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n° 19861Fiche technique37901 caractères37901
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Temps de lecture estimé : 26 mn
21/10/20
corrigé 26/10/21
Résumé:  Marc-Aurèle se lance dans une folle aventure pour découvrir l'identité de la inconnue du train. Son plan minutieusement préparé se déroulera-t-il sans encombre ?
Critères:  #aventure #rencontre fh cadeau hotel caférestau voyage voir noculotte lingerie nopéné
Auteur : Onyx31      Envoi mini-message

Série : BlackBerry vs iPhone : ou la quête de l'érotisme

Chapitre 02 / 04
BlackBerry vs iPhone : Qui est-elle?

Résumé de l’épisode 1 :

Marc-Aurèle, talentueux homme d’affaires, a rencontré une femme sur le trajet Paris - Brive qu’il a nommée : l’inconnue du train.

Depuis, ses pensées sont hantées par son souvenir.

Quelques jours plus tard, il reçoit de cette inconnue un colis, une guêpière de dentelle, la N°8 d’Aubade.

Sa décision est prise, il plaque tout pour partir à sa recherche.






Mon BlackBerry en main, j’envoie un SMS à l’inconnue du train.


« Madame, j’ai bien reçu votre troublante invitation. Je suis galant homme et l’honorerai, n’ayez crainte. Mais souffrez que je le fisse à ma façon. Ne vous éloignez pas de votre iPhone et ne perdez pas patience. Je ferai bon usage de votre numéro, soyez en certaine.

Mes hommages du matin. »


Ces mots, tant soit-il un peu guindés, je les avais répétés maintes et maintes fois. La réponse ne se fit pas attendre.


« Vous m’en voyez fort aise. »


Voilà, cela va me laisser le temps de me retourner. L’ascenseur me descend au garage où je vais retrouver ma voiture.

À chaque fois que je la vois, je ne peux m’empêcher d’admirer ses lignes. C’est un objet parfaitement harmonieux qui sied à merveille à ma collection d’œuvres d’art. Je vis seul, n’ai engendré aucune progéniture que je sache, et mes amis sont avant tout des relations professionnelles. Ma carapace de cadre dynamique épanoui n’est là que pour donner le change et éviter d’étaler au grand jour une vie sans amour ni idéaux. Je me drogue au travail, oubliant ainsi la futilité d’une existence vide de sens. Je recherche uniquement l’excitation de plaisirs fugaces tels que, décrocher un contrat, m’offrir des « œuvres » et, évidemment, comme tout mâle qui se respecte, jouir de mémorables parties de jambes en l’air avec de sulfureuses créatures.


Mes doigts se posent sur la croupe du bolide, glissent délicatement le long de ses courbes sensuelles balayant instantanément ces mornes pensées.


Je m’installe, ceinture, contact, une pression sur le bouton Start et le V12 s’ébroue. Le petit cheval cabré sur fond jaune au centre du volant semble me faire un clin d’œil et me dire : « prêt pour l’aventure ? »

Oui, ce ne fut pas sans mal, mais ma décision est irrévocable.

Let’s go !


La berlinette italienne s’élance, direction, le centre-ville. Englué dans les méandres de la circulation toulousaine, je fais le point sur la situation avant d’envisager un plan d’action.


Il lui fut certainement très facile de me retrouver. Connaissant mon nom, une simple recherche internet l’aura aiguillée vers ma page LinkedIn compilant toutes les informations me concernant. Mais dans mon cas, la démasquer sera autrement plus délicat. Elle ne m’a laissé, outre un souvenir impérissable, qu’une unique photo agrémentée d’un numéro de téléphone. Je me suis évidemment rué sur l’annuaire inversé, en vain.


Enfin, j’arrive place du Capitole et je le vois, face à moi, majestueux, le Grand Hôtel de l’Opéra. Je me gare, descends, tends les clés au voiturier et m’engouffre d’un pas vif et assuré dans le hall d’entrée. Je me dirige directement vers un comptoir derrière lequel une jeune réceptionniste aux charmes dissimulés par un trop strict uniforme m’accueille très professionnellement. Je lui rends son sourire et la salue avant de lui décrire l’inconnue du train tout en lui montrant la photo. Je lui demande alors s’il est possible de louer la même chambre. La délicieuse « Éloïse », comme indiqué sur le badge ornant une poitrine aux galbes harmonieux, s’en souvient parfaitement. Une cliente exigeante précise-t-elle, ce qui, en langage diplomatique du personnel hôtelier, signifie « chiante à l’excès ». Malheureusement, le service de sa suite n’ayant pas été effectué, il m’est impossible d’en disposer.


Encore mieux ! J’insiste pour avoir SA suite en l’état, sans que personne ne touche à quoi que ce soit. Éloïse me regarde d’un air étonné, hésite, j’insiste, elle tergiverse, je me fais plus persuasif, et finalement, va quérir son supérieur. Un quinquagénaire peu avenant arrive. Je reprends mes explications, bataille durant dix bonnes minutes pour, in fine, briser toute résistance. J’ai néanmoins dû sortir les grands moyens en la réservant durant les trois prochains mois. Au diable l’avarice, et de toute façon, il me faudra un pied à terre dans la ville rose pour mettre mon plan à exécution.


