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Temps de lecture estimé : 24 mn
25/03/11
Résumé:  ... et si les chemins de traverse ne menaient pas au paradis ?
Critères:  fh fhh alliance amour jalousie voir fmast anulingus fist double fdanus fsodo
Auteur : Tancrède      Envoi mini-message

Série : Héloïse ou les chemins de traverse

Chapitre 02 / 02
Héloïse, ou les chemins de traverse (2)

Résumé : Antoine, un jeune mari conservateur, a accepté de partager son épouse Héloïse avec son frère. Expérience imprévue, absolument pas planifiée, dont aucun des participants n’a semblé se plaindre. Mais… si les chemins de traverse ne menaient pas au paradis ?








Le soleil brillait déjà sur les champs lorsque j’ai pris la route ce matin-là. J’éprouvais à vrai dire un réel plaisir à traverser ces campagnes où je vivais désormais. Je m’étais cru enfant de la ville : c’est pourtant là, au milieu de nulle part, au cœur de cette lointaine province qui aurait fait ricaner de condescendance mes anciens amis, que j’ai découvert le sens de la lumière.


Les campagnes étaient devenues miennes : je me les étais progressivement appropriées et je savais désormais que leurs silences s’adressaient en réalité à l’âme profonde. Et dans la douceur paisible de cet été sans fin, j’aimais voir les couleurs des champs se métamorphoser sous mon regard ébahi, virevolter dans un lancinant tourbillon de taches et de traits, comme dans un paysage à la Van Gogh.


J’en étais à l’âge où l’on n’est pas encore rongé par le cancer de certitudes effondrées, écartelé entre des illusions déçues et d’insolents ébahissements. Ma vie, c’était tout simplement une romance vaguement douce-amère où le doute était en liberté surveillée, où l’inquiétude ressemblait à un bric-à-brac, à une infusion de mélancolie, à une poignée de trèfles à trois ou quatre feuilles…


Mon trèfle à quatre feuilles à moi, mon porte-bonheur, c’était ma douce Héloïse. Héloïse ! Son seul prénom évoquait une fascinante odyssée amoureuse. J’aurais aimé être son Abélard – je n’étais que son modeste Antoine, et m’imaginer en sauveur des causes perdues eût été, ma foi, fort présomptueux.


Héloïse était belle, mais elle était bien davantage encore. Les hommes, dit-on, sont fascinés par les fesses, les yeux ou les seins des femmes. Héloïse avait là de quoi séduire le plus blasé des mâles, et j’avoue ne m’être jamais lassé d’admirer ce qui chez elle ressemblait à de bien troublants appas. Pourtant, j’étais d’abord tombé follement amoureux de sa voix : je la trouvais cristalline, sensuelle. Elle évoquait pour moi une force et une précarité, un poème chuchoté qui m’atteignait comme un aveu intime. À l’écouter, j’avais le sentiment de faire un voyage enchanteur par-delà les nuages et les orages de l’existence. Je voulais pour elle, et pour elle seule, me changer en chercheur de Graal, devenir navigateur du tendre et du trouble. Aujourd’hui encore, quand je m’abandonne à mes souvenirs, ils me racontent les obsédantes fiançailles de mes rêves évanouis et de mes dérisoires petits secrets, et elle y a la plus grande part.


Héloïse était ma terre promise. J’ai déjà avoué – et je n’en suis pas fier – mon peu de goût pour la chose sexuelle. Si Héloïse était vierge quand je l’ai connue, j’avoue sans honte que je l’étais aussi. C’est Sénèque – un de ceux qui, depuis des années, m’aident à donner un sens à ma vie – qui écrivait : « Les vices d’autrefois sont devenus les mœurs d’aujourd’hui » – c’était il y a si longtemps déjà, et pourtant ce pourrait être aujourd’hui, et sans doute demain.


