Une Histoire sur http://revebebe.free.fr/
n° 19185Fiche technique70121 caractères70121
Temps de lecture estimé : 38 mn
07/09/19
Résumé:  La fin approche et tout se précipite. Nos héros verront se dévoiler les antagonistes de cette histoire d'espionnage et enfin je reverrai Raïssa !
Critères:  ffh hbi nympho hotel amour trans fellation anulingus pénétratio double fsodo hsodo policier -policier
Auteur : Samir Erwan            Envoi mini-message

Série : "1000fleurs"

Chapitre 04 / 04
Un miel de mille fleurs - Dernière partie

Précédemment :

Espion pour un Service de Renseignement, j’enquête sur une structure criminelle dirigée par Jacob et Ethan. Pour recueillir des informations, Raïssa s’est infiltrée dans le lit de Jacob. Ce dernier, ayant des doutes sur moi, lui a ensuite demandé d’infiltrer mon lit. D’avoir une prise sur moi. Raïssa a donc invité Charlène à garder un œil sur moi, durant son absence à l’étranger. S’est développée une histoire d’amour à trois, dans toute cette tension d’espionnage.







– 31 –


Le soleil se lève sur la ville. Par la fenêtre de mon Airbnb loué pour la mission, le ciel se teint d’orange estival sur les buildings de la Métropole. Mais je ne suis pas au penthouse de la tour Elizabeth, donc le soleil entre à peine dans le studio. Tout ce que je sais, c’est que le jour sera radieux, car Raïssa est revenue en ville.


Charlène se prépare pour se doucher, se démaquille avec un petit linge humecté. Elle est belle et gracieuse, nous venons de jouir et j’aurais envie de la reprendre de dos. De prendre ses seins à pleine main, de mettre mon sexe entre ses jambes, que nous nous regardions dans le miroir, que je la prenne ainsi, les yeux dans les yeux. Le temps perdu avec cette prétentieuse de Mélissa du département « Analyse » alors que depuis quelques mois, je redécouvre les joies de l’amour et de la sensualité avec différentes partenaires – que j’aime tous les deux, en plus ! – me semble tellement loin. Et vain. Je m’approche de Charlène, mais un bip sonore de l’ordinateur m’arrête : un message prioritaire, de mon pseudo-distinguo, Richard.


Dans un mail crypté, il m’informe d’un rendez-vous avec mon supérieur, monsieur Jonathan : « Je ne fais que le messager, m’écrit-il, il viendra te rejoindre dans ton repaire dont le Service paie les factures depuis quatre mois. 17 h. Sois présent. »


J’ai donc la journée pour organiser son arrivée. Pour bâtir une stratégie. Pour démontrer qu’il faut passer à l’action. Si je pouvais rencontrer Raïssa avant mon supérieur, j’aurais plus de données à attester. Charlène est allée se doucher, j’en profite pour contacter Éric, le correspondant et coloc de mon agente, par téléphone :



Charlène marche dans le studio, seins nus, une serviette de toilette autour de la taille, et s’essuie les cheveux, la tête de côté. Elle regarde ce qu’elle portera pour la journée et opte pour un chemisier noir, quasi transparent. Je me rapproche d’elle et soulève la petite veste en cuir pour lui montrer. Dans le téléphone, je dis à Éric :



Je raccroche et explique à Charlène que j’ai besoin d’elle. J’écris sur le bloc-notes des instructions à remettre à Éric et je cachette le papier dans une enveloppe. J’indique à Charlène la station de métro où Éric montera les escalators tandis qu’elle les descendra et où se fera l’échange de clé et d’enveloppe. Elle acquiesce en silence et réfléchit :



Tout se précipite et je sens venir la finale. Il nous faut réussir et ne sais si je peux compter sur mon Service. La plupart des fichiers « Infos » leur sont déjà parvenus, mais pas les « Escamote », ni la manière dont j’ai pu me procurer l’entièreté des renseignements. Avant une intervention, monsieur Jonathan souhaite jeter un coup d’œil et d’oreille sur la base de données complète pour se faire une idée précise. Et je suis un peu coincé par toutes les scènes torrides – avec moi en tant que rôle principal ! – dans les archives.


Avant que Charlène ne quitte mon studio, je réitère ma question de ce matin :



Elle ne me regarde pas, range son sac, semble réfléchir à la meilleure réponse possible, je n’en peux plus d’attendre :



Elle se retourne vers moi et je la trouve belle, désirable : dans son corps si menu, elle possède une énergie colossale et une solide détermination.



Je fais les trois pas qui nous séparent en moins de deux, et je l‘embrasse terriblement en lui avouant :



Puis elle part. Nos yeux attendris sont empreints de nostalgie future. « Je reviens vite ! » Nous nous aimons, malgré tout, malgré les doutes. Étrange amour que ce triangle dans cette atmosphère de tension !




– 32 –


Mais Charlène n’est pas rapidement revenue. Je me suis morfondu, ai repensé aux dernières phrases que je lui avais dit : « J’espère ne pas avoir fait une erreur en te faisant confiance… » et je craignais. Pourquoi me mettrais-je à douter vers la fin de l’aventure ? Parce qu’elle m’avait surprise. Lors de notre cambriolage de nuit, on aurait dit une agente confirmée. Mais elle n’était qu’une artiste qui réglait le son de groupes musicaux au bar de la tour Elizabeth !


L’écoute de l’arrivée de Jacob, Mark et de Jamila dans la suite s’est poursuivie. Ils n’échangeaient que des banalités. Jamila a longuement pris sa douche, en ayant laissé son sac à main dans le hall. Ainsi, j’ai pu entendre Mark informer Jacob qu’il semblait y avoir eu une intrusion durant leur absence. J’ai entendu Mark monter l’escalier menant à la mezzanine, redescendre et dire à Jacob :



Jacob a rétorqué, toujours en anglais, qu’il n’en avait rien à battre, que même si certaines personnes trouvaient quelque chose, la structure de Jacob et Ethan était protégée.



