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n° 16472Fiche technique52571 caractères52571
Temps de lecture estimé : 30 mn
23/10/14
corrigé 10/06/21
Résumé:  Elles sont trois générations que le fil des vacances et un penchant pour les galipettes conjuguées au même sexe ont fait se croiser.
Critères:  fff hplusag jeunes vacances exhib miroir intermast cunnilingu init
Auteur : Anophèle      Envoi mini-message
Le miroir à trois faces




Un miroir presque sans tain dont l’une des faces n’est que le reflet de circonstances patinées par le temps (pour plus de détails, cf. n° 15001 – La robe chamarrée). C’est aussi – tant s’en faut – l’enchaînement de quelques apartés venus s’y greffer sous la forme de confidences sur oreiller. Certains y verront une suite que la retenue ou l’âge de raison aurait éborgnée, d’autres trouveront plus prosaïquement une réponse tardive à leurs MP’s.


Le souci d’équité – qui reconnaît le droit de chacun de s’exprimer – impliquait toutefois d’y associer deux facettes. De celles qui auraient pu traduire le ressenti de l’aînée et celui de la cadette si l’envie leur avait pris et si Revebebe ne leur était pas étranger.


C’était ainsi à l’été 1111, peu après la grande migration des Huns vers les rivages du sud et quelques aléas qui avaient poussé mon radeau vers l’île du Levant. Un soir après le dîner.




Les personnages :


Margrit : la tenancière de l’auberge ;

Stéphanie : la fille de papa-maman ;

Vanessa : votre servante.


Dans la chambre de Margrit, après une tentative de séduction manifestement ratée.





Dire que je n’attendais pas une réaction de Margrit à la suite de l’inopportun « bon ben… sur ce, je vais me coucher », assené par une Stéphanie toute surprise de son effet serait s’asseoir sur la logique.


Dès mon arrivée à l’auberge quelques jours auparavant, je m’étais faite aux allures maîtresse-femme de notre hôtesse. Lesbienne certes, mais aussi dominante rompue aux petits revers depuis les décennies, elle n’est pas de celles qui s’en laissent conter sans trouver la répartie.


Elle avait formulé l’idée de l’essayage de la petite robe après le dîner. C’est elle aussi, à n’en pas douter, qui avait soufflé à papa-maman l’exceptionnelle interprétation de Verdi au festival d’Aix ce soir-là.



Au point où en est la soirée, la manière abrupte ne peut être une fin de non-retour, m’étais-je dit empreinte d’une conviction presque sans failles. Le geste qu’on arrondit, la bouche en cul de poule et un éclair de malice dans les yeux finissent toujours par ébaucher la surenchère sur un fond de tendresse. Cette soudaine saute d’humeur de notre demoiselle ne pouvait être qu’un point d’orgue. Seule la durée est à la libre appréciation de l’instrumentiste. Il fallait composer.


Dressée sur ses ergots devant l’armoire en bois des îles, mademoiselle faisait celle qui n’entendait pas. Pressée apparemment de remonter son slip et de renfiler à la hâte la petite robe neuve objet de toutes les convoitises… frêle et unique rempart à portée de main. Sa jupette et le caraco du début de la soirée, elle les récupérerait dans l’autre pièce en passant.


J’ai pensé un instant que la crainte de voir débarquer papa-maman au retour d’Aix avait pu être la cause de la volte-face. Mais au festival, dans la cour de l’archevêché, « Nabucco » devait en être à peine au dernier acte et côté navettes, il n’y en avait évidemment plus à cette heure. J’aurais pu m’avancer, dire ou faire n’importe quoi qui aurait amadoué des susceptibilités à fleur de peau. Dans mon for intérieur, je ne pouvais que me sentir infiniment complice pour des raisons que je n’étais d’ailleurs pas seule à reconnaître. La môme a un charme fou, c’est vrai. Il émane d’elle un magnétisme sensuel qui s’était déjà manifesté le premier soir, celui où ils m’avaient invitée à leur table pour le dessert.


Elle est le genre d’ingénue dont on est amoureuse avant même de se poser la question de faisabilité. Le bord de nappe qu’on s’amuse à soulever et qu’on agite sous le prétexte de se faire de l’air. Les yeux qui plongent alors sur tes cuisses comme une invite à la provocation et le visage qui s’éclaire quand les regards court-circuitent… autant de signes qui ne sont pas de nature à dompter les neurones ! Toute imbue de son savoir-faire, Margrit n’avait d’ailleurs rien trouvé de mieux que de dire en pouffant :



Oh ce n’est certes pas uniquement pour la beauté du paysage que j’ai arpenté les sentiers le lendemain, à la recherche incertaine d’une demoiselle et de sa plagette préférée. Ni que je me suis finalement retrouvée le bec dans l’eau, seule à l’abri d’un rocher complaisant. Disons que j’étais certaine de l’être (seule) et quelque part rassurée de n’avoir été vue ni dérangée pendant ce temps où les chimères m’invitèrent dans un hymne à l’amour que l’on dit solitaire. J’en étais du moins persuadée jusqu’à ce qu’à l’anisette du soir, on me tende « la revue que t’as oubliée près du rocher » avec un sourire angélique ! Bah, après tout le voyeurisme, lorsqu’il est accidentel, n’est qu’une part de nos rêves d’adolescentes. C’eut été saugrenu de demander non pas si, mais comment elle m’avait vue et pourquoi elle ne s’était pas manifestée.