Je monte à l’étage et trouve la suite. Je respire calmement et profite de l’instant présent. Encore quelques secondes et je vais pénétrer dans son intimité.


J’ouvre précautionneusement la porte qui me laisse entrevoir un vaste vestibule. Je hume l’air à la recherche de son parfum. Rien. Cela commence décidément mal. J’avance alors dans le salon où traînent les restes d’un plateau-repas. Qu’en aurait déduit Sherlock Holmes ? Envie de dîner tardivement, ou besoin de rester seule ? Je remarque non loin un seau contenant une bouteille de Moët & Chandon 2005 partiellement vide. Choix très féminin qu’un champagne sucré. Je saisis la flûte, la remplis, cherche la trace de ses lèvres sur le cristal et y superpose religieusement les miennes. J’en avale une gorgée qui me fait grimacer, il est chaud et éventé. Mais déjà une corbeille de fruits attire mon attention. Je pose la coupe, prends un des noyaux d’abricot jonchant une assiette, le porte à ma bouche et ferme les yeux. Je lui cherche un goût particulier, sans succès. Décidément, chou blanc sur toute la ligne. Je continue néanmoins de le suçoter tout en poussant plus avant mon inspection.


Je passe dans la chambre où trône un lit majestueux aux draps de satin en bataille. Une seule place a été utilisée. Quelques poches à l’enseigne de grands couturiers traînent de-ci de-là corroborant son style classique et son statut social. Je regarde à l’intérieur si par le plus grand des hasards un ticket de caisse aurait été oublié. Rien. Une poche Aubade attire mon attention. Elle est vide, mais remplit mon imagination d’images et d’odeurs sensuelles.


Je me dirige vers la salle d’eau. Du linge blanc brodé à l’enseigne de l’établissement est négligemment posé sur le rebord de la baignoire. Un bocal de sels de bain cannelle orange est ouvert. J’ouvre les robinets et verse juste ce qu’il faut de sels. Les serviettes sont encore humides. Je regarde le contenu de la poubelle : tampons de coton marqués de traces vermillon, elle a donc changé la couleur de ses ongles, certainement pour l’assortir à sa tenue.


La baignoire est maintenant prête, je me déshabille, plonge dans l’eau chaude, ferme les yeux et mon esprit s’évade. Je nous imagine galopants sur une plage désertique. Arrivant à sa hauteur, je remarque son regard de défi « attrape-moi si tu le peux ». Je saute alors sur sa monture et je me retrouve juste derrière elle. Ma tête, balayée par ses cheveux, se colle à sa nuque. Je la mordille. La belle fait accélérer sa monture, mes mains empoignent ses seins. Puis mes doigts glissent le long de ses bras, se saisissent des rênes et stoppent brutalement la jument qui freine des quatre fers. Je me retrouve plaqué contre elle, nous tombons et roulons par terre. Je me retrouve sur elle, ma bouche à quelques centimètres de la sienne, je…


Brr, brr, brr…


Putain de téléphone ! Je le laisse vibrer dans la poche de ma veste.

Mon rêve s’est évanoui.

Je plonge entièrement sous l’eau, attends le dernier moment, lorsque mes poumons privés d’oxygène sont sur le point d’imploser, puis ressors prestement. Je reprends mon souffle.

Fait chier… je n’ai rien trouvé qui puisse me renseigner sur son identité.


Je m’adosse au rebord de la baignoire et me laisse envahir par l’odeur de cannelle flottant dans la pièce. Je frissonne. L’eau est presque froide, j’ai dû m’assoupir. Je sors, me sèche avec le drap de bain qu’elle a utilisé et me dirige nu vers le lit où je me glisse à sa place, la tête dans l’oreiller, à la recherche de la moindre odeur. Jouissance extrême, je décèle encore les fragrances de Poison de Dior. Tel un amant fourbu, je m’endors, un sourire béat sur les lèvres.


Je me réveille en sursaut et regarde mon bracelet-montre. 16 h. Je me lève paré de ma tenue d’Adam et retourne à la salle de bain. Mes affaires sont par terre, froissées. Je récupère mon BlackBerry et appelle mon avocat et ami.


Je lui demande de s’occuper de la vente de mon loft. Il tente de m’en dissuader argumentant qu’il est exceptionnel. Il est vrai que lorsque je l’ai acheté, ce n’était qu’un vieux commerce accolé à un entrepôt. 210 mètres carrés au cœur de Toulouse aménagés par deux talentueux architectes d’intérieurs new-yorkais. Il est réellement unique, mais je n’y n’ai aucun souvenir particulier. Il ne représente rien de plus que l’écrin de mes œuvres d’art. Or il se trouve que je vais avoir besoin de liquidités pour l’aventure de ma vie ce qui rend ma décision irrévocable. Je raccroche.