Je préférais, j’en conviens, les écrits du vieux philosophe aux médiocres élucubrations de quelques plumitifs à la mode – ceux qu’encensait la critique et dont l’un ou l’autre de mes distingués collègues exaltait – forcément – l’éblouissant talent. Peu importe, au demeurant : le temps se chargerait sans peine, mais avec délectation, de les replonger dans les ténèbres dont ils n’auraient jamais dû sortir. Mais soit…


Héloïse était attentive, inventive à décoder les sentiments, les rides d’un visage. Nous nous aimions avec une tendresse merveilleuse, une délicate complicité, dans une passion maladroitement – et peut-être sottement – contenue et maîtrisée. Être dans un lit avec elle, regarder ses yeux en lui faisant l’amour me donnait le vertige. Aussi, avoir accepté de la partager me troublait. L’image insistante de son plaisir sans moi se faisait de plus en plus obsédante. Elle me rongeait.


Et alors que j’approchais de ce lycée où j’allais apprendre à des élèves encore ébahis (il en restait alors !) comment et pourquoi apprécier Horace, je me suis répété en pensant à ma femme cette phrase d’une de ses odes : « Cui flavam religas comam simplex munditiis ? » – Pour qui donc relèves-tu avec une si naturelle coquetterie ta blonde chevelure ?


À jouer avec le feu, on risque certes de se brûler. J’avais joué avec le feu. La peur de la brûlure désormais serait chez moi comme une musique de fond…




++++++++++





Quand Héloïse ouvrit les yeux, la chambre était noyée de soleil. Couché sur le côté, François la regardait depuis un long moment déjà, soucieux de ne pas l’éveiller. Elle esquissa un pâle sourire :



François tendit le bras, posa doucement la main sur la hanche nue de la jeune femme :



Désireux de joindre le geste à la parole, il avait sans complexe posé la main sur le sein d’Héloïse, dont la pointe durcit spontanément.



Héloïse gagna la salle de bains, juste de l’autre côté du couloir. À peine avait-elle eu le temps de s’asseoir sur les toilettes que François entrait à son tour :



Il s’approcha d’Héloïse ; toujours assise, elle gardait les cuisses hermétiquement closes. François s’agenouilla devant elle, mit les mains sur ses genoux :



Héloïse le regardait, les yeux écarquillés :



Héloïse poussa un soupir qui se voulait excédé, regarda fixement François, puis lentement écarta les cuisses. Les yeux du garçon ne quittaient pas le sexe de la belle. Ce furent d’abord quelques gouttes qui, quasi furtivement, coulèrent le long des lèvres roses. Puis un long filet s’échappa, éclaboussant la cuvette blanche. François avait tendu la main, allant recueillir le liquide doré à la sortie du sexe d’Héloïse. Quand elle eut terminé, celle-ci tenta de refermer les jambes mais François l’en empêcha. Il porta ses doigts humides et chauds à la bouche de la jeune femme, voulut les introduire dans sa bouche. Elle eut un mouvement de recul, détourna violemment la tête. François n’insista pas : sous le regard horrifié d’Héloïse, il lécha consciencieusement ses propres doigts.



Elle voulut tendre la main vers le papier de toilette, mais François arrêta son geste :



Héloïse se leva alors précipitamment et, en courant, regagna le lit conjugal et se réfugia sous la couette. François la rejoignit. Il tira brusquement sur la couette, dévoilant entièrement le corps de sa belle-sœur.



Héloïse avait croisé les bras sur ses seins, les soustrayant au regard de son beau-frère. Mais il la saisit par les chevilles, lui écarta les jambes, s’agenouilla entre elles.



Héloïse sourit, dévoila ses seins :



Elle lui caressa doucement la main, ajouta :



François l’observait, silencieux. Était-il sincère ou faisait-il juste semblant ? Il avait un regard triste de chien battu – mais Héloïse connaissait son goût de la comédie.



François s’était allongé aux côtés d’Héloïse. Elle avait gardé les cuisses largement écartées et replié les bras, glissé les deux mains sous sa nuque – comme en un geste d’abandon. Ou un signe de confiance, c’est selon. François caressait les tétons déjà tout durs de la blonde. Il les faisait rouler entre le pouce et l’index, les pinçait durement, cherchait à les étirer.



