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Temps de lecture estimé : 25 mn
01/09/15
corrigé 07/06/21
Résumé:  Après leur mort, tous les humains ressuscitent le long d'un fleuve immense. Jeannette est morte pour la troisième fois. Elle revient à la vie.
Critères:  #aventure #sciencefiction #personnages f fh couple hépilé fépilée bain amour revede voir nudisme fmast intermast fellation cunnilingu pénétratio fdanus init
Auteur : Arkayn            Envoi mini-message

Série : Contes érotiques du Monde du fleuve !

Chapitre 01
Jeannette - Première partie

Imaginé en 1952 « Le monde du fleuve », premier tome de la série « Le fleuve de l’éternité » est publié en 1971. Dans ce roman, écrit par Philip José Farmer, tous les êtres humains, nés de la préhistoire à l’an 2008, ressuscitent le long d’un fleuve de près de seize millions de kilomètres de long, dans une vallée aux parois infranchissables. Tous les âges sont mélangés, comme les régions, et il n’est pas rare de voir se côtoyer des Scythes du 4ème siècle avant JC avec des polonais du 17ème siècle ou des anglais du 20ème siècle avec des chinois du 13ème siècle. Quelques aventuriers, tel Richard Francis Burton (qui découvrit le lac Tanganyika et – presque – les sources du Nil, pénétra déguisé dans la cité interdite de Hara, accomplit le pèlerinage de la Mecque sans être musulman, mais aussi traduisit le Kâma-Sûtra et les contes des Mille et une Nuit. Érudit, il parlait 29 langues et 11 idiomes), Samuel Langhorne Clemens, alias Mark Twain, Jean sans Terre, Savinien Cyrano de Bergerac, Alice Pleaseance Leadell Hargreaves (qui inspira Alice au pays des merveilles) partent à la conquête des pôles de cette planète afin de découvrir l’identité de ceux qui les ont ressuscités.

Farmer fut le premier à introduire l’érotisme dans la science-fiction dans son roman « Ose ». Il n’aurait donc pas renié que l’on explore la vie de quelques autres personnages dans Revebebe.




La voix s’était exprimée dans un espéranto empreint de consonances que Jeannette ne reconnut pas. Peut-être une langue du nord ou ancienne comme le gaélique. Le rire moqueur de la petite fille résonna dans sa tête. Elle ouvrit les yeux pour voir le visage rond de l’enfant penché sur elle.


Celle-ci devait avoir huit ans et son air espiègle contrastait avec son visage que n’encadrait aucun cheveu. Ses yeux verts pétillaient de malice et toujours rieuse, elle tira Jeannette par la main.



Jeannette, surprise, se leva et suivit la petite fille. Elles étaient nues toutes les deux, bien entendu. À chaque résurrection, il en était toujours ainsi. Sur terre ou sur le monde du fleuve, tout le monde naissait nu. Elle n’y attacha donc aucune importance. Depuis deux ans qu’elle parcourait le fleuve, elle avait adopté l’habitude de se baigner nue tous les matins au milieu des autres Lazares. De toute façon, même sur terre, elle s’était déjà changée devant des hommes ou des femmes. Et puis, tant que son Graal ne lui aurait pas donné de tissu, elle devrait aller nue. Ce n’était pas la première fois.


Se faisant tirer pour avancer, Jeannette observa la petite fille. C’était la première qu’elle voyait depuis sa résurrection. La rumeur avait bien circulé le long de la vallée que les enfants de plus de cinq ans étaient revenus eux aussi à la vie, mais elle n’en avait encore jamais vu. Et plus le temps passerait, moins elle aurait de chance d’en rencontrer. Tout le monde revenait à la vie avec son corps de vingt-cinq ans, que l’on soit mort à quarante ou cent-dix ans. Un jour, la petite aura vingt-cinq ans, comme tout le monde. Et il n’y aura plus d’enfants sur le monde du fleuve. Moi aussi, pensa Jeannette. Dans quatre ans, j’aurai vingt-cinq ans. Et je suis déjà morte trois fois.


Vive et gracile, la petite pressait Jeannette pour avancer. Son corps nu se glissait entre les personnes qui commençaient à se rassembler autour du champignon de pierre, entraînant la jeune femme dans son sillage. Les gens s’écartaient avec bonne humeur et celle-ci espéra que sa première impression était la bonne. Sa dernière vie ne s’était pas déroulée au mieux.

Une voix héla Jeannette.