Je n’apprendrai plus rien sur l’inconnue du train ici et la tâche à accomplir reste immense. Je m’habille donc et m’en vais. En passant à la réception, je demande que le service d’étage s’occupe de ma suite. Je récupère ma Ferrari et retourne chez moi.


Je prends les bagages en cuir assortis à la sellerie de ma voiture, y entasse à la va-vite quelques costumes et effets personnels. Je récupère mon PC portable, fourre tous mes papiers importants dans une grande malle en bois et cuir fin 18e et dispose à côté mes « œuvres » essentielles et une feuille marquée : « à livrer au Grand Hôtel de l’Opéra ».


Avant de sortir, je me retourne une dernière fois. Je n’ai nul regret. Ce lieu ne m’inspire rien, ni émotion ni sentiment aucun.


Je m’installe dans ma voiture et appelle Pauline. Je tombe sur sa messagerie où je lui explique que faire des effets restés chez moi. Je raccroche mais aussitôt la rappelle. C’est avec émoi que je lui avoue qu’elle est une femme formidable, la remercie chaleureusement et lui souhaite d’être pleinement heureuse.


Ensuite, au tour de Philippe, mon associé, à qui j’explique la situation. Je prends une année sabbatique. Je veux nommer Pauline directrice opérationnelle avec l’intégralité de mon salaire et ne garderai que le titre de D.G. ainsi que mes dividendes qui, soit dit en passant, en tant qu’associé majoritaire, représentent quand même plusieurs centaines de milliers d’euros l’an.


En moins d’une heure, je venais de liquider l’intégralité de mon passé. L’avenir est devant moi. Il m’appelle à bras ouverts.


Je démarre, attrape l’autoroute, direction Londres.


Pourquoi Londres ?

Vous devez savoir, à ce stade de l’histoire, que, pour de simples questions fiscales, ma holding est basée à la City, même si l’essentiel de nos affaires se traite à en France. Ceci explique l’immatriculation anglaise de ma voiture ce qui m’évite nombre de soucis avec la maréchaussée. J’appelle mon collaborateur sur place pour le prévenir de mon arrivée afin qu’il prenne ses dispositions comme à l’accoutumée.


Car j’ai un plan, plus qu’incertain, certes, mais peu importe, j’ai une foi inébranlable en l’avenir.


L’autoroute se dégage peu à peu, je branche mon avertisseur de radar, allume mes feux de croisement, et mets pied au plancher. Je suis littéralement collé au siège par l’accélération, fulgurante, le vrombissement mélodieux du moteur dans les oreilles, telle une symphonie, les sonorités passant du grave à l’aiguë à l’approche du rupteur. L’impression de puissance est phénoménale.

C’est juste jouissif.


Freinage brutal, je passe rapidement de 230 à 110 km/h afin d’éviter le papy devant moi. Je lui lance une salve d’appels de phares, il se rabat, je repars, une ligne droite, personne à l’horizon, je libère brutalement la cavalerie. L’aiguille du tachymètre s’envole inexorablement, 150, 200, 250, et enfin le mythique 300 km/h.

J’adore.

Je suis le roi du monde.


Passer cette limite symbolique est euphorisant, la toute-puissance qu’elle procure, l’insouciance, le plaisir de braver les interdits. Je lâche l’accélérateur et me cale sur un petit 180. C’est que je sais être raisonnable !


Quelques heures et ravitaillements d’essence plus tard, j’arrive à Calais où j’embarque dans l’Eurostar qui me déposera au cœur de la capitale du vénérable Empire britannique.


Londres, enfin. La partie peut commencer.

Nous sommes au milieu de la nuit. Je me dirige donc vers ce palace londonien où une chambre m’est déjà réservée. Je m’affale sur le lit et sombre dans un sommeil réparateur.


6 h. Je suis réveillé.

Durant le trajet, j’ai jeté les bases du plan qui me permettra de découvrir l’identité de l’inconnue du train. Je trépigne d’impatience jusqu’à 8 h. N’y pouvant plus, je fonce au siège de ma holding.


Il y a deux ans, un cabinet de détectives privés londonien nous avait sollicités dans le cadre d’une affaire de piratage de données personnelles détenues illégalement par un de ses clients. Je récupère leurs coordonnées et prends rendez-vous.


J’aimerais pouvoir distordre le temps afin de réduire à néant ces interminables périodes d’attentes inutiles où l’oisiveté me plonge dans les affres du doute. Enfin, l’heure du rendez-vous approche. La circulation londonienne en voiture étant une gageure, j’opte pour un Black Cab et file sans plus attendre.


Une fois les salutations d’usage expédiées, j’explique mon plan à John, le patron, qui hésite sérieusement devant certains aspects illégaux de ma démarche. Mais les anciens militaires sont des hommes d’honneur, et, vu qu’il me doit un service, l’affaire est rondement menée d’autant plus que j’ai un argument de poids, son prix sera le mien.


Il nous faudra une semaine entière pour échafauder un plan et en régler les moindres détails. Enfin, tout ne peut être prévu et certaines zones d’ombres persistent, notamment la principale… acceptera-t-elle d’entrer dans le jeu ?


