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Temps de lecture estimé : 29 mn
03/10/21
Résumé:  Grâce à Sandra, Jérôme retrouve un premier emploi prometteur dans une start-up. Leur relation amoureuse se construit peu à peu.
Critères:  fh travail caresses fellation pénétratio fsodo
Auteur : Roy Suffer  (Vieil épicurien)            Envoi mini-message

Série : Demandeur d'emploi

Chapitre 02 / 03
Fin de galère ?

Résumé de l’épisode précédent :

Un lien amoureux improbable s’est tissé entre Sandra, directrice d’agence Pôle Emploi et Jérôme, un cadre réduit au chômage par un patron véreux.







La semaine qui suit est un peu triste, malgré un soleil éclatant. Et puis la nécessité faisant loi, satisfaire aux besoins premiers reprend vite le dessus. L’argent manque cruellement, non pas pour le superflu mais pour des choses aussi bêtes que changer l’alternateur de son vieux véhicule. Le garagiste lui demande deux cents euros, Internet lui propose la pièce à plus de cent cinquante, mais son compte est pratiquement vide, panneau solaire de l’arrosage oblige. Par force, Jérôme reste à la maison sauf pour quelques courses qu’il fait à pied et un tour quotidien à son jardin. Il en profite pour accélérer ses corrections de manuscrits en cours et en réclamer d’autres à son éditeur, qui finit par lui accorder une petite avance, fort bienvenue. Il craignait fort que toute rémunération dût attendre le retour des vacances. Chaque jour, il attend le passage du facteur susceptible d’apporter le précieux chèque. Mais c’est un tout autre courrier qu’il reçoit. Une jolie enveloppe jaune, épaisse, remplie d’une écriture fine et nerveuse.


Très cher Jérôme,

J’ai préféré utiliser les vieux moyens pour t’informer, afin de ne pas laisser de traces sur le réseau du boulot. Tu verras, c’est un début, mais ce n’est que le début. J’avais bien briefé cette stagiaire, une allumeuse de nature, qui ne se plaint habituellement pas. Mais quand je lui eus fait miroiter quelque argent facile à gagner, pour peu qu’un procès ait lieu, elle a foncé comme un bon petit soldat. Et d’après les dernières rumeurs, elle ne sera pas la dernière à porter plainte (Me too ! ).

Tu me manques, et là aussi ce n’est que le début…

Sandra


La courte lettre est accompagnée de la photocopie d’un article du journal local :


HARCELEMENT :

Un scandale éclate à la Chambre des Métiers.

Une stagiaire porte plainte contre Monsieur Granradin, le président, pourtant honorablement connu…



« Ah la vache ! Plus garce tu meurs, pense Jérôme en souriant. Il épluche l’article avec délectation. La petite stagiaire de Pôle Emploi avait fait la Nafissatou Dialo, c’était du Strauss-Kahn dans le texte ! Petite jubilation, doublée de celle d’avoir en prime toutes les coordonnées de sa belle, preuve de sa confiance. Il aurait bien acheté le quotidien pour être informé des suites de l’affaire, mais son prix lui permettant d’acheter un pain, il préfère le pain. Enfin le chèque de l’éditeur arrive, à point nommé pour régler les factures d’électricité, d’eau et de téléphone. Il lui reste suffisamment pour commander l’alternateur, ce qu’il fait. Deux jours pour changer ce fichu engin, mal placé presque sous le moteur et avec une courroie très difficile à tendre sans pont ni fosse.


La voiture réparée, il retourne à la déchetterie pour récupérer des pattes d’aluminium pour réparer la gouttière de la petite rue arrière. Comme elle est très basse, des gamins s’y sont suspendus et les fixations ont lâché. Le meilleur endroit pour cela, c’est celle où les ateliers de Granradin déposent leurs déchets, des ferrailles de toutes sortes et, il le sait bien, de bonne qualité. Alors qu’il fouille dans la benne, un camion arrive. Deux hommes en descendent. Merde ! Il n’aurait pas souhaité les rencontrer.



Il trouve tout de même quelques beaux profilés d’alu au fond du camion et revient un peu chagriné. Cette entreprise dans laquelle il avait tant donné battait de l’aile, la famille Granradin allait la mettre à mal par ses âneries.