Jeannette se tira de sa torpeur. Elle leva la tête. La nuit blanchissait de plus en plus et l’aube ne tarderait pas. Elle se dépêcha de tendre son Graal et celui de la petite fille à l’homme, en prenant bien soin de repérer les emplacements.

Chaque Graal était personnel. Elle seule pourrait l’ouvrir et si elle le perdait, elle mourrait de faim à moins que des âmes compatissantes ne daignent partager leurs rations. Mais si elle devait vivre encore mille ans, autant utiliser le suicide exprès. Une mort, une résurrection, un nouveau Graal !

L’homme, ayant fini de placer tous les Graals qu’on lui tendait, sauta prestement au sol et tout le monde recula.

Jeannette serra la petite fille contre elle. Elle sentit sa peau douce et tendre contre son ventre. Celle-ci s’abandonna contre elle. Elle leva juste la tête pour regarder Jeannette. Ressuscitées en même temps, il était clair que celle-ci s’était déjà choisi une nouvelle maman en la personne de la jeune femme. Elle ne devait pas en être à sa première mort sur le monde du fleuve, elle non plus.



La petite fille rit.



Le rire cristallin résonna une fois de plus. La petite semblait accepter facilement sa nouvelle vie. Elle venait de mourir, Dieu sait comment, de perdre probablement des personnes à qui elle s’était attachée et elle trouvait à rire. Jeannette l’envia. Peut-être pourraient-elles rester ensemble ? Elle n’avait pas eu d’enfants sur terre et ici, aucune femme n’était tombée enceinte. Quelqu’un lui avait dit que c’était aussi bien. Ils devaient être quarante ou cinquante milliards d’individus – Jeannette avait bien du mal à imaginer ce que cela pouvait représenter – répartis le long du fleuve. S’ils se mettaient à procréer, cela deviendrait vite intenable.


Jeannette regarda autour d’elle. La foule n’était pas très dense. Ils devaient être trois cents ou quatre cents au maximum et tous attendaient patiemment, en plaisantant, ou en discutant de tout et de rien. Beaucoup, hommes et femmes, portaient le kilt, le vêtement classique du monde du fleuve ou des tenues qui lui étaient inconnues, comme cette sorte de robe longue laissant le sein droit nu – elle apprendrait plus tard qu’il s’agissait d’égyptiennes de la haute antiquité. Certaines femmes avaient adopté le tissu semi-transparent fourni par le Graal en le torsadant pour en faire un soutien-gorge ou allaient seins nus. Et quelques groupes d’hommes et de femmes étaient même totalement nus sans que cela offusque qui que ce soit ou n’en fasse l’objet de regards appuyés.


Son regard se porta vers un homme, grand, à cinq toises d’elle – elle ne parvenait pas à s’habituer à ce système de mesure dont on lui avait parlé : des mètres. Combien cela faisait-il ? Dix, peut-être ? Il semblait très fort mais il émanait de lui un grand calme Son corps était musclé et son ventre plat. Ses bras étaient épais, aussi larges que ses cuisses à elle. Il était entièrement nu et chauve, comme tous les nouveaux ressuscités. Il faudrait quelques jours pour que les cheveux repoussent. Jeannette ne put s’empêcher de jeter un œil sur son sexe. Il était de taille moyenne et plutôt large, comme elle les aimait. Mais bien sûr circoncis, comme tous les hommes. Elle aurait préféré qu’il n’en fût rien.


D’un bout à l’autre du fleuve, il en allait ainsi. Au petit matin, l’air semblait miroiter et une ou plusieurs silhouettes apparaissaient. Hommes et femmes, morts ailleurs la veille, revenaient à la vie, nus et totalement imberbes. Mais quelque fut leur religion précédente, s’ils en avaient une, les hommes étaient circoncis. Nul ne savait pourquoi.

Et les femmes étaient vierges. Ça, elle s’en serait bien passée. Une fois suffit.


Comme elle avait changé, depuis sa première mort sur la terre ! Jeannette se souvint de son fiancé. Elle l’avait aimé mais elle n’avait pas été à l’hôtel avec lui. Il était loin, ce jour qui aurait dû être le plus beau de sa vie. Elle avait trouvé une autre voie et l’avait suivie. Elle était morte vierge. Mais ça, c’était sur la terre. Ici, il en était tout autrement.

Le jour du grand cri, celui où tous les humains ressuscitèrent en même temps, elle avait d’abord erré, hagarde. Ce monde ne ressemblait en rien au paradis qu’on lui avait promis. Comment Dieu pouvait-il laisser tout le monde nu, sur ce monde si différent de celui annoncé par les Saintes Écritures ? Pour la première fois, elle avait commencé à douter.


