enfin, si, y a eu mon patron, mais là, c’est pas pareil.

Daphné : Ah…

Flora : Et puis, non, d’ailleurs, tout compte fait, je ne lui ai fait qu’une pipe…


(Un silence.)


Daphné : Et quand c’est que vous recrutez votre secrétaire ?

Flora : Je sais pas. Au plus vite. Parce que ?

Daphné : Ben…

Flora : Oh mais oui ! T’as raison, bien sûr ! T’as qu’à postuler, t’as de bonnes chances d’être prise ! Et là, je te promets que Roméo ne nous résistera pas !

Daphné : Euh… attends, si je postule, c’est pas pour sucer Roméo, tu sais…

Flora : Pas que pour le sucer, disons.

Daphné : Euh… c’est surtout pour avoir un boulot moins pénible que le mien.

Flora : Oh pour ça, t’en fais pas ! Je ferai en sorte que le boulot te soit le plus agréable possible…






Acte II, scène 7

Mercredi 30 mai, 17 h 45

L’appartement de Juliette et Roméo

(Eloïse)



(Eloïse est assise à la table du salon et pianote sur un ordinateur portable. Juliette entre, élégamment vêtue.)


Juliette : Salut ma puce !

Eloïse : Salut !


(Juliette vient embrasser Eloïse.)


Eloïse (sérieuse) : Je suis contente que tu rentres avant Roméo ; je voulais te parler seule à seule.

Juliette (posant son sac) : Ouh là ! Tu m’inquiètes…

Eloïse : Non, non, t’en fais pas, y a rien de grave. C’est juste que je voulais te parler d’une idée que j’ai eue.


(Juliette ôte sa veste et s’assoit à côté d’Eloïse.)


Juliette : Je t’écoute.

Eloïse : Son histoire de secrétaire qu’il nous bassine depuis trois jours, eh ben j’ai envie de postuler…

Juliette : ???

Eloïse : Pour trois raisons : la première, c’est que j’ai envie de travailler. Pour moi, pour m’épanouir quelque part ; je veux dire quelque part ailleurs que dans un lit avec vous… Et puis aussi pour vous, ou disons pour nous, pour ne plus être une charge…

Juliette : Mais tu n’as jamais été une…

Eloïse (l’interrompant) : Attends, laisse-moi continuer ! En plus, si je travaillais, même au smic, ça nous ferait mille euros de plus ; avec ses six cents à lui, on pourrait se payer une belle baraque ou des vacances de rêve ! Et crois-moi, les vacances de rêve, c’est super, mais c’est pas donné… j’ai vu une partie de ce qu’avait déboursé le mec de ma mère.

Juliette : Tu sais, il ne…

Eloïse : Je continue ! Tu m’engueuleras après ! La seconde raison, c’est que je pense que, dans l’absolu, j’aurais des chances d’être prise ; ça doit pas être si éloigné de ça du boulot que je faisais avant de vous rencontrer. Et la troisième raison, c’est que si jamais je suis prise, d’une part Flora pourra difficilement approcher Roméo, et d’autre part, sur le même principe, il nous fera pas chier avec sa secrétaire…


(Un silence.)


Eloïse : Ça y est, j’ai terminé, là…

Juliette (souriant) : Oui, oui, je sais, mais j’étais en train de réfléchir à tout ce que ça impliquait…

Eloïse : Oui… moi, j’ai passé la journée à y réfléchir.

Juliette : De toute façon, la seule vraie raison, c’est la première. Disons que la troisième, ce sera notre petit bonus. Mais la deuxième, j’en doute encore. Pas dans l’absolu, mais dans les faits.

Eloïse : Oui, je…

Juliette (l’interrompant) : Non, maintenant, c’est toi qui m’écoutes ! Sur le fait que tu aies envie de travailler, il n’y a rien à redire. Je comprends parfaitement. Juste, ce que je voudrais te dire, c’est qu’il ne faut pas que ce soit une simple question financière et qu’en aucun cas tu ne dois te sentir une charge pour nous. Je t’aime, Roméo t’aime, on t’aime, ce n’est pas comme si on hébergeait un vague copain…

Eloïse : Je sais bien, mais…

Juliette : Attends ! Ensuite, si tu as envie de travailler, trouve surtout un boulot qui te plaît. Je veux dire : un qui te plaît vraiment ! Ne prends pas un truc dans le simple but de surveiller Roméo.