François s’était doucement laissé glisser le long d’Héloïse. Sa bouche était à présent à hauteur de son sexe. Il le lécha, écarta les lèvres humides, dégagea le clitoris gonflé. Il le titilla du bout de la langue, le mordilla entre les dents puis l’aspira goulûment. Héloïse avait saisi des deux mains la tête de son jeune amant, la maintenait contre sa chatte. Son ventre se soulevait, cherchant à amplifier la divine caresse. Elle jouit alors, bruyamment, laissa son plaisir s’écouler dans la bouche de François. Celui-ci n’avait pas bougé. C’est elle qui, après un moment, l’attira sur son corps.



François s’était agenouillé entre les cuisses d’Héloïse. Sa verge n’eut aucun mal à trouver l’ouverture déjà béante.



Ainsi installée, elle sentait la queue de François s’enfoncer très loin en elle. Elle avait l’impression de n’avoir jamais été aussi profondément investie. Son amant la pénétra longtemps, sans hâte, puis plus fort, et plus fort encore. La sueur ruisselait sur leurs deux corps.



Sans interrompre ses va-et-vient, il se pencha en avant, chercha la bouche d’Héloïse. Elle détourna la tête :



François lui prit la tête entre les mains, la tourna vers lui :



Lentement, les lèvres s’écartèrent, laissant deviner une pointe de langue rose.



La langue de François avait maintenant rejoint celle d’Héloïse. Elle paraissait la caresser, elle était douce, si douce au toucher et au goûter !



Héloïse avait fermé les yeux : elle sentait la jouissance monter en elle, au creux de son ventre, elle tentait de la repousser, encore, encore, mais non, c’était mission impossible. Son plaisir explosa, et elle eut dans les yeux des myriades d’étoiles filantes. Son cœur battait à tout rompre. Elle retira ses jambes des épaules de François, les laissa retomber lourdement sur le lit. Elle se passa la main sur le front :



Elle ajouta, en caressant la joue de son jeune mâle :



François, qui n’avait pas joui, saisit Héloïse par les hanches, la fit se tourner sur le ventre. Elle avait gardé les jambes jointes. Du bout des doigts, il lui caressa les omoplates, la colonne vertébrale, atteignit le coccyx.



Héloïse hésitait. Elle sentait ses tempes cogner, son cœur s’affoler. Elle avait envie d’obtempérer, de se montrer, mais en même temps le redoutait. Elle devinait que si elle acceptait, elle ne pourrait plus rien refuser. Son esprit disait encore non alors que son corps déjà disait oui. Lentement, comme à regret – mais était-ce à regret ? – elle porta ses mains à ses fesses, les écarta.



Ce fut soudain comme si une barrière en elle avait cédé : Héloïse tira pour ouvrir ses fesses, tira encore – jusqu’à en avoir mal. Elle resta là, ouverte, vaincue. Son anus palpitait doucement au creux de ses reins. François mouilla de sa salive la pointe de son index, la posa avec une infinie tendresse sur la petite étoile plissée. Héloïse eut la tentation de se refermer mais sut y renoncer. Et quand le jeune homme commença doucement à caresser son anus, elle écarta d’elle-même les cuisses pour lui en faciliter l’accès.


François, qui n’avait encore rien dit, rapprocha sa bouche du beau cul offert. Un court instant plus tard, sa langue entrait en action : elle lécha la bouche étroite, la tapissa abondamment de salive, tenta de s’introduire en elle. L’anneau s’assouplissait progressivement, le beau cul s’entrouvrait, réclamant une caresse plus précise. Plus intime. François tendit son doigt à Héloïse :



La jeune femme n’hésita pas une seconde : elle lécha l’index offert, laissa sa salive couler. Elle dégoulinait le long du doigt. François le retira de la bouche accueillante, puis le posa avec tendresse sur l’anus désormais impatient. Il pressa doucement. L’anneau céda sans peine, la porte étroite laissa deviner les prémisses de son mystère. Héloïse gémit, mais elle souleva ses fesses comme pour mieux s’offrir. Elle se retrouva à genoux, les cuisses très largement écartées, les reins creusés, la tête dans la couette.


Lentement, l’index s’enfonçait. Les parois intimes se refermaient autour de lui mais jamais plus douce prison n’aurait pu l’accueillir. Héloïse avait le cœur battant et François le regard subjugué : l’anus refermé sur son doigt le fascinait. Il vivait un moment d’éblouissement – un éblouissement qui l’enchantait mais en même temps le rendait comme fou.