Puis elle avait rejoint un groupe d’hommes et de femmes qui semblaient faire face avec calme à la situation. Pas un ne parlait français, mais ils l’acceptèrent simplement. Ensemble, ils découvrirent le fonctionnement des Graals puis commencèrent à bâtir des abris. Les mots étaient remplacés par des gestes ou des regards. Ce soir-là, ils dînèrent du premier repas fourni par les Graals autour d’un feu. Pour Jeannette, ce fût un steak cuit à point, avec une salade délicieusement assaisonnée et du pain. Cela n’avait rien à voir avec ce qu’elle mangeait en temps ordinaire mais elle se régala. De toute façon, elle était affamée, elle qui ne mangeait quasiment pas sur Terre.


Il y avait aussi des choses dont elle ne comprit pas l’usage, comme ces tubes blancs. Un des hommes, après le repas, en porta un à sa bouche et avec une drôle de pièce de métal carré trouvée dans le Graal, mit le feu à l’autre extrémité. De la fumée commença à sortir de sa bouche. Hilare, l’homme, d’assez petite taille, qui s’était assis près d’elle regarda son air ahuri. Visiblement, elle n’avait jamais vu de cigarette. Il lui tendit la sienne en lui faisant le geste d’inspirer. Le feu dévora aussitôt la bouche, la gorge et les poumons de Jeannette. Elle toussa longtemps, les larmes aux yeux, sous les rires gentiment moqueurs du reste du groupe.


Mais au fond d’elle, des souvenirs étaient remontés à la surface. Elle eut un long frisson qui n’échappa pas à l’homme près d’elle. Youri, si elle avait bien compris. Il la regarda, l’air inquiet. Jeanne aurait voulu lui expliquer mais quels gestes auraient pu expliquer sa mort si violente ? Elle eut un geste de dénégation et sourit, résignée.


Il y avait encore dans les Graals une liqueur qu’elle sentit doucement. Si elle ignorait de quoi il s’agissait – du whisky – elle reconnut néanmoins de l’alcool et refusa d’y toucher.

Le dernier article du Graal l’intrigua. C’était une petite tablette fine et verte. Tout le monde avait la même. Youri porta la sienne à la bouche et commença à mâcher. Il fit signe à Jeannette de ne pas avaler. Cela avait goût de menthe et la jeune femme apprécia la sensation. L’un près de l’autre, ils mâchèrent en silence un moment.

Les yeux de Youri semblaient avoir pris de l’éclat mais Jeannette se rendit compte que les siens devaient être aussi brillants. Tous ses sens parurent s’amplifier. Elle pouvait ressentir l’air, le feu, l’herbe…


La suite parut confuse à Jeannette. Comment était-elle arrivée là ? Elle était assise sur le champignon de pierre, les jambes bien écartées, un pied calé chacun dans un trou. Elle sentit la langue de Youri qui s’insinuait dans son intimité. Son bas-ventre était en feu et une étrange humidité ruisselait hors d’elle. La langue de Youri écarta les chairs roses et tendres, entra aussi loin qu’elle le put. Elle ressortit, entama de longs va-et-vient de bas en haut, remontant jusqu’à son bouton d’amour.


Jeannette sentit les mains de Youri se plaquer sur ses fesses, tandis que ses pouces se glissaient sur la peau tendre à l’intérieur de ses cuisses, caressant la jeune femme quelques instants. Puis les pouces se rejoignirent à l’entrée de son sexe avant de s’écarter et de remonter lentement le long des grandes lèvres. La langue de Youri ne quittait plus le clitoris, tournant autour, le titillant. Parfois, pour rompre le rythme, c’étaient les lèvres de Youri qui venaient l’aspirer, le tirant, l’allongeant avant de le relâcher. Des ondes de plaisir remontaient du ventre de Jeannette. Elle haletait, cambrée en arrière, ses magnifiques seins en forme de poire tendus à l’extrême. Ses tétons pointaient, énormes.


Ses mains quittèrent la roche où elles prenaient appui pour venir caresser ses seins, ce qui l’obligea à se pencher davantage encore en arrière pour se maintenir, mettant encore plus en avant son clitoris. Ses doigts vinrent tirer sur ses tétons, les faisant rouler, les relâchant, tournant autour d’eux. La jeune femme les abandonnait quelques instants pour prendre ses seins à pleines mains avant de revenir jouer avec les deux boutons.


