n° 19678 | Fiche technique | 35290 caractères | 35290Temps de lecture estimé : 20 mn | 23/06/20 |
Résumé: Où nous faisons connaissance avec Stéphanie, jeune femme célibataire au charme discret. | ||||
Critères: jeunes lingerie nonéro portrait -lieuloisi | ||||
Auteur : Xochiquetzal |
DEBUT de la série | Série : Amour de femme Chapitre 01 / 08 | Épisode suivant |
Alors que Stéphanie dort profondément, la radio trouble le silence de la chambre. Il est sept heures du matin et les nouvelles qui surgissent du haut-parleur se propagent dans l’air parfaitement calme de la pièce :
« France Info, sept heures, le journal : l’ultimatum de l’OTAN au Kosovo expire ce soir. Les forces serbes se sont en partie retirées… »
« France : le ministre de l’Intérieur a fourni des précisions supplémentaires sur le projet de… »
« La bourse, Jean-Pierre Gaillard : la bourse de Paris gagne 0,3% en clôture. Le CAC frôle la barre fatidique des trois mille cinq cents points dans un marché très animé… »
Les informations ne font que glisser sur Stéphanie. Elle se demande parfois pourquoi elle continue de régler son réveil sur cette célèbre radio d’information en continu, puisqu’elle ne retient qu’une infime fraction des événements qu’elle relate. Mais elle a remarqué qu’elle avait tendance à chantonner toute la journée la première chanson entendue le matin. Et cela a le don de l’irriter profondément, quand, précisément, ce morceau ne lui plaît pas. C’est pourquoi elle a renoncé à être réveillée par une station musicale. Quant à l’odieux « bip-bip » que propose bien sûr son réveil, elle n’a jamais tenté de l’utiliser, tant elle est convaincue qu’il la mettrait de mauvaise humeur jusqu’au lendemain.
Elle prend petit à petit conscience que la nuit est finie. Dans un grand effort de volonté, elle tend le bras pour allumer la lampe de chevet, qui semble si lointaine. Quand la lumière jaillit, elle retourne son visage sur l’oreiller, comme si la clarté était insoutenable. Elle reste encore un moment dans cette position puis, lorsque son corps et son esprit sont disposés à commencer la journée, elle repousse l’épaisse couette qui lui tenait chaud. Elle s’assied sur le rebord du lit et se frotte les yeux. Enfin, elle se lève, s’étire longuement en soupirant. Elle s’attarde un instant près du lit et ajuste sa culotte sur ses hanches.
Sa chambre est tapissée de bleu pâle, qui s’accorde bien avec le pin, dans lequel sont faits les quelques meubles de la pièce. Autour du lit, vaste au demeurant pour une jeune femme vivant seule, on ne trouve qu’une table de chevet, un bureau et une armoire. Un livre traîne sur la table de chevet : c’est un épais guide touristique de Prague. Sur le bureau, quelques papiers forment une petite pile bien ordonnée. Une photo est posée bien en évidence : elle représente Stéphanie et ses parents, devant leur maison située tout près de Bordeaux. La jeune femme y a habité jusqu’à ce qu’elle commence ses études supérieures. D’ailleurs, il ne se passe pas un mois sans qu’elle aille y retrouver sa famille.
Stéphanie actionne la manivelle qui soulève le volet roulant. Le soleil fait son entrée dans la chambre par une grande fenêtre. Au mur, deux reproductions de toiles impressionnistes sont accrochées, ainsi qu’une photo du Mont-Blanc devant lequel posent quatre jeunes filles : Stéphanie et ses sœurs. La photo a été prise voilà cinq ans. Elles sont montées ensemble au sommet du Mont Buet, à l’extrémité de la vallée de Chamonix, en Haute-Savoie, et ont tiré une intense fierté d’avoir réussi cette randonnée difficile, dont elles parlent souvent depuis. Quand Stéphanie s’est installée dans son appartement toulousain, elle a donc naturellement choisi de faire agrandir cette photo pour décorer sa chambre. Régulièrement, elle se remémore cette journée inoubliable, si bien qu’aucun détail ne lui a échappé :
Le réveil a sonné à six heures précises dans la chambre où dormaient les quatre sœurs. Stéphanie s’est levée la première. Elle s’est habillée rapidement dans le noir, puis est allée préparer le café dans la petite cuisine du chalet. L’aînée, Anne, et la benjamine, Élodie, l’ont tout d’abord rejointe. Ces dernières, qui n’étaient pas encore habillées, ne se sont pas fait prier une seule seconde pour aider Stéphanie à confectionner le casse-croûte qu’elles allaient manger au sommet de leur marche. Du pain, du jambon, du fromage, des fruits, des gâteaux : il ne manquait rien pour réussir l’ascension !
