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Temps de lecture estimé : 13 mn
25/09/17
corrigé 06/06/21
Résumé:  Un récit tiré d'un journal intime : une femme mûre dépressive entre dans une boutique de luxe, pour le pire et le meilleur.
Critères:  ff inconnu complexe magasin fsoumise humilié(e) exhib noculotte nopéné journal
Auteur : Dyonisia  (Rêves, autofictions... souvenirs et confidences...)      Envoi mini-message

Série : Histoire de Colette

Chapitre 01 / 06
Soumission

Il y a plusieurs années, en nettoyant les tiroirs d’une commode de brocante j’y trouvai un petit cahier coincé au fond du socle. Chiffonné et à moitié déchiré, ses pages étaient en partie couvertes d’une écriture fine et irrégulière à l’encre bleue pâlie. Apparemment un journal oublié.

Les paragraphes s’enchaînaient correctement au début. Ils perdaient progressivement leur cohérence ensuite jusqu’à devenir une série de bouts de phrases, voire d’annotations sans logique ni chronologie. J’ai essayé de mettre en ordre la narration en espérant ne pas trop trahir la pensée de la protagoniste.


______________________



Prologue


Je m’appelle Colette C*. J’ai 53 ans. J’ai divorcée il y a plusieurs années d’un mariage accepté par convenances sociales. Il y a trente ans, malgré l’éclosion des mouvements de libération de la femme, ou peut-être à cause d’eux, l’homosexualité féminine était encore confinée au sous-entendu et au demi-mot. D’ailleurs, cela a-t-il vraiment changé aujourd’hui ? J’avais donc convolé « en justes noces », pour éviter que mes préférences amoureuses ne deviennent un sujet de critique et de rejet.


Sans être ouvertement discriminante, la qualification de « goudou » ne promettait pas un avenir radieux en dehors des cercles militants et de certains couvents… J’ai supporté mon état de femme mariée pendant dix ans. Le travail, les sorties, les amis – et surtout les amies – rendaient la chose acceptable. J’ai même admis presque avec plaisir l’obligation du « devoir conjugal ». Je n’ai pas eu d’enfant.


Était-ce une réaction inconsciente de mon corps, une forme de dénégation ? Quoi qu’il en soit, j’en étais soulagée, à l’époque. Maintenant, je le regrette. Je ne peux m’empêcher d’éprouver un sentiment de frustration quand je croise des jeunes femmes, étudiantes de vingt ans ou jeunes mères, dont l’air épanoui me serre fugitivement le cœur. Mais la vie est passée et aujourd’hui mon esprit est envahi par d’autres souvenirs bien plus douloureux.


Mon divorce prononcé, j’ai changé de ville et de vie. J’ai repris des études, je me suis investie dans de nouvelles occupations. J’ai beaucoup travaillé pour me rendre autonome, et j’ai réussi à m’élever, un peu, dans la société. Je me suis installée dans l’arrière-pays provençal et je suis employée dans un bureau d’études spécialisé dans les relations internationales. De petite secrétaire à tout faire, j’ai pu évoluer vers certaines responsabilités et devenir, modestement, une assistante à laquelle on confie de temps à autre de petites missions.


Peut-être eût-il mieux valu, tout compte fait, que cela ne soit pas puisque les péripéties qui suivent trouvent en partie leur cause dans les conséquences de ma progression professionnelle. Sans doute aussi, ma nature discrète et réservée est-elle en cause, je ne veux pas le nier. Mais, comme on dit, on ne se refait pas, et parfois on découvre sur le tard les côtés sombres et secrets de sa personnalité.


Je parle, bien sûr, de ma personnalité psychique car sur le plan physique j’estime que je n’avais pas été trop défavorisée. Satisfaite de mes un mètre soixante-huit, un peu moins de ma rondeur dont attestaient mes soixante-huit kilos, mais somme toute heureuse de mes hanches pleines et de ma poitrine qui titrait, bon an mal an, un gentil 95C, je me considérais comme encore attirante. Sans trop de succès, hélas, et je ne compte plus les soirées – ou les nuits – de plaisirs solitaires, perdue dans mes fantasmes et rêvant de la fille idéale qui partagerait mon excès d’amour saphique. La vie quotidienne d’une lesbienne cinquantenaire dans une petite ville de province exige de faire de l’hypocrisie sa seconde nature. Si l’on n’est pas intégrée dans le milieu bourgeois local, la rumeur et les médisances courent vite.