Ainsi offerte, Jeannette sentit les doigts de Youri qui prenaient lentement possession de son sexe, écartant en descendant les petites lèvres. Ils s’enfoncèrent légèrement en elle, recueillant le liquide qui trempait son bas-ventre. Les doigts continuèrent leur descente jusqu’à l’entrée du petit trou, totalement dévoilé par les fesses largement écartées de la jeune femme. Ils remontèrent, redescendirent plusieurs fois pour tourner autour.

Les jambes de Jeannette flageolaient maintenant. Elle vibrait de tout son corps. Un long gémissement montait en elle. La langue de Youri allait de gauche à droite, de bas en haut, imprévue, jouant avec le bouton d’amour, augmentant la cadence. Quand un des pouces se glissa dans le petit trou de Jeannette, celle-ci se sentit exploser, une houle de feu l’emportant dans le plaisir.


Elle se revit ensuite, à quatre pattes, engloutissant le sexe de Youri dans sa bouche tandis que ses mains jouaient avec ses bourses. Mais comment avait-elle appris à faire cela ? Elle n’en avait aucune idée. Sa langue jouait avec son gland, tournait autour. Les lèvres s’arrondissaient sur le sexe, long et fin. Elle le prit en elle aussi loin qu’elle pouvait avant de reculer lentement, les deux pouces remontant au même rythme en appuyant sur la grosse veine.


Du coin de l’œil, Jeannette vit passer une femme, tenant deux hommes par le sexe. Cela ne l’étonna pas. Ce soir-là, tout lui paraissait absolument à sa place. Elle reprit les mouvements de sa bouche, tandis que sa main allait de plus en plus vite d’avant en arrière sur le sexe de Youri. Il dut s’appuyer sur le champignon de pierre. Sa respiration se faisait de plus en plus rauque, de plus en plus courte. Jeannette se revit ensuite une jambe de chaque côté de Youri. Celui-ci était allongé sur le dos. Elle tenait son sexe dans sa main, caressant son propre sexe avec. Elle le faisait aller d’avant en arrière et parfois glisser jusqu’à son petit œillet noir. Son bas ventre était totalement inondé. Elle le voulait en elle.


Elle sentit le corps d’une femme, plaquée derrière elle, qui lui caressait les seins. Elle leva la tête et les deux femmes s’embrassèrent à pleine bouche. Puis la jeune inconnue s’enfuit en riant. Quand était-elle venue se mêler à leur jeu ? Jeannette n’en avait aucune idée mais cela n’avait pas d’importance.


Elle dirigea le sexe de Youri en elle puis lentement, elle fit descendre son bassin. Elle ondula pour mieux l’accueillir, les mains de son amant sur ses hanches. Les chairs roses de la jeune femme s’écartèrent, accompagnant l’entrée du pénis en elle. Mais très vite, elle sentit une résistance. Elle se laissa aller, essayant de descendre encore pour forcer le passage, mais la douleur se fit vive. Jeannette recula pour lui échapper.


Les mains de Youri la retinrent. Doucement, lentement, un sourire encourageant à la bouche, il lui dit des mots qu’elle ne comprit pas. Les mains remontèrent sur son corps, se promenant doucement jusqu’à la voluptueuse poitrine offerte, caressant les pointes érigées. Puis les mains continuèrent leur chemin vers le dos de la jeune femme. Celle-ci se sentit tirée en avant, jusqu’à ce qu’elle se retrouve allongée sur le ventre du jeune homme. Instinctivement, les bras de Jeannette ne nouèrent autour du cou de Youri. Leur baiser fut long et passionné. Jeannette sentait le sexe de l’homme qui attendait, appuyé contre l’entrée de son vagin. Elle sentit les mains qui glissaient vers ses hanches, la maintenant doucement mais fermement, allongée sur lui, les jambes écartées. Dans cette position, elle ne pouvait lui échapper. Le bassin de Youri se souleva doucement mais sûrement, tandis qu’elle était maintenue. La douleur revint, insistante, mais Youri appuya plus fort. Jeannette cria quand la membrane se rompit. La jeune femme venait de perdre sa virginité, comme treize milliards, deux cent soixante-treize millions huit cent vingt-six mille cent trois autres femmes cette nuit-là.


L’explosion prit Jeannette par surprise. Elle sursauta violemment. Perdue dans ses pensées, elle avait oublié l’instant présent. La flamme bleu familière s’éleva à six ou sept mètres de hauteur dans un formidable bruit de tonnerre qui se répercuta de champignon en champignon dans la vallée. Le déjeuner était servi.