Eloïse : Tu sais comme je suis ; si je bosse, c’est pas pour faire carrière ; je veux un truc cool, sans prise de tête et surtout sans la moindre responsabilité. Et le boulot de secrétariat, a priori, ça me déplaît pas… Et dans ces circonstances-là, je suis même sûre que ça pourra m’amuser vraiment…


(Un silence.)


Juliette (souriant) : Bah après, c’est vrai que l’idée est plutôt rigolote…

Eloïse : Oui.

Juliette : Mais par contre, honnêtement, je vois pas comment tu pourrais être prise. D’après ce qu’il nous a dit, c’est plus ou moins lui et l’autre truie qui vont recruter. Lui, ça m’étonnerait qu’il soit ravi, et elle, c’est évident qu’elle voudra jamais de toi.

Eloïse (souriant) : Oui, sauf si elle ne me reconnaît pas…

Juliette (incrédule) : Si elle ne te…

Eloïse : Rappelle-toi de la réaction de Siriac lorsqu’il m’a vue la semaine dernière…

Juliette : Oui mais ça a duré trois secondes.

Eloïse : Parce qu’on était ici, qu’il savait que je devais être là, qu’il s’attendait à me voir, que je lui ai parlé, que je lui ai demandé s’il me reconnaissait pas… Mais quelqu’un qui m’a vue que trois ou quatre fois, qui m’a pas vue depuis presque un an…

Juliette (dubitative) : Mouais…

Eloïse (changeant sa voix et prenant un lourd accent) : …qui m’entendra parler autrement…


(Juliette éclate de rire.)


Juliette : Où c’est que t’as trouvé cet accent-là ?

Eloïse : Au Québec. Ils sont hallucinants, là-bas…

Juliette : Ouais, enfin, même, ça me paraît pas gagné. Moi, même si l’autre salope changeait de coupe de cheveux, de voix, de tronche, ou même prenait ou perdait vingt kilos, je crois que je la reconnaîtrais partout…

Eloïse (souriant) : Oui mais moi j’ai pas couché avec elle…


(Juliette sourit, mais avec amertume.)


Juliette (péniblement) : C’est une erreur de parcours. Je n’étais pas dans mon état normal…

Eloïse : Tu sais, moi, au final, je l’ai pas côtoyée souvent. On s’est vues une première fois à une soirée chez elle quand je sortais avec Roméo avant qu’on se connaisse, toi et moi ; elle avait même pas dû faire attention à moi. Une deuxième fois chez elle encore quand on était allées y récupérer Roméo, tu t’en souviens ?

Juliette : Oui, même si je préférerais l’avoir oublié…

Eloïse : Ensuite on s’est croisées au restau chinois où Siriac avait fait son sketch sur les voitures.

Juliette (pensive) : Ah… oui…

Eloïse : Et puis peu de temps après chez Cassandra, quand tu l’avais assommée.

Juliette : De quoi ?

Eloïse : Tu te souviens pas que tu t’étais pointée avec un espèce de pantin et Roméo avec Flora ? Et tu avais frappé Flora…

Juliette (souriant) : Si, ça me revient…

Eloïse (amère) : Ensuite je l’ai vue ici même, quand tu avais baisé avec elle…

Juliette : Je… excuse-moi…

Eloïse : Et la dernière fois où je l’ai vue, c’est quand elle a débarqué dans ta douche, tu te souviens ?

Juliette (amusée) : Oui… Là, c’est toi qui l’avais assommée…

Eloïse (innocente) : C’était pas moi, elle a juste glissé malencontreusement…


(Juliette sourit.)


Juliette : En même temps, ça fait quand même pas mal de fois…

Eloïse : Oui, mais si tu regardes bien, à chaque fois, j’étais pas franchement l’objet de ses regards ou de ses attentions. Quand c’était pas Roméo, c’était toi…


(Juliette soupire.)


Juliette : Oui, peut-être…

Eloïse : De toute façon, au pire elle me reconnaît et puis voilà. Je risque pas ma vie…

Juliette : C’est sûr.