°°°




Dans le micocoulier en face de la fenêtre, cette foutue cigale s’était remise à faire crisser ses ailes, crispante et monocorde. Chanson de geste d’un autre âge qu’une Dame Margrit en quête d’inspiration s’essayait à recomposer de façon plus ou moins synchrone, les bras enfouis entre les cuisses dans les pans de sa jupe. Moments presque figés faits de cruelles incertitudes, où l’expérience, les acquis et même l’enthousiasme semblent remis en question.


Les yeux qu’on relève par intervalles pétillent pourtant de cette énergie exubérante qui avait jusque-là fait merveille… à condition de le dire vite, bien sûr. La bravade désopilante de mademoiselle – rien qu’une pirouette en fait – ne pouvait simplement plus à ce stade prendre des allures de Waterloo. Remettre les aiguilles à zéro le plus naturellement qui soit ne coûtait rien d’essayer, d’autant qu’entre elles aussi le tutoiement s’était bien installé.



Le sage laisse aux silences le loisir de l’interprétation (selon un vieil adage probablement chinois) puisqu’il est de bon ton d’adopter une attitude décomplexée sur un aspect on ne peut plus naturel et sain même si trop longtemps réprimé par les élites puritaines de notre condition humaine dans le cadre d’un mode de vie offrant la place qui lui convient à l’érotisme qui n’est-ce pas est le sel de l’existence et puis ce n’est plus comme avant on peut maintenant exprimer nos envies et nos fantasmes sans passer pour une dévergondée car après tout nous sommes entre adultes consentants et il y a moyen de faire tout ceci d’une manière respectueuse de l’intégrité physique et morale des personnes et qui n’est pas dégradante et qui ne salit pas les draps vous reprendrez bien un peu de thé très chère.



M… ouais ! En guise d’une nouvelle approche, on peut faire plus subtil. Avait-elle oublié les premières réactions ? Ce qui compte finalement, c’est le voyage. Pas seulement la destination.



Plongée dans des pensées métaphysiques d’avant déluge, on s’attarde entre une épaulette « que ce serait aussi bien de reprendre une peu » et un pli à la taille qu’on tente d’effacer d’un revers de main. Détendue, presque affable tout à coup mademoiselle. Madame s’engouffre résolument dans la brèche.



Réminiscences pas si lointaines de vestiaires en salle de gym, questions perfides habilement ciblées. L’art de la métaphore, de l’allusion et de l’image en 3D. Faire resurgir des perceptions que l’on sait à peine estompées, y ajouter une pincée de ses propres certitudes et laisser mijoter.



Elle allait se lancer dans une longue explication, mais elle avait aussi trop l’impression d’essayer de faire comprendre ce qu’est la neige à quelqu’un qui n’a jamais quitté l’archipel des Tuamotu. L’essentiel était de remettre au diapason des émotions qui auraient pu faire bingo « si ce couillon de concierge n’avait pas poussé la porte au mauvais moment pour le nettoyage des douches ».



On a failli ne pas se faire prier une seconde fois. Et miracle, on s’est même fendue d’un sourire ravageur. Les bémols de la première heure étaient-ils en train de s’évaporer dans la moiteur ambiante ? Le « génie » de Margrit, manifestement opérait. Pas peu fière de son intuition, la madame. Et de rassurer une nouvelle fois si besoin était, sur les craintes de voir papa-maman débarquer de manière inopinée.


J’avais entendu incidemment qu’Ellen n’était en réalité pas la génitrice de Stéphanie, mais sa belle-mère officielle depuis quelques années à peine. La relation était affectueuse, quoiqu’un peu distante si je me référais aux confidences de Margrit. En dépit d’une différence d’âge imprécise – Ellen semblant plus jeune – les deux femmes se connaissaient de longue date. L’époque dorée où madame notre hôtesse distillait son savoir dans l’ambiance feutrée de quelques salons de massage en Californie.



Un haussement d’épaule en disait long sur les certitudes affectives de mademoiselle. À cet âge encore, on entremêle vite sentiments et démangeaisons avec la défense de se gratter de nos années impubères. On veut se montrer loin des contingences, on tend le doigt vers la cigale du micocoulier et on reste campée sur ses pieds, à jauger de la longueur de la robe contre la jambe. Si l’on devait se fier aux seules mimiques, il y aurait peu de doutes sur les infléchissements que mademoiselle cherchait obstinément à ne pas défier.



Deux épingles et un bout de fil traînaient dans une boîte sur l’étagère. Les yeux de Madame aussi, traînaient bien au-delà de l’ouvrage, en quête d’inspiration dans quelque formule moins couture.



Éclat de rires.



Rôdée au précepte cougar échaudée craint l’eau froide, Margrit n’insista pas. Allait-elle quand même dénicher une nouvelle fois au haut de l’étagère, ce délicieux recueil d’estampes qui retrace avec minutie et la précision de l’orfèvre, une histoire d’Ô revue et corrigée dévolue à la seule féminité ? Le doute dans mon esprit planta mille-une épines. Allait-on voir une Pandore aux pieds d’Agrippine ?