Inquiet, je m’en mordais les doigts, mais je me suis ressaisi. J’ai fait venir une femme de chambre pour qu’elle change les draps. J’ai rangé mon studio pour recevoir monsieur Jonathan. J’ai classé rapports et données dans un cartable pour expliquer les tenants de l’enquête. J’ai rappelé Éric pour connaître si l’échange avec Charlène s’était effectué. Il n’a jamais répondu. J’aurais voulu rencontrer mon agente avant la réunion de 17 h  ! Je continuais à écouter la suite de Jacob lors de mon rangement et me suis arrêté lorsque Mark a informé Jacob de l’arrivée de son collègue.


Jacob a émis un bruit de bouche, satisfait et a affirmé, en anglais :



Et Mark de rire sous cape. Jamila n’a que très peu parlé durant la journée. Qui est ce collègue, de quel boss parle-t-on ? Richard m’avait informé que Curtis était en déplacement. Mais Ethan ? Qui est le boss, finalement ?


Vingt minutes avant 17 h, heure de rendez-vous avec monsieur Jonathan, Charlène a surgi dans mon repaire avec la clé en poche. Elle me l’a donnée en me lâchant rapidement, objectivement, avoir été suivie. Qu’elle avait repéré la filature ! Qu’elle avait pris son temps pour la défaire ! Qu’il semblait y avoir trois équipes de suiveurs. Elle a enlevé sa veste le temps de marcher trois ou quatre rues, la remettre, cacher ses cheveux sous un chapeau, enlever ce chapeau :



J’ai soupiré en serrant la clé du local d’Éric dans le creux de ma main.



La façon dont elle m’a décrit la filature et la manière dont elle s’en est débarrassée m’ont de nouveau questionné. Je l’ai regardée dans les yeux pour lui affirmer :



Elle m’a souri et m’a embrassé rapidement tandis qu’on toquait à la porte. Il était 17 h  !



Je l’ai menée vers la porte en lui caressant le creux du dos, j’ai ouvert. Monsieur Jonathan était là, un œil sombre qui s’est vivement allumé à la vue de Charlène sortant de mon repaire. Il a souri, Charlène l’a rapidement salué. Mon supérieur s’est retourné pour la regarder onduler son corps dans le corridor puis m’a regardé, un grand sourire aux lèvres.





– 33 –


Monsieur Jonathan avait la cinquantaine avancée. Il avait gravi les échelons du Service et en dirigeait une section importante. Il était l’un des membres influents du Comité d’Action – celui qui prenait les décisions des enquêtes et des interventions. Je le connaissais depuis mes débuts au Service. Je le respectais, même si j’en connaissais peu sur lui. On disait dans les coulisses du Service qu’il possédait plusieurs maisons dans divers pays où il avait habité lors de ses jeunes années d’espion de terrain, et que c’était par son épouse qui détenait sa fortune. Mélissa m’avait raconté tout ça. J’avais préféré ne pas écouter ces ragots. Naturellement, il était un homme à femmes, et on racontait plusieurs histoires scabreuses à son sujet. Mais encore, des ragots. Jamais il n’aurait été attiré par Mélissa…


Cette enquête sur la structure de Jacob – et d’Ethan, ça va de soi – était la première où j’étais directement en contact avec lui. Habituellement, dans les missions, j’envoyais toujours les comptes rendus à un sous-fifre, ou bien je n’étais moi-même qu’un sous-fifre dans une équipe plus importante. Or, j’étais seul sur cette affectation « Jacob », certes avec un petit support-distinguo de Richard. Et monsieur Jonathan ne m’avait donné que très peu de moyens. L’enquête ne semblait pas être des plus importantes – pourtant, moi, je trouvais que oui ! – et mon supérieur direct avait fait le déplacement et semblait curieux des avancées.



Monsieur Jonathan s’est assis, a appuyé ses coudes sur ses genoux, je lui ai donné le cartable puis me suis installé à l’ordinateur pour lui faire écouter certains fichiers prouvant mes dires. J’ai fait la narration des protagonistes de la structure de Jacob, le cheminement de l’argent, les motards, Don Baldo, j’ai démontré les liens avec les compagnies de transports africaines, les contacts avec le cartel Villahermosa. À l’occasion, je cliquais sur un fichier audio pour lui faire écouter tel ou tel discours de Jacob ou de Don Baldo.


Le micro-GPS de mon agente dans la suite de Jacob a alors émis un bruit, une porte qui s’est refermée, et monsieur Jonathan a relevé la tête. Nous avons entendu, live, Jacob demander à Jamila de contacter son agente :



Monsieur Jonathan a hoché la tête, s’est replongé dans le cartable en lisant en diagonale mes rapports et j’ai continué en évoquant le Delaware, le dénommé Curtis qui possédait trois autres identités – Richard Grant, Javik Dubosc, Karl Montoya – et que nous ne pouvions pas passer à côté de cet homme, car, selon l’examen des fichiers piqués dans l’ordi de Jacob, Curtis ordonnait les bombardements en Afghanistan (ou ailleurs) pour déstabiliser les pays, et mettre la main sur les cultures de pavots (ou autres). Et surtout, faire du pognon à tout le réseau de Jacob et Ethan.


Monsieur Jonathan écoutait attentivement et se mordait l’intérieur des joues, signe de réflexion intense. Au bout d’un moment, alors que j’étais en plein milieu d’une phrase enfonçant le clou, il a fermé le cartable d’un geste sec :



J’étais exalté, confiant de mes renseignements, certain que monsieur Jonathan réunirait le Comité d’Action ce soir même pour rapidement passer à l’arrestation de Jacob et de Mark. Puis, le Service les questionnerait pour localiser Ethan le big boss, le tour serait joué, et je gagnerais mes galons !



J’ai donc montré le dossier « Infos », puis les bandes-son originales d’où provenaient les tuyaux. Il m’a demandé d’en ouvrir un au hasard. J’ai cliqué. Nous avons écouté.


Les talons de Jamila dans le couloir, la clé dans la serrure, la porte qui se referme.


  • — Sir ?

Ses pas. Je me remémorais cette nuit du tout début de l’enquête qu’il me faisait du bien d’entendre Raïssa jouer un rôle… Puis, la voix sèche de Jacob :


  • — Here !

Des pas encore :


  • — Yeah. I like your dress. Turn around. Show me your ass. Yeah… Bend down, don’t talk, I want to lick you…

Des gémissements doux, Jamila qui profite d’une feuille de rose :


  • — You accept my fingers. It’s good !