18 h. Je sors mon BlackBerry et envoie le message suivant à l’inconnue du train.


« Madame, je vous attendrai ce samedi matin à Heathrow Airport, votre heure sera la mienne.

En vous souhaitant bon voyage. »


Les minutes s’égrènent.

Toujours pas de réponse.

Je m’impatiente.


Une heure s’est écoulée, je frôle l’hystérie.

Une heure quarante-cinq minutes et trois whiskies plus tard, mon cerveau est au bord de l’explosion quand mon téléphone vibre.


« J’y serai. »


J’exulte, mais, paradoxalement, toute la tension accumulée ces derniers jours s’évanouit comme par miracle. Je m’affale aussitôt sur un fauteuil, vidé, mais empli d’une douce sensation : j’allais la revoir !


Le samedi matin, dès l’ouverture de l’aéroport, accompagné de John et son équipe, nous sommes sur le pied de guerre. C’est que la journée va être longue et éprouvante, nous n’avons pas le droit à l’erreur. John a soudoyé un employé du PC de sécurité à qui il a confié la photo de l’inconnue prise dans le train.


Attente interminable.

Ma patience est mise à rude épreuve, le doute m’envahit. Et si elle passait entre les mailles du filet, si l’opérateur ne la reconnaissait pas ? Tout mon plan tomberait à l’eau.


Rester positif.


11 h 28. La radio crachote, cible repérée, terminal A3, provenance Berlin. Il la décrit. Provocation ou jeu, elle porte le même tailleur que lors de notre première rencontre. Elle se dirige vers l’espace de retrait des bagages. John prend alors son walkie-talkie.


Plus loin, un jeune homme d’une vingtaine d’années au look d’étudiant reçoit dans son oreillette la description de la femme. Il la repère, observe les alentours, la prend discrètement en photo et demande confirmation.


Aucun doute possible, il reçoit donc le feu vert pour passer à l’action. Il analyse la situation et choisit le bon moment, dans la cohue, près du tourniquet à bagages. Il l’approche, plonge discrètement la main dans son sac à bandoulière et en ressort une pochette. Il s’éloigne tranquillement, et, dès l’angle du couloir franchi, cours vers les toilettes. Une fois arrivé, il donne l’objet dérobé à un homme portant des gants de latex. Ce dernier ouvre la pochette, en sort les papiers d’identité, passeport, cartes de crédit, les photographie avant de les remettre soigneusement à leur place. Une fois fini, l’étudiant de circonstance repart, trouve la femme, la bouscule légèrement, s’excuse et passe son chemin. Voilà. C’est fini. La pochette a repris sa place initiale.


Premier round gagné !


John reçoit un appel sur le walkie-talkie. La femme se nomme Christelle de Valnor, trente-cinq ans, productrice de défilé de haute couture. Un rapide coup d’œil sur internet m’apprend qu’elle est issue de la vieille noblesse française.


Il reprend sa radio pour renseigner un homme en livrée noire sur le nom de l’inconnue. Il l’inscrit aussitôt au marqueur sur une pancarte qu’il lève bien haut.


Je donnerai volontiers ma Ferrari pour voir sa tête quand elle lira son nom sur la pancarte !

Effectivement, à la sortie du terminal, l’inconnue, qui n’en était presque plus une, se fige à la vue de son nom. Elle hésite, regarde tout autour, puis se rapproche.



Ses affaires l’amènent souvent à Londres où ce palace réputé au service irréprochable fait référence.



Il prend la sortie VIP, montre son laissez-passer et ouvre la porte d’une Rolls-Royce blanche à sa cliente avant de s’occuper des bagages.


Confortablement installée sur la banquette de cuir Connolly, Christelle de Valnor remarque immédiatement la bouteille de Moët & Chandon 2005 dans le mini bar. Elle arbore un discret sourire et prend son iPhone.


« Délicate attention que ce champagne, soyez-en remercié. Je constate avec enthousiasme que vous avez effectivement fait bon usage de mon numéro. »


Elle se met immédiatement à l’aise, se sert une coupe et branche son iPhone sur la prise ad hoc de la chaîne hi-fi. Aretha Franklin vient s’inviter en musique de fond. Ses escarpins enlevés, elle pose ses pieds nus sur l’épaisse laine vierge du tapis, ferme les yeux et se laisse bercer jusqu’à l’hôtel, un léger sourire aux lèvres.


C’est le portier du palace qui la sort de sa rêverie. Comme elle s’en doutait, une suite lui a été réservée. À l’intérieur, de nombreuses fleurs aux couleurs et senteurs variées trônent dans le salon. Sur une table basse, quelques magazines de mode et un seau à champagne avec toujours le même millésime. À côté, deux flûtes.


Deux flûtes ?

Nerveusement, elle fait rapidement le tour du propriétaire.

Vide.


Elle prend son téléphone.