On décide qu’un à-propos de bazar ouvrirait des perspectives moins éthérées. Les évocations d’un recueil d’artiste, si parlantes qu’elles soient, ne peuvent être qu’un pis-aller. On refait quelques pas vers l’étagère et on dit sur un ton que rien n’efface



Et comme quand deux et deux font vraiment quatre, on pose délicatement la mini roulette à même le sol avant de venir s’asseoir en tailleur à côté d’une Stéphanie interdite.



Miracle encore, mademoiselle se prend l’invective façon boutade. La pensée positive de la méthode Coué. On devrait tresser une couronne à ce brave pharmacien ! Chercher la raison du revirement équivaudrait à se demander pourquoi chez Lipton, il y a une pause-café.


La boule s’arrête sur le rouge. Perd et manque, apparemment.



Elle s’applique Stéphanie. Envoie la boule à contre-sens, qui met un temps fou pour redescendre et venir s’insérer une nouvelle fois dans une case écarlate !




°°°




Il y a des moments où un sourire aigrelet peut virer très vite en soupe à la grimace. On regarde autour de soi, on essaie de deviner la suite pour se donner une contenance. On veut jouer les bonnes perdantes et on se pince la lèvre parce qu’il est un peu tard pour se mordre les doigts. Le risque d’un nouveau demi-tour, dévastateur celui-là, est encore bien présent me dis-je en doutant pourtant de l’éventualité.


Madame, elle, prend son temps. Se relève, amorce un geste du doigt qui se veut sans complaisance.



On ne dit mot. On se demande si l’injonction est du lard ou si elle va virer cochon, mais on s’exécute. Par fierté et pour montrer qu’on ne se défile pas devant le principe établi d’un jeu bête et méchant. On rit aux flagorneries, on se laisse tourner dans un sens, retourner dans l’autre, mais on la relève, la robe. Et on maintient le bas des deux mains autour de la taille, sans se douter qu’à la jonction de l’aine et de la cuisse, la bordure d’un slip jaune et noir s’est bêtement déplacée, insolente sous les contorsions.



Le trouble naît parfois de la simple direction d’un regard. Je me rendais compte que l’insouciance est l’un des rares sentiments qui puisse inspirer nos élans par réflexe spontané. Ne pas disposer d’arguments pour s’en défendre a ses bons côtés. Elle est décidément trop tentante la petite.


Margrit me dévisage de cet air que rien n’affecte. Parce qu’elle a le sens du concret, Margrit. Le sentiment d’être auscultée dans mes pensées m’électrise. Elle sourit à la duplicité. Les mains qu’on enfile de chaque côté dans l’échancrure à hauteur des aisselles seraient-elles l’invite amicale d’une porte entr’ouverte ?


Le long cheminement des doigts qu’on devine sous la soie, tout en petits cercles, s’ingénie à maintenir l’embrouille. Les mains pourtant se retirent, s’affairent à dénouer le mince ruban qui retient encore le haut autour du cou. Elle laisse faire, Stéphanie. Penche la tête et regarde sans sourciller le tissu glisser le long des bras. Enfin, elle se décide d’enjamber les derniers pans tombés sur ses chevilles. Incidemment, on s’essaie dans la foulée à remettre un peu le slip en place et on attend. Margrit renchérit d’un signe de la tête. Dubitative, l’air refais-le-me-le.



Un « tourne-toi-regarde-moi » incisif vient ponctuer le débat. Elle saisit Stéphanie par le bas des reins, se plaque contre elle et dans l’étreinte un peu confuse, écrase sa bouche sur celle de la petite. Surprise, demoiselle cherche à se dégager, émet des « mmm » étouffés et se tortille. Mais réalisant qu’elle est maintenue, elle finit par s’abandonner.


La manière intempestive, avec pour seule finalité de provoquer les inerties m’inquiétait. Étrange façon de gérer les situations lorsqu’on les sait instables. Je suis plutôt contre, mais ma nature conciliante voulait éviter les vagues. À voir les réactions, je me dis que ma sensibilité m’égarait : une Stéphanie à peine embrouillée s’essuyait mollement la bouche et s’extirpait de l’embrassade avec le sourire. Elle goûtait ce soir à peu près la même allégeance qu’à ses réveils d’alors…



Elle l’enlace encore. Cette fois avec l’extrême précaution que demande la fragilité du moment. L’instant d’avant n’aurait-il été qu’un test ? Ce qui trouble finalement, ce ne sont pas tant les manières. C’est bien plus la perception qu’on a de leurs conséquences, je crois. Or comme si la suite ne pouvait plus dès lors prendre des allures anodines, mademoiselle passe en mode docilité. Oh elle a bien un peu couiné à sentir les doigts se promener sur ses cuisses.


Là pourtant, c’est moins nerfs-à-vif. Elle laisse explorer avec une dégaine étonnante. Elle regarde sans broncher la madame envelopper « l’embryon de poitrine » (terme absurde et très irréaliste, imagé par Stéphanie elle-même un soir précédent) et se fait toute moindre en sentant la main se plaquer sur un néné. Ah les vertus du contact direct avec les zones érogènes ! La force de persuasion d’une aînée que l’on sait déterminée, mêlée à une pointe d’humour et à un brin de tendresse… j’en connais peu qui résistent à ce genre de traitement.