Puis la première sodomie. Des cris, des grognements :


  • — You’re a slut, you know that ?
  • — Yes Sir… ah !


Monsieur Jonathan avait un sourire de concupiscence sur les lèvres tout en écoutant cette baise et m’a donné une claque familière dans le dos :



J’étais mal à l’aise.



Monsieur Jonathan a éclaté de rire toujours en me donnant des claques dans le dos, ce que je détestais, tout en évoquant sa vie passée :



Puis il s’est repris :



En suçant la bite de Jacob entre autres, ai-je pensé, il payait mieux que nous, aurais-je voulu rajouter.



J’aurais souhaité laisser Charlène en dehors de tout ça, mais au final, je me devais d’être le plus franc possible avec monsieur Jonathan. Charlène avait joué un rôle important dans la collecte des infos et puis Jamila, sur ordre de Jacob, l’avait contacté :



Comment pouvais-je dire à mon supérieur que :

– Premièrement, mon agente, Jamila, a connu mes faiblesses sexuelles, mon goût pour l’anal.

– Deuxièmement, que Jacob avait toujours un doute sur moi malgré tout, et qu’il voulait une prise au chantage si possible.

– Troisièmement, que Jamila lui a avoué mes faiblesses liées à la prostate, et que Jacob lui a demandé de monter son propre réseau.

– Quatrièmement, que mon agente l’a fait, et qu’elle m’a envoyé une chick with dick dans mon lit, une poupée queutée, un nouveau honey trap et je me suis laissé prendre – mais complètement prendre !

– Et que cinquièmement, elles avaient tout filmé !


Comment pouvais-je dire tout cela à mon employeur ? J’ai soupiré, acceptant le fait, voulant écarter le sujet, mais devant le faire. Mais j’ai été sauvé par la cloche. Il n’y avait pas de cloche. Et ai-je vraiment été sauvé ?


Car dans la suite de Jacob, les cibles s’activaient. On venait de toquer à la porte, Mark s’était alarmé, Jamila l’avait calmé : « C’est seulement mon agente… » et Charlène entrait dans leur suite, faire son rapport de la semaine. Las et résigné, je me suis retourné vers monsieur Jonathan :





– 34 –



  • — Bonsoir Charlène.

Des bises.


  • — Alors du nouveau ?
  • — Yeah, what’s new ?
  • — Rien de spécial, je dois avouer…
  • — Mais encore ? demande la voix de Jamila.
  • — Finalement, ce n’est vraiment qu’un ancien prof d’université, qui tente d’être écrivain…
  • — Et vous avez fait quoi ?
  • — L’amour simplement. Je ne l’ai pas lâché d’une semelle…
  • — Des vidéos ?
  • — Oui, les voici.


Un temps de branchements de câble dans l’ordinateur probablement, monsieur Jonathan se retourne vers moi pour me demander : « C’est de toi qu’ils parlent ? » Je hoche la tête, silencieux. Puis, nous entendons Mark se racler la gorge, Jacob éclater de son éternel rire satisfait, et Jamila glousser dans son rôle de nymphomane. En arrière-plan sonore, je m’entends gémir. J’ai honte que monsieur Jonathan soit témoin de ce film sonore.



  • — You know how to deal with your dick !
  • — Thank you…


Monsieur Jonathan me regarde, curieux. Il venait bien d’entendre Jacob affirmer : « Tu sais bien y faire avec ta queue. »



Je fais semblant de ne pas l’avoir entendu. Parce que « mon autre moi » dans le fichier vidéo que Jamila, Jacob, Mark et Charlène regardent, jouit en gémissant, et quémande à cette étrange amante de continuer. Monsieur Jonathan a compris :



Je ne réponds pas, car dans la suite, Jacob félicite Charlène toujours en anglais :



  • — Good job ! Très bien, je te remercie. Félicitation aussi Jamila pour avoir débauché cette jeune recrue. Ce « prof d’université », on va pouvoir le faire tomber aisément.
  • — Mais pourquoi ça ? demande Jamila. Il ne semble qu’être un prof…
  • — Je sais que c’est un agent de renseignements…
  • — Un quoi ? que Jamila questionne, estomaquée.
  • — À spy. Mais pas de souci, on le tient, actuellement. Il ne pourra jamais se relever. Charlène, retourne le voir, comme si de rien n’était. Le temps de nous organiser…
  • — Je pourrais y aller moi aussi ? demande Jamila, empressée.
  • — Non, sorry. Pas le temps. J’aimerais que tu sois là lorsque le big boss viendra.


Une bouffée d’angoisse me submerge, la peur tout en chaleur me prend : « Je sais que c’est un agent de renseignements… » Il a vraiment dit ça, mais comment il a pu, comment il a su, Raïssa m’aurait-elle trahie ? Ou bien Charlène ? Et monsieur Jonathan me touche l’épaule et me regarde, rassurant :



Il rigole un peu en me laissant entendre que j’aurais dû être un peu plus prudent, que certains collègues du Service en feront des gorges chaudes, ah, ah, ou bien profondes ? Ah, ah. Monsieur Jonathan rit de sa blague, se lève et prend le cartable avec tous les documents relatifs à l’enquête sous le bras.



Et je me retrouve seul dans mon repaire, angoissé à l’idée d’avoir été repéré. Il me faut agir. Devrais-je attendre Charlène ? Selon les dires de Jacob, elle est supposée me retrouver. Mais après vingt minutes où je me ronge les sangs, je décide de ne pas écouter le conseil de monsieur Jonathan. Je débranche l’ordinateur, cache le disque dur avec toutes les infos dans mon sac, récupère une copie du cartable et je dégage de mon studio qui est devenu une prison malgré les joies que j’y ai vécues. Quelle heure est-il ? 19 h  ! en espérant qu’Éric ait eu le temps de suivre mes instructions !