La jeune femme fit semblant de dévorer le ventre de la petite fille, tout en la couvrant de bisous et en la chatouillant. Celle-ci se tortilla comme un ver, ravie du traitement infligé. La flamme avait duré à peine trois secondes. Tout danger étant écarté jusqu’au prochain repas, l’homme qui avait placé les Graals remonta sur le champignon. Il prit en premier celui de la petite fille :



Il tendit ensuite celui de Jeannette qui le remercia. Les deux nouvelles Lazares s’éloignèrent vers un arbre proche pour découvrir le menu. Chacune posa sa main sur le tube de métal long de soixante-quinze centimètres et large de quarante-cinq. Ceux-ci s’ouvrirent, découvrant les six récipients habituels. Il y avait là des œufs au bacon, des toasts, du beurre, du lait, de la confiture, un quart de melon et les habituelles paillettes brunes qu’il suffisait de mettre dans de l’eau, même froide, pour faire un délicieux café fumant. Pas de tissu !


Quelqu’un avait parlé à Jeannette de convertisseur énergie/matière mais elle n’y avait rien compris. L’important, c’est que tout le monde avait à manger à sa faim.

Assises en tailleur face à face, Cimaya et elle attaquèrent le repas de bon cœur. Jeannette était curieuse d’en savoir plus sur la petite fille, mais elle aurait tout le temps. Son esprit vagabonda.


Après cette première nuit sur le monde du fleuve, Jeannette se réveilla avec la gueule de bois. Les effets de la tablette à mâcher s’étant dissipés, elle prit conscience de son comportement. Elle sombra dans une terrible dépression. Comment aurait-elle pu accepter de s’être donnée à un inconnu, comme une catin ? Comment accepter son comportement de chienne lubrique ? Pourtant, elle avait aimé ce qu’elle avait fait, les actes les gestes… et plus encore les sensations. Elle resta prostrée loin de tous, et surtout de Youri.


L’une des femmes du groupe prit soin d’elle. Ce fut elle qui portait son Graal au champignon et la forçait à manger ensuite. Elle l’emmenait se laver au fleuve, lui parlait, la berçait comme une enfant. Youri vint la voir régulièrement, mais Jeannette se recroquevillait à chaque fois. Il aurait voulu lui parler, mais il y avait la barrière de la langue. Ses visites s’espacèrent. Il finit par ne plus aller voir la jeune femme car cela lui faisait trop mal. Lui qui avait été le premier homme à aller dans l’espace, il se sentait impuissant.


Pour Jeannette, le salut vint d’une autre femme. Maria Montessori parlait un peu français. Elle avait entendu parler de cette femme prostrée. Première femme-médecin italienne, elle avait suivi des études de psychologie et de philosophie.

Gagnant petit à petit la confiance de Jeannette, elle l’amena à parler et à comprendre. Il fallut de semaines, mais Jeannette revint à la vie. Elle avait toujours été forte mais il lui fallut longtemps pour accepter que les tablettes à mâcher ne l’avaient pas forcée à faire ce qu’elle avait fait ce soir-là. Si à petites doses elles procuraient de la détente, la tablette entière libérait les tabous, laissaient s’exprimer totalement la personnalité de la personne. Bien qu’elle se le soit interdit toute sa vie, il lui fallut prendre conscience qu’elle aimait le sexe. C’est une nouvelle Jeannette qui alla retrouver Youri. Mais elle le trouva en belle compagnie. Il était trop tard. Elle partit donc à l’aventure sur les rives du fleuve.



Surprise une fois de plus, Jeannette leva la tête pour découvrir l’homme aperçut un instant avant. Il parlait espéranto sans effort, contrairement à elle, dont les mots étaient encore hésitants. Cette langue artificielle s’était répandue sur tout le monde du fleuve grâce aux missionnaires de l’Église de la Seconde Chance.


La bouche pleine, elle lui fit signe de prendre place avec elles. L’homme la remercia, sourit à la petite fille et s’assit en tailleur lui aussi à leurs côtés. Jeannette ne put s’empêcher d’admirer son port de tête fier, ses muscles admirablement dessinés et gonflés de force, son ventre plat. Et son sexe qui ne la laissa pas indifférente, même circoncis.


Sur terre, en son temps, les bains publics étaient mixtes dans sa région. Des hommes, elles en avait vu quelques-uns, dont ses frères. Elle aimait ce petit geste qui décalottait le gland pour laver la verge, et ce petit repli de peau qui en reprenait possession lorsqu’on le relâchait. Son « col roulé », lui avait dit un de ses amants, qui regrettait lui aussi ce petit morceau de peau disparu.