Il ôta son doigt, le lécha avec gourmandise avant de le noyer de salive et d’y adjoindre son majeur. Cette fois, ce furent les deux doigts qui ensemble reprirent leur découverte. Les mouvements de ses doigts étaient pour François comme une expérience magique : quand il ressortait ses doigts, les écartait pour accroître l’ouverture secrète, il avait l’impression de dévoiler une énigme et un trésor. Pour lui, l’amour avec Héloïse devait être une fête brûlante : il s’était toujours promis de refuser les conventions déguisées en convenances, les soi-disant libertés habillées en peau de chagrin. Et Héloïse était pour lui une œuvre d’art, vulnérable, fragile. Il avait découvert en elle un équilibre précieux entre le cœur et l’esprit, une volonté de s’ouvrir à l’inconnu qui le fascinaient. En lui ouvrant ses fesses, elle avait fait de lui, nolens volens, un Moïse des temps modernes en quête d’une terra incognita – allusion biblique qui ne manqua pas de l’amuser.


François accentua sa pression : il voulait à tout prix que ce cul adoré s’ouvre, qu’il bée et palpite pour lui, pour lui seul, qu’il lui dévoile son mystère.


Héloïse avait décrypté les obsessions de son jeune amant : elle avait encore creusé les reins, tendait ses fesses en une ultime offrande. Elle avait mal quand François l’écartelait mais elle en était fière. Sa souffrance, lui semblait-il, la rendait plus forte, plus maîtresse d’elle-même, quasi invincible. Elle y voyait l’affirmation inattendue d’une conquête de soi et s’en trouvait bien. Elle n’eut dès lors aucune hésitation quand François lui demanda :



Elle trouva tout de suite son petit bouton gonflé. Elle l’effleura, faillit sursauter de plaisir. Alors, ses doigts furent en elle. De l’autre côté de la fine cloison, elle devinait les doigts de son amant. Sans gêne, sans fausse pudeur, elle se masturba avec une rage croissante jusqu’à ce que son plaisir devienne irrépressible.



Héloïse s’était effondrée sur le lit. Elle sanglotait à présent, sans savoir si c’était de plaisir pur ou de confusion intime.


François n’avait rien dit. Il avait gardé ouvertes les fesses de son amante : l’anus palpitait encore, hésitant à se refermer. Alors, l’homme fixa contre la tentante corolle sa verge en érection et poussa. L’ouverture s’agrandit sans peine.



Mais l’abjuration était bien inutile : le corps d’Héloïse était apprivoisé, tandis que son esprit cherchait à connaître ses limites, comme pour mieux les frôler. Sentir la queue de François au fond d’elle n’était pas, comme elle l’avait redouté, source de blessure ou de déchirement, c’était plutôt comme une volonté farouche d’être, un besoin de vivre plus intensément à l’heure du don de soi ou de l’ultime renoncement.


Le corps et l’esprit d’Héloïse vagabondaient entre pleurs et extase, ils erraient en une prodigieuse tentation d’absolu et de sérénité.


Et quand François éjacula enfin au plus profond de ses reins, Héloïse sut qu’elle avait fait un pas libérateur et que son monde ancien désormais traînerait à la dérive. François prétendait ôter à sa belle-sœur des morceaux de sa personnalité qu’il entendait garder précieusement. Elle-même réalisait que ses propres certitudes étaient exsangues, et que le bonheur qu’elle avait jalousement protégé était maintenant en équilibre précaire au bord de l’abîme…