– 35 –


Le couloir est vide. Je cours vers la sortie de secours. Dévale les escaliers. Mes pieds font trop de bruit. Combien d’étages ? Je suis essoufflé, je débarque dans le parking souterrain, cours vers le passage piéton, surgi dans la rue. Regard à gauche, à droite, peu de passants, personne n’attend dans des voitures, fumant une clope ou lisant un journal. D’un pas pressé, je me dirige vers le métro. M’engouffre dans la bouche. L’escalator est trop lent ! Les portes du train bleu me cachent à d’éventuels poursuivants. La rame est presque vide. Tout de même, je sors deux arrêts plus loin, pour aller de l’autre côté de la voie, et faire le chemin inverse. Aucun visage familier que j’aurais entr’aperçu dans la rame précédente. Je souffle sur un siège. Regarde mon reflet défiler dans le tunnel. Mais qu’est-ce qui s’est passé dans cette mission ?


Me rappelle le recrutement à l’université, puis le briefing de Raïssa. Les heures d’attentes au bar le soir, tandis qu’elle récupérait une clé et montait aux étages rencontrer la cible. Les heures ensuite d’écoute de ses gémissements plaintifs, de ses couinements de jouissance, moi avec un spasme au cœur. De colère, de jalousie, de désirs… Puis sa venue dans mon studio, une semaine de vacance donnée par la douceur des corps, de travail pour réunir les éléments de l’enquête, d’émotions fortes par la découverte d’une âme et d’une personnalité à chérir. Et ensuite, l’arrivée de Charlène, moi piégé par mes deux amantes, et avec quelle propension de ma part ! Jamais Mélissa ne m’aurait fait atteindre ces voluptés ! Une nouvelle semaine de liberté avec Charlène, l’exploration d’un nouveau monde, la crainte occasionnelle d’aller aux cabinets puis le cambriolage, le puzzle enfin terminé.


Et me voilà, là, dans le métro bleu, à me lever précipitamment parce que la voix de robot annonçant les arrêts vient de dire le mien. Je suis seul sur le quai. Inaperçu. Aucun agent n’a pu me suivre. D’ailleurs, qui a suivi Charlène ?


Je marche dans le quartier ouvrier. Des bars, des jeunes, d’anciennes usines réaffectées en loft, une vie branchée qui est loin de la mienne, reclus dans mon Airbnb tout frais payé. La porte du local d’Éric est cachée dans une ruelle : je remarque trois issues de fuite possible, une échelle menant au toit, l’arrière-boutique d’un resto chinois dont la porte menant aux cuisines est entrebâillée, et le bout de la rue. Personne ne me voit insérer la clé.


L’intérieur : des canapés défoncés faisant office de salon autour d’une table basse fabriquée en bois de palette à ma droite, des bières vides un peu partout. Devant une sorte de cuisine avec une table vintage en formica des années 60, un comptoir avec un réchaud et deux ronds de poêles électriques, un peu de vaisselles sales, des bouteilles encore. Et partout sur les murs, des graffiti ou des posters anticapitalistes, le Big Brother qui nous watche, Guy Fawkes avec le masque de V for Vendetta, Anonymus, des affiches de manifestations pour la sauvegarde du climat, pour les zones à défendre, contre la guerre en Irak, etc.

Mais qu’est-ce que je fous ici ?


Je fais le tour rapidement, ouvre les tiroirs des meubles, ne trouve aucun écrit personnel sinon des journaux d’il y a quelque temps et des livres dont Germinal, Noam Chomsky, Orwell et encore, une pleine bibliothèque ! Toujours en urgence, je vais dans la cuisine, rien de spécifique à signaler sinon que le frigo, provenant d’Emmaüs sans doute, est rempli de bières. Je suis en sueur et ne sais pourquoi, je cherche quelque chose et ne sais pas quoi. Dans les commodes éraflées, du linge masculin et féminin, pêle-mêle. Des sacs de couchage roulés dans un coin. C’est un repaire. La bande à Éric doit y squatter. Il n’y a qu’une petite salle de bain. J’angoisse à l’idée d’avoir abandonné Raïssa dans les rets de ce salaud de Jacob, je crains m’être fait doubler par je ne sais qui, est-ce que seulement j’ai fait les bons choix durant cette aventure ? Un frétillement me parcourt soudainement les couilles à cette pensée et je me dis que si je me fais prendre ou tuer, j’aurai passé de bons moments malgré tout.


À cette pensée, mon regard tombe sur la table en formica. Il y a une carte postale. Je connais le dessin. Je sais qui l’a créé. Je l’ai déjà vu. Non, pas vrai, on me l’a raconté : « C’est un collage de 1296 petites photos noires et blanches montrant des femmes suçant des hommes et, selon la clarté ou la noirceur des photos, représentent au final une grande bouche englobant un membre… »



Quoi qu’il en soit, en regardant ce tableau, Jamila s’est métamorphosée en Raïssa. Elle s’est retournée vers moi, et a éclaté en sanglots. Je l’ai consolée, je l’ai prise dans les bras, elle s’est y cachée, a longtemps pleuré. J’ai simplement été là, pour elle…


Je pleure à mon tour soudainement, d’avoir perdu Raïssa, de n’avoir rien pu faire pour elle, je culpabilise de l’avoir envoyé en une mission de chicksploitation. Tout ça pour quoi ? Pour arrêter un seul des meneurs du grand jeu capitaliste de la vente de drogue et d’armes et de guerre aux États voyous parce qu’ils ont de la ressource ? Et je vois cette bite se faire sucer, en kaléidoscope, en 1296 toutes petites images de 1296 femmes suçant 1296 queues différentes, et mes yeux pleins de larmes ne voient que l’amour de Raïssa – mais elle est plus que ça !


Je tourne la carte postale pour y trouver une petite phrase, manuscrite.


« Attends-nous ici. Ne t’en fais pas. C. »


C ?

Charlène ? C’est elle qui a créé ce tableau, ces cartes postales. Elle est aussi une agente. Pour qui ? je ne sais pas. Est-ce moi qui suis entré dans son réseau ou est-ce moi qui l’ai recrutée ? Dans le monde de l’espionnage au final, tout se confond. Tôt ce matin, elle est partie avec des instructions à donner à Éric, le coloc de Raïssa. Elle devait aussi récupérer la clé qui m’a permis d’ouvrir ce local. A-t-elle lu les instructions destinées à Éric et sa bande de black block ? Sinon ? Que ferait cette carte ici, sinon ? Pour qui travaille-t-elle putain de dieu ! et finalement ? Bien que ce soit Jamila qui l’ait recrutée dans un réseau « à la Jacob », comment Charlène a-t-elle été amenée à gérer le son des spectacles du bar de la tour Elizabeth ?


