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n° 21368Fiche technique36761 caractères36761
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Temps de lecture estimé : 21 mn
23/12/22
Présentation:  Toute ressemblance avec une femme qui a (mal)heureusement existé serait purement fortuite
Résumé:  La seule fois où j’ai contracté une maladie vénérienne, c’est avec la femme que j’aimais le plus au monde.
Critères:  fh bizarre amour cérébral -amouroman
Auteur : Arpenteur      Envoi mini-message
Des conséquences d'une chaude pisse

Durant une longue période de ma vie, j’ai été un aficionado des sites de rencontres. Par choix, parce que j’en avais ras le bol de vivre avec quelqu’un à temps complet, que je tenais à ma liberté et que je cherchais des relations faciles. J’ai accumulé les conquêtes, sans toutefois mériter une place au Guinness Book des records ; une trentaine de personnes tout au plus que je voyais en général de nombreuses fois chacune, car les plans Q d’un soir cela n’a jamais été mon truc. Pour la majorité, il s’agissait de femmes mais également quelques hommes, une trans aussi ; je ne me prétends pas bisexuel au sens LGBT du terme, je préfère en général les filles aux garçons, mais je suis un pervers polymorphe ouvert à toutes les expériences, et surtout à celles qui sont un peu bizarres.


S’il faut ici me confesser, je dois avouer que je n’ai jamais été un fervent utilisateur du préservatif. Il n’y a pas de quoi s’en vanter, mais je ne m’en vante pas ! Quand mon ou ma partenaire le réclamait, j’avais toujours ce qu’il fallait sous la main, je ne me baladais pas sans. Mais quand il ou elle n’en avait visiblement rien à foutre ou que ce n’était carrément pas dans ses problématiques du moment, franchement je n’insistais pas. J’ai probablement pris et fais prendre pas mal de risques aux autres par mon laisser-aller, mais par chance je n’ai jamais rien eu et de ce fait n’ai jamais rien transmis.


À la suite de ces incartades, je regrettais systématiquement mon inconséquence, en particulier quand je trouvais une nouvelle conquête, je n’aurais voulu pour rien au monde la contaminer. Dès lors, j’étais tous les trois/quatre matins fourré chez mon toubib à lui demander des tests sanguins. Les laboratoires pharmaceutiques se sont enrichis et la sécu a creusé son déficit rien qu’à cause de moi car, pour noyer le poisson, j’avais aussi plusieurs médecins généralistes qui me faisaient chacun leurs prescriptions. Lors d’un précédent déménagement, j’ai été effaré de retrouver parmi mes papiers autant d’ordonnances prescrivant des tests VIH, contre la syphilis ou l’Hépatite B.




Je touche du bois, mais la seule fois où j’ai contracté une MST, c’était avec Anick, et c’était bien avant la période que je viens d’évoquer, j’étais encore étudiant. Et il s’agissait d’une blennorragie, plus vulgairement appelée « chaude pisse ». Comble du comble, je n’avais même pas réussi à pénétrer ma compagne. Ma bite molle avait frotté contre sa chatte et cela avait manifestement suffi à propager la maladie. Le dermato, qui était un sacré connard, sûrement un vieux con d’extrême droite, a lourdement insisté pour que je dénonce ma partenaire, je l’ai envoyé chier. Qu’il crève ce bâtard, je ne suis pas une balance !

Quoiqu’il en soit, cette simple anecdote m’a traumatisé. Si ce n’est ce regrettable incident, Anick aurait sans doute pu devenir l’amour de vie, d’ailleurs elle l’est toujours un peu.