Il fait ses réparations, en profite pour démousser cette partie du toit et s’occupe de son jardin. Il est content de son système d’arrosage, les tomates sont belles et donnent bien. Aussi ses menus varient, salades de tomates et œufs durs, tomates poêlées aux œufs, tomates farcies aux œufs, omelettes aux fines herbes et coulis de tomates… Son estomac est rassasié, c’est tout ce qui importe. Juillet est harassant, deux semaines de canicule. Il reçoit quelques textos, c’est pareil en Bretagne et Sandra va se rafraîchir au bord de la mer qui atteint vingt et un degrés, un record là-bas. Elle pense toujours à lui, comme lui à elle, et elle ne l’emmerde pas avec des sentiments. Pas de « je t’aime », de « mon amour » ou ce genre de choses qui l’auraient gêné. Elle a envie de lui comme lui d’elle et leur relation n’entre pas dans des complications. Il décroche un petit ticket avec la nouvelle boulangère, une fille recrutée à sa sortie de l’école. Elle est toute mignonne, toute timide mais gentille comme tout. Ils parlent un peu, puis un peu plus, puis beaucoup. Il n’a absolument pas l’intention de la mettre dans son lit, c’est plutôt comme une petite sœur qu’il n’a pas eue. De temps en temps, elle lui donne des croissants invendus de la veille en lui disant :



Il n’a pas de micro-ondes, mais il s’en fiche. Un croissant, même un peu rassis, reste un luxe. Et puis fendu en deux avec une tranche de jambon, un peu de béchamel et du gruyère, c’est carrément repas de fête ! Ça change des tomates aux œufs. Comme elle distribue également le journal, il ose lui demander ce qu’elle fait des invendus. En fait, elle ne renvoie à la centrale que le bandeau et le reste part aux déchets. Elle lui garde donc chaque jour le journal de la veille, sans le titre. Il peut ainsi, avec un jour de retard, suivre l’affaire Granradin qui, il est vrai, prend une certaine ampleur. Jusque-là, cinq femmes ont porté plainte contre lui : la jeune stagiaire, une autre secrétaire de la chambre des métiers, celle de l’atelier et deux du Conseil Départemental dont une élue. Ça commence à faire beaucoup. Sa parole contre cinq, la partie est loin d’être gagnée. Jérôme est partagé entre un sentiment de vengeance qui lui fait plutôt plaisir, et la pensée pour tous ces employés qui risquent d’y perdre leur boulot. Mais tout cela, il n’y peut plus rien. Au moins se sent-il propre, pauvre mais propre.


Il reçoit un dernier SMS de Bretagne :


Je rentre demain. Je passe par Roissy à 17 h, son père emmène Pascal à Malaga. Tu seras là à n’importe quelle heure ? Avec le chassé-croisé je ne peux rien prévoir…


Bien sûr qu’il sera là, à l’attendre fébrilement. Rien à faire cuire, il fait trop chaud, donc salade de tomates aux œufs durs, avec beaucoup de ciboulette et de basilic. Et même des petits croûtons de pain dur grillé pour donner du croquant. Le petit diesel de la Clio broute dans la pente vers minuit. Sandra titube presque en descendant.



Elle se mouille avec satisfaction, il la savonne, elle lui offre son dos, il la masse. Le trapèze d’abord, puis tous les points durs de chaque côté de sa colonne vertébrale.



Il croise ses doigts et applique les malléoles de ses mains sur les endroits douloureux du dos en remontant lentement. Par deux fois, les vertèbres craquent. Puis il se cambre et la décolle de terre en l’étirant, à nouveau gros craquement.



Elle ramène un carton de diverses denrées de la ferme, deux artichauts, deux choux-fleurs, des bocaux de pâtés, rillettes et autres cochonnailles, une grosse boîte de galettes bretonnes et une bouteille de whisky breton.



Elle se laisse faire avec délice, elle ajoute son médius sur le clitoris et a un premier orgasme.



Elle s’endort comme une masse. Jérôme reste sur la béquille, s’extirpe délicatement de sous elle et la recouvre d’un drap léger. Il s’endort également, perdu dans ces parfums de femme, le sexe palpitant.


Ce doit être elle qui se réveille la première, puisque c’est en sentant l’air frais sur son torse que Jérôme se réveille. Sandra rampe à reculons sur le lit et s’arrête à hauteur de son pénis.