On dessine des petits ronds autour des aréoles. On triture les mamelons entre les index et les pouces jusqu’à se laisser surprendre par un tressaillement. Incidemment encore, on s’aventure plus bas. On marque un arrêt à la hauteur du nombril et on atteint l’entrejambe. Là, on presse… tout doucement parce qu’on sait la manière suave et répétée déboucher sur des moiteurs convoitées. Un doigt entame de savants allers-retours le long de l’étroit sillon creusé à même la texture du slip. Puis deux… oh juste pour enserrer les grandes lèvres au travers du tissu, les malaxer doucement l’une contre l’autre en regardant ailleurs. Que d’impatiences ravalées !


Grand silence. On aurait aimé percevoir une réaction, mais rien. À peine une moue qui ne pouvait même plus être qualifiée de réprobatrice. Et une contraction, un peu plus marquée. Nerveuse sans doute, la contraction. Finalement, je m’étais faite à cette idée pas si saugrenue de canaliser le surplus d’énergie quand l’impétuosité rechigne à se montrer débordante.

On avait demandé à demoiselle d’appuyer le dos contre une des portes de la grande armoire. Et on s’est accroupie. On a même dit que ce serait bien, si elle tendait un peu le bassin. Juste un peu.


Glisser la main entre les cuisses n’avait pas posé problème. Madame relève pourtant la tête en soupirant. Regard inquisiteur, comme si le satisfecit d’une Stéphanie conquise n’était plus qu’une question de temps.



J’aurais pu ne percevoir que le rythme des respirations. Mais madame a le sens du suivi en silence, le know-how du doigté sous coutures et de ses retombées. Je ne suis pas contre, si c’est harmonieux.


Soulever le liseré du slip tout au haut de la cuisse, se mordiller la langue pendant l’approche et repousser la petite bande de tissu presque entièrement sur le côté, c’est aussi d’une certaine manière redécouvrir… ce qui se cache derrière !


Fallait-il s’enhardir jusqu’à cette lente et minutieuse exploration d’intimités plus profondes ? Oh on n’a pas envoyé de préavis. Les yeux rivés sur le visage de Stéphanie, on soulève l’élastique à la taille. On plonge dans la culotte parce depuis un moment, on sent le ventre se creuser et les jambes s’ouvrir. On fait alors la main toute petite… et on la retire en regardant béate le fil gluant de cyprine qu’on s’amuse à étirer entre deux doigts avec des lenteurs calculées.



Il a fallu quand même un « ouvre la bouche » appuyé pour qu’elle veuille bien obtempérer.



Au-delà des saveurs diffuses, il y a ces moments qui ont un goût d’éternité. Combien de fois les doigts se sont-ils insérés entre quatre lèvres avant de revenir étirer l’élastique ? Madame prenait son plaisir dans la durée. Elle observait Stéphanie comme si le battement d’aile d’une mouette allait décider d’une perturbation aux antipodes. J’ai l’extrême orgueil de me croire clairvoyante, mais que pouvais-je faire sinon tomber comme souvent dans tous les panneaux ? La transmission des pensées dans ces cas, est ce que l’éternuement est au rhume de cerveau : difficile d’y échapper. Et lorsqu’il se manifeste, on a le nez qui démange encore plus. Un « alors Vanessa ? » sans concession vint rompre le silence.




°°°




À partir de là, toutes les philosophies transcendantales et la mécanique quantique me donnèrent une furieuse envie de me remettre en condition, c’est à dire « à poil » selon l’expression non épurée. Les injonctions un peu foireuses, le touche-pipi à-la-va-vite du début de soirée prenaient soudain des allures infiniment plus pragmatiques. Après tout, on peut bien de temps en temps s’en remettre à ses concupiscences (oh ce mot !) Elle me regarde, Margrit. Pas incrédule non. Disons… confondue. Elle doit penser que voir une greluche potentiellement blonde se décoller enfin de la tapisserie et se montrer telle qu’elle est ne gâcherait pas le paysage. Et la perfide en rajoute.



Maîtriser ses impatiences quand l’adrénaline picore la peau du ventre comme le feraient une multitude de petites aiguilles tient plus du prodige que d’un choix délibéré. L’envie de toucher devient lancinante. Infiniment plus pernicieuse que l’étaient les ficelles de la première heure. Alors laisser aller. Ne plus entendre que le chant des sirènes, quitter une nouvelle fois le short, puis le slip et le chemisier dans l’ordre. Éviter tant qu’à faire les lenteurs facultatives accolées à l’exercice… se montrer naturelle quoi !

Une provocation pour le fun, me disais-je en faisant sauter les derniers boutons du chemisier. Oublier les apparences, c’est aussi s’exprimer, non ? Margrit ne manque d’ailleurs pas de la saisir, l’expression. À bras le corps, les mains plaquées sur mes hanches à me détailler toute crue devant la petite comme si la biche venait de sortir du bois.


Éloges irréels et sans doute oniriques inspirés par les circonstances, assortis des détails morphologiques qui font qu’une chatte ne s’apparente pas forcément à la seule espèce des félidés. Debout devant l’armoire, on suivait presque religieusement.


À l’évidence, quelque chose chez Stéphanie avait évolué. Le regard sans doute, les attitudes surtout. Je n’ai jamais su si c’est d’elle-même qu’elle s’est avancée, ou si c’est moi la première qui l’ai enlacée.