« Avez-vous prévu de passer ? »

« Qui sait, peut-être, mais si vous le désirez, je vous attendrai, ce soir aux Trois-Garçons, à 20 h. »


Elle frémit.


« Dois-je prévoir quelque chose de particulier ? »

« Soyez vous-même, sans plus. »

« J’y serai, avec grand plaisir. »


Les Trois-Garçons est un restaurant atypique de Londres. L’ambiance y est inimitable, un mélange d’ancien et de moderne, de classique et de rococo. On aime ou non, mais personne ne peut y rester insensible. Le tout donne un cocktail très éloigné du conformisme victorien, ce qui est parfaitement adapté à la suite des opérations, enfin, telle que je me l’imagine à cet instant.


L’heure arrive.

Elle demande à la réception de tenir prête sa limousine. Elle descend vêtue d’une simple robe de soirée raffinée à fourreau. Le tissu noir a été légèrement saupoudré de poussière de diamant faisant ainsi rayonner l’élégante de mille feux. Quatre rangées de perles ornent sa poitrine. Une coiffure sophistiquée et des escarpins assurent à sa démarche un côté glamour qui ne peut laisser indifférent.


Après un bref trajet, elle entre au restaurant où le majordome l’installe à la table qui lui a été réservée.

À peine assise, son téléphone vibre. Son cœur fait un bon, elle respire un grand coup avant d’extraire de sa pochette son iPhone.


« Vous êtes divine, Madame. »

« Vous êtes là ? »

« Ici et ailleurs… »


Sur la table, deux couverts sont dressés.


« Un gentleman ne fait pas attendre une dame. »

« Sauf à vouloir faire monter le plaisir. »

« Je ne suis pas adepte des plaisirs solitaires, Monsieur. »

Vous n’êtes pas seule, je suis là, près de vous. »


Elle tourne rapidement la tête et balaie la salle du regard. Il est tôt, peu de clients sont présents. Un vieux couple, deux tourtereaux aux yeux débordant de passion, quelques jeunes de bonne famille fêtant certainement un événement ainsi qu’une femme absorbée par sa lecture, mais aucun homme seul.


Tout attentive à détailler les personnes présentes, elle n’a pas remarqué qu’à la table de la femme au livre, un smartphone dirigé vers elle est discrètement posé dans le pot de fleurs. Grâce à la visio-conférence, je pouvais assister à la scène confortablement installé dans le Range Rover de John à quelques dizaines de mètres seulement. Miracle de la technologie moderne, l’image et le son s’affichaient comme au cinéma sur mon PC.


« Vous avez le don d’invisibilité ? »

« Non, celui d’ubiquité. Et j’ai la ferme intention d’en abuser pour vous surprendre. »

« Soit, et alors ? Dois-je monter sur la table et vous faire un strip-tease ? »

« L’idée est plaisante. Si cela vous chante, laissez-vous aller. Auriez-vous une âme d’exhibitionniste ? »

« Point du tout, mais vous, vous semblez être un voyeur patenté ! »

« Disons que j’aime les belles choses, quelle que soit leur nature. »

« Parce que vous me considérez comme « une chose » ? »


Merde, quel con je fais !

Je me suis laissé emporter par le côté surréaliste de la situation. Je la vois là, sur l’écran devant moi, sensuelle et désirable. Et cette discussion qui a instantanément pris un petit côté sexy de son propre chef. À quoi joue-t-elle ? Cherche-t-elle toujours à me déstabiliser ? Se prendrait-elle au jeu ?


Rester concentré.

Ne pas oublier que c’est une femme brillante à l’esprit affûté qui ne doit certainement pas hésiter une seconde à user de ses charmes pour arriver à ses fins.


« Détrompez-vous ! L’expression « belle chose » est ici employée dans un sens générique en tant qu’objet artistique. Englobant tout ce qui éveille les sens et peut procurer une émotion, un geste parfaitement exécuté, un esprit fin, une odeur ou un goût, un touché sensuel… et je ne doute pas que vous puissiez transformer un strip-tease en œuvre d’art… érotique.

Mais je ne me laisse pas abuser. Je vois clair. Vous mettez en avant vos atours féminins dans le seul but de m’éblouir et de protéger ainsi l’essentiel, c’est-à-dire, vous. »


Silence.

Elle cherche ses mots. Yes ! J’ai repris la main !

J’attends sa réponse en trépignant d’impatience le regard rivé à l’écran, quand, sans crier gare, un doute m’assaille.

Serait-elle troublée ?


En effet, elle ne paraît plus être dans le feu de l’action à chercher la réplique cinglante qui me clouerait définitivement au pilori, elle semble ailleurs… comme perdue dans ses pensées, immobile, le regard vide. Serait elle était en pleine introspection ?


Enfin un mouvement, elle fixe son iPhone puis le pose sur la table. Elle balaie du regard une nouvelle fois la salle. Serait-elle à ma recherche ? Ses yeux fixent le menu posé à côté d’elle.

Je suis décontenancé.

Elle reprend son téléphone.