Sa langue parcourt lentement l’engin de la base au prépuce qu’une main agile décalotte tandis que l’autre se saisit des testicules. Le gland disparaît dans la jolie bouche gourmande, et le regard vert profond mesure l’effet produit sur le visage de son amant. Peut-il rêver meilleur réveil ? Elle s’active lentement, méticuleusement tandis qu’il se hisse sur ses coudes. Un rai de soleil chatoie dans la chevelure blonde et dessine une ligne éblouissante le long du dos, d’une fesse et d’une cuisse. Instant d’immortalité paradisiaque. Quand elle juge prêt l’objet de son désir, elle hisse son bassin jusqu’à lui, retenant le drap sur ses épaules. Prêtresse romaine ou païenne, la vulve glabre à la fente dévoilée s’écarte lentement pour l’intromission. Puis elle s’empale jusqu’au dernier millimètre. Elle dandine du popotin, se caressant le fond du vagin avec le bout du gland, avant d’entamer une lente et progressive chorégraphie. Lorsqu’elle se soulève, son bassin bascule en avant puis se renverse à son apogée pour redescendre basculé vers l’arrière. Un mouvement alterno-rotatif digne de Monsieur Timonier, l’inventeur entre autres de la machine à coudre. Il veut s’emparer de ses seins, elle le lui interdit en lui plaquant les poignets sur le lit. C’est elle qui, en arquant le dos, vient lui sucer et lui mordiller douloureusement les tétons. Une rageuse envie d’éjaculer en elle le saisit, il donne des coups de bassin, mais elle pèse de tout son poids sur les bras écartés et accélère ses allers-retours. Elle lit dans ses yeux la montée du plaisir, alors elle saute à terre, le laissant éberlué et frustré.



Elle remplit le filtre et met de l’eau à chauffer.



C’est ainsi qu’il lui tourne le dos, essayant désespérément de débloquer ses vannes tandis qu’elle se frotte l’émail.



Elle se met à lui caresser les fesses, puis les hanches, puis elle se colle à lui et lui prend le pénis à deux mains.



Elle prend son café, assise sur ses genoux, il en profite pour lui caresser éhontément les seins, le cul et le sexe, mais aussi pour se gaver de ses formes retrouvées.



Soudain, le téléphone portable de Jérôme vrombit sur le buffet.




Le mois d’août est remarquable, malgré la chaleur et les orages de la mi-mois, et ceci à maints égards. Sandra a élu domicile chez son amant, passant chez elle le soir ou le matin pour changer de vêtements et relever son courrier. La vie à deux est riche en discussions comme en amour. Ils sont heureux comme jamais. Un beau jour, alors qu’il est au jardin pour l’entretien et la cueillette quotidienne, son portable sonne.



Il court comme un fou, ce doit être important sinon elle ne l’aurait pas dérangé à l’improviste. En moins de vingt minutes, il se présente à l’accueil, maîtrisant son souffle court.



Sandra fait une drôle de tête. Elle n’avait jamais vu son Jérôme « en activité », défendre son bout de gras avec aplomb, précision, à la fois ferme et détendu. « Un sacré commercial », se dit-elle. La discussion dure de longues dizaines de minutes, Jérôme se défend pied à pied.



– un salaire mensuel de deux mille cinq cents euros net ;


– l’indexation du salaire sur le chiffre d’affaires, le point zéro étant le CA actuel ;


– un véhicule de fonction loué ;


– une carte de carburant dans une station locale ;


– un ordinateur portable ;


– un téléphone mobile et son abonnement illimité ;


– le remboursement des repas pris à l’extérieur sur présentation des tickets ;


– l’autorisation de poursuivre en free-lance mes activités de correcteur en tant que vacataire.

Vous écrivez tout cela noir sur blanc dans le contrat et je signe. À dater du premier septembre.


On se serre vigoureusement les pinces, tout le monde semble content. Jérôme se confond en remerciements à la directrice de l’agence, devant tous ses collègues, alors qu’elle les raccompagne. Elle en est rouge de plaisir, de confusion ou d’agacement, il le saura ce soir.