Équilibre difficile à gérer que celui d’être à la fois dans l’action et dans l’écriture. Il y a quand on s’essaie à l’érotisme, les réalités qu’on enjolive. Il y a celles qu’on élude pour ne pas tomber dans la pornographie de basse fosse et il y a celles qui sont bêtement l’instant. Faire avec et au besoin abréger par respect pour le lecteur, l’option tient parfois de l’« essayé-pas-pu ». Sauf à passer le témoin.




Version Margrit : son ressenti vraisemblable et des révélations qui m’ont soufflée.



Lorsqu’attendre risque d’éclipser une option importante, mieux vaut décider tout de suite, disait ma mère dans son jargon hollando-javanais. J’aurais pu contrarier les humeurs de notre tourterelle avec une réflexion du genre



C’eut été la braquer davantage. Ce n’est plus à t’uit ans et quelques expériences qu’on s’essaie à un verbiage de fanfaronnade. Qui de toute façon, n’aurait eu que le défaut de perpétuer des frayeurs inutiles. Qu’elle veuille s’affirmer, ça se comprend. Mais elle joue le jeu avec des armes masculines : elle parle au lieu d’écouter.


Alors rester zen ! Pour être efficace, il faut que les sensations, le ressenti, passent vite. Avec une forme d’impact immédiat, porté par le rire et des mots familiers. Les images claires, banales ou évocatrices font souvent éclore des perceptions insoupçonnées. C’est du moins ce que les rencontres les plus improbables m’avaient démontré jusqu’ici. Mais conne je suis, conne je resterai. Suis allée trop loin, bien trop vite. Même si les angles s’arrondissent, il ne faut pas que je m’étonne de la bravade.


N’admettre qu’une part de chance dans l’évolution de notre petite soirée serait étouffer l’esprit de répartie d’une mignonne, sa sensibilité et cette faculté qu’elle a de séduire presque par inadvertance. Le problème est qu’elle a la fâcheuse tendance de donner son avis quand on ne le lui demande pas.


Elle n’est d’ailleurs pas seule à souffler le chaud et le froid sans sourciller. Je repense à ce qu’avait cru bon de relever Ellen juste avant de partir pour Aix, comme si toute l’impatience du monde trouvait sa résolution dans le vent.



Délicate attention ! Au-delà du coup de griffe, il faut reconnaître que l’argument fait sens, même si bavard et mal fondé. Chez Ellen, les démons de la chair sont facétieux. Un jour on se la joue Chaste Suzanne : on se complaît dans la fixation ou dans une jalousie puérile. Le lendemain on fait un ancrage sur les Cinquante nuances de Grey : que ne donnerait-on pas pour voir belle fifille se dévergonder jusqu’à l’outrance ? J’aurais pu rétorquer



Il fallait que je me retienne. Le parler batave a quelques fois des expressions qui ne conviennent pas dans la bouche d’une dame.


L’arrivée de Vanessa l’avait momentanément dissuadée de courir sentiers et terrasses à la recherche de la perle rare. Jusqu’à ce qu’elle décrète que ma dernière pensionnaire n’était pas branchée et sûrement trop sage. Cette animosité larvée empreinte d’une jalousie d’un autre âge m’agaçait prodigieusement.


Ellen, c’est un paradoxe. Un sacré numéro à l’époque où je l’ai connue, aux States il y a de cela presque dix ans. Elle s’est mariée depuis, souscrivant du même coup au puritanisme des Mormons jusqu’à ce qu’elle retrouve le goût de ses premières réalités. Oh de manière plus ou moins sporadique, avec la prudence qu’implique une petite vie de bourgeoise à l’américaine bien réglée.


Convaincre son mari des bienfaits d’une quinzaine nature n’avait pas été chose aisée. Mais « le séjour chez une amie qui tient une auberge tout à fait comme il faut » avait emporté le suffrage. Après quelques palabres et mon soutien moral, elle avait obtenu que Stéphanie se mêle aux estivants et passe la journée au bord de l’eau. Elle ne s’est pas crue obligée de préciser que dans le contexte de l’île, c’était forcément toute nue. La faute à pas de chance si comme souvent les années bissextiles, la drague mâle était plus en verve cette année-là que les hypothétiques approches féminines.


Bonjour le sourire d’Ellen, lorsqu’elle apprit que j’avais obtenu deux billets (oui deux) pour le festival d’Aix le lendemain. Un de ces sourires à projection qui meurt de l’envie d’en savoir davantage. Mais ni elle ni personne ne saurait quoi que ce soit d’une idée canaille qui n’était encore qu’une vue de l’esprit.


Bref, j’étais résolue à ne pas laisser filer l’opportunité. 19 heures, j’accroche Vanessa au bas de l’escalier. Il fallait absolument qu’elle dépose chez moi la petite robe de toutes les couleurs qu’elle avait dénichée au village. (Il faut être fou pour acheter ce genre de chose à une gamine de dix-huit ans, mais bon)


Trop sage Vanessa ? Allons donc ! Un poil bêcheuse et parfois mijaurée, je veux bien. Mais pas branchée, ça fait sourire. Quant à Stéphanie, elle ne devrait pas non plus rechigner longtemps à un embarquement pour Cythère, si j’en crois les oracles.