(Eloïse va chercher un étui à lunettes sur un meuble.)


Eloïse : Et tiens, regarde, j’ai trouvé ça.


(Elle prend les lunettes et se les met.)


Juliette : Ça te va bien… et, effectivement, on te reconnaîtra encore un peu moins…


(Eloïse repose les lunettes.)


Juliette : Et pour ton nom ? ton prénom ? Ça va forcément te trahir, non ?

Eloïse : Je pense pas que Flora connaisse mon nom. Et mon prénom, ben je le changerai, c’est pas très grave…


(Un silence.)


Eloïse : Maintenant, il reste à décider si on en parle à Roméo.

Juliette : Je suis pas sûre que la perspective de t’avoir comme secrétaire et sur sa route jusqu’au cul de Flora le réjouisse…


(Un silence.)


Eloïse : L’idéal, ce serait presque que je puisse être embauchée sans qu’il le sache.

Juliette : Ben c’est pas gagné si c’est lui qui fait le recrutement.

Eloïse : J’sais bien…


(Un silence.)


Juliette : Attends, j’ai peut-être une idée… Tu peux sans doute passer direct par son chef… Tu te rappelles, Roméo disait que c’était un gros obsédé, qu’il pensait qu’au cul, qu’il payait Flora pour qu’elle le suce…


(Un silence.)


Eloïse : Et donc ? En gros, tu proposes que je suce le patron pour avoir le poste ?

Juliette (souriant) : Ah bah il faut savoir ce qu’on veut, hein…






Acte II, scène 8

Jeudi 31 mai, 9 h 10

Le bureau de Marcel

(Eloïse, Marcel)



(Marcel est assis à son bureau ; Eloïse lui fait face, debout, radieuse, portant des lunettes, élégamment vêtue d’une robe moulante courte et délicieusement échancrée, la poitrine rehaussée. Il la regarde intensément.)


Eloïse (excessivement obséquieuse et changeant sa voix) : Je vous remercie de m’accorder cet entretien, monsieur le directeur.

Marcel : Je vous en prie. Ma secrétaire m’a dit que vous souhaitiez me rencontrer au sujet d’un emploi ?

Eloïse : Oui, je crois savoir que vous recherchez une autre secrétaire.

Marcel : En effet, mademoiselle, nous cherchons une secrétaire, mais ce n’est pas pour moi…


(Il la dévisage un moment, puis l’observe scrupuleusement de la tête aux pieds, s’attardant sur sa poitrine puis sur ses hanches.)


Marcel (à part) : … hélas.


(Il finit par jeter distraitement un œil sur un feuillet.)


Marcel : Selon votre CV, vous semblez parfaitement correspondre au profil…


(Eloïse cligne des yeux en souriant avec émoi.)


Marcel : Puis-je vous demander comment vous avez eu connaissance de notre entreprise et du fait que nous recherchions une secrétaire ?

Eloïse (extravagante) : Mon père a un cousin dont le fils est ami avec le neveu du beau-frère de la tante d’un de vos employés.

Marcel (impressionné) : Ah ?

Eloïse (hésitante) : Et surtout, j’ai lu une annonce d’offre d’emploi sur Internet.

Marcel : Tiens, je ne savais pas qu’ils avaient diffusé une annonce. Ils perdent pas de temps, ces deux-là…


(Un silence.)


Marcel : Voyez-vous, mademoiselle…


(Il jette un œil sur le feuillet.)


Marcel : …mademoiselle Lisa, nous sommes en train de recréer entièrement notre service des ressources humaines. La secrétaire que nous cherchons devra travailler sous la responsabilité de deux personnes, et j’aurais souhaité que ce soit eux qui s’occupent du recrutement…

Eloïse : Je comprends, monsieur.


(Il regarde à nouveau fixement sa poitrine, puis ses hanches.)


Marcel : Toutefois, je sais reconnaître un bon c…


(Il hésite.)


Marcel (se reprenant) : Je sais reconnaître un bon profil, et si je suis arrivé à la place que j’occupe aujourd’hui, c’est notamment parce que j’ai su ne pas me poser trop de questions lorsque cela n’était pas nécessaire.


(Eloïse sourit poliment.)