Fou de toutes ces questions, je me prends une bière de microbrasserie dans le frigo de la planque. J’ai bu en tournant et retournant la carte postale. J’entame une seconde bière en ouvrant un livre de Philip K. Dick que je ne connais pas, Ubik. Incapable de passer la troisième page, mon esprit partant partout, j’ouvre le frigo pour me prendre une autre bière quand la porte du local s’ouvre avec fracas.

Me retourne.


Une apparition échevelée. Une silhouette connue, élancée, fine, gracile, brune, stylisée, athlétique, fugitive qui se découpe dans le clair-obscur de la nuit tombante. Une robe déchirée, une bretelle ne tenant plus sur l’épaule bronzée, elle est pieds nus, les cheveux en bataille d’avoir couru, a le souffle court. Ce souffle, je l’ai entendu autrement, ce même souffle. Et ce minois essoufflé, je le reconnaîtrais entre mille, entre des millions : Raïssa ! Je me lève, pas le temps de la contempler, elle se précipite vers moi et je me perds enfin dans son parfum, ses bras autour de ma nuque, mon nez dans ses cheveux, son corps contre le mien, sa taille sous ma main, ma bouche sur son cou, la sienne dans le mien, sa chaleur, sa chaleur… ses spasmes. Pleure-t-elle ? Ou est-ce moi ?


La porte du local toujours ouverte, Charlène, ses longs cheveux noirs et rouges attachés en queue tombant sur son épaule, avec sa chemise de garçonne à moitié déboutonnée et sa jupe de jean, se tient dans l’embrasure, la main sur le bouton, prête à refermer et nous laisser seul. Elle me fait un clin d’œil complice et nous dit :



J’acquiesce dans le cou de Raïssa. Charlène ferme. Mon agente et moi nous sommes enfin retrouvés. Est-ce la fin de l’histoire ?




– 36 –


Après un temps d’enlacement où Raïssa était enfouie dans mon giron, j’appuie ma paume contre sa joue et lui relève la tête. Oui, elle a pleuré. Elle tend ses lèvres, je les embrasse avant de poser les questions qui me triturent. J’aime leur humidité, leur fermeté tout en étant tendre, sa langue agile, son respire, son corps soudainement à l’attaque, c’est elle qui prend le contrôle, avec une main dans mes cheveux et une poussée vers le divan, nos lèvres toujours soudées. Elle grimpe sur mes jambes, la jupe évasée et indécente. Elle se hâte de tenter de déboucler mon ceinturon, tout en continuant de m’embrasser, la langue violente, le souffle court. Ses mains à mon entrejambe font leur effet, elle déboucle ma ceinture et je lui dis à l’oreille :



Elle tente en vain de déboutonner mon pantalon :



Elle se fige un instant en se redressant, les yeux perdus, Jacob l’a-t-elle fait consommer ? Je la trouve belle, encore et toujours, ses traits fins, ses yeux sombres, sa maturité :



Je tente de bouger, de me dégager. Elle dit alors mon nom et s’effondre contre mon épaule :



Je lui réponds en caresses, elle rétorque en bougeant son bassin contre le mien.



Brusque, elle redresse son torse, me regarde de haut, je suis pris au piège entre ses cuisses et lance :



Elle se plaint à la manière de Jamila :



Son sourire attaque mes lèvres, j’abdique dès le début du combat, car elle murmure :



Elle engouffre sa langue dans ma bouche, nous respirons à peine et elle contre-attaque en tentant de nouveau d’ouvrir mon pantalon :



Je riposte en repoussant une épaule, elle réplique en la faisant tourner, je viens de descendre la dernière bretelle de sa robe qui maintenait son vêtement en place :



Je dis son nom de manière apaisée malgré toute l’envie que j’ai de me laisser aller à ses caresses buccales et anales, mais Raïssa n’écoute pas. Elle tente de mettre sa main dans mon slip. Et tout en agitant ses mains et ses doigts, elle me regarde et me sourit. Je n’en peux plus. Je dois être un professionnel ! J’engouffre mes doigts dans ses cheveux et je tire. Elle ouvre la bouche et sa tête et son corps suivent le mouvement violent de ma main agrippée dans sa tignasse :



Je résiste :



Elle abdique :



Je relâche ma prise et elle approche son visage du mien. Vingt centimètres, tout au plus. Ses beaux yeux noirs me fixent, elle a toujours eu de beaux sourcils, elle a soudainement un air rasséréné :





– 37 –



J’en ai plus qu’assez, je désire savoir ce qu’il s’est passé, qu’est-ce qu’elle fait ici, pourquoi Charlène est repartie après avoir dit un : « J’ai un truc à faire, je reviens. » Je la désire, elle aussi, mais je me raisonne, reste pro.


Tandis que Jamila réussit son stratagème et enroule ses doigts autour de mon pénis coincé dans le pantalon, je réaffirme ma prise dans ses cheveux, je donne un coup de bassin et Raïssa tombe à la renverse par terre. Je me lève rapidement à la suite de sa chute et mon pantalon tombe sur mes chevilles, dévoilant mon sexe à moitié enserré dans l’élastique de mon boxer. Raïssa reprend ses esprits et voit mon gland sorti, elle sourit, mais d’une petite tape sur la main, je l’empêche de l’empoigner. J’agrippe ses cheveux et lui dit :



Ses yeux noirs ciblent toujours mon sexe et elle se lèche les lèvres. J’abdique, je n’en peux plus, Jamila est trop forte, je descends mon sous-vêtement et nos corps se propulsent l’un vers l’autre. Moi, le bassin, elle, la tête, elle gobe mon sexe et c’est bon, tellement bon, chaud, mouillé, et je bouge en elle sans m’apercevoir que je maintiens toujours ses cheveux fous entre les doigts griffus. La honte soudaine, je ne suis pas Jacob ! Je me retire, Raïssa émet une plainte, je persiste ma saisie dans ses cheveux et je me baisse vers son visage :



Elle fait une mine boudeuse, soupire, se détourne, cherche son sac, le trouve non loin, fouille dedans, extrait son téléphone.