Je m’inventais des amoureux, toujours à bonne distance d’ici, ce qui expliquait ma condition de célibataire et justifiait mes voyages dans des régions éloignées. En ces occasions, relativement rares, je profitais de mon anonymat pour me livrer à des débordements sexuels où j’explorais toutes les capacités de mon corps à jouir. Je crois bien qu’à l’exception de la coprologie, de la pédophilie et de la zoophilie (hormis, je dois dire, l’expérience d’une langue de chat sur le minou), j’ai connu et apprécié tout ce qu’une femme peut donner et recevoir d’une autre, voire de plusieurs autres. J’en tirais un apaisement momentané, mais au retour, retrouvant la banalité de l’existence, j’éprouvais le désenchantement de n’avoir eu pour partenaires que des filles de rencontre.


Peu de temps avant les évènements qui ont transformé radicalement mon avenir, j’avais été envoyée en mission dans un pays du Moyen-Orient. Honneur insigne pour moi, mais qui a eu sur mon équilibre psychologique des effets majeurs à cause de l’aventure traumatisante qu’il m’a fait vivre et que je raconterai peut-être un jour.


Bref, revenue à la vie « civile » j’avais dû être suivie médicalement. Aucun résultat tangible n’ayant été constaté et mon esprit continuant de vadrouiller en boucle malgré les traitements et les anxiolytiques, les docteurs au grand complet, généraliste, gynécologiste et psychiatre, avaient décidé de me placer en cure de sommeil.


Après de longues semaines en maison de repos spécialisée, j’avais été déclarée tirée d’affaire et, sous réserve d’entretiens réguliers à poursuivre, autorisée à rentrer chez moi, en arrêt de maladie. Il m’avait été conseillé de trouver des dérivatifs, de chercher des « compensations », de me prendre moi-même en main pour retrouver mon équilibre.


Je flânais donc ce jour là dans les rues de D… sans but précis mais à l’affût de la bonne affaire que pourrait m’offrir la période des soldes. J’avais un peu forci, mes culottes me serraient et mes seins avaient perdu de leur faible superbe. L’infirmière en chef et ses collègues, pour qui rien de ma personne n’avait plus de secret, et même les aides-soignantes, qui n’en ignoraient pas non plus la plus intime parcelle, m’avaient chacune à leur tour fermement invitée à m’inscrire à un club de gymnastique.


J’avais obtempéré dès ma sortie. Je m’étais déjà rendue à quelques séances, assez pour apprendre que le chemin serait long. En attendant, un renouvellement de lingerie ne serait pas inutile et de jolis frous-frous sont la base du bien-être, toutes les femmes vous le diront. Je furetais, de ci, de là, allant de devantures en magasins, comparant les ensembles proposés, les marques offertes et les prix sacrifiés.


J’attendais le coup de foudre, l’impulsion soudaine qui vous fait oublier n’importe quelle somme à débourser parce que, c’est évident, c’est ce soutien-gorge et pas un autre qui est fait pour vous. Ai-je été conduite par mon inconscient ? Ai-je été poussée par les forces obscures accumulées dans mon subconscient ? Mes pas indécis m’ont guidée vers la rue la plus huppée, devant la boutique la plus sélect de la ville.


Jamais je n’avais osé y entrer auparavant. Par ouï-dire, je savais que les tarifs pratiqués y atteignaient des montants faramineux. On m’avait cité des coûts qui dépassaient mes émoluments du mois pour une bricole. Un simple string y valait, pour moi, une fortune.


C’est un lieu fréquenté par la plus haute bourgeoisie locale dont les dames aiment à s’y retrouver entre soi. Des avocates et des femmes d’avocats, de chirurgiens, de notables de tous bords, d’officiers supérieurs aussi, souvent aussi gradées que leur mari. Un monde qui, selon l’expression de ma grand-mère, « pète dans la soie ». Nulle étiquette ne vous avertit de la dépense à prévoir. Cela ne se fait pas.


On entre parce qu’on veut ce merveilleux petit ensemble-là, ou bien pour voir si un autre encore plus adorable ne serait pas mieux approprié. La vitrine est chiche en expositions, quelques modèles seulement, parfaitement mis en valeur. En retrait des vitres, un rideau très simple masque la vue de l’intérieur du sanctuaire. La porte, sans apparat, est voilée elle aussi.


À la réflexion, je me dis aujourd’hui que rien n’arrive fortuitement. J’étais passée chez le coiffeur la veille, j’avais choisi ce matin-là ma plus jolie robe. J’ai tourné la poignée, je suis entrée, et toute ma vie a basculé.