Lorsque le café a fini de passer, elles ont appelé la cadette, Alice, dont le manque de courage pour sortir du lit est toujours légendaire. Ce jour-là, toutefois, elle a rapidement rejoint ses sœurs autour de la table, afin de ne pas risquer de les irriter : avant de rentrer à Bordeaux et de laisser leur progéniture continuer seule les vacances à la montagne, leurs parents leur ont fait promettre de ne pas se disputer. Les quatre filles ont pris un petit-déjeuner consistant. Élodie était la plus volubile de toutes : elle était si heureuse d’être avec ses grandes sœurs, loin de ses parents. Elle se sentait d’un seul coup plus mûre.
À peine Alice avait-elle fini de boire son café au lait que les trois autres filles se sont accordé, sans même se concerter, pour juger qu’elle devait laver la vaisselle, dans la mesure où elle n’avait pas préparé les provisions. Devant une telle unanimité, Alice s’est exécutée. Elle a reçu l’aide de Stéphanie, pendant qu’Anne et Élodie occupaient la salle de bain. Elles ont fait un brin de toilette et se sont habillées d’un tee-shirt et d’un cycliste. Élodie n’était pas peu fière d’imiter sa sœur aînée.
Une fois prêtes, elles ont laissé la place à Alice et Stéphanie, qui ne se sont pas attardées dans leurs préparatifs. Puis, les quatre filles ont réparti le déjeuner et l’eau dans leurs sacs à dos respectifs. Les trois plus âgées se sont permis une plaisanterie sur la brassière qui soutenait la poitrine tout juste formée d’Élodie, ce qui n’était guère du goût de cette dernière, qui suivait avec beaucoup d’attention le développement de son corps. Enfin, dans la bonne humeur ambiante, elle n’a pu que sourire des taquineries de ses sœurs. Elles ont pris chacune un pull et Anne s’est chargée de l’appareil-photos dans son sac.
L’ascension du Mont Buet, dont le sommet culmine à près de 3100 mètres d’altitude, était la dernière randonnée des vacances. Les quatre jeunes filles avaient décidé de partir à mi-chemin entre le Col des Montets et le village du Buet, où se trouvait leur chalet, sur la route qui mène de Chamonix à la Suisse. Plus de 1700 mètres de dénivellation les attendaient et elles n’auraient jamais tenté une telle marche, si elles n’avaient pas déjà passé quatre semaines à arpenter les chemins de la Vallée de Chamonix et des environs.
Leurs parents étaient rentrés la veille par le train à Bordeaux. Ils avaient décidé de réaliser une expérience risquée et sans précédent : celle de laisser leurs quatre filles ensemble pendant le dernier week-end d’août. Quelques années, et même quelques mois auparavant, ils ne l’auraient pas envisagé, mais les quatre sœurs s’entendaient de mieux en mieux, malgré leurs différences d’âge, de maturité et de goût.
Ainsi, Anne a conduit ses sœurs jusqu’au pied de leur ascension avec la voiture que lui ont laissée ses parents pour le voyage retour. Le trajet était court depuis le chalet, mais marcher sur une route goudronnée au retour de leur randonnée n’attirait aucunement les quatre filles. Anne a garé le véhicule sous un arbre. Il était six heures et demie et quelques randonneurs avaient déjà laissé leur voiture sur le parking. Les quatre sœurs ont troqué leurs légères chaussures de sport contre de robustes chaussures de randonnée. Elles se sont chargées de leurs gourdes et de leurs sacs à dos, puis ont entrepris l’ascension.