Marcel : Asseyez-vous, je vous en prie.


(Eloïse s’assoit. Marcel observe plus précisément les feuillets qu’il tient toujours.)


Eloïse : Si je peux me permettre, monsieur…


(Il relève la tête d’un air interrogateur.)


Eloïse : Il y a une petite erreur sur mon CV.


(Pour désigner du doigt une ligne du feuillet que tient Marcel, elle se lève et se penche en avant par-dessus le bureau, portant ainsi son décolleté juste sous le nez de Marcel, qui y plonge un regard surabondant.)


Eloïse (théâtrale) : Ici, vous voyez ?

Marcel (sans quitter des yeux la poitrine d’Eloïse) : Oui…

Eloïse : C’est 2006 à la place de 2005.

Marcel : C’est… c’est noté… merci.


(Eloïse se rassoit. Marcel étudie encore vaguement et en hâte les feuillets qu’il tient.)


Marcel (reposant les feuillets) : Inutile de tergiverser ! Je suis sûr que vous ferez un excellent travail ! Vous êtes embauchée ! Félicitations !

Eloïse (ravie) : Merci beaucoup, monsieur ! Je ne vous décevrai pas !

Marcel : Je l’espère ! Et si vos capacités sont à la hauteur de ce que je devine, vous avez beaucoup d’avenir dans notre entreprise…


(Il décroche un téléphone et appuie une touche.)


Marcel (au téléphone) : Alice, vous pouvez me préparer un contrat de travail type secrétariat ? Merci.


(Il est sur le point de raccrocher lorsqu’il reprend vivement le combiné.)


Marcel (au téléphone) : Attendez, Alice : pouvez-vous également m’envoyer Flora et Roméo ?


(Il raccroche.)


Marcel : Neuf heures, douze heures trente et treize heures trente, dix-sept heures trente ; vendredi après-midi libre ; période d’essai d’un mois ; smic horaire fois un virgule deux pour commencer ; possibilités de primes, Flora vous en parlera sans doute.

Eloïse (ravie) : Bien.

Marcel : Vous avez des questions ?

Eloïse : Je commence quand ?

Marcel : Demain, si vous êtes libre. Et ça tombe bien, c’est le premier juin.


(On frappe à la porte du bureau.)


Marcel (fort) : Entrez !


(Flora entre.)


Flora : Bonjour.

Marcel : Ah, bonjour Flora. Venez, approchez. Je vous présente… euh…


(Il feuillette rapidement le dossier qu’il tenait précédemment.)


Eloïse (se levant et souriant) : Lisa.


(Flora regarde curieusement Eloïse.)


Marcel : Oui, excusez-moi. Lisa, qui sera votre nouvelle secrétaire.

Flora (étonnée) : Ah ? Mais… je croyais que…

Marcel : Candidature spontanée, excellent dossier, références exemplaires et profil parfaitement adapté au poste. Je me suis permis de vous faire gagner du temps.

Flora : Bien…


(Flora regarde à nouveau Eloïse attentivement. Celle-ci paraît mal à l’aise. Flora lui tend la main.)


Flora : Bonjour.

Eloïse (complaisante): Bonjour madame.

Flora (à Eloïse) : On ne s’est pas déjà vues quelque part ?

Eloïse : Je ne crois pas, ça ne me dit rien…

Flora : C’est curieux, j’ai l’impression que…


(Elle s’interrompt et observe rapidement la poitrine d’Eloïse, puis sa taille et ses hanches et à nouveau son visage.)


Flora (haussant les épaules) : Non, c’est sans doute juste que vous me rappelez quelqu’un… Eh bien, soyez la bienvenue parmi nous.

Eloïse : Merci.

Marcel (à Flora) : Je compte sur vous pour lui expliquer le fonctionnement de l’entreprise.

Flora : Entendu.

Marcel (avec un clin d’œil) : Tout le fonctionnement…

Flora (souriant) : Avec plaisir.

Marcel : Bien. Et Roméo ? Il n’est pas avec vous ?

Flora : Il terminait une commande avec un fournisseur.

Marcel : Oh, mais ce n’est plus à vous de vous occuper de ce genre de choses !

Flora : C’est ce que je lui ai dit, mais vous savez comme il est, il ne veut pas lâcher un dossier en cours.