Cette fille-là n’était pas comme les autres. Un look particulier, à l’écart de toutes les modes, et c’était une vraie foldingue, je l’idolâtrais tellement elle était barrée. Elle vivait en coloc avec une autre nana, Madie, une rouquine aux cheveux filasse, adepte de peinture sur soie et de macramé, une vraie conne bouffeuse de « bio » qui la maternait, elles étaient amies d’enfance. J’avais rencontré les deux donzelles à une manif débile, je ne sais même plus quel en était le propos, ni pourquoi j’y traînais mes guêtres, si ce n'est mon désœuvrement, mais nous y avions sympathisé. Et je les avais retrouvées quelques jours plus tard dans un troquet qui organisait des petits concerts de jazz. J’avais tout de suite tilté sur la grande brune, sa peau blafarde était d’une blancheur époustouflante. Le terme « maladive » était sans doute ce qui la caractérisait le mieux ; sans rien changer, sans aucun accessoire, elle aurait pu être naturellement gothique, peut-être même vampire. Empruntée dans ses gestes, délirante dans ses propos, elle avait tout pour plaire et vivait dans un univers qui lui était bien propre.


Toujours est-il qu’au grand désespoir de son amie, avec qui je n’étais pas en odeur de sainteté, nous passions le plus clair de nos soirées ensemble, pour discuter, pour délirer, fumer des joints, flirter un peu. Il était clair qu’elle m’avait à la bonne et que, moi aussi, je l’adorais. Nous passions aussi beaucoup de temps à nous balader en forêt ou au bord de la mer, ambiance romantique. Mais nos longs baisers et nos attouchements restaient toujours très chastes, toujours au-dessus de la ceinture, un amour en somme idéalisé. Car nous étions fort timorés, moi surtout, vu mon manque d’expérience à l’époque. Mais elle restait également volontairement réservée, parce qu’elle voulait préserver les doux moments de tendre complicité qui nous unissaient, c’était pour elle vital. Nous dormions pourtant ensemble, blottis l’un contre l’autre, moi en caleçon et elle en petite culotte, et je bandais souvent contre ses fesses, mais il était hors de question de faire frotti-frotta.


Cette situation dura longtemps, trop longtemps sans doute. C’était cet amour plus ou moins platonique qui nous unissait, mais nous ne prononcions jamais le mot « Je t’aime », de peur de rompre le charme. Juste de la douceur, de la tendresse et des baisers, jamais un geste plus déplacé. Je m’occupais néanmoins de ses seins qui étaient plutôt généreux et d’une blancheur étourdissante, c’était le seul écart que nous nous accordions.




Elle avait toujours des trucs « chelou » à me raconter et très souvent ses élucubrations tournaient autour du sexe.

Quelques exemples…

Avec son amie, elles faisaient partie d’une petite troupe de théâtre et le metteur en scène lui aurait proposé de jouer le rôle d’une prostituée, elle me demanda ce que moi j’en pensais et si ça me gênerait si elle était amenée à exhiber sa poitrine en public ou à enfiler des bas et des porte-jarretelles.

Une autre fois, elle avait, soi-disant, rencontré un type louche dans un troquet près de la gare. En échange de rails de coke, il lui aurait demandé de faire la pute pour lui et de sucer des clients sur le grand boulevard. Le pire c’est que je l’en croyais capable. Il était de notoriété publique que ce bistrot était un bar à putes, et beaucoup d’entre elles officiaient sur cette artère. Anick, de son côté, était à certains moments tellement imprévisible… comme la fois où des copains étaient venus chez moi et où elle s’était baladée sans gêne en petite culotte devant eux durant un bon moment, j’étais vert et mes potes avaient été interloqués. Ils m’avaient reparlé durant de longs mois de ses nichons négligemment exhibés et des poils noirs qui s’échappaient de sa culotte. C’est vrai qu’autant que je pouvais en juger, elle était plutôt poilue, de longs poils noirs de la même couleur que sa chevelure noir de jais.

Et cette fois aussi où elle m’avait parlé de son parrain qui selon ses dires, depuis son plus jeune âge, n’arrêtait pas de la coincer dans des recoins pour la peloter et pour lui faire faire des choses que la morale réprouve. En plus, elle me racontait tout ça dans le menu détail et j’en étais vaguement écœuré.