Le présage en tout cas, était à graver sur disque dur. Vite remettre la main sur cette caméra IP dernier cri qu’un client m’avait proposée en paiement de sa note. Limpide la notice :


Carte-mémoire 8 heures en continu, zoom, télécommande + audio et connexion USB pour ordi, etc. Du chinois sauce fou-z’y tout, mais miracle, ça fonctionne ! Noyer le gadget dans la reliure d’un vieux bouquin sur l’étagère… ça avait occupé l’après-midi un peu plus que de coutume.





°°°




Dire que je me croyais incapable de voir la différence entre un Renoir et une image d’Épinal bradée en grande surface ! Deux naïades presqu’entièrement dévêtues me réconciliaient avec le sens de l’esthétique. On ne saurait mettre en mots ou en concept l’expérience érotique, je crois. On ne la saisit qu’en la vivant.


Toute lovées l’une dans l’autre, elles s’examinent, se comparent peut-être, se caressent avec mille précautions. L’épaule, les bras, les cuisses… un peu. Une main s’insère dans la culotte à la taille, tire le tissu vers le bas jusqu’à laisser apparaître les premiers poils d’un pubis tout galbé. J’aurais aimé voir Stéphanie la quitter elle-même, pour la symbolique et la beauté du geste, disons.


Image décoiffante que le comportement borderline d’une Vanessa en veine d’inspiration. Beauté sauvage et dégaine bobo en effervescence, j’avais peine à croire qu’elle s’extériorise pour de bon. Les expressions, les gestes, même les rires étaient en phase. Plus rien à voir avec les tartuferies d’avant.


Mais pourquoi s’arrêtent-elles ? Sont-elles tout à fait sottes ? Ou un peu demeurées ? Ou pétries de timidité ? Vont-elles se regarder en biches de faïence jusqu’à la Saint-QQ ou serais-je à mon corps défendant, la raison de leurs hésitations ?


À partir de ce moment presque inclus, j’avais décidé de ne pas intervenir sauf nécessité absolue.


Suggérer qu’elles ouvrent l’armoire et se regardent dans le long miroir à l’intérieur d’une des portes, c’était juste imbiber la soirée d’un peu de pragma-romantisme. S’il existe des tendances saphiques chez bien des filles, ces tendances se distinguent à peine de la délectation narcissique, dit-on.


Il fallait leur apporter une béquille. Le motif, ne serait-t-il que verbal, de se goûter sous un angle… disons plus ouvert, tangible et fatalement « emotional ». Oui je sais, j’attends beaucoup des gens que j’aime. Trop peut-être. J’attends et même je demande, mais je ne sais pas exiger.


Elle s’applique pourtant comme à sa première conquête, Vanessa. Le visage enfoui dans le cou d’une jouvencelle en passe de dévoyer ses plus beaux attributs et qui n’a d’yeux que pour l’image reflétée par le miroir. Instants presque figés, où plus rien n’a d’importance que la perception visuelle. Atmosphère corrodante s’il en est.


Elle presse le bassin contre cette partie du corps où le dos perd son nom. Plus haut, des doigts aux ongles peints s’activent. On enrobe, on promène l’index autour des pointes brunes, on enfonce un peu et on relâche aussitôt. On desserre les doigts au premier sursaut et on se remet à vagabonder au gré des vagues. Les mains une nouvelle fois glissent sous l’élastique… serait-ce pour conjurer les oracles ? Jolie façon de transposer les « je te veux » dans les silences, je trouve.


Oh mais rêverais-je ? Le visage presque grave, les yeux grands ouverts et encore obnubilée par la symbolique de sa propre image, demoiselle prend le relais. Elle tire elle-même vers le bas le liseré de son slip, s’arrête un instant à mi-cuisses et l’envoie brusquement au diable de quelques secousses du pied.



Elle éclate de ce rire espiègle qui invite à ne pas la prendre pour plus importante qu’elle n’est. C’était tentant d’en rajouter.



Il y a des sourires exponentiels. Vanessa aussi, anticipe mes pensées. Elle plaque la main contre le triangle imprécis, ni hirsute, ni filiforme qui chez Stéphanie se trouve être d’une douceur à émouvoir les pierres. Détails certes frivoles, mais qui dans certaines circonstances et au plan de la seule esthétique, devraient être considérés comme l’ADN de la personnalité.


On écarte les grandes lèvres, assez pour libérer le clito. Confinement exquis entre deux doigts inspirés. Elle prend soin de ne pas écraser le bourgeon, pas encore. Vulve luisante aux chairs érotisées, rivages tourmentés qu’on croyait inabordables… Ne manquent que quelques initiatives d’une Stéphanie toute anxieuse qui ne chercherait encore que ses marques.


Et puis le coup de fil intempestif.



Remettre le portable sur son chargeur, pester contre ces gens qui ont le culot d’emmerder les autres à minuit passé et vérifier que sur l’étagère, rien n’a bougé. LED allumée, angle inchangé… tout fonctionne ! La frayeur de ma vie. À me lever pour répondre, j’avais frôlé un des montants en me précipitant.


Une chance… ça n’a pas perturbé l’ambiance. On me regarde. J’en avais assez dit au téléphone pour qu’on ne pose pas de questions. On reste plaquées l’une contre l’autre, hors du temps. Deux mains entrelacées ponctuent la récréation d’une touche affectueuse. Même la cigale s’était mise en veilleuse.


