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n° 18109Fiche technique12218 caractères12218
Temps de lecture estimé : 8 mn
03/10/17
Résumé:  Le meilleur moment de l'amour n'est-il pas l'ascension de l'escalier ?
Critères:  extracon ascenseur miroir
Auteur : Calpurnia            Envoi mini-message
Ascenseur vers l'azur

Depuis peu, mais d’une manière éclatante car à chaque minute, au cœur de mes pensées, Raphaëlle est devenue ma maîtresse. À quarante ans et quelques, elle s’est laissé séduire par mon sourire et les roses écarlates en gerbe que je viens de lui offrir, au restaurant, en gage de la passion érotique que j’éprouve pour elle. En sortant, nous avons décidé de finir la soirée dans l’intimité, chez elle.


Elle habite une tour de trente étages. Vu d’en bas, l’immeuble est impressionnant tant il semble défier le ciel nocturne de son enfilade interminable de fenêtres éclairées. Ses talons aiguilles piétinent élégamment la moquette. Confiants, nous nous tenons par la main pour traverser le hall désert où se déverse la lumière éblouissante des néons. En attendant l’arrivée de la cabine, je me rends compte que j’ai perdu un bouton à la manche de ma chemise, et l’idée d’avoir à en recoudre un autre m’agace au point que je ne remarque pas combien ceci a peu d’importance, ni le regard de Raphaëlle terriblement chargé de désir.


Le bouton vingt-neuvième qu’elle presse s’éclaire. La porte de l’ascenseur se referme sur notre couple illégitime dans un bruit feutré de métal bien huilé. Elle est mariée, mais son époux est parti pour une semaine en voyage d’affaires. Ils n’ont pas d’enfants.


Légère secousse. Nous décollons.


Immobile, elle se tient si près de moi que je sens son souffle chaud parcourir mon cou – en taille, je la dépasse d’une tête. Je colle mon nez dans sa longue chevelure brune dont les parfums puissants me charment au-delà des mots. C’est, en elle, ce qui m’a séduit en premier, quand je l’ai rencontrée dans un train où nous étions assis l’un à côté de l’autre pour un voyage de plusieurs heures. Nos regards se croisent à travers les deux grands miroirs, qui, ce n’est pas fréquent, sont fixés parallèlement l’un à l’autre, de sorte que nos images sont multipliées à l’infini, en une enfilade fascinante d’elle et moi intercalés.


Nous nous faisons face et les mains de Raphaëlle se posent sur le haut de mon dos, puis glissent le long de ma colonne vertébrale, ce qui provoque en moi un puissant frisson. J’ai l’impression de vivre un rêve que je veux prolonger le plus possible en fermant les yeux quelques secondes, avant de retrouver ses pupilles vert pomme. Elle rit du trouble qu’elle vient de provoquer en moi. Elle rit de ses dents à engloutir la vie, et son rire voltige dans l’espace étroit autour de nous, en vagues cristallines puis, s’enfuyant, s’élève aussi haut que sa tour de béton. Cinquième étage, indique l’afficheur à cristaux liquides aussi rouges que les ongles de ma belle.


Mes doigts glissent sur sa joue et dessinent lentement les contours de sa bouche aux lèvres aussi écarlates que mes roses qu’elle a posées au sol, en prenant soin de ne pas abîmer son maquillage. Les siens s’égarent sur mes reins et me griffent à travers le coton de ma chemise. Exaspéré par le désir, je ne puis réprimer un soupir alors que je sens, dans mon caleçon, mon sexe se déployer, prêt à honorer notre rencontre. Dans deux minutes, nous allons entrer chez elle et nous étreindre avec une intensité jamais atteinte. Nous n’en sommes qu’au huitième étage et il me semble déjà que la Terre est à des milliers de kilomètres sous nos pieds.


Une main fine se glisse en dessous du tissu de ma chemise, vers le bas. Au point où j’en suis, elle peut bien les faire sauter un à un, ces sacrés boutons qui ne tiennent pas ! Peut-être veut-elle palper le dessin de mes abdominaux ? La peau glabre de mon ventre est très sensible. C’est la brûlure d’un feu de délices qui m’embrase comme un arbre sec en pleine canicule. Je frémis. Onzième étage.