Pendant la première partie de la montée, elles ont marché toutes les quatre ensemble, à un rythme régulier, mais relativement lent. La pente n’était pas très forte, et il faisait encore très frais entre les arbres que le jour commençait d’éclairer. Les quatre filles ne parlaient guère, soufflant distinctement le temps que leurs corps s’adaptent à l’exercice physique. Les épines tombées des sapins entre lesquels avait été tracé le chemin formaient un épais tapis où le pied s’enfonçait légèrement. À proximité, un ruisseau coulait calmement entre d’imposants rochers creusés par le courant. De si bon matin, l’humidité était presque palpable et d’innombrables gouttelettes s’accrochaient aux arbres ainsi qu’aux herbes et aux mousses qui recouvraient le sol. Mis à part le ruisseau, la nature semblait complètement endormie autour des quatre filles : aucune brise ne venait déranger le calme de ce tableau.
Après trois quarts d’heure de marche, elles ont atteint le long et étroit plateau qui les séparait du refuge de la Pierre à Bérard. Le chemin s’étendait à une altitude presque constante sur le bas du versant au soleil. Il faisait apparaître une terre marron clair entre des herbes vives. Il était traversé de nombreux cours d’eau. En contre-bas, au creux de la vallée, coulait le ruisseau déjà familier des quatre randonneuses. À cet endroit, son lit était constitué de petits galets qu’il avait charriés. Sur les bords, quelques vaches paissaient. Le versant opposé était encore entièrement dans l’ombre. De courts glaciers ornaient le sommet de la lourde barre rocheuse. À leurs pieds s’allongeaient de longs éboulis.
Petit à petit, les deux sportives de la famille, Stéphanie et Alice, avaient distancé leurs deux sœurs : Anne n’avait pas le même entraînement physique et Élodie était encore relativement jeune. De toute façon, elle ne montrait pas les mêmes aptitudes sportives que les deux premières. Par contre, elles aimaient toutes la randonnée en montagne, dont le goût leur avait été transmis par leurs parents alors qu’elles étaient très jeunes.
Les deux jeunes filles sont donc parvenues les premières au refuge, après avoir traversé le plateau en un peu plus d’une heure. Elles ont posé leurs sacs, ouvert leurs gourdes et avalé de petites gorgées d’eau. Elles ont apprécié l’effet du liquide régénérateur sur leur organisme. Quelques dizaines de mètres plus bas, elles pouvaient voir Anne et Élodie, qui montaient selon leur propre rythme. Elles les ont saluées pour les encourager.
Stéphanie et Alice ont échangé leurs premières impressions sur l’intensité de l’ascension et la beauté du paysage. Toute entières accaparées par l’effort, elles n’avaient prononcé que quelques mots pendant la montée. Anne et Élodie les ont alors rejointes. Elles n’étaient pas particulièrement fatiguées, car elles avaient marché à la vitesse qui leur convenait. Une longue pratique de la montagne leur avait permis de connaître leurs limites et elles ne les transgressaient jamais. C’est une obligation dès lors que l’on veut continuer d’apprécier la randonnée et que l’on souhaite la pratiquer en toute sécurité.
La partie la plus difficile de l’ascension restait à affronter. Les quatre filles avaient convenu de se séparer en deux groupes dès le départ du chalet, afin de respecter le rythme de chacune. Stéphanie et Alice ont rangé leurs pulls dans leurs sacs à dos : la montée allait s’intensifier et se dérouler sur le versant au soleil, dont la chaleur se faisait plus intense au fur et à mesure qu’il s’élevait dans le ciel.
Elles portaient chacune un petit short et un tee-shirt aux larges bretelles pour éviter le frottement des harnais du sac à dos sur les épaules. Une fois encore, elles étaient habillées presque identiquement : leurs goûts dans ce domaine étaient particulièrement proches. Elles ont donc laissé Anne et Élodie derrière elles, leur annonçant qu’elles ne les attendraient qu’au sommet.
Malgré la pente de plus en plus raide, Stéphanie et Alice avançaient à une vitesse soutenue. De petits groupes de randonneurs s’arrêtaient pour les laisser passer devant eux sur l’étroit sentier. Conformément à l’habitude de tous ceux qui marchent en montagne, elles ne manquaient pas de les saluer. Elles mettaient un point d’honneur à toujours échanger cette marque de sympathie, qui traduit d’une part que l’on partage l’agréable souffrance de l’ascension, et d’autre part que l’on s’accorde sur les valeurs fondamentales du randonneur, au premier rang desquelles Stéphanie et Alice plaçaient le respect et l’attitude modeste que l’on se doit d’avoir face à la montagne.