Je lui mets mon pénis en bouche qu’elle a grand ouverte, et j’y vais. Jamila voulait ma queue, la voilà ! Je n’ai plus de scrupule, je vais et viens dans sa bouche, rapide, lui maintenant la tête entre mes mains. Je n’aurais jamais pensé lui baiser la bouche, je pensais vivre une aventure romantique, une véritable romance, un amour tendu dans une histoire d’espionnage : mais le personnage de mon agente a pris le dessus, et celui de ma cible a pris le dessus sur moi, et me voilà en train d’aucunement me retenir.


J’entends des bruits de déglutition et Raïssa encourage mon rythme en me tenant les fesses, en ne m’arrêtant pas, mais je vais déjà éjaculer ? Je fais un pas arrière pour me retirer de sa bouche enflammée et me rassieds sur le divan, essoufflé. Raïssa se relève tranquillement, mutine :



Elle relève sa jupe et descend son petit slip avant de revenir à califourchon sur moi. Je sens son sexe chaud contre le mien, elle enroule ses bras autour de ma nuque, m’embrasse de nouveau, je goûte mon sexe sur sa langue, dans sa salive, j’accepte la négociation :



Raïssa se redresse, clique deux-trois fois sur son téléphone, le retourne. Et me montre la photo de monsieur Jonathan, serrant la main à Jacob.



Je me redresse précipitamment. Une nouvelle fois, Raïssa choit par terre dans mon énervement. Je fais de rapides cent pas dans le local d’Éric, me mords les lèvres, tente de saisir toutes les conséquences : notre Service est impliqué dans tout ce bordel ? C’est pour cela que je n’avais aucun subside ou presque, aucune équipe ? Pour cela que monsieur Jonathan est venu en personne faire le débriefing avec moi ?


Mais pourquoi avoir lancé une opération ? Pourquoi ai-je été cette tête de Turc ? Parce qu’on ne me faisait pas confiance ? Parce qu’on croyait que j’échouerais ? Et Mélissa, mon ex, anciennement du Département « Analyse », qui a évolué au Comité Supérieur, avec monsieur Jonathan ? Mais qu’est-ce que c’est que ce bordel ? Et moi qui ai offert dans un cartable toutes les données sur le dossier « Jacob » à qui ? À celui qui est ma cible prioritaire ? Mon supérieur hiérarchique ? Mais c’est… ?

Raïssa susurre mon nom. Je me retourne.



Raïssa susurre mon nom. Me retourne de nouveau.



J’ai prononcé des trois questions en m’avançant vers elle. Je la saisis par une aisselle, elle se laisse porter, je m’affaisse encore une fois sur le divan, c’est une valse que Raïssa et moi dansons, elle est de retour sur mes cuisses, ses bras autour de mon cou, ses cheveux en voûte autour de nos visages, mon sexe bien droit devant le sien chaud, elle chorégraphe parfaitement son effet. Tout près de mes lèvres, elle me chuchote ces mots d’extrême violence.



De sa main, Raïssa joue avec mon pénis sur son clitoris.



Toujours avec sa main, elle fait glisser mon sexe dans le sien et nous soufflons la tension à venir.



Elle le prouve à ce moment, alors que son bassin bouge en un lent Chaabi. Le rythme de sa voix, en dansant son folklore maghrébin, se fait plus lent, hésitant, elle se concentre sur nous, et non sur ce qui s’est passé.



Elle crie ses trois mots anglais.



Mark est intervenu directement :



Elle imite Mark en changeant de voix et en étant plus active sur mon corps. Elle se donne des coups de plus en plus profonds.



Je lui prends en même temps un poignet et lui amène derrière le dos, elle continue à raconter malgré tout, la tête en l’air.



Durant sa dernière phrase, j’ai pris son deuxième poignet et me suis relevé quelque peu. Je veux donner la cadence aussi, Raïssa crie dans le présent, et dans le passé, mais pas pour les mêmes raisons.



Elle se libère de ma poigne, appose une main sur mon épaule. Je m’adosse au divan, je ne bouge plus, c’est elle qui mène le tempo. À chaque mot, à chaque phrase, c’est elle qui va de plus en plus profond en elle, mon sexe est tout suinté de sa mouille, elle se perd dans son histoire et dans la jouissance qu’elle recherche. À chaque petite pause, chaque petite virgule, elle ondule du bassin sur mon sexe. Raïssa me regarde dans les yeux en narrant les évènements.



J’en ai profité. Je suis sortie dans le couloir. Par contre, j’ai regardé, avant de sortir. Ethan se protégeait à peine. Deux gars le rouaient de coups, de battes et de coups de pieds. Et Jacob… Jacob, lui, rien. Il ne se protégeait pas. Il se faisait frapper. Me regardait, à l’écart, de tout, isolé, acceptait les coups, sans rechigner. J’ai ri. Je lui ai fait un doigt d’honneur, rageur. Il a souri, la gueule en sang, a murmuré, je l’ai entendu :



Je le mérite, je le mérite, c’est moi qui le mérite, merde ! c’est nous qui le méritons !


Je jouis, elle aussi, elle s’effondre sur mon épaule, elle pleure, je pleure. C’est fini. C’est fini. Je l’aime. Je m’en veux, pourtant. Je regrette la manière dont nous nous sommes rencontrés. Seulement. J’enserre son corps de mes bras et nous enfouissons nos nez dans la nuque de l’autre.




– 38 –


Environ une heure plus tard, je me sens bien. Revigoré. Un poids qui n’est plus sur mes épaules. Malgré tout ce qui s’est produit ces derniers temps, je considère avoir réussi la mission. Raïssa et moi marchons dans les rues en direction du métro pour retourner à la tour Elizabeth. J’enlace sa taille et nos pas sont fluides. Elle colle son corps contre le mien et, non seulement je considère avoir réussi la mission professionnelle, mais j’estime avoir réussi un projet personnel, celui de trouver une âme sœur, une femme que j’aime, une acolyte pour longtemps. Je souris. Raïssa m’embrasse dans le cou. Il fait beau et les lumières des lampadaires jettent des auras jaunes.