Je dépose un baiser léger sur son oreille droite. Elle rit car cela la chatouille. Mais elle ne fait rien pour me dissuader de continuer, alors je lèche carrément le lobe, puis le serre doucement entre mes incisives. Je murmure « coquine ». Hochant la tête, elle assume ce qualificatif. Treizième étage.


Elle m’imite ; je sens sa langue lutiner mon organe auditif. Elle chuchote à son tour « Obsédé… », puis elle ajoute « Satyre lubrique ! » Ce n’est pas faux, et je prends ces épithètes comme le compliment d’une libertine à un Sardanapale ; nous sommes donc faits pour nous entendre. Quinzième étage.


Sa longue robe noire au col échancré est une invitation permanente aux facéties câlines : il est temps que je m’y intéresse. Penché en avant, je bisoute la zone exposée située juste entre les seins, jouant avec les limites du vêtement que je ne peux pas encore retirer. Elle se laisse faire, et même m’encourage en étirant l’habit vers le bas afin de découvrir un peu plus de ses globes mammaires – depuis tout petit, j’ai toujours été gourmand de ces attributs des dames. Il semble qu’elle ne porte pas de soutien-gorge, ou alors, un balconnet sans bretelles très discret. Je ne résiste pas à ta tentation de vérifier en glissant une main le long du haut de son dos. Effectivement, je sens le relief d’une bretelle. Un regard noir punit aussitôt mon indiscrétion. J’avais oublié (fait semblant d’oublier) que la lingerie est son apanage féminin. Docile, je cesse aussitôt de la toucher. Elle éclate de ce rire tellement féminin qui n’appartient qu’à elle, de nouveau. Dix-huitième étage. Le ciel se rapproche. J’ai chaud et commence à transpirer. L’air doit se raréfier.


Audacieuse, sa petite main agile franchit le détroit de ma ceinture et pénètre par l’avant l’antre de mon pantalon. Elle se faufile avec la rapidité d’un serpent qui attaque jusque sous le boxer et se saisit de ma verge. Raphaëlle sait qu’elle joue avec un bâton de dynamite car elle pourrait très vite me faire éjaculer, ce qui gâcherait quelque peu la suite des événements. Pour ne pas me faire exploser, elle se contente ensuite d’effleurer rapidement mes bourses, de l’extrémité de ses doigts, avant de se retirer, satisfaite de l’incendie de mes sens qu’elle a provoqué. Mon entrejambe présente maintenant une jolie bosse, bien arrondie. Supplice de Tantale : il faut attendre le sommet. Vingtième étage.


Puisqu’elle a donné le signal, puisqu’il est permis de s’enhardir, je soulève un pan de la robe afin de glisser sur la surface lisse d’une cuisse charnue. Raphaëlle en profite pour se suspendre à mon cou, soutenue par mes deux mains sur ses jambes impudiquement découvertes. Les parfums féminins m’enivrent littéralement. Nos regards se plongent l’un dans l’autre et nos lèvres s’apprêtent à se rejoindre. Ma tendre amie me semble aussi légère que l’est la vie en ce moment précis. Mon sexe comprimé est tout contre le sien : il me suffirait d’ouvrir ma braguette et d’écarter sa culotte, dont l’humidité se transmet à mon pantalon, pour que ma verge bondisse et pour la pénétrer d’un coup, sans autre forme de préliminaire. Vingt-troisième étage.


Alerte ! Incident critique au vingt-quatrième : la porte s’ouvre prématurément, l’ascenseur ayant été appelé par un habitant de l’immeuble que ma douce amante ne connaît que trop bien pour son habitude de glisser dans les boîtes aux lettres de petits mots venimeux afin de condamner les faits qu’il a discrètement observés et jugés comme contraires à la morale. Or, la belle Raphaëlle ne craint pas, par les nuits où la forte chaleur l’empêche de dormir, de prendre le frais sur son balcon dans une tenue des plus légères, parfois même dans le plus simple appareil, allongée sur son transatlantique afin de laisser jusqu’à l’aurore le vent caresser délicatement sa peau dévoilée, en exposant ses charmes à quiconque possède une bonne vision nocturne et veut la regarder librement, voire à cette occasion de s’adonner au plaisir solitaire des doigts ou d’un jouet vibrant, ou bien d’aimer son époux à la lueur des étoiles. En conséquence, elle n’a pas été épargnée par le parangon de vertu qui, à plusieurs reprises, a souligné par écrit son péché mortel d’impudeur licencieuse et de fornication publique.