« Vous parliez de plaisirs des sens, il y a ici deux couverts et une carte certainement capable de réjouir les papilles gustatives les plus exigeantes. Me laisserez-vous en profiter seule ? »


Une invitation… aucun doute possible là-dessus, elle m’invite à la rejoindre. C’est terriblement tentant, dîner avec elle, peut-être les prémices d’une soirée torride. Mon pénis qui commence à prendre vie a déjà donné sa réponse, mais moi, est-ce vraiment ce que je désire ? La mettre dans mon lit, là comme ça ? Une simple histoire de sexe même aussi plaisante soit-elle ? Il y a peu, jamais je n’aurais tergiversé de la sorte.


Non, il ne peut en être ainsi. Mais qu’est-ce que je suis en train de faire ? Je n’en sais fichtrement rien.


Je reprends mon téléphone.


« Vous n’êtes pas seule, Madame, je suis là pour vous tenir compagnie. »

« Si vous le dites. »


Elle pose son smartphone, attrape le menu et l’étudie. D’un geste de main élégant elle hèle le maître d’hôtel pour prendre commande. Un instant après un jeune serveur vient lui apporter un seau à champagne, débouche la bouteille avant de remplir sa coupe.

Elle déguste son breuvage en attendant d’être servie. Son regard se pose mainte fois sur son iPhone traduisant une certaine fébrilité.


À quoi pense-t-elle ?


Je suis à la fois terriblement excité… et terrifié.


Enfin sa commande arrive. J’observe et compare avec le menu que j’ai sous les yeux. J’hésite un peu pour finalement me lancer.


« Judicieux choix que ces Tortellini au crabe de Dorset. »

« Vous croyez m’impressionner ? Il en faut bien plus. »


Elle prend alors un malin plaisir à porter à ses lèvres peintes les mets de façon légèrement provocante.


« Vous ratez quelque chose c’est délicieux. »

« Je me réserve pour le dessert. »

« Un gourmand ? Attention à l’embonpoint ! »

« N’ayez crainte, je suis très sportif. »

« Espionner une dame, je n’appelle pas du sport, mais un vice. »

« Un vice ? Seriez-vous femme à vous laisser dicter votre conduite par la morale judéo-chrétienne ? »

« C’est ce que vous croyez ? »


Zut, je n’aurais peut-être pas dû la provoquer. La dernière fois, cela c’est mal fini pour moi.


Elle pose son iPhone sur la table, bien en vue et continue son repas comme si de rien n’était. Elle semble prendre plaisir à déguster le contenu de son assiette, appelle le maître d’hôtel qui lui ressert une autre coupe. Elle la lève dans le vide comme pour trinquer avec un convive invisible.


L’ambiance est tendue dans le Range Rover. Qu’est-elle en train de manigancer ?


Enfin, après un temps qui m’a paru infini elle reprend son iPhone.


« C’est l’heure du dessert. »


Elle attend quelques secondes et recompose un SMS.


« Puisque vous ne venez pas à moi… »


Et sur ce, elle se lève calmement.



J’attrape la poignée de la porte, prêt à me jeter à sa poursuite lorsque John m’agrippe le bras en me disant :



Effectivement, après avoir repositionné parfaitement sa chaise, elle se dirige toujours aussi calmement vers l’intérieur du restaurant.


Merde, elle sort du champ de l’objectif, je l’ai perdu.



Il semble savoir ce qu’il fait, c’est bien la seule chose qui me rassure en ce moment. Il prend son walkie-talkie et contacte sa complice au livre qui nous rassure instantanément. Elle a simplement été aux toilettes.



En effet, quelques minutes plus tard, là revoilà qui s’installe toujours aussi sereinement à sa table. Elle reprend son téléphone.


Brrr brrr, je me jette sur mon BlackBerry.


« Je vous ai laissé un cadeau, là. »


« Vous avez reçu une photo.»


Je télécharge le fichier. Une serviette soigneusement pliée est consciencieusement posée près d’une vasque dans les toilettes très certainement.



Elle veut m’obliger à traverser la salle, non seulement je serai démasqué, mais en plus je devrais m’humilier publiquement à entrer dans les toilettes des femmes.


Je me tourne vers John avec un regard abattu signe de mon désarroi. Comme à son habitude, il ne se laisse pas démonter. Il me demande de lui envoyer la photo reçue et attrape sa radio. Il contacte sa complice à qui il donne ses instructions via son oreillette.



J’exulte ! Je suis sauvé.


Effectivement, quelques minutes plus tard Line arrive en courant. John ouvre sa fenêtre et récupère la serviette. Il la déplie et nous restons tous trois cloués sur place.


Un tanga noir.



John redonne la serviette à Line quand une idée me vient à l’esprit.



Je me retourne, ouvre un sac, en sors la guêpière qu’elle m’avait précédemment envoyée et je lui tends.



Elle tourne les talons sans mot dire et repars aussi prestement qu’elle est arrivée.


L’attente est interminable, je suis complètement aveugle sans liaison vidéo et je ne sais pas ce qu’elle a fait durant tout ce temps. Si elle a été aux toilettes, je suis grillé.


Brr Brr Appel vidéo : Line.


J’accepte et le transfère sur mon PC.


Je lâche un ouf de soulagement. Elle est toujours là, assise à sa table à déguster son café gourmand.


Je ferme les yeux, respire calmement pour faire baisser mon taux d’adrénaline. C’est qu’il va me falloir jouer serré.


J’attrape mon BlackBerry, prends le temps de réfléchir… et le repose. Je saisis le tanga et le hume à la recherche d’une quelconque excitation. Il y a bien une odeur, mais je suis incapable dans donner la provenance. Tant pis, je prends le risque, à moi de prendre l’avantage.


« Madame, très joli tanga noir. »


Elle ne peut réprimer un air de surprise. Elle relève la tête et balaie prestement la salle du regard.


« Appréciez-vous le contact du tissu sur votre peau ?

Mais dans votre précipitation, vous avez oublié quelque chose, là-bas, dans les toilettes, à la même place. »


Elle pose son téléphone et bascule sur sa chaise. Elle semble décontenancée.


Le temps se fige, de longues minutes s’écoulent.


Enfin, elle se lève, toujours avec la même prestance qu’ont les femmes du monde, se dirige de nouveau vers les toilettes et sort du champ de vision de la vidéo.


Rarement mon niveau de stress n’aura été aussi élevé. Je la visualise mentalement se déplacer et quand j’estime qu’elle est arrivée. J’envoie un nouveau message.


« Madame, j’ai bien retenu ma leçon, mais elle sera mieux sur vous à magnifier votre corps. »


Silence.

Mon cœur bat la chamade.


« Monsieur, si vous avez l’âme d’un voyeur, sachez que je suis, moi, une femme d’action. »


« Appel vidéo entrant : Inconnue du train. »



J’appuie sans réfléchir sur "accepter" et braque l’objectif sur ma poitrine afin qu’elle ne puisse pas deviner où je suis. Je transfère rapidement la vidéo sur mon PC.


Mon regard est rivé à l’écran, les couleurs sont blafardes, mais peu importe. Je vois les murs des toilettes avec des mosaïques monochromes dans les tons vert bleu. Elle se dirige vers la porte et… tire le verrou.


Je déglutis.

La tension est à son paroxysme, aussi bien concernant mon état psychique que physique avec mon sexe qui ne demande qu’à prendre l’air.


La caméra se déplace lentement, faisant maintenant fasse au miroir. Elle semble poser le téléphone et le tourner vers elle. Je ne vois plus sa tête mais juste son buste, avec, en gros plan, son décolleté.


John, par pudeur, sort griller une cigarette. Je me retrouve seul dans le véhicule hypnotisé par son audace.


Ses deux mains se posent alors sur ses épaules et commencent à descendre les bretelles de la robe, lentement, très lentement. Le silence décuple l’intensité du moment. Le haut des balconnets se laisse deviner, je retiens ma respiration quand soudainement elle se tourne.


Je vois apparaître le bandeau d’un soutien-gorge, d’un geste rapide et précis, elle le dégrafe, le défait et pivote prestement pour faire fasse de nouveau à la caméra. Cela n’a duré qu’un bref instant, une main cachant pudiquement ses seins, l’autre jetant le soutien-gorge sur le téléphone.


L’écran devient soudainement troublé ne laissant entrapercevoir que quelques mouvements furtifs à travers l’étoffe.


Je reste sans voix. Je suis complètement déboussolé, errant entre frustration et volupté infinie.


De trop longues minutes s’écoulent. L’image revient. Elle est devant moi, tout habillée. J’ai juste le temps d’apprécier un large sourire avant qu’elle ne mette fin à la transmission.


Je suis troublé, enfin, bien plus que cela. Ce n’était pas un rictus de circonstance, mais plutôt un sourire décomplexé signe d’un ravissement extatique.


Enfin, elle revint à sa table pour récupérer ses affaires. Le maître d’hôtel s’approche pour lui signifier que sa note avait été réglée par avance. Elle demande sa limousine.




*****




Quelques minutes plus tard, Christelle de Valnor s’affalait littéralement à l’arrière de la Rolls Royce. Prise de panique elle s’était enfuie, oui, enfuie, espérant seulement avoir sauvé les apparences. Quelque chose d’incompréhensible était arrivé, une perte de contrôle inhabituelle qui aurait pu s’avérer dangereuse, voir catastrophique. Elle sentait un besoin impérieux de recouvrer ses esprits. Elle voulait simplement errer dans ce cocon protecteur que lui offrait la limousine. Elle demanda à son chauffeur de rouler, peu importe où.


Ses mains tapotaient son iPhone, elle hésitait.


Tout lui semblait flou. Il y avait cette fierté de mener le jeu et de ne pas céder au premier venu, mais, simultanément, elle sentait une envie indéfinissable qui la troublait depuis le premier jour où il lui avait tendu ce journal. Pitoyable tentative de drague, incontestablement, mais en même temps il avait ce regard qui semblait dire : « viens, suis-moi et tu ne le regretteras pas ».


À l’encontre de toutes les règles de la bienséance, il l’avait laissée en plan sans jamais la rappeler, l’obligeant, elle, Christelle de Valnor, à faire le premier pas. Mais, en contrepartie, il avait déployé des trésors d’ingéniosité pour la retrouver. Pourquoi avait-elle cette impression que rien ne pouvait l’arrêter, qu’avec lui il n’y avait plus de règles, plus d’interdits ? Pourquoi lui semblait-elle l’entendre lui susurrer : vas-y, tu peux le faire, toi aussi !

Mais faire quoi ?


Que veut-il à la fin ? S’il voulait l’attirer dans son lit, n’avait-il pas remarqué qu’elle était prête à s’offrir à lui ce soir. Est-il si rustre qu’il n’a rien vu ?


Elle l’a maudit toute la soirée pour l’avoir humiliée de la sorte, la laissant seule à une table pour deux dans un grand restaurant. De quoi avait-elle eu l’air ? Mais pourquoi est-elle restée ? Pire, qu’est-ce qui lui a pris d’aller se déshabiller pour lui donner sa culotte ? A-t-elle perdu toute fierté et dignité, qu’elle était à deux doigts de s’exhiber nue ? Est-elle tombée si bas pour avoir cédé à cette pulsion ?


Pulsion.

Le mot est lâché.


Depuis quand Christelle de Valnor cède-t-elle à ses pulsions ?


Qu’a cet homme de si particulier pour la pousser de la sorte à commettre de telles abominations ? Il n’était pourtant ni le plus beau, ni le plus cultivé et ni le plus riche qu’elle ait rencontré. Elle avait toujours imposé ses propres choix aux hommes, mais aujourd’hui elle se sentait fragile, et cela lui faisait peur.


Elle était perdue et n’avait plus qu’une envie, s’embrumer l’esprit au champagne et abandonner son corps à la volupté d’un lit douillet aux draps soyeux.


Elle ordonna à son chauffeur de la ramener à son hôtel.


Une fois dans sa suite, elle ouvrit une bouteille et s’en versa une coupe. Elle retira ses chaussures, laissa choir sa robe et se regarda dans le grand miroir du salon. Elle était là, vêtue de sa seule guêpière, son sexe nu apparent, un décolleté impudique dont le collier de perles rehaussait le côté provocant. L’image était à la fois troublante… et vulgaire.


Cela a eu l’effet d’un électrochoc, la téléportant instantanément le jour où sa gouvernante l’a surprise, préadolescente, en train de jouer avec son minou. Ce comportement était tout bonnement inadmissible et Christelle fut placée en pension dans une des plus strictes institutions jésuites. Elle y sera formatée par une saine éducation traditionnelle où le mot sexe était banni du langage, où l’on ne reste jamais entièrement nue, même durant « l’acte d’amour ». Elle n’avait plus jamais fait de vague jusqu’au jour fatidique où ses parents décidèrent de la marier avec un obscur descendant des Habsbourg. Elle refusa net en les menaçant de devenir strip-teaseuse dans un bar à putes. Le seul fait que leur fille connaisse et ose prononcer le mot « pute » devant eux les décidèrent définitivement de la mettre à la porte et bien sûr, de la déshériter.


L’ultime trahison.


Elle ferma les yeux.

De délicieux picotements se propageaient depuis son bas-ventre. D’instinct elle glissa sa main entre ses cuisses. Incontestablement son sexe était humide comme rarement il ne l’avait été. Elle ne put refréner le souvenir de la sensation inimitable de sa robe caressant la peau de ses fesses ni le frisson ressenti lorsqu’un courant d’air s’y est engouffré, excitant son intimité débarrassée de sa protection de soie.

Une indescriptible envie d’enfoncer brutalement ses doigts au plus profond de sa vulve l’envahit. Elle retira immédiatement sa main, non, ce n’était pas son style, pas elle, pas Christelle de Valnor.


Elle ouvrit les yeux… et eut honte d’elle.


Ses parents avaient-ils raison de penser que le mal était ancré au plus profond de son être et qu’elle était définitivement perdue ? Pourquoi ses pulsions la poussaient inexorablement à se comporter de la sorte ? Et ce Marc-Aurèle, serait-il le diable en personne pour éveiller en elle de si coupables envies qu’elle avait mis si longtemps à enfouir ?


Elle aurait voulu ne jamais avoir pris ce maudit train, mais le mal était fait, elle avait été bien au-delà du raisonnable, bravant toutes les règles de la bien-pensance jusqu’à frôler l’irréparable.


Elle avait besoin d’oublier, et seul un bain brûlant pouvait ramener son corps à de plus avouables sensations. Elle traversa sa chambre pour atteindre la salle de bain quand son regard fut attiré par une enveloppe posée sur son oreiller. Elle l’ouvrit fébrilement et y trouva un simple bristol avec, noté :


Aux plaisirs futurs…


Cette carte était accompagnée d’un billet d’avion open à son nom.

Destination : Vienne.



À suivre