Quel crédit fallait-il accorder à ces divagations ? Quelle était la part de délire et de réalité ? Ses égarements tournaient toujours plus ou moins autour du sexe et autour de situations violentes ou scabreuses. Elle pouvait broder sur ces sujets durant des heures, elle m’avait par exemple décrit avec moult détails toutes les prostituées qui avaient, paraît-il, travaillé à ses côtés : ce qu’elles avaient dit, ce qu’elles avaient fait, comment elles étaient habillées, comment elles aguichaient les passants ! On y avait passé une grande partie de la nuit. Pour en savoir autant, elle devait les avoir au minimum côtoyées ou en tout cas bien observées. Et le lendemain, on était passé aux prétendus clients qu’elle avait eus, puis à son metteur en scène, un vieux barbu vicieux qui n’était apparemment pas très clair. Il lui faisait, lui aussi, des propositions malhonnêtes.

Le pire c’est que j’écoutais tout ça religieusement, participant même à son délire en lui posant moult questions pour l’encourager dans les détails. Je ne savais pas trop si cela m’effrayait ou si cela m’excitait, probablement un peu des deux. Je me posais plus de questions que j’avais de réponses. Pourtant, au-delà des méandres de sa pensée torturée, je l’aimais d’un amour sincère et véritable.




Sa colocataire ne pouvait visiblement pas me blairer. Mais un jour, la situation devenant à son sens incontrôlable, elle prit sur elle et me gratifia d’une petite visite. Fait exceptionnel, Anick était chez ses vieux pour le week-end. La rouquine avait prévu de rester dix minutes, mais notre conversation s’éternisa durant plus de deux heures. Elle me parla de tous les délires sexuels dont son amie l’abreuvait, qui étaient similaires à ceux dont j’étais la cible, avec néanmoins de nombreuses nuances.



Et moi de lui parler, sans trop entrer dans les détails, de tous les trucs de malade dont Anick m’abreuvait depuis des semaines, quasiment au quotidien.

Madie réagit à mes propos :



Je n’avais pas trop envie de raconter ma vie, je n’appréciais pas du tout cette fille, mais, devant la gravité de la situation, je me suis senti obligé d’avouer que nous ne l’avions encore jamais fait, mis à part quelques baisers et quelques attouchements relativement chastes.



À son retour, Anick avait bien entendu de nouveaux délires à raconter. Comme à son habitude, un véritable moulin à paroles. Je lui ai préparé un pétard car j’avais remarqué qu’elle était quand même nettement plus cool quand elle fumait un joint. Moi aussi, j’en avais vraiment ma claque de l’entendre dire que des hommes l’avaient encore souillée, alors que de notre côté, tous les deux nous ne faisions jamais rien de vraiment concret.

Je lui ai caressé doucement la poitrine, prenant bien soin de m’appliquer pour bien faire durcir ses tétons, les tétant un peu avant de les mordiller. J’étais persuadé qu’un tel traitement ne pouvait pas la laisser indifférente et qu’il attiserait son envie. D’ailleurs, elle gémissait maintenant à chaque effleurement. Et puis j’ai eu le malheur de descendre sur son ventre et de dire :



Immédiatement, elle s’est refermée comme une huître :



On aurait dit la vierge Marie ! Immaculée sans conception. Le seul avantage que j’y vis c’est que cela fit cesser immédiatement ses élucubrations. Mais cela ne fit pas plus avancer le Schmilblick.

Le reste de la soirée fut à la fois très sage et très agréable, elle me parla du roman qu’elle était en train de lire, des sculptures qu’elle était allée voir au musée, de William Faulkner, de Philip Roth, de Jim Morrison. Elle se lova dans mes bras sur le canapé et nous finîmes par nous endormir ainsi, sans que j’aie à me fader la ribambelle de mecs qui n’arrêtaient pas de la considérer comme une fille de mauvaise vie…


La fois suivante, quand elle proclama qu’elle avait encore