1- Soumission…


L’ambiance de la boutique était feutrée. Dès l’ouverture de la porte, c’est le silence qui m’avait surprise, un silence quasi religieux. Rien à voir avec le tumulte qui règne dans les magasins en période de soldes. Ici, point de folles hystériques prêtes à se battre pour le moindre bout de nylon convoité, mais des personnes distinguées, se frôlant sans heurts, s’effaçant aimablement pour permettre à la voisine d’approcher du rayon. Lorsque les mains se rencontraient dans la fouille bien élevée des tiroirs, un seul sourire indulgent en témoignait, et à la place des regards agressifs habituels ailleurs, deux haussements courtois de sourcils s’invitaient mutuellement à emporter le modèle choisi.


J’étais restée un moment près de la porte, incertaine de pénétrer plus avant. Prémonition ou simple conscience de transgresser les règles sociales, je ne me sentais pas à ma place, avec un vague sentiment d’inquiétude. La grande et svelte vendeuse qui officiait à proximité de l’entrée m’avait jeté un coup d’œil interrogateur avant d’afficher l’espace d’une seconde un sourire vaguement condescendant à mon égard. Elle m’invita à lui confier mon sac et mon manteau. Malgré son jeune âge – vingt, vingt-deux ans peut-être – elle m’avait jaugée et identifiée comme étrangère à sa chalandise usuelle.


Cette considération dédaigneuse m’eût parue insultante en d’autres temps, mais j’étais, je le répète, dans un état d’incertitude et de recherche. Au lieu de m’enfuir, je me suis avancée et c’est alors que je l’ai vue, Elle !


Je l’ai reconnue tout de suite : depuis mon installation dans cette ville, je l’avais croisée quelques fois, aperçue plus souvent au volant de son cabriolet de luxe, et régulièrement vue dans la rubrique des personnalités de la presse locale. Il courait quelques racontars sur elle, mais jamais aucun scandale n’avait entaché sa réputation. Elle avait autour de quarante-cinq ans et n’était pas mariée.


On disait qu’elle dirigeait de main de maître son office notarial, qu’elle tenait son personnel et sa clientèle avec la même poigne, qu’il ne faisait pas bon lui tenir tête, y compris pour ses confrères. Une maîtresse femme, menant virilement ses affaires avec une implacable autorité. Ses employées (oui, son étude n’employait que des femmes, à tous les postes, des clercs aux secrétaires), ses employées, donc, ne divulguaient pas la moindre information qui puisse alimenter les chroniques, et d’ailleurs on ne les voyait pratiquement jamais en dehors des bureaux de Me Ève L*.


Ce jour-là, elle portait un ensemble osé, boléro et jupe de cuir mauve, qui accentuait la finesse de sa silhouette et des mules à talons qui la grandissaient d’une dizaine de centimètres. La belle notaire courait les soldes, tout comme moi, et elle semblait aussi peu déterminée que moi sur l’article qu’elle recherchait. Pour l’instant, elle contemplait un rayonnage exposant des dessous de haute couture. Mue par une impulsion incontrôlée, je me suis détachée de la porte et j’ai zigzagué le plus discrètement et naturellement possible vers le rayon qui lui faisait face. Cette femme de classe m’intriguait et m’attirait. Je m’étais souvent dit que j’aimerais faire sa connaissance ; pourquoi pas saisir cette occasion ?


Plus proche d’elle, ma belle assurance s’est vite envolée. J’aurais bien voulu l’aborder, mais sous quel prétexte lui adresser la parole sans paraître importune… Pour trouver une contenance, je me mis à examiner un très joli body blanc, qui ne m’intéressait pas vraiment car les tailles disponibles ne semblaient pas proposer mon 44 indispensable. Je tripatouillais quand même un modèle, puis l’autre, éprouvant l’amplitude des bonnets, tâtant la fermeture de l’entrejambe, la coupe de la taille et des fesses. Ma morphologie m’oblige à être attentive, car se retrouver avec les boutons dans l’entaille et le bas du body en chiffon roulé entre les fesses n’a rien de confortable.


J’examinais tout, en fait, plus par habitude que par besoin : j’aurais préféré trouver un ou deux soutiens-gorge et une ou deux paires de culottes de bonne qualité que le rabais important m’autoriserait à acheter, même si cela devait représenter une folie pour ma bourse. En tout cas, mon manège a attiré son attention. En levant les yeux, j’ai vu les siens qui me fixaient avec acuité. Elle agitait nonchalamment une large ceinture de cuir qu’elle venait de prendre en main. Cette attitude m’a fait songer à la Mère supérieure du pensionnat de mon adolescence : c’était le même geste, avant de nous corriger.


J’ai légèrement rougi, sans doute, car son visage s’est éclairé et elle a plissé les paupières en m’étudiant sans retenue. J’ai souri à mon tour en inclinant la tête pour la saluer. Elle a fait le tour des rayons et s’est plantée à côté de moi, la main tendue.



Je me suis présentée, mais elle a eu l’air de ne pas écouter.