Était-ce l’imminence d’un éternuement chez Vanessa, qui amena la main sur la courbe d’une fesse ? De là à repasser vers les moiteurs un instant délaissées ? Toute empreinte cette fois d’une frénésie et d’ardeurs jusque-là plus ou moins contenues…


On dit qu’hormis ceux de langue, les jeux de mains sont la seconde nature de l’éternel-féminin. Stéphanie aussi, paraissait… Non, elle ne « paraissait » plus. Mais alors plus du tout !


Mi-anges, mi-diablesses, deux démones tendrement enlacées se triturent la vulve, seules au monde.



Je suis restée un moment assise en travers de la petite bergère au pied du lit, à les couver du regard.


Et puis il y a des circonstances qui demandent que l’on sache s’esquiver lorsque le bon sens fait un signe, ou au besoin l’exige.





Version Stéphanie :



C’est Ellen qui avait insisté pour que je passe un bout des vacances avec eux au Levant. Même si le naturisme, c’est pas trop mon truc. Mais comme j’avais rien d’autre de prévu…


Faut dire que l’endroit est sympa. C’est pas la foule comme sur la Côte. Y’a plein de p’tits sentiers et des criques encore sauvages. Ça sent bon la nature dans les criques, pas trop l’ambre solaire. Et puis j’étais pas obligée de m’agglutiner avec les autres, c’était déjà ça.


L’auberge aussi est sympa. Nichée un peu à l’écart tout au haut du village. Là c’est pagne et soutien-gorge obligatoires. Ou shorts, si on préfère. Au village aussi d’ailleurs.


On était là depuis presque une semaine. Bon, ce n’est pas que la solitude me pèse, mais j’ai été assez contente de voir arriver Vanessa. Au moins quelqu’un avec qui parler à table. Parce qu’à part la tenancière, qui elle n’arrête pas de parler, il n’y a pas grand monde avec qui échanger.


Ce soir je dînais seule avec Vanessa sous la pergola. Ellen et Dad étaient à Aix pour un festival de Verdi. Autant dire que j’étais assez contente qu’ils me lâchent un peu les baskets. J’avais pensé qu’on pourrait aller dans une boîte branchée pour finir la soirée, mais non. Margrit était passée à la table. Margrit, c’est la tenancière. Elle avait dit qu’elle avait une surprise.


Alors du coup, nous voilà invitées dans les appartements de Madame. Bien sûr la surprise dépassait ce que je pouvais imaginer. C’est vrai que j’en avais eu envie quand je l’ai vue dans la vitrine, la p’tite robe. Paternel avait dit non. Ce que je ne savais pas, c’est que Vanessa était allée l’acheter. Bonjour la surprise sur la carte de crédit aussi !


Essayage, bien sûr.


Bon là, j’ai senti assez vite le prétexte. Elle aime bien les filles, Margrit. D’ailleurs elle ne s’en cache pas. Les jeunes, elle préfère. Moi, c’est pas ma passion mais chacun ses goûts, hein. C’est vrai que sur le sujet, ce ne sont pas les discussions qui ont manqués. Je pense que c’est faux de dire qu’un moment de gêne est vite passé, ou que j’avais l’âge d’essayer. Et elle en rajoutait avec des questions, genre



Quel préambule ? Et puis en préambule de quoi ? D’accord, on avait bien un peu discuté les jours d’avant. J’avais même parlé d’une fois avec la prof de gym – de yoga plutôt – qui voulait savoir si j’aimais me caresser et ça, ça a eu l’air de la passionner, mais bon…


Je n’dis pas qu’elle est pas sympa Margrit. Mais des fois, elle m’impressionne et elle m’agacerait presque. Ce soir c’est sûr, elle était passée à Mach 2 pour de bon. J’ai laissé faire, vu les circonstances. Jusqu’à ce que ça devienne… je ne saurais dire quoi exactement. Contraignant, peut-être. Alors aller me coucher ?


C’est vrai qu’en restant, il y avait le risque qu’elle remette la compresse d’une certaine façon. D’un autre côté, ça faisait désordre de tout plaquer sur un coup de tête, comme elle disait.


Bon, j’accepterais de vivre à peu près n’importe quoi dès lors que j’aurais le choix de le vivre comme je l’entends. Mais je n’aime pas qu’on me l’impose. Bien sûr, il est arrivé pile le coup de la roulette. Rigolo parce que c’était un jeu. Dans un sens, ça laissait la porte ouverte. Et puis bon… de fil en aiguille…


Il y avait Vanessa aussi. Là, c’est autre chose. Je n’étais pas très fixée avec elle. Bien sûr, on pouvait parler de tout et de rien sans que ça dégénère. En plus elle a ce côté attachant qui sait écouter… Et elle sent bon. C’est peut-être gadget, mais je trouve que c’est important de sentir bon. Parce que Margrit, ça fait un bout de temps qu’elle ne devait plus savoir où était passé son dernier flacon d’Elisabeth-à-Barden. Oui je sais… Margrit, c’est pas Miss Monde non plus.