Heureusement, il me monte pas à bord car il veut descendre et n’a pas vu que la cabine montait. D’ailleurs, qu’aurait à faire ce sycophante dans les sommets célestes, alors que le sac poubelle qu’il transporte est destiné aux enfers du dernier sous-sol ? Rien de rien ! Mais ce qu’il a vu, et agrandi ses yeux glauques derrière ses épaisses lunettes, n’échappera sans doute pas aux commérages qu’il répandra autour de lui. Raphaëlle hausse les épaules : elle s’en moque. Plus personne n’écoute ce triste sire frustré de n’avoir jamais tenu de femme entre ses bras.


Tandis qu’après cette fâcheuse interruption la cabine reprend sa trop rapide ascension et que ma belle repose à nouveau sur ses pieds, derrière la robe retroussée mes doigts s’aventurent de plus en plus haut sur les cuisses, jusqu’à palper, sous les dentelles de la culotte fine, les globes de la douce callipyge. Les fruits sont fermes à souhait et se promettent succulents sous le suçon et autres mignardises, lorsque j’aurai le loisir d’y accéder à ma guise. Sans doute l’ai-je atteinte là où elle est vulnérable, car elle mord sa lèvre inférieure, bascule sa tête en arrière, retient son souffle. Vingt-sixième étage. Le temps peut s’arrêter, l’ascenseur se bloquer, courant coupé, black-out de plusieurs heures sur la ville. Juste pour nous deux.


Après s’être frayé un passage le long du sillon, mon index effleure la rosette anale. Raphaëlle tressaille, comme sous l’effet d’un contact électrique. Elle murmure « Oui, oh oui ! » Cet endroit est si sensible que j’ai l’impression que si je continuais, soit en glissant mon doigt à l’intérieur de l’orifice, soit en me contentant de tourner autour, elle pourrait jouir de cette façon. Vingt-huitième étage.


Nous sommes collés l’un à l’autre. Nos sueurs d’amants se mêlent dans l’étroite cabine. Mon cœur bat à se rompre : je vais peut-être mourir avant d’atteindre le sommet du ciel, le soleil câlin, les ailes fondues comme Icare. Dans les miroirs où nous sommes multiples, j’ai une drôle d’allure : ma cravate est à moitié défaite, et un pan de ma chemise sort de mon pantalon. Raphaëlle, par contre, à l’approche de son royaume, n’a rien perdu de sa féminité superbe. Je l’amène à se tourner légèrement afin d’admirer les images dupliquées des sublimes hémisphères rosés entre lesquels fouille mon doigt. Elle, fière de son corps qu’elle m’offre à dévorer du regard et des mains, se prête complaisamment à ce jeu qui ne dure qu’un court instant dans la réalité, mais sera durablement imprimé dans ma mémoire.


Le monde et ses problèmes ont disparu en dessous de nous : je suis tout entier présent pour elle, comme elle l’est pour moi, et notre présence mutuelle permet que notre union soit pure de toute réserve. Nous nous élevons vers notre joie complète, et cela seul compte à présent.

Vingt-neuvième, niveau final. Le « ding » de l’ouverture nous invite à quitter ce lieu minuscule. Dans moins d’une minute, nos vêtements voleront dans toutes les directions, je vais rendre gloire à ce corps de femme qui se tient près de moi, et je compte bien le faire d’une manière éclatante ; il n’y a rien de plus important, et je crois pourvoir affirmer, sans grand risque de me tromper, que c’est réciproque. Le voyage vertical s’achève, prélude à notre ébat horizontal, à notre exultation charnelle. La porte de l’appartement de ma tendre maîtresse est située juste en face. Allons nous y aimer, cette fois dans un paradis de confort et la sécurité.