Je n’en revenais pas : cette femme si distinguée m’expliquait sans détour qu’elle méprisait la lingerie et les dessous. Non que j’en sois restée aux culottes Petit Bateau, mais je mettais toujours quelque chose, un soutien-gorge, indispensable avec mes seins lourds, et au moins des collants, comme ce jour-là par exemple.


Elle a dû deviner mes pensées – je sais aujourd’hui quelle est sa perspicacité ! – car son regard est descendu vers mes jambes.



J’avouai l’incongruité d’avoir mis des collants, en me sentant déjà coupable de cette inconvenance au regard des critères qu’elle venait de m’indiquer.



Je me récriai en rappelant qu’à mon âge, hélas, les belles années sont passées et que le corps a oublié la fermeté de sa jeunesse. Elle eut une moue ironique et me coupa la parole :



M’entendre ainsi rabrouée en public m’avait sidérée. Ce sermon me fit venir les larmes aux yeux. Elle reprit plus doucement :



Je concédai de mauvaise grâce qu’en effet on me l’avait conseillé récemment et que je venais de m’y mettre.



La situation était embarrassante. Je me sentais déstabilisée, et, pourquoi ne pas l’admettre, cette femme me troublait. Ses manières directes me subjuguaient. J’avais si souvent rêvé de me trouver en sa présence, dans son intimité, que je craignais que mon désir d’elle ne fût trop évident. J’acquiesçai confusément d’un mouvement de tête à ses derniers propos. J’aurais voulu me dégager de cette conversation qui prenait une tournure inattendue, mais je restais clouée sur place malgré moi.


Madame Ève (oui, l’appeler ainsi me vint spontanément) se détourna un instant pour attraper une coûteuse paire de bas exposée sur le présentoir voisin.



Je protestai qu’il n’en était pas question, que je ne pouvais accepter un tel cadeau, mais que, bien sûr, j’étais prête à lui rendre service, qu’elle n’avait qu’à me dire ce qu’elle souhaitait.



Cela paraissait lui tenir tellement à cœur que j’ai accepté de les essayer, pour lui faire plaisir. Comme je cherchais des yeux les cabines, elle m’a précisé que ce n’était pas nécessaire, puisque les rayonnages nous entouraient presque complètement. C’était certes un peu insolite, mais en regardant autour de nous, j’ai vu qu’en effet nous étions isolées des autres acheteuses.


J’allais passer mes mains sous ma robe pour enlever les collants quand je me suis souvenu que je n’avais que ça. J’ai donc insisté pour aller en cabine, en confessant la vérité sur mes dessous. Mais elle n’a fait qu’en rire.



J’ai encore un peu protesté, mais ses pupilles se sont rétractées méchamment et un vilain rictus s’est marqué sur sa bouche. Par peur d’un esclandre, j’ai obtempéré à sa volonté. Appuyée contre le bord de la gondole, j’ai fait glisser le haut de mes collants sur mes cuisses, en me tortillant pour éviter que la robe ne remonte. Mais pour les retirer, j’ai dû d’abord ôter mes trotteurs qu’elle a fait valser à un mètre d’un coup de pied négligent. Ensuite, je n’ai pu faire autrement que relever une cheville afin de tirer plus commodément sur la première jambe des collants.


Madame Ève était en face de moi. J’ai vu ses yeux se porter sur mes cuisses et j’ai rougi. D’où elle se tenait, elle avait sans doute une vue directe sur mon ventre maintenant démasqué. J’avais honte d’exposer, presque volontairement, mon sexe sans le moindre voile. Elle a froncé les sourcils en devinant l’épaisse touffe de poils pubiens que j’avais négligée d’entretenir depuis des semaines. Mais il me fallait aller au bout de mon effeuillage forcé en relevant à son tour l’autre jambe pour la dépouiller du reste des collants.


Elle s’est avancée vivement pour écarter les pans de ma robe pour s’assurer de ce qu’elle avait constaté. Plusieurs boutons n’ont pas résisté à son geste et mon bas-ventre s’en est trouvé découvert. Sa main s’est refermée sur une mèche bouclée.



Et elle a arraché d’un coup sec les poils qu’elle tenait. J’ai poussé un cri aigu, de surprise et de douleur. Quelques têtes se sont tournées dans notre direction. Si j’avais pu rentrer sous terre, je l’aurais fait. Elle m’a tendu les bas en m’enjoignant de les passer. Je me suis exécutée aussi vite que possible pour ne pas attirer à nouveau l’attention. Mais pour cela, j’ai dû encore lever mes jambes l’une après l’autre et exhiber deux fois de plus mon intimité. Madame Ève ne s’est pas privée de l’observer d’un œil expert.



(À suivre)