Jeannette prit conscience que l’homme la détaillait lui aussi et se sentit rougir. Assise en tailleur, elle avait les jambes grandes ouvertes. Si elle voyait le sexe de l’homme, lui ne perdait rien de son intimité non plus. Confuse, elle posa son Graal sur ses jambes mais elle sentit que ses tétons durcissaient, trahissant son émoi.


L’homme ouvrit son Graal à son tour et en sortit un morceau de tissu semi transparent. Il rit et le tendit à Jeannette qui en ferait un bien meilleur usage que lui. Parfois, il y avait des surprises. Outre des repas à faire vomir un homme préhistorique affamé – heureusement, c’était rare – certains hommes se voyaient octroyer du rouge à lèvre tandis que des femmes se retrouvaient avec des accessoires masculins.


Jeannette le torsada et le noua derrière son dos, confectionnant ainsi un soutien-gorge. Elle se leva et se regarda, le ventre nu avec ce petit bout de tissu qui lui cachait à peine les seins. Elle éclata de rire.



L’homme se leva d’un bon, comme piqué par une abeille, à la plus grande inquiétude de Cimaya, qui le regarda apeuré.



L’homme la regarda avec ravissement. Elle bredouilla :



Il posa un genou à terre et s’empara de la main de la jeune femme, la portant à ses lèvres. Ses yeux la dévoraient du regard.



Cimaya éclata de rire.



Le reste du repas se passa joyeusement, en espéranto pour ne pas exclure la petite fille. Mais il était évident qu’Yvain et Jeannette venaient de se trouver.


Cimaya courait le long du fleuve pour rester à la hauteur de la petite embarcation, ce qui n’était pas trop difficile. Remontant le courant, malgré les coups de pagaies puissants d’Yvain et du navigateur, ils n’allaient pas très vite. Par moment, elle prenait même la tête, les laissant loin derrière elle. Elle n’avait pas voulu monter à bord car elle avait peur de l’eau. Si se baigner sur la rive ne lui posait pas de problème, elle était terrorisée à l’idée de monter sur une barque, souvenir d’une noyade à peine un mois après le jour du grand cri.


Yvain avait promis de lui apprendre à nager, mais en attendant, elle préférait courir.

Un homme était venu les aborder, leur demandant s’ils s’étaient présentés au chef comme il est de coutume pour les nouveaux ressuscités. Il leur proposa même de les emmener car il remontait le fleuve vers la capitale.


En fait, sa générosité était en partie intéressée, car sa barque était lourdement chargée de marchandises (le troc est courant sur le monde du fleuve. Objets fabriqués avec la peau des poissons, alcool…) et les bras d’Yvain seraient les bienvenus. Jeannette regarda courir la petite fille, nue et libre comme l’air, ravie de se dépenser. Tels deux ressorts, ses jambes fines la propulsaient sur l’herbe douce de la rive. Ses petits pieds semblaient à peine effleurer le sol.


Simon, le navigateur, lui tournait le dos. Installé à l’avant de la barque, il donnait le rythme. Des tas de colis et de paquets s’entassaient derrière lui, le masquant en partie. Elle voyait le haut de son corps qui se soulevait légèrement quand la pagaie plongeait dans l’eau. Il aurait préféré un vrai navire mais il était ravi de naviguer sur le fleuve. Cela lui rappelait sa vie terrestre, avait-il dit.


Jeannette était à genoux, penchée en avant. Sa tête reposait sur son bras, posée sur le plat bord. Elle ne ramait pas. C’était elle qui avait la garde des précieux Graals, y compris celui de la fillette. Yvain se tenait derrière elle, à genoux lui aussi. Faute de place (si Cimaya avait voulu monter, elle aurait dû s’asseoir sur les paquets), il avait écarté les jambes, englobant la jeune femme entre ses cuisses musclées.

Elle ne le voyait pas, mais elle devinait les bras puissants qui plongeaient la pagaie dans l’eau. À chaque geste, Yvain se soulevait pour accompagner le mouvement, lui donnant plus de force.