En arrivant, elle lui saute au cou. Il s’excuse :




Septembre s’ouvre sur de nouvelles contraintes. Sandra repart vivre chez elle avec son fils et Jérôme entame son travail. Ils ne se verront plus que tous les quinze jours, un peu plus à Toussaint. Au volant de la petite Twingo qu’on lui a louée, il parcourt le département avec les informations obtenues à la Chambre d’Agriculture. Les producteurs bios sont kyrielle, mais en majorité des bobos de l’Île-de-France recyclés avec quelques chèvres ou quelques ares de friches qu’ils appellent pompeusement « permaculture ». Les vrais, les sérieux, ceux capables de fournir plus d’une botte de poireaux par semaine se comptent vite sur les doigts des deux mains. Une dizaine en plus de la vingtaine déjà inscrits et l’on est aux limites des capacités actuelles du département en maraîchage bio. Les nouveaux inscrits voient en Jérôme une aubaine, résoudre leur problème de commercialisation. Les anciens inscrits sont contents de voir enfin quelqu’un de « Bio&Vous », entité jusque-là sans visage. Avec un article gratuit dans le journal local et un autre dans les bulletins communaux, il n’est pas très compliqué de compter une centaine de clients supplémentaires. À vingt euros le prix du panier moyen hebdomadaire, cela représente une augmentation de cent mille euros de chiffre d’affaires annuel. Jérôme se frotte déjà les mains en pensant à son augmentation de salaire, mais n’en reste pas là. Il fait aussi quelques « gros coups » : trois cantines d’écoles et lycées et deux maisons de retraite qui décident, grâce à la souplesse du système proposé, d’offrir un repas bio par semaine à leurs pensionnaires. Le problème de ces gros clients, c’est qu’ils souhaitent le « clé en mains », c’est à dire pas uniquement les légumes et les fruits, mais aussi la viande et le pain. Excellente façon de se diversifier et d’augmenter le catalogue. Ce sera l’un des principaux objectifs pour la nouvelle année. Mais il négocie d’abord auprès de ses employeurs un budget publicitaire, aussi modeste soit-il, qu’il pourrait utiliser à l’envi. On lui accorde royalement cinq mille euros, une misère, au vu de son rapport d’activité et des projections qu’il présente. Après quatre mois d’activité intense, il demande également cinq jours de congés autour du premier janvier, histoire de passer un peu de temps avec Sandra.


Beaux moments romantiques autour du feu dans la grande cheminée. Le récupérateur de chaleur chauffe l’eau qui alimente les radiateurs de l’entrée, de la salle d’eau et de la chambre. Mais le bois utilisé, Jérôme l’a fait livrer, il n’a plus le temps d’aller le glaner en forêt. Désormais, il s’offre une pièce de viande rouge et deux morceaux de poisson par semaine, et il achète chaque jour une baguette fraîche et le journal du jour. Son salaire lui permet également d’inviter Sandra au restaurant, même si c’est elle qui assure le transport. Ils vont chez un jeune chef rencontré dans un patelin perdu, qui a un talent fou et s’approvisionne quotidiennement en bio. Au cours du dîner, Jérôme sort de sa veste un long étui qu’il offre à Sandra en guise d’étrennes. Elle l’ouvre fébrilement et éclate de rire. Devant la mine décontenancée de Jérôme, elle plonge dans son sac et lui tend un petit paquet cubique qu’il ouvre également. Ils ont eu la même idée, s’offrant mutuellement une belle montre, « pour que tu penses à moi à chaque fois que tu la regardes » disent-ils ensemble. Cet unisson de mots et de pensées les met en joie, leur belle entente n’est pas feinte et probablement pas uniquement sexuelle.


L’année commence avec l’annonce du prochain procès de Granradin, prévu au mois de mai. Jérôme est appelé par le notaire pour signer l’acte de donation de sa maison. La bonne nouvelle tourne à la catastrophe, car ses gentils parents, ignorants de sa situation précaire, lui laissent les frais à régler. Heureusement, la valeur de la bâtisse ayant été estimée à vil prix avant travaux, le montant des frais dilapide ses récentes économies mais il peut y faire face. Il est désormais véritablement chez lui, avec ce que cela comporte comme obligations et impôts.


Il court les radios locales pour obtenir des interviews, il fait passer un article publicitaire dans la gazette locale et, grâce à la petite boulangère, fait imprimer quelques milliers d’emballages pour le pain qu’il distribue lui-même dans toutes les boulangeries de la région. C’est le moyen pour lui de détecter les boulangers et meuniers bios et d’en recruter quelques-uns pour « Bio&Vous ». Le nombre d’inscriptions monte régulièrement, le bouche-à-oreille fait son effet. Au siège, on se frotte les mains quand les cinq cent mille euros sont dépassés, un peu avant l’été. Après avoir recruté des producteurs de viande bio, Jérôme s’attaque à tous les responsables de restaurations collectives, depuis les cantines des petits patelins jusqu’aux restaurants d’entreprises, en passant par les restaurateurs. Il obtient une rallonge de budget pour diffuser des publicités récurrentes sur les réseaux sociaux, ses patrons s’en chargent eux-mêmes.