++++++++++




Lorsque, vers 13 h 30, je suis rentré du lycée, j’ai retrouvé mon Héloïse délicieusement enjouée : elle s’affairait dans la cuisine à préparer le déjeuner tandis que mon frère, vautré sur le canapé du salon, lisait avec une apparente application un ouvrage d’économie. Tous deux me parurent détendus. Le matin, en arrivant en classe, mes gamberges, pourtant, allaient bon train. Je m’étais efforcé d’expliquer à mes étudiants que l’apparence parfois tue l’essence. Je leur avais dit combien il était difficile à l’homme d’atteindre à sa propre vérité : il lui fallait pour cela accepter de revenir à sa nudité première. Et c’était une démarche exigeante, inquiétante, parce qu’il nous est singulièrement difficile de douter, et surtout de douter de nous-mêmes. La vie, leur avais-je dit, est une fugue constante qui nous entraîne malgré nous aux confins du précaire. Mes élèves m’avaient regardé en silence : derrière une apparente lucidité, ils m’avaient deviné fragile. Et cela, sans doute, les avait troublés…


L’après-midi, Héloïse me suggéra une promenade dans la campagne. Le temps était fort agréable et j’avais grand plaisir à marcher avec elle, main dans la main. Elle était souriante mais je la devinais préoccupée. Un peu comme si elle avait quelque chose à me confier – ou à m’avouer.



Nous avons poursuivi notre chemin en silence. Naguère, j’aurais pensé que l’important devait être là, dans les regards de ceux qui ont gardé intacte une fraîcheur innocente et sont encore capables de s’aimer sans mot dire. Maintenant, je ne savais plus : le doute se faisait détresse.



Héloïse s’était arrêtée de marcher. Elle me regardait fixement.



J’étais abasourdi. Je n’en croyais pas mes oreilles. Pas mon Héloïse, mon étoile polaire ! J’avais bien imaginé des caresses, des rapports intimes et, malgré moi, je m’en étais délecté. Mais pas ça ! Ils étaient allés trop loin. Comme si loin, ce n’était pas déjà trop loin ! Mon cœur battait la chamade. Mais cette situation insensée, c’est mon irresponsabilité qui l’avait suscitée ! Moi qui jamais n’avais rien abdiqué de mes principes, il me fallait maintenant, tout de suite, assumer ma faute. Je devais faire face, mentir, dissimuler mes sentiments, camoufler ma désillusion.



Je ne savais que répondre. Certes, j’avais quasiment offert Héloïse à mon frère et au fond de moi, c’est surtout mon orgueil qui était blessé. Et je me reprochais bien tard de n’avoir jamais soupçonné les désirs qui hantaient le subconscient de ma femme, qu’elle gardait enfouis en elle et qui vainement attendaient de pouvoir s’épanouir en toute liberté.


J’en avais conscience : coupables étaient mes silences, étouffante mon indifférence et vénéneuse mon absence d’empressement. Je n’avais rien d’un aficionado du sexe, j’étais tout juste un austère plutôt balourd doublé de surcroît d’un imbécile malheureux, qui portait sa petite vertu comme un ridicule cache-misère.


Je croyais mon univers contrasté, mais néanmoins équilibré. Voilà que j’y faisais soudain d’hallucinantes découvertes et que j’allais devoir tenter de les assumer sans faille.



On est rentrés à la maison en silence. François avait préparé un délicieux apéritif qui nous a mis tous trois d’apparente bonne humeur. Mon frère plaisantait joyeusement. Héloïse s’amusait de ses pitreries et moi-même, je relativisais l’importance des événements récents… Le dîner fut vite expédié : pizzas surgelées, sans goût ni consistance – mais le vin rouge, un Amarone pour lequel j’aurais sans hésitation – comme on change ! – accepté de me damner, était vraiment succulent : 16,5° de bonheur ! D’aucuns auraient jugé que c’était une faute de boire un tel nectar en accompagnement d’une pizza, surgelée de surcroît. On s’en foutait. On en a bu deux bouteilles – comme si on avait quelque chose à fêter ensemble, ou à nous faire pardonner. Et quand vint l’heure d’aller nous coucher, c’est moi qui ai suggéré :



Héloïse me regardait, interdite, François souriait, sûr de lui :



Mais où donc avais-je la tête ? Au carnaval de la lourdeur et de la bêtise, j’aurais décidément une place de choix ! Mais il était trop tard pour faire machine arrière. Comme la veille, on s’est retrouvés dans le même lit mais cette fois, c’est Héloïse qui a pris l’initiative : elle avait pris une verge dans chaque main et nous masturbait doucement. Elle n’eut aucun mal à nous faire bander. Je n’avais pourtant pas vraiment envie de participer à une fête des sens. Entre Héloïse et François, ce fut par contre une joyeuse sarabande de caresses, de gestes fous, de mots obscènes, de pénétrations acrobatiques, de salives échangées. Il y avait entre eux une exceptionnelle complicité : à l’évidence, ces deux-là s’étaient trouvés, apprivoisés. Pourraient-ils demain accepter d’être séparés ?