Après les révélations à propos de mon supérieur, Raïssa et moi sommes restés quelque temps soudés ensemble, à moitié habillés, à reprendre notre souffle, nos esprits, notre rythme. Elle s’est retirée de mon sexe flasque pour aller aux toilettes. Je me suis essuyé, avant de remettre mon pantalon. J’ai ouvert le frigo, des bières, rien à manger. Je réfléchissais aux conséquences. Monsieur Jonathan semblait être le grand manitou de la structure d’Ethan et Jacob. Monsieur Jonathan étant Ethan… avec son passé d’espion baroudeur, il avait dû connaître certaines ficelles, et fait une sorte de « délit d’initié » pour sa gueule. Uniquement pour sa gueule. Il pouvait ainsi déjouer toute enquête possible, il était un ponte de Service de renseignements.


Lorsque Raïssa est revenue de la salle de bain du local, elle s’était rhabillée en Raïssa militante. Adieu les jupes de luxe et de pute, adieu le corps à moitié dénudé pour sucer des queues, pour obtenir des renseignements, adieu les seins mis en valeur pour déconcentrer un concurrent. Elle avait trouvé, je ne sais où un vieux jean lui allant à ravir, un t-shirt punk et une petite veste simple, ornée du A rouge et noir anarchiste. Elle était redevenue elle-même, et elle me l’a prouvé en me lançant un sourire juvénile.



Le temps seulement de remarquer qu’il n’y avait rien à grailler, son téléphone émit un son de SMS. Elle s’est dirigée vers un poste de radio après avoir lu le SMS et m’a tendu le téléphone. Il y était écrit :


« Écoutez les informations. Vous pouvez revenir, je vous attends. »


À la radio, sur la chaîne d’information, un commentateur tentait de comprendre les évènements qui s’étaient produits à la tour Elizabeth.


« Extrême gauche ? Extrême droite ? on ne sait pas toujours pas quel groupe a pénétré la tour Elizabeth pour défoncer la suite. On ne sait pas. La police a ouvert une enquête. »


Raïssa et moi nous sommes regardés, interloqués. Le journaliste principal a repris le micro pour annoncer :


« Je vous rappelle donc cet incident : il s’est produit vers 20 h 30. Un groupe de six individus cagoulés ont fait irruption dans la suite de la tour Elizabeth. Cette suite, rappelons-le, était louée depuis quelques mois par un dénommé Mark Quenneville, bras droit du vice-président d’un groupe de lobbyistes américains. Les assaillants ont roué de coups les Américains avant de s’esquiver, personne ne sait encore comment. Ils ont disparu. Des documents retrouvés sur place font état d’une enquête, et la police a arrêté les victimes de la baston, pour un interrogatoire serré. Règlement de compte politique ou lié à la mafia ? L’enquête nous le dira… »


Raïssa et moi nous sommes serrés dans les bras, avons fermé le local et sommes partis vers mon repaire pour retrouver Charlène qui nous avait envoyé le SMS.


Dans le métro, peu de monde, Raïssa et moi sommes assis dans le fond d’un wagon, et elle me caresse la cuisse. Sa main agile glisse même vers la fermeture éclair de mon pantalon, et le descend. Je la regarde, elle me sourit en sortant mon sexe qui se durcit rapidement sous la pression de haut en bas de ses doigts.



Je ne tente même pas de lui dire non, je me laisse aller à ses caresses, regarde les rares passagers qui nous ignorent. Le métro est un métronome, et Raïssa coulisse mon sexe à chaque soubresaut des rails. Son visage près du mien, je sens son souffle dans mon cou, elle observe de ses yeux noirs et profonds mes réactions que me donne sa main.



Le métro s’arrête, je laisse sortir des passagers, en laisse entrer d’autres, personne ne nous dérange. Raïssa s’active sur mon pénis sorti de mon pantalon, personne ne remarque rien. Jamais je n’aurais accepté qu’une femme me masturbe en un lieu public comme mon agente est en train de le faire. Jamila s’est donnée à des hommes, a subi plusieurs traitements sexuels différents, elle a joué la soumise. Raïssa est sortie de son corps pour mener à bien la mission, et elle est devenue nymphomane. En a toujours besoin. La preuve, cette masturbation publique… Je sens la tension monter, je m’écrase sur mon siège.



Elle continue à me masturber et m’embrasse. Je lui bouffe la bouche, souffle dans sa bouche et j’éjacule sur sa main. Mon corps trésaille par l’interdit du lieu public. Elle murmure mon nom.



Elle lèche mon sperme sur sa main en me fixant de ses yeux sombres, avec un demi-sourire.



Je retiens un rire gêné, hoche la tête négativement, cache mon sexe et monte la fermeture éclair. Mon pantalon est taché, difficile de le cacher.



Raïssa sourit, nous nous embrassons.




– 39 –


Retour dans la pièce principale de cette histoire : ce petit studio que j’ai quitté précipitamment en début de soirée, car je me savais coincé par mes ennemis. J’y ai passé de longs moments seuls, dans cet Airbnb, écoutant râles et châtiments, j’en ai passé d’autres, accompagnés par Raïssa – quelle belle semaine de fausse infiltration ! – et par Charlène peu après. Comme si le studio portait une odeur de sexe, malgré la venue de femmes de ménage à l’occasion, car tout a tourné autour du sexe lors de cette mission.


J’ouvre la porte, Raïssa derrière moi. Les lumières sont allumées, tamisées, les rideaux fermés aux fenêtres. Nous savions retrouver Charlène, elle nous l’avait dit par SMS. Je ne m’attendais pas à trouver, assis dans le sofa où nous avions tant baisé, mon distinguo, Richard, un verre à la main. Il le lève à mon entrée, dit mon nom, tout enjoué :



Charlène, sortie d’on ne sait où, vient à notre rencontre rapidement. Raïssa et elles se sautent dans les bras, heureuses de se retrouver. Puis Charlène se retourne vers moi, nous ne parlons pas, elle approche son visage, ne savons ni l’un ni l’autre si nous pouvons nous embrasser sur les lèvres devant Richard, devant Raïssa…

Richard éclate de rire et rompt ce doute :



Charlène, Raïssa et moi sommes interloqués et nous approchons du salon. Charlène baisse les yeux et remarque mon pantalon souillé par l’épisode du métro, une tache mouillée, collante. Je la cache d’une main, mal à l’aise. Richard sert des verres de champagne. Ce ne sera pas du vin blanc, pour faire changement ! Richard doit approcher la cinquantaine. Il est petit, plutôt corpulent au tour de taille et une large calvitie au-dessus de la tête. Il bouge avec peine, comme si les articulations de ses genoux ne pouvaient plier. Son visage est affable, ses yeux vifs, mais avec un sourire triste, comme s’il était cynique avec la vie qui ne lui avait joué quelques surprises inexprimables. Nous prenons tous un verre et le levons vers la nuit pour trinquer. Étrangement, je cache toujours le sperme suintant sur mon pantalon.