Marcel : C’est tout à son honneur. Bon, dès qu’il aura terminé, vous me l’envoyez.


(Un silence.)


Marcel : Mademoiselle… euh…

Eloïse : Lisa.

Marcel : Lisa, oui, merci. Je ne vais pas réussir à le retenir… Mademoiselle Lisa, si vous avez quelques minutes, après avoir signé votre contrat, vous rejoindrez Flora qui vous fera visiter l’entreprise et vous expliquera rapidement en quoi consistera votre travail.

Eloïse : Volontiers.

Flora (à Eloïse) : Je vous attendrai dans mon bureau, le couloir sur votre droite en sortant, puis deuxième porte à gauche.

Marcel : D’ailleurs, ce bureau sera également le vôtre. Comment se passent les travaux, Flora ?

Flora : C’est presque terminé ; ils sont en train de repeindre.

Marcel : Il restera l’installation du nouveau mobilier. Vous croyez que mademoiselle…


(Il hésite en regardant Eloïse.)


Eloïse (amusée) : Lisa.

Marcel : Que mademoiselle Lisa pourra s’installer dès demain ?

Flora (souriant) : Bah, au pire elle s’installera à mon bureau et j’irai travailler sur les genoux de Roméo…

Marcel (rigolant, à Eloïse) : Voyez-vous, mademoiselle, Flora et Roméo sont très intimes…

Eloïse (péniblement) : Ah oui ?

Marcel : J’espère que vous parviendrez à supporter leurs frasques…

Eloïse (avec un sourire sanguinaire) : Je ferai de mon mieux…

Flora (s’éloignant) : Je vous attends dans mon bureau, Lisa.

Eloïse : Oui, merci.


(Flora sort. Marcel fait signe à Eloïse de se rasseoir.)


Marcel : Désirez-vous un café ?

Eloïse : Volontiers, merci.


(Il décroche son téléphone et presse une touche.)


Marcel (au téléphone) : Alice ? Vous voulez bien nous apporter deux cafés ? … Merci. … Ainsi que les exemplaires du contrat de travail.


(Il raccroche. On frappe à la porte du bureau.)


Marcel : Entrez !


(Roméo entre. Eloïse est dos à la porte ; il ne l’a pas reconnue.)


Roméo : Bonjour.

Marcel : Bonjour, Roméo, approchez. Je voulais vous présenter votre nouvelle secrétaire, mademoiselle Nina.

Eloïse (se levant) : Lisa.

Marcel (se reprenant) : Mademoiselle Lisa. Rooooh, décidément…


(Roméo s’avance en même temps qu’Eloïse se retourne vers lui. Roméo, la découvrant s’immobilise tout net en poussant une exclamation de surprise.)


Marcel : Eh bien, Roméo, qu’y a-t-il ?

Roméo : Euh… rien… c’est juste que… je ne…


(Eloïse lance à Roméo un clin d’œil et un regard suppliant.)


Roméo : Je ne… je ne m’attendais pas à quelqu’un d’aussi joli…


(Eloïse sourit bêtement en regardant ses pieds et en se retournant.)


Eloïse (faussement intimidée) : Oh ! vous me flattez, monsieur !

Marcel (à part) : C’est vrai qu’elle est bonne !


(Roméo s’approche d’elle et lui tend la main. Eloïse le salue.)


Marcel : Mademoiselle Lisa commence demain. Roméo, je compte sur vous pour évaluer au mieux son travail pendant sa période d’essai d’un mois. Flora vous secondera et se chargera de lui présenter le fonctionnement de l’entreprise.

Roméo (tout bas) : Eh ben… ça va pas être triste…

Marcel : Comment ?

Roméo : Euh… je disais simplement que je n’allais pas m’ennuyer dans mon nouveau bureau…






Acte II, scène 9

Jeudi 31 mai, 10 h 10

Le lieu de travail de Roméo et Flora

La cloison entre leurs deux bureaux a été abattue pour n’en former plus qu’un, très spacieux.

(Roméo, Flora, Conrad)



(Conrad, juché sur un petit échafaudage, est en train de peindre le plafond du bureau au centre de la pièce, où l’on devine la marque encore récente d’une cloison intermédiaire. Flora est appuyée sur un bureau, à gauche de la pièce. Roméo est debout à côté d’elle.)