Héloïse avait bien remarqué mon air préoccupé. Elle s’installa à califourchon sur moi, m’introduisit dans son sexe chaud, me lécha les lèvres, le nez, les yeux :



Oui, j’étais bien. Le sexe d’Héloïse, c’était ma demeure, mon abri, mon refuge. J’avais l’impression que nous faisions un parcours initiatique dans une contrée étrange et pourtant familière. Héloïse était déchaînée. Elle allait et venait, m’enfonçait en elle. Son sexe en folie coulait sur mon ventre, tandis que de sa bouche entrouverte s’échappaient de longs filets de salive qu’elle déposait sur ma langue et que je buvais avec délectation. Elle m’offrait des éclats de vie et moi, je larguais les amarres. Jamais, me semblait-il, je n’avais eu autant envie d’elle, jamais je n’avais autant attendu et espéré sa jouissance.


C’est alors que François, toujours lui, s’est agenouillé derrière ma femme. Il lui a écarté les fesses, fixé la pointe de sa verge contre son anus. Héloïse s’est instinctivement figée dans son mouvement. Puis j’ai nettement perçu qu’elle se reculait vers lui, comme en signe d’offrande. Quand sa queue a glissé en elle, je l’ai sentie qui progressait lentement mais sûrement, comprimant mon membre dans son réceptacle. Héloïse avait les yeux et la bouche ouverts, elle bavait sans s’en préoccuper. Alors, comme d’un commun accord, François et moi nous sommes mis en mouvement, à tour de rôle : quand l’un s’enfonçait en elle, l’autre en ressortait presque. Le temps se faisait vertige, et le corps d’Héloïse était une carte du tendre où nous cherchions notre voie.



J’étais abasourdi : que mon frère considère ma femme comme une poupée avec laquelle on pouvait jouer à satiété, voilà qui me choquait et me fascinait à la fois. Mais elle : se pouvait-il qu’elle y consentît ? Elle y consentit, en effet. François avait décidément des rapports à la sexualité qui étaient à des années-lumière des miens !


Il n’empêche : quand il a délaissé les reins d’Héloïse et s’est allongé sur le lit pour qu’elle s’empale sur lui, j’ai implicitement – et physiquement ! – accepté de lui succéder. Lui succéder ! Cela impliquait qu’il avait été le premier à investir le cul de ma femme, qu’elle avait découvert avec lui le plaisir anal et que longtemps encore je le regretterais. Et pourtant, quand ma verge s’est engagée en elle, qu’elle a franchi l’anneau tout assoupli, j’ai eu un instant de vertige.


Les fesses ouvertes d’Héloïse étaient des fruits dans lesquels on avait envie de mordre, son cul une révélation. Mon esprit était assailli de bouleversements érotiques – une prolifération étouffante d’images et de propos scabreux, de fulgurances qui transperçaient mes certitudes désormais bancales, d’où la raison disparaissait comme par enchantement ou par maléfice.


J’ai joui le premier et ce fut pour moi comme si le ciel prenait toutes les couleurs du spectre solaire.


Héloïse et François continuèrent sans moi leur chevauchée fantastique, noyés de sueur, de salive et de cyprine. François avait planté son index dans l’anus béant de ma belle, la fouillait encore, avant de la solliciter :



Héloïse avait sans hésitation enfoncé son doigt dans son anus, caressait celui de François. Les deux doigts se chevauchaient, s’entremêlaient, s’écartaient. Leur jeu érotique me parut durer une éternité, et puis ce fut l’explosion finale, la fusion de deux corps en folie, un chant d’amour sans pitié ni égard pour le vil spectateur-voyeur que j’étais.


En moi avait éclaté un univers d’idées reçues, incapables de se cramponner davantage et dont ma femme s’enfuyait. La complaisance dont j’avais fait preuve confinait à une lâcheté morale dans laquelle je ne me reconnaissais pas. Ma vie, par ma faute, n’était plus qu’un scénario branlant. Alors que le temps désormais allait partir à la dérive, j’aurais voulu revivre l’éternité à l’envers. Mais c’était déjà peine perdue…




++++++++++




Les jours ont passé, et les semaines. Nul d’entre nous n’a reparlé de ce singulier week-end mais je suis sûr qu’il nous avait bouleversés et qu’il nous hantait tous les trois. François espaçait ses visites et si ses rapports à Héloïse restaient chaleureux, ils n’étaient à mes yeux empreints d’aucune familiarité excessive. Une fois, une seule, j’ai demandé à Héloïse s’il n’y avait plus rien entre eux. Elle m’a tranquillement certifié que non. Et je l’ai crue.


J’avais repris mes travaux de recherche : je voulais à tout prix rédiger la thèse de doctorat que je consacrais à Sénèque et la défendre dès que j’en aurais terminé la rédaction définitive. En rentrant tard le soir, il m’avait pourtant parfois semblé qu’Héloïse avait les yeux brillants et le teint délicatement rosé d’une femme amoureuse. Sa volubilité excessive m’intriguait et m’inquiétait. Un soir, en rentrant, alors que, vêtue de sa nuisette, Héloïse vaquait à la cuisine en chantonnant, j’ai sans préliminaire glissé ma main entre ses cuisses, fouillé sous sa culotte : sa chatte était toute humide, poisseuse du plaisir qu’elle avait dû avoir peu de temps auparavant. J’ai ôté mes doigts. Je n’ai rien dit, elle n’a rien dit. Elle savait que je savais mais elle a choisi de garder le silence. Du temps du soupçon, nous étions passés à l’ère du mensonge…


C’est à Noël, alors que nous passions quelques heures chez mes parents, que François a annoncé qu’il abandonnait ses études : il refusait de s’imaginer en futur employé de banque ou en fonctionnaire départemental. Au lieu de quoi il envisageait de s’installer à Cuba. À Cuba ! Là où d’infâmes barbudos confondaient culture et canne à sucre, villages de vacances et camps de travail ! À moins qu’il ne préférât suer sous le soleil des tropiques plutôt que sécher sur des bancs d’auditoire… J’étais terriblement injuste et mesquin, je le savais. Ma méchanceté prenait même des proportions gargantuesques. Mais je lui en voulais terriblement d’avoir saccagé mon existence : j’étais rongé par l’incertitude et le remords, égaré, pris au piège du temps qui passe. J’ignorais qui j’étais encore vraiment. Sans véritable identité, je ne savais plus à quel saint ou à quel démon me vouer.


Aussi l’annonce du départ de François me laissa-t-elle profondément, cruellement indifférent. J’aurais dû me douter, pourtant, que mon frère était aussi malheureux que nous et que son départ était une fuite, une chance qu’il voulait nous laisser, à Héloïse et à moi, de rebâtir ensemble un présent et un futur, plus complexes, sans doute, mais plus harmonieux.


C’était peine perdue : Héloïse et moi avions rétabli des relations d’une apparente sérénité, mais nous savions l’un et l’autre que le temps du sursis était engagé. Nous refaisions certes l’amour – comme avant. Avant François. Jamais plus je n’ai sodomisé Héloïse, jamais elle ne m’a sollicité en ce sens. Un soir, pourtant, alors que nous venions de faire l’amour, c’est elle qui, à l’improviste, m’a déclaré :



Je l’ai regardée, éberlué. Elle a poursuivi :



Elle a ouvert le tiroir de sa table de nuit, en a sorti un tube de gel – je n’ai jamais su ni où ni quand elle se l’était procuré : ce n’était assurément pas le genre de produit qu’on trouvait à l’épicerie du village. Peu importe. Elle m’en a enduit la main, m’a regardé, puis s’est couchée sur le dos. Les jambes repliées de part et d’autre de sa poitrine, elle m’offrait une vue fabuleuse sur son sexe et son anus. J’avais beau être quasi au bout de mon désespoir, effectuer seul, jour après jour, une espèce de chemin de croix intime, je restais fasciné par le corps de ma femme. Son sexe rose s’entrouvrait, l’étoile plissée palpitait doucement. Pour moi. Pour moi ? J’aurais tant voulu le croire !