Le procès Granradin est reporté pour vice de forme, le bougre a les meilleurs avocats. Il aura donc lieu en octobre. Parallèlement, l’entreprise Granradin est épinglée par un contrôle fiscal doublé, au vu des documents comptables, par un contrôle de la DGCCRF (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes). Bingo ! La seule issue sera certainement une liquidation judiciaire de l’entreprise, à moins qu’elle ne soit rachetée. Jérôme est fortement contrit en pensant à tous ces employés sympathiques et compétents qui vont pâtir, comme lui, des agissements de Granradin et consort.


Le mois d’août en France est reconnu pour être un mois « creux » pour le commerce, c’est donc au mois d’août que la start-up donne à Jérôme le solde de ses congés. Il aurait préféré juillet, comme Sandra, il lui demande donc si, de son côté, elle peut changer ses dates.



C’est ainsi qu’ils s’offrent un week-end à Deauville dans un presque palace de quatre étoiles. Certes, il y a pas mal de monde, normal un quinze août. Cependant, ils sont loin de chez eux, parfaitement inconnus, et Sandra devrait être détendue. Au lieu de cela, Jérôme ne la sent pas comme à l’habitude. Elle, si prompte à s’émerveiller de tout semble insensible au charme du lieu, à la beauté de la chambre, à la qualité de la restauration. C’est au cours d’une promenade dans les dunes, à l’écart des planches bondées, qu’elle crève l’abcès :



Elle s’arrête net de marcher, empoigne la lisse de bois des deux mains, de grosses larmes roulent sur ses joues et elle frappe du pied.



Elle se jette dans ses bras et là, ils croient entendre dans le vent : « chabadabada-chabadabada ».



Pour pleuvoir, il pleut ! Un vrai orage de quinze août avec de splendides éclairs sur la mer. Ils font l’amour une bonne partie de la nuit, éclairés comme par le stroboscope d’une boîte de nuit. Peu importent les freins et réticences qu’a soulevés Jérôme, il l’aime aussi et c’est ça l’essentiel pour Sandra. Elle passe la dernière journée normande collée à lui, pendue à son bras, arrêtant fréquemment leurs promenades pour un petit bécot, même rapide. Son bonheur semble sans limites. Au retour, sa bonne humeur perdure, malgré le boulot. Elle rentre le soir et son premier travail est de se mettre nue, profitant de la fraîcheur exceptionnelle de la vieille maison.



Ils jouent comme des enfants insouciants, mordant le présent à belles dents et oubliant pour quelques instants l’avenir. L’avenir les rattrape très vite avec la rentrée. Pascal la fait au lycée, un évènement dans sa jeune vie et quelques complications pour sa mère. Jérôme demande un entretien avec ses employeurs et leur expose la réalité de la situation : ça marche bien, soit, mais inutile de rêver à la poursuite d’une croissance exponentielle, le secteur est ratissé et le seul challenge est désormais de maintenir le nombre de clients, voire de faire progresser la valeur du panier moyen, par la vente de produits appertisés par exemple, des conserves en bocaux.



Ah oui, désolé je ne saisis pas tout en arithmétique. Je préfère le binaire… Ça me va également.


Jérôme mène sa tâche avec persévérance jusqu’au bout, enrichissant le catalogue de nombreuses conserves, parfois très originales, comme des escargots ou des confits et foies gras locaux. Ils font « un carton » pour les fêtes. Il loue des locaux pour les futures formations et commence à préparer le programme et la documentation. De leur côté, ses deux associés se lancent dans le recrutement des futurs responsables départementaux. Au quinze janvier, la première semaine de formation est lancée, et Jérôme est désormais de nouveau sans emploi, mais tranquille. À l’automne, il a enfin changé sa voiture, mettant sa vieille fourgonnette diesel à la casse pour la remplacer par une petite hybride, profitant de plein de promotions et aides diverses. Elle est presque aussi pratique, avec son arrière transformable, mais tellement plus confortable, silencieuse et économe en carburant. Et puis il peut enfin transporter sa belle sans honte pour son tacot. Pour l’instant, la belle hybride couche dehors, parce que le garage est rempli de plaques de laine de bois et tout le nécessaire pour aménager le grenier. Il se fera ça au printemps, entre les sessions de formation.