Je me suis dit que même si j’y laissais ma chemise à son truc de roulette, ça ne pouvait pas aller loin. La chemise en fait, c’était la robe que j’avais renfilée. Nous voilà parties pour un nouvel essayage, jusqu’à ce qu’elle me dise de l’enlever encore une fois pour pointer l’ourlet comme il fallait.


Après, je ne sais plus très bien. Je regardais Vanessa. Je repensais à cet après-midi où je l’avais vue toute seule dans la crique. Elle devait se douter que je l’avais regardée, mais elle n’avait rien laissé paraître. Quand même, ça m’avait… disons marquée. Je la voyais avec d’autres yeux. Surtout avec des pensées… différentes.


Le premier soir, je l’avais déjà trouvée déroutante quand mon père l’avait invitée à la table. Elle n’a pas eu l’air gênée le lendemain, quand je lui ai tendu la revue qu’elle avait oubliée à côté du rocher. Pourquoi je la lui ai rapportée, j’en sais trop rien. Juste pour qu’elle se doute, peut-être.


Alors quand au début j’ai vu arriver Margrit avec ses grands sabots, j’ai un peu paniqué. J’me disais… J’sais plus c’que j’me disais. Il y avait des images qui revenaient. Pas seulement celles de la crique bien sûr. Mais quand même. Et puis les manigances de Margrit n’arrangeaient rien. Bon, c’était le jeu.


De l’autre côté, il y avait la curiosité. D’ailleurs l’étude des mésanges charbonnières vient encore confirmer les dires de je n’sais qui, qui évoquait le fait qu’une augmentation des concentrations en récepteurs D4 de la dopamine dans le cerveau allait de pair avec un accroissement de la curiosité chez la souris. Alors « voir la belle dame se remettre en condition ouvre des perspectives » avait lancé Margrit.


À nous regarder dans le grand miroir, ça avait fait naître des vibrations qui sont montées sournoisement de la pointe des pieds jusqu’à la racine des cheveux en passant par bien des détours. Laisser venir le « contre-nature » n’était pas désagréable après tout. Ce qui me retenait un peu, c’était cette insistance de Margrit à vouloir me voir me toucher. Comme si j’étais la seule à ne pas oser le faire devant elle. C’est le terme masturber qui me gênait je crois, jusqu’à ce que je voie Vanessa le faire. Tout lentement d’abord.


Je ne la voyais plus de loin cette fois. J’aurais même pu la toucher. Alors à suivre les gestes… C’est elle finalement, qui a guidé ma main vers mon nid d’amour, comme elle disait. Je m’étais tournée un peu contre elle pour éviter les regards de Margrit, mais bon. Étonnement, il n’y a pas eu de commentaire pour une fois. Si… un quand même je crois qui disait, transposé à peu près textuellement



Après, je ne sais plus. On s’est retrouvées sur le couvre-lit en patchwork, toute essoufflées, presque sages. Je m’souviens qu’elle avait eu une envie folle de me manger mes cuisses de grenouille. Margrit était passée dans la pièce à côté, ça m’a détendue mais ça n’a pas dissipé les appréhensions sur le moment.




°°°




Au petit matin, toilette de chat et p’tit déj au pas de course. J’espérais ne pas avoir les yeux trop bordés de reconnaissance. Ellen et Dad devaient arriver au bateau de dix heures, sûrement. J’avais remis la robe dans son carton, avec le dessin vite fait d’un chat qui se marre et j’avais dit que c’était Margrit et Vanessa qui s’étaient cotisées. Voilà voilà.


Plus que deux jours avant de remonter sur Paris. Vanessa était partie le lendemain. Une escale imprévue à Nice, dans une clinique. Pour son boulot… elle avait dit. Je crois que j’étais jalouse de tous ceux qui l’abordaient.


De retour à Paris, je n’attendais que son coup de fil. On s’est rencontrées dans une brasserie du 6ème, pas loin de la fac.

Il faisait bon dehors. C’était curieux de la voir en tailleur. Plutôt strict, la p’tite veste ouverte quand même.


Elle m’a demandé si j’avais repris les cours, si Ellen s’était aperçue de quelque chose, bref je crois que j’ai montré trop vite que j’étais presque amoureuse. On aurait dit que ça l’amusait de m’entendre dire que la vie est compliquée. Parce que j’ai bien vu qu’elle n’était plus la même. Ben oui quoi… on aime et on n’aime plus. Lesbienne d’un soir ! On n’est pourtant pas si différentes. Foutaise, son argument « dix ans d’écart ».


De là son histoire bête d’un type qui se balade dans un bois et dont pied bute sur quelque chose de dur au bruit de casserole. Intrigué, il se baisse et voit les vestiges d’une très ancienne lampe à huile qui devait être là depuis la nuit des temps.


Il s’applique, la débarrasse de la terre et de la mousse, la frotte avec tant d’ardeur qu’à peine la lampe redevenue présentable, il en sort une vapeur tourbillonnante qui peu à peu prend la forme d’un génie. D’un génie parlant bien sûr.


Pour le remercier de lui avoir redonné vie, le génie lui dit



Ils s’asseyent tous les deux sur un caillou. Le type réfléchit et dit



Le type se remet à penser, puis dit calmement



Le génie réfléchit un grand moment la tête entre les mains, puis se tournant vers le type lui dit



Suis rentrée le cœur un peu gros quand même.