Roméo (hésitant) : Alors ? Qu’est-ce que tu penses de notre nouvelle secrétaire ?

Flora : Ben pas grand-chose encore. Si ce n’est qu’elle est mignonne. Je sais pourquoi le chef l’a recrutée…

Roméo : Mouais…

Flora : Tu la trouves pas mignonne ?

Roméo : Si, si…

Flora : Elle me fait un peu penser à une de tes greluches, mais en mieux.

Roméo (consterné) : Tu trouves ?


(On frappe à l’une des portes du bureau.)


Conrad : Entrez !


(Flora et Roméo le regardent curieusement.)


Conrad : Euh… désolé… un réflexe sans doute…


(Il se remet à peindre. Eloïse entre près du bureau de Flora.)


Flora : Ah, Lisa ! On parlait de vous, justement…

Eloïse : Ah ?

Flora : Roméo me disait qu’il vous trouvait très belle…

Roméo : Pffff, tu me saoules, Flora !


(Eloïse peine à se retenir de rire.)


Flora : Bon, mais avant qu’il vous saute dessus, je vais vous emmener visiter la boîte…

Eloïse : Je vous suis.


(Elle lance un regard amusé à Roméo avant de sortir à la suite de Flora.)






Acte II, scène 10

Jeudi 31 mai, 11 h 40

L’appartement de Juliette et Roméo

(Eloïse)



(Eloïse va-et-vient dans le salon, un téléphone à la main.)



Eloïse (au téléphone) : Allô Juliette ? … Oui, ça boume, super ! … Oui, ça se passe encore mieux que prévu. … Je suis prise, direct ! … Je te raconterai ce soir en détail, mais j’ai passé la matinée à me marrer.






Acte II, scène 11

Jeudi 31 mai, 12 h 30

Le lieu de travail de Roméo et Flora

(Roméo)



(Roméo est assis à un bureau à droite de la pièce et compose un numéro de téléphone.)



Roméo (au téléphone) : Allô ? Oui, salut, c’est Roméo. … Dis donc, Eloïse, t’as rien à me dire, par hasard ? … Non, elle est partie bouffer. … Ben non, ça m’amuse qu’à moitié. … Non, je sais même pas comment c’est possible, mais je crois pas qu’elle t’ait reconnue. … Oui, moi aussi j’ai repensé à la réaction de Siriac, l’autre soir. … En tout cas, les lunettes te vont à ravir. … Mais sinon, j’insiste, je trouve ça complètement con, ton plan foireux pour me surveiller. … Ben j’espère, que c’est pas que pour ça. …






Acte II, scène 12

Jeudi 31 mai, 18 h 20

L’appartement de Juliette et Roméo

(Juliette, Roméo, Eloïse)



(Juliette et Eloïse sont assises dans le canapé. Roméo fait les cent pas devant elles. Eloïse est pliée en deux.)



Roméo (à Eloïse) : Mais arrête de rire comme une baleine ! Moi ça me fait pas rire !

Juliette (froide) : Moi non plus !

Roméo (à Juliette) : Oh tu vas pas croire toutes les conneries que raconte Flora, quand même !

Eloïse (hennissant) : Je sens que je vais bien m’amuser !

Roméo : Remarque, ça peut s’arrêter assez vite, les confidences de Flora, il suffit que je lui dise qui tu es…

Eloïse : Attends au moins la fin de ma période d’essai…

Juliette (ombrageuse) : Non, moi je veux bien en avoir davantage, des confidences…

Eloïse : Bah oui, parce que pour l’instant, ça va pas bien loin. Elle m’a juste dit que t’étais le meilleur coup qu’elle connaissait…

Roméo : Pfff ! J’en reviens pas du traquenard ! Je vais aller voir mon chef et lui dire qui tu es, et il va te foutre dehors !

Eloïse (amusée) : Tu rigoles ? Ton chef, il m’a embauchée juste pour ma tronche et ma poitrine. Il obéit qu’à sa queue, ça se voit…

Juliette (toisant Roméo) : Tel chef, tel employé…


(Roméo soupire.)