Jeannette sentait les jambes de l’homme qui frottaient doucement sur le haut de ses cuisses. Le geste était doux, répété. Et attendu, se rendit bientôt compte Jeannette. Elle espérait le moment où Yvain se relevait, où ses cuisses se resserraient légèrement à la lisière de ses fesses à elle. Sa peau était douce, humide d’une légère transpiration. Elle sentait les muscles puissants qui se tendaient. Puis venait le moment où il se rasseyait, rompant le contact. Petit à petit, elle ferma les yeux, se laissant aller à cette sensation. Est-ce qu’il la regardait ? Est-ce qu’il goûtait lui aussi à ces deux peaux qui se répondaient ? Deux peaux qui se trouvent, ne font qu’une…


Elle chercha à imaginer ce sexe épais proche de ses fesses, qui se rapprochait à chaque geste. Elle aurait voulu se reculer, le sentir enfin glisser le long de son sillon. Elle aurait voulu le sentir durcir petit à petit, se relever, l’envahir. N’était-ce pas l’impression qu’ils donnaient tous les deux à qui aurait regardé de loin ? Un homme qui lentement va-et-vient entre les jambes de son amante, qui lentement cherche leur plaisir. Jeannette se contint pour ne pas se retourner, pour ne pas écarter les jambes telle une fleur. Elle aurait voulu prendre ce sexe à pleines mains, le guider en elle, l’amener à répandre sa semence sur son ventre. En elle.

Discrètement, elle fit glisser sa main libre entre ses jambes. Ses doigts rencontrèrent la chaude humidité de son ventre. Le rouge lui vint aux joues. Elle espéra qu’Yvain n’avait pas perçu son trouble. Mais au fond d’elle-même, elle savait bien qu’elle n’espérait que cela. La jeune femme fit un gros effort pour penser à autre chose. Elle ne pouvait pas se permettre d’arriver devant le chef, le sexe en feu. Son esprit repartit vers ses souvenirs.



Elle revit une autre navigation sur ce même fleuve, loin de là. Cette fois-là, c’était elle qui ramait. Elle descendait tranquillement vers l’aval, sans destination précise, cherchant juste à rencontrer des gens. Au hasard de ses escales, elle restait quelques jours, puis repartait à l’aventure. De temps en temps, si un homme lui plaisait, elle l’acceptait dans sa couche sans façon. Ce fut un mouvement qu’elle perçut du coin de l’œil qui l’alarma. Une, deux, trois, sept barques, dissimulées derrière des buissons venaient de s’élancer derrière elle. Inquiète, elle se demanda ce qu’ils lui voulaient. Elle n’avait rien qui puisse les intéresser. Sauf son corps, pensa-t-elle en blêmissant.



Bien qu’elle ait abandonné depuis longtemps ses anciennes croyances, elle n’avait pu s’empêcher d’appeler le Seigneur à son secours. Jeannette commença à pagayer de plus en plus vite pour distancer ses poursuivants. Sa seule chance était de quitter leur territoire avant qu’ils ne la rattrapent. Mais elle avait peu d’espoir. Ils étaient à trois ou quatre par barque, ce qui leur conférait une puissance et une rapidité qu’elle n’aurait jamais. Elle lutterait autant qu’elle le pouvait puis se laisserait couler. Jamais ils ne l’attraperaient vivante.


Elle continua à pagayer, même si ses muscles commençaient à lui faire mal. Elle essaya d’accélérer le rythme, mais la fatigue commença à l’envahir. Jeannette jeta rageusement sa pagaie au fond de son embarcation et s’empara de son arc. Elle allait mourir, mais elle ne partirait pas seule. Sa première flèche se ficha profondément dans le torse d’un des poursuivants. Dans un râle, il s’affaissa sur lui-même. Des cris de rage jaillirent des poitrines des hommes qui la poursuivaient. Elle décocha encore deux flèches, blessant légèrement un autre homme. Elle s’était entraînée à tirer, mais jamais elle n’aurait pensé qu’elle devrait le faire à bord d’une embarcation qui filait à toute allure dans le courant. Une nouvelle flèche se ficha dans la gorge d’un homme à la trogne particulièrement patibulaire.


Jeannette entendit un curieux sifflement venant de derrière elle. Elle eut juste le temps de tourner la tête. D’autres barques avaient pris la chasse, lui coupant la route à son insu. Elle vit plusieurs hommes, debout, qui faisaient tournoyer trois cordes reliées entre elles par leur milieu et lestées à leur extrémité de lourdes pierres.

Un des bolas s’enroula violemment autour d’elle, la faisant tomber lourdement au fond de la barque. Sa tête porta, l’étourdissant. Rapidement, elle sentit qu’on se saisissait d’elle sans ménagement. Le reste fut assez flou. Des visages, des cris, des coups, encore des visages… elle sombra dans l’inconscience.