Sans rien dire, j’ai entrepris de la caresser, de l’ouvrir : un doigt, deux doigts, puis un troisième. La chatte d’Héloïse s’ouvrait, m’accueillait sans difficulté. J’eus bientôt mes cinq doigts en elle, le pouce replié à l’intérieur de ma main.



Alors, sans réfléchir davantage, j’ai forcé. Et ma main entière a disparu dans le vagin d’Héloïse. Je la sentais comprimée entre les parois. J’ai fait tourner mon poignet, tenté d’ouvrir les doigts, de les écarter. C’est moi qui maintenant voulais l’habiter toute !



Ma femme s’est alors retournée, ma main toujours profondément enfoncée en elle. Elle s’est installée, genoux très écartés, m’a tendu son cul magnifique. Le sang battait à mes tempes, des délires rageurs se bousculaient en moi.



J’ai regardé ce corps fabuleux qu’elle m’offrait comme jamais elle ne me l’avait offert. Je ne savais pas si, à d’autres occasions, elle en avait fait profiter un autre, ou si cet autre avait obtenu d’elle ce qu’elle me donnait aujourd’hui. Le fantôme de François revint hanter mon esprit bouleversé.


Alors, je l’ai branlée avec une violence qui m’a surpris. Je suis sûr qu’elle souffrait mais à aucun moment Héloïse ne s’est plainte : de nous trois, c’est bien elle qui était la plus forte et là, elle se servait de moi pour exorciser son passé. Est-ce pour cela ou grâce à cela qu’elle a autant joui, inondant ma main et mon poignet ? Comment l’aurais-je su puisqu’elle n’en a rien dit ? Elle est restée là, haletante, mais son silence était pour moi un affolant et terrifiant mystère.



Et la vie a repris, fragile, incertaine. Nous vivions les restes de notre amour en myopes. Et si l’issue n’en était pas encore définitivement connue, le suspense en paraissait cousu de gros fil blanc…


La fin de l’année scolaire approchait et le long congé parental d’Héloïse arrivait aussi à son terme. Il lui fallait choisir entre démission ou reprise de fonctions. L’inspection académique lui confirma que son ancien emploi, resté vacant, l’attendait – si elle le souhaitait. Elle le souhaitait.


Héloïse m’a expliqué le peu de satisfaction qu’elle avait éprouvée à vivre dans nos campagnes. Elle croyait le bonheur affaire d’opiniâtreté. Mais c’était pour elle un paradis perdu qui s’éloignait chaque fois qu’elle croyait s’en rapprocher. Sans jamais faire allusion à François, elle m’a reproché mon intransigeance qui s’était, selon elle, transformée au fil du temps en une insupportable arrogance et nous avait privés de tout contact social. Elle avait faim de bonheur, n’acceptait plus qu’il soit toujours pour le lendemain. Elle voulait enfin s’accomplir et comptait que cet accomplissement dont elle rêvait lui apporterait sérénité et satisfaction. Elle le croyait. Sans doute avait-elle raison.


Elle s’en est allée, il y a de cela bien des années déjà. Nous nous sommes peu revus. Mes filles ont grandi, belles comme l’était leur mère. Mais elles aussi préféraient la ville à la campagne. Notre complicité s’est étiolée et mes rêves porteurs d’espoir ressemblent désormais à un paquet d’illusions gâchées.


J’ai terminé ma thèse, que j’ai soutenue magna cum laude. Sénèque est resté mon compagnon d’infortune et je suis désormais plus âgé que lui. Il reste pourtant, au fond de moi, des blessures qui obstinément refusent de cicatriser. Et alors que lentement ma vie s’échappe, quand mes bleus au cœur se rappellent à mes souvenirs, je ferme doucement les yeux, je tends l’oreille et j’entends – comme si c’était hier – la douce, la merveilleuse voix cristalline d’Héloïse…