Eloïse : Aaah, je suis pressé d’être à demain…

Juliette (sombre) : Oui, moi aussi, à demain soir, pour en savoir davantage…







Acte II, scène 13

Jeudi 31 mai, 20 h 50

Le salon de Flora

(Flora, Daphné)



(Les deux jeunes femmes sont attablées et discutent en savourant une tasse de thé.)



Flora : Du coup, c’est plié, pour le poste de secrétaire. Je suis désolée, j’ai pas eu mon mot à dire.

Daphné : Et qui c’est, cette nana, tu la connais ?

Flora : Non. Je sais pas où ils l’ont trouvée. Elle a un gros accent, genre québécois. La seule chose que j’ai vue, c’est que mon chef était déjà raide dingue d’elle.

Daphné (amusée) : C’est vrai ?

Flora : Oui. Remarque, c’est une petite bombe, très mignonne, super bien foutue.

Daphné (riant) : Il va falloir que tu surveilles Roméo…

Flora : Oui… Le pauvre, il peinait déjà à se retenir de me sauter dessus quand j’étais dans le bureau d’à côté. Mais si on est deux et dans le même bureau…

Daphné : Parce que tu comptes directement proposer à la secrétaire un plan à trois avec Roméo ?

Flora : Ben, peut-être pas directement, mais…

Daphné : Euh… tu sais, Flora, tout le monde n’est pas comme toi…

Flora : Tu crois ?


(Un silence.)


Flora : Bah, on verra… Mais j’ai déjà plein d’idées… Les greluches n’ont qu’à bien se tenir !


(Un silence.)


Daphné : Qu’est-ce tu fais, ce soir ?

Flora : Pas grand-chose, je pensais passer la soirée cool avec un ou deux copains.

Daphné : Qui ça ?

Flora : Je sais pas trop encore… Tu as des préférences ?

Daphné : Ben… c’est ton cul, hein… tu fais comme tu veux…

Flora : T’as des trucs de prévus, ce soir ?

Daphné (souriant) : Pas grand-chose, non.

Flora (prenant son téléphone) : Alors ? Combien ? Trois, quatre ?

Daphné : Deux ou trois, ce sera déjà pas mal…


(Flora fait défiler son répertoire.)


Flora : Bon, tu me dis… Alain… Alfonso… Amon… Angus…

Daphné : Ben on n’a pas fini…

Flora : Arnaud… Arnold… Arthus… Aziz…

Daphné : On va tirer ça aux dés, plutôt…





À suivre…






Acte II, Bonus scene

?????

Une scène vide

(Personne)




Un spectateur, dans le public : Je proteste ! C’est nul ! Ça manque de cul, dans cet acte ! J’exige d’être remboursé !


(Siriac entre.)


Siriac : Mais enfin, calmez-vous, monsieur ! Nos personnages sont embarqués dans une intrigue complexe, dans laquelle il n’y a pas que du sexe, c’est normal.

Le spectateur : Non ! C’est nul ! Je veux du cul, et du sérieux !


(Siriac se tourne et baisse son pantalon, montrant ses fesses au public.)


Siriac : Est-ce que cela vous suffit ?

Le spectateur : J’ai horreur qu’on se paye ma tête, jeune homme ! Vous allez voir de quel bois je me chauffe !


(Flora entre.)


Flora (au spectateur) : Alors ? Que se passe-t-il ? J’apprends que vous n’êtes pas satisfait de notre prestation ?

Le spectateur : Non, c’est un scandale ! Et même vous, d’habitude vous baisez avec tout le monde, et là… rien du tout… c’est tout juste suggéré… C’est inadmissible !


(Flora descend de la scène en soupirant et s’approche du spectateur.)


Flora (s’agenouillant aux pieds du spectateur) : Voyons, calmez-vous, tout va s’arranger…


(Elle commence à caresser le spectateur à travers son pantalon.)


Un autre spectateur : Moi aussi, je proteste !

Un autre spectateur : Moi aussi !

Un autre spectateur : C’est inadmissible !

Un autre spectateur : On se moque de nous !

Flora : Un instant, messieurs, pas tous à la fois. Levez bien les mains, Siriac va s’occuper de vous…


(Un silence complet.)