Au cours de la montée, les filles traversèrent un paysage varié. La végétation s’estompait avec l’altitude. Dans la première partie de la pente, elles rencontrèrent de grandes plaques herbeuses entre les rochers gris-rose. Puis ces derniers envahirent leur environnement. Plus loin, la neige commença à apparaître sous forme de petits bancs, puis recouvrit la roche. Les randonneuses suivaient l’étroit chemin tracé à travers la neige par ceux qui les avaient précédées. À l’approche du sommet, la neige disparut et le sol se couvrit de petits morceaux de roche friable détachés de la montagne par l’érosion. Rares étaient les minuscules fleurs blanches qui parvenaient à se développer dans ces conditions précaires. L’ultime pente qui menait au sommet du Mont Buet était terrible : elle était fortement inclinée et ne s’embarrassait pas de lacets.
Alice et Stéphanie sont parvenues au terme de leur ascension vers onze heures. Elles ont immédiatement revêtu leurs pulls et protégé la peau de leur visage à l’aide d’une crème solaire. Puis, elles ont attendu leurs sœurs pendant presque une heure. Elles en ont profité pour admirer le paysage qui les entourait, et surtout le Massif du Mont-Blanc. Le suzerain était entouré de tous ses vassaux : les plus puissants comme le Mont-Maudit ou le Mont-Blanc du Tacul ; les plus agressifs tels l’Aiguille du Midi vers laquelle s’élançait un minuscule téléphérique ; ainsi que des seigneurs plus lointains régnant en maître sur leurs domaines. L’Aiguille Verte, plus proche du Mont-Buet, était de ceux-là. À ses pieds pointait l’aiguille des Drus et coulait le glacier d’Argentière. Depuis le sommet du Mont-Blanc, le glacier des Bossons s’étirait jusqu’à la vallée. Il constituait le riche habit brillant du monarque, que quelques nuages couronnaient déjà.
Leurs regards s’étendaient sur des vallées familières comme celle de Sallanches par laquelle on accédait au massif. Elles ont essayé de reconnaître toutes les randonnées qu’elles avaient déjà faites au milieu de cette multitude de sommets. Elles ont pu voir les montagnes enneigées de la Suisse et de l’Italie. De petits nuages commençaient de bourgeonner, alimentés par l’énergie que le soleil, maintenant haut dans le ciel, dispensait avec vigueur en altitude. Ils étaient vivement remués par l’air turbulent qui circulait à cette hauteur.
Lorsque Anne et Élodie ont gagné à leur tour le sommet, les quatre sœurs ont demandé à un autre randonneur de bien vouloir les photographier, avec la chaîne du Mont-Blanc en arrière-plan. C’est ainsi que Stéphanie a pu décorer sa chambre avec un cliché pris à 3100 mètres d’altitude ! Après cette séance de pose, les quatre filles se sont accordées pour juger que l’ascension leur avait creusé l’appétit, et elles ont entrepris de savourer les provisions qu’elles avaient eu tant de peine à apporter jusqu’à ce lieu. La discussion était animée : chacune d’entre elles avait son propre avis et son propre témoignage sur la randonnée. D’autres groupes de randonneurs regardaient avec amusement ces quatre filles à l’allure si dynamique.
Lorsque la sueur qui avait mouillé leurs dos au cours de la montée a fini de sécher, elles ont retiré leurs pulls, ce qui n’a pas eu pour effet de réduire l’attention qu’on leur portait. Élodie a aussi enlevé son tee-shirt, dévoilant une brassière de coton gris légèrement tendue par ses seins à peine matures. Elle a vu Alice esquisser un sourire et a préféré anticiper la remarque à laquelle elle devait évidemment s’attendre, compte tenu des plaisanteries qui avaient précédé le départ le matin même. Alice, prenant acte que la blague n’aurait pas l’effet escompté, s’est ravisée immédiatement.
Chacune d’entre elles a appliqué de la crème solaire sur ses épaules. Les rayons du soleil prodiguaient une chaleur que le contraste avec l’air frais du sommet rendait particulièrement agréable. Mais, à cette altitude, ils n’ont pas encore traversé les couches les plus denses de l’atmosphère et compromettent la santé de la peau si l’on ne s’en protège pas. Les quatre filles étaient suffisamment soucieuses de leur corps pour profiter des bienfaits du soleil, sans prendre de risques inutiles. D’ailleurs, elles éprouvaient un certain plaisir à caresser leurs épaules du bout des doigts.
Après un long moment à profiter des joies du sommet, Anne a demandé à ses sœurs, d’une manière qui ne laissait guère d’ambiguïté sur ses intentions, si elles n’étaient pas prêtes à débuter la descente. Elle a estimé utile d’ajouter que celle-ci allait nécessiter au moins quatre heures sous une température élevée. Mais, Élodie, Alice et Stéphanie n’ont pas protesté ; elles savaient très bien que l’ami d’Anne, Pascal, allait probablement essayer de la joindre au téléphone en début de soirée, et qu’Anne souhaitait être rentrée au chalet avant son appel. Élodie a trouvé là une occasion acceptable de se montrer taquine à son tour. Aussi, après avoir effectué un dernier tour d’horizon pour figer ces images des montagnes qu’elles devaient attendre jusqu’à l’année prochaine, elles ont rangé leurs quelques affaires dans les sacs à dos et se sont préparées à redescendre.
Bien sûr, ce sont une nouvelle fois Alice et Stéphanie qui sont parties loin devant. Conformément à son tempérament, Alice a éprouvé une grande satisfaction à sentir les cailloux rouler sous ses pieds, ou les crampons de ses chaussures glisser sur un rocher humide. Stéphanie était un peu plus réticente à expérimenter de telles sensations. Elle descendait à vive allure, mais son regard s’attachait à déterminer les obstacles à éviter avant qu’elle ne les atteigne.
La chaleur était intense, et malgré leur tenue aérée, leur peau était couverte de sueur. De temps à autre, Stéphanie sentait une goutte couler entre ses seins. Elle se disait que ses vacances leur avaient été profitables. À chaque petit saut qu’elle faisait pour franchir une pierre, ils se contractaient pour compléter l’effet du soutien-gorge, qui les retenait pourtant fermement. Stéphanie était persuadée qu’ils s’étaient encore affermis.
Lorsqu’elles ont atteint le plateau, Alice et Stéphanie ont rencontré une foule plus nombreuse. Elles ont pensé avec amusement que ce refuge, où l’on servait à cette heure des crèmes glacées à un rythme effréné, avait paru coupé du monde le matin même. Elles ont regardé avec sympathie les petits enfants qui se donnaient des airs de montagnard. En revanche, elles ne se sont pas privées de jugements sévères et sans appel à l’égard de ceux et celles qui débutaient leur ascension en plein midi, sans eau, avec des intentions bien au-dessus de leurs forces. Cette conception de la montagne leur échappait complètement et elles ne faisaient aucun effort pour la tolérer.
Les deux filles sont parvenues à la voiture en un temps record. Elles ont beaucoup apprécié la dernière demi-heure de la descente, le long du ruisseau, sous les arbres. L’air frais et humide sous les sapins leur a donné la sensation de fraîcheur qui leur manquait sur le plateau. Se doutant avec justesse qu’Anne n’arriverait que plus tard, Alice s’était munie des clés du véhicule, et les deux sœurs ont pu profiter de ses sièges confortables pour laisser reposer leurs jambes et leurs dos endoloris par l’effort. Elles ont retiré leurs grosses chaussures de marche et leurs chaussettes et remarqué avec amusement le léger contraste de bronzage entre leurs jambes et leurs pieds.
Lorsque Anne et Élodie ont terminé leur marche, elles n’ont pas bénéficié du même repos bienfaiteur. Alice et Stéphanie leur ont demandé de rentrer immédiatement au chalet. En échange, elles leur ont accordé d’être les premières à profiter du bonheur de la douche. Satisfaite de cette proposition, Anne a posé son sac dans le coffre, changé rapidement de chaussures et s’est installée au volant. Elle a essayé à plusieurs reprises de démarrer le moteur, mais rien n’y a fait. Elle a rougi de colère :
Mais avant qu’elle n’ait sombré dans le désespoir le plus profond, Alice a pris en main la situation. Elle n’aurait su manquer l’opportunité d’asseoir sa réputation.
La réponse s’est fait un petit peu attendre. Il était difficile de repartir pour une demi-heure de marche en plein soleil sur une route goudronnée, alors que l’on se voyait déjà sous la douche. Mais Stéphanie n’a pas voulu laisser seule sa sœur avec qui elle avait fait équipe toute la journée et elle s’est décidée à l’accompagner.
Elles sont revenues environ quarante minutes plus tard dans la camionnette de l’agriculteur. Anne et Élodie s’étaient mises à l’aise à leur tour et attendaient dans la voiture grande ouverte. Leur bienfaiteur les a saluées avant d’ouvrir le capot des deux véhicules et de connecter la voiture des quatre filles à la batterie de sa camionnette. Un instant plus tard, le moteur récalcitrant ronronnait avec régularité.
Anne a démarré avec précaution dans la direction du col des Montets vers Chamonix. Ce n’était pas le moment de caler !
Enfin, elles sont parvenues à un supermarché et, sans trop de difficultés, Alice a procédé au changement d’accumulateur.
Stéphanie a laissé ses sœurs passer les premières dans la salle de bain. En attendant d’y accéder à son tour, elle s’est assise dans un fauteuil, sur le balcon et a posé ses pieds nus sur la rambarde. Sans bouger, elle a pensé aux images de la journée. La sueur, la poussière, le soleil, les courbatures lui procuraient une impression ambivalente. D’un côté, elle avait hâte de laver toutes ces traces de la randonnée. Mais, en même temps, elle éprouvait déjà un certain plaisir à s’imaginer l’effet de la douche, et elle appréciait presque d’être dans cet état où le corps se détendait sans complexe, s’abandonnait, ne répondait plus.
Enfin, elle a pu disposer de la salle de bain. Elle a fermé la porte derrière elle pour ne pas être dérangée pendant ce moment de bonheur. Son visage dans la glace avait de vives couleurs. Elle a déboutonné son short et l’a fait glisser le long de ses cuisses, puis elle a retiré son tee-shirt. Elle a ainsi dévoilé un soutien-gorge de coton blanc, dont la forme était particulièrement adaptée à la pratique du sport. Elle s’est regardée dans le miroir, a inspecté un grain de beauté, puis a enlevé ses sous-vêtements.
Une fois enfermée dans la cabine de douche, Stéphanie a mis l’eau à couler. Celle-ci a jailli sur ses épaules, éclaboussé son visage, coulé furieusement sur sa poitrine. Elle a emporté avec elle la poussière que la sueur avait collée sur sa peau. La jeune fille a entrepris de laver ses cheveux, puis s’est munie d’un gant de toilette qu’elle a savonné copieusement. Il a glissé sur son corps et lui a fait l’effet d’une tendre caresse. À plusieurs reprises, il est passé et repassé sur les seins de Stéphanie, jusqu’à ce qu’elle prenne conscience de cette excitation. Un peu émue par cette immixtion du plaisir dans cette activité pourtant quotidienne, la jeune fille a abandonné sa poitrine et achevé de purifier son corps tout entier.
Après avoir longuement séché sa peau, Stéphanie a enfilé un body blanc et une courte jupe, puis elle a peigné avec soin ses longs cheveux bruns. Elle a passé de la crème hydratante sur son visage. Elle a encore limé ses ongles avant de rejoindre ses sœurs. Cette séance dans la salle de bain lui a apporté une intense satisfaction et elle en est sortie d’excellente humeur. Les efforts de la journée étaient déjà loin, et seules restaient les belles images rapportées de là-haut.
Les quatre filles de la photographie sont aujourd’hui cinq ans plus âgées, mais elles n’ont pas tant changé en traversant cette période. L’aînée, Anne, qui devance Stéphanie de cinq ans, est maintenant mariée avec Pascal. Un stage à l’étranger de son ami lui avait donné l’occasion d’accompagner ses parents et ses sœurs à la montagne. Elle venait alors de réussir sa maîtrise de biologie, une discipline qu’elle enseigne aujourd’hui dans un lycée près de Nantes, où elle habite avec son mari. Contrairement à Alice et Stéphanie, elle n’est guère attirée par le sport. Elle est grande et brune comme Stéphanie, mais ses hanches sont plus larges, sa peau est plus claire et d’aspect délicat. Ses cheveux sont plus épais et densément plantés.
La plus jeune, Élodie, est née trois ans après Stéphanie. Elle ressemble beaucoup à Anne physiquement, d’autant que depuis les vacances dans la vallée de Chamonix, ses hanches et sa poitrine se sont complètement développées. Elles partagent notamment les mêmes traits du visage et les mêmes cheveux. En revanche, elle est plus extravertie que ses sœurs, plus causante, moins consensuelle aussi.
Elle se passionne pour le cinéma et possède déjà une solide culture dans ce domaine. Elle se prépare d’ailleurs à en faire son métier en suivant les cours d’une école parisienne spécialisée. Elle ne veut pas être actrice : ce qui l’intéresse avant tout, c’est d’être derrière la caméra. La persévérance qui la caractérise lui sera bien utile dans l’exercice de cette profession. Stéphanie, qui l’appelle régulièrement au téléphone, s’amuse de l’entendre mûrir de jour en jour, affirmer sans cesse plus distinctement sa personnalité.
Alice est un an plus jeune que Stéphanie, mais les deux sœurs ont grandi comme des jumelles et leur complicité est restée intacte. Avec Stéphanie, elle partage le goût du sport. Sa discipline est la gymnastique, alors que celle de Stéphanie est la natation. Elle a maintenant arrêté de s’entraîner, mais à l’époque de la photographie, elle participait régulièrement à des compétitions. Ce qui n’a jamais été le cas de Stéphanie, qui jugeait qu’un rythme d’entraînement plus soutenu, condition nécessaire pour avoir quelques satisfactions dans les championnats sportifs, risquait de mettre en péril l’équilibre de son corps, en développant exagérément ses cuisses et ses épaules.
Contrairement à Stéphanie, aussi, Alice a toujours été attirée par le risque ou le danger : elle est la seule des quatre filles à avoir accepté de sauter à l’élastique et de pratiquer le ski nautique quand leurs parents le leur ont proposé. Elle combine aujourd’hui l’attrait du vide et le sens de l’équilibre et de la synchronisation des gestes, appris par l’exercice de la gymnastique, en faisant partie d’une équipe de parachutistes, dont la spécialité est le voile-contact.
Sa peau a pourtant une apparence assez fragile, et ses fins cheveux châtains, coupés courts, entourent un petit visage arrondi. Mais, dès qu’elle fait un mouvement, sa force se révèle par le jeu discret des muscles sous l’épiderme. Paradoxalement, malgré l’énergie qui se dégage de son corps, Alice est particulièrement timide et ne se lie pas facilement.
Elle habite toujours chez ses parents à Bordeaux et est maintenant titulaire d’une maîtrise de chimie. Elle, qui envisageait avec beaucoup d’insouciance son avenir professionnel au moment des vacances à la montagne, a aujourd’hui un projet bien établi : elle veut poursuivre encore ses études pendant un an, avant de travailler dans le domaine des matériaux composites, qu’elle a découvert au cours d’un stage, et où sa formation de chimiste est recherchée.
Les quatre filles ont presque toujours vécu en autonomie, se liant peu à leurs voisins ou à leurs camarades de classe. C’était encore plus vrai pour Alice et Stéphanie, dont les âges sont très proches. Anne a d’abord joué le rôle de la grande sœur, puis la différence s’est atténuée lorsque Alice et Stéphanie ont grandi à leur tour. Quant à Élodie, elle a partagé très vite les jeux de ses trois sœurs. Bien sûr, il y a eu des moments de tension au fur et à mesure que chacune des quatre filles traversait les périodes difficiles de leur adolescence, mais rien n’a rompu l’amour qui lie les quatre sœurs.
En pensant plus ou moins consciemment à tout cela, Stéphanie parvient dans la cuisine, prépare le café, glisse quelques tranches dans le grille-pain et s’assied devant sa tasse, en attendant que les premières actions de la journée parviennent à leur terme. Elle prend un soin non dissimulé à confectionner ses tartines, et savoure chacune d’elle comme si elle en découvrait le goût. Le petit-déjeuner dure jusqu’à ce que l’appel de la douche devienne irrésistible. Stéphanie range alors rapidement les ingrédients du repas et passe un coup d’éponge dans la vaisselle qu’elle rince et laisse à s’égoutter.
Elle entre dans la salle de bain, qui n’est pas vaste. Devant elle, un grand miroir occupe la hauteur complète du mur. Elle a donc tout le loisir d’observer son corps. Elle se saisit des bretelles de son caraco, qu’elle retire en dévoilant ses seins. Ses doigts en caressent la forme : ils descendent en pente douce depuis leur naissance diffuse sous la clavicule. Puis, ils s’affirment nettement. Leurs aréoles brunes sont le cadre discret de leurs pointes arrondies. Entre les deux collines si fermement délicates s’étend un léger relief recouvert de la même peau si timidement colorée que celle des seins. Puis ses mains glissent doucement sur son ventre jusqu’à ses hanches. Elle saisit du bout des doigts l’étoffe blanche de son slip. Dans une caresse, le tissu découvre la rondeur de ses fesses. Stéphanie se baisse à peine pour retirer le sous-vêtement qu’elle pose négligemment près d’elle.
Elle est maintenant nue dans cette petite pièce, mais ne se hâte pas de rentrer dans la cabine de douche. Elle est grande et mince, mais une musculature discrète donne à son corps une juste proportion. Ses longs cheveux bruns, qu’elle attache si rarement, descendent dans une large et dense cascade entre ses omoplates. Deux grands yeux sombres, bordés de longs cils bien noirs, attirent l’attention sur son visage, au-dessus de pommettes arrondies. De fines lèvres à peine rosées dessinent une petite bouche. Quand enfin le puissant jet d’eau chaude commence à la masser, Stéphanie regarde les gouttes d’eau rebondir sur ses épaules, descendre sur sa poitrine. Le rituel purificateur dure longtemps. Il excite chacun des récepteurs de sa peau.
Il est suivi d’une courte séance de maquillage pendant laquelle Stéphanie renforce le noir profond de ses cils et teinte discrètement de bleu ses paupières. Elle passe encore un bon moment à se coiffer : elle démêle ses cheveux; coupe leurs extrémités quand elles se sont dédoublées ; puis les peigne avec application. Ensuite, debout devant son armoire, elle laisse libre cours à son humeur dans le choix des vêtements. Après avoir longtemps hésité, elle se décide pour un coordonnée de dentelle bleu pastel. Elle enfile le slip, le remonte nettement sur ses hanches pour dévoiler complètement la naissance de ses cuisses. Sur le bas de son ventre, la dentelle laisse deviner la toison sombre de son sexe. Puis, elle passe le soutien-gorge, contrôle avec une infinie précaution que ses seins sont confortablement protégés dans leur écrin de tissu. Elle ouvre ensuite une petite boîte, en sort un épais collant noir, qu’elle prépare d’un mouvement rapide des doigts, avant de se baisser pour l’enfiler. Il recouvre sa culotte, ses hanches et l’arrondi de son ventre, et l’affranchira ainsi des rigueurs de l’hiver.
Alors que l’heure de partir s’approche dangereusement, elle s’habille d’une courte jupe et d’un gros pull en laine, qui lui fera toute la journée l’effet d’une caresse sur sa peau nue. Il ne lui reste plus qu’à déposer une goutte de parfum dans le cou, derrière l’oreille, et à mettre ses chaussures, pour être enfin prête. Elle se munit de son sac à main, ouvre la porte, enfonce la clé dans la serrure. « Zut ! J’ai oublié ma montre ! » Elle court dans l’appartement, manque de se tordre les chevilles. « Mais où est-elle ? » Elle finit enfin par la trouver dans la cuisine, posée sur la boîte à pain. « C’est bien sa place! » regrette-t-elle, mais elle sait pertinemment qu’elle n’a pas la discipline suffisante pour ranger toujours ses affaires au même endroit.