Nous l’imitons et je remarque que Charlène n’a pas besoin de ces explications. Un échange de regard avec elle me confirme qu’elle est derrière tout ça. Richard coupe court à mes réflexions en disant solennellement mon nom et en me regardant dans les yeux.



Au départ, je ne voyais pas de lien, mais c’est la mutation de Mélissa au Comité Supérieur, et quelques mails échangés entre elle et Jonathan qui m’ont mis la puce à l’oreille. On voulait que tu échoues dans ta mission. Jonathan ne voulait pas que tu découvres les liens de la présence de Jacob ici en ville. Tu commençais à peine ta prise de fonction que j’ai infiltré Charlène comme soundwoman, au bar de la tour Elizabeth : il fallait commencer par quelque chose…


Raïssa et moi écoutions religieusement le discours de Richard, l’homme qui pilotait tout depuis le début. Je me retourne vers Charlène, assise comme une écolière, les mains sur les genoux :



Richard reprend la parole en versant de nouveau du champagne dans nos verres. Son regard se partage entre Raïssa et moi :



Charlène rajoute :



Je suis estomaqué par la facilité dont s’est déroulée « l’arrestation » de Jacob et de Mark. Le regard de Richard se perd sur Raïssa qui reste silencieuse depuis le début de ce débriefing. Il reprend la parole :



Sa voix se casse, Richard baisse la tête, et soupirant longuement. Raïssa le regarde, je sens qu’elle réfléchit à toute vitesse. Elle lui adresse la parole :



Richard se reprend, un sourire vague sur les lèvres et acquiesce.



Déjà debout, Richard se retourne vers moi et hoche la tête, encore ce sourire rêveur sur les lèvres.



Il me la cale dans la paume à contrecœur. Puis se reprend en vidant son verre :



Il salue Charlène, son agent, me fait un salut militaire sans prétention : « Et soyez sages ! » rajoute-t-il en fermant la porte. Charlène, Raïssa et moi sommes debout au milieu du salon, à nous regarder l’un l’autre.



Raïssa, avec un sourire éclatant, rompt l’embarras soudain.



Nous éclatons de rire et joignons nos gestes à la parole.




40 – Épilogue



Je n’ai pu continuer à parler, car Raïssa avait englobé une nouvelle fois mon pénis dans sa bouche, et Charlène avait mis la sienne dans la mienne. Nous avons passé trois jours nus. Nous avons vécu une forme de poly-amour où chacun écoutait les autres. J’étais incapable de dire si je préférais Raïssa ou Charlène. Elles-mêmes devaient l’ignorer, je crois. Nous avons dansé comme aucun couple ne pouvait danser.


Couché sur le dos, Raïssa, me chevauchant, embrassait Charlène qui me sodomisait.

Ou bien, Raïssa nous suçant en avalant nos deux queues en même temps dans sa bouche.

Ou bien, moi enculant Charlène tandis qu’elle doigtait Raïssa, ou la léchait, ou la baisait.



J’ai fait l’amour en missionnaire à ma Sahélienne, Charlène dans mon dos contrôlait mon rythme avec sa bite dans mon cul. Ou le contraire.

Ou bien Raïssa et moi nous partageant le sexe de Charlène, ou elles qui se partagent le mien.

Naturellement, nous avons pénétré Raïssa en même temps, moi dans son cul, Charlène dans son vagin. Ou le contraire. Naturellement aussi, Charlène ou moi la prenions par-derrière tandis que Raïssa suçait l’autre.

L’amour oral, l’amour anal, l’amour vaginal, l’amour de trois êtres heureux de cette réunion des corps et des esprits.


Nous sommes redevenus professionnels lorsque nous avons revu Richard et certains pontes du Service. On m’a donné toutes les félicitations, on m’a octroyé une promotion : je suis devenu le chef des opérations d’un territoire qu’il m’est interdit de révéler.



Charlène aussi a eu une promotion, bien que son rôle dans cette mission n’ait jamais été officiel. Richard et moi le savions. Elle aussi est devenue chef des opérations d’un autre territoire.



Raïssa a été recrutée. Elle a passé des tests psychologiques qui ont révélé sa nymphomanie. Elle a accepté de suivre des séances d’hypnose qui l’ont aidée à retrouver sa personnalité sexuelle d’avant la mission de « 1000fleurs ». Seulement, à vingt-quatre ans, elle est plus expérimentée que toutes ses amies réunies.


J’ai revu Éric, une fois. Il était content de l’action menée dans le penthouse de la tour Elizabeth : « Je n’en parle à personne, promis ! », mais était déçu de ne plus être colocataire avec Raïssa.



En effet, Raïssa s’entraînait dans un des camps du Service pour qu’elle devienne une agente de terrain confirmé. Elle n’aura plus à utiliser son cul pour soutirer des informations.


À l’insu du Service, durant quelques instants trop courts, Charlène, Raïssa et moi nous retrouvons dans des chambres d’hôtel anonyme dans différentes villes du pays. Nous utilisons des boîtes aux lettres mortes, pour ne pas nous faire repérer. Mais cette liaison n’a pu durer : Charlène a dû partir dans son territoire, moi dans le mien. Et Raïssa, à la fin de son entraînement, a probablement reçu une légende redéfinissant son identité pour courir après de méchants terroristes.


La dernière fois que nous avons pu nous réunir, tous les trois, nous nous sommes tous dit : « Je vous aime tous les deux. » Et que peut-être, un jour, nous serons ensemble sur une nouvelle mission.