Quand elle revint à elle, sa tête l’élançait atrocement. Le sang battait à ses tempes douloureusement et une violente nausée lui souleva le cœur. Le choc avait dû être très violent. Dans une semi-conscience, elle devina qu’elle devait avoir un traumatisme crânien. Ses côtes lui faisaient mal aussi, ainsi que ses bras. Elle laissa échapper un gémissement. Jeannette sentit une main se poser doucement sous sa nuque et lui soulever légèrement la tête.



Ouvrir les yeux fut un calvaire. Mais tout était trouble de toute façon. Elle sentit qu’on posait un linge mouillé sur son front.


Il fallut près d’une heure à Jeannette pour être en état de parler. Elle était dans une grande cage, en compagnie d’une vingtaine de personnes, hommes ou femmes. C’était la première fois qu’elle voyait ce qui semblait être une prison sur le monde du fleuve. Elle eut du mal à comprendre.


Qui voudrait faire prisonnier ses semblables ? Ici, chacun avait à manger, pouvait aller à sa guise, n’avait pas besoin de travailler, pouvait trouver une compagne ou un compagnon à sa guise et en changer tout aussi facilement, était éternellement jeune…



L’homme laissa échapper un éclat de rire.



Une voix rugit, venant de l’extérieur de la cage :



Un homme se tenait debout près de la cage. Petit, il était incroyablement gros. Si elle n’avait pas été commotionnée, Jeannette aurait ri tellement il était ridicule. Outre des pièces de vêtements disposées sans grâce sur son corps obèse, il portait ce qui était censé représenter une couronne. Deux hommes, armés de lances, se tenaient derrière lui. Une incroyable impression de méchanceté et de vice émanait de lui. L’homme se pencha aussi près qu’il le put des barreaux et dévisagea la jeune femme d’un air mauvais.



Jeannette frissonna.



Les yeux de Jeannette s’agrandirent d’horreur. Mais quand l’homme finit de parler, une chape de froid s’abattit sur la jeune femme. Elle eut l’impression de ne plus pouvoir respirer.



L’homme partit, un rire aussi gras que lui résonnant derrière lui, plein de menaces.


Jeannette se recroquevilla en gémissant. Si elle était morte vierge sur la terre, elle s’était largement rattrapée sur ce nouveau monde. Elle se donnait sans réfléchir à tous les hommes qui lui plaisaient, sans se poser de questions. Mais être prise par ces soudards… Les larmes lui montèrent aux yeux. Une boule douloureuse lui vrilla l’estomac.

Un grand silence s’était abattu dans la cage. Hommes et femmes se regardèrent, semblant prendre une décision silencieuse.

Le grand noir, un certain Martin se glissa contre Jeannette pendant que les autres se levèrent et se collèrent aux barreaux, cachant le couple à la vue de tous.



Jeannette, intriguée, leva la tête.



Martin regarda Jeannette avec tendresse et poursuivit.



Jeannette commença à comprendre. Martin lui offrait une porte de sortie.



Les yeux de Jeannette se mouillèrent de nouveau, mais cette fois de gratitude. Ce qui l’attendait était si horrible qu’elle préférait cette solution. Pourtant, elle n’avait jamais reculé devant l’ennemi. Mais il fallait bien se rendre à l’évidence. La jeune femme regarda l’homme dans les yeux. C’était la première fois qu’elle voyait un noir d’aussi près. Fugitivement, elle songea qu’elle aurait bien passé une nuit avec lui. Histoire de découvrir. Elle se pencha vers l’homme et ses lèvres se posèrent doucement sur les siennes.



Martin fit un signe à un homme de haute taille. Celui-ci vint se placer derrière Jeannette. Personne n’avait vu le geste, toujours masqués par le reste du groupe. La jeune femme eu quand même une dernière inquiétude.



Martin caressa doucement la joue de Jeannette.



Jeannette obtempéra. L’homme derrière elle se positionna de façon à immobiliser ses jambes. Puis il tira doucement les bras de la jeune femme en arrière et les bloqua dans ses bras puissants. Martin se mit à genoux face à eux et doucement plaça une main derrière la nuque de Jeannette. Son autre main vint couvrir la bouche et le nez de la jeune femme. Celle-ci ne bougea pas, donnant son aval. Alors le superbe noir serra.


Bientôt, l’air manqua à Jeannette et elle commença à se débattre, bien qu’elle se le soit interdit. Mais les réflexes sont ce qu’ils sont. L’homme derrière elle la maintint plus fermement. Elle commença à paniquer mais rapidement, un voile noir survint. Elle entendit seulement une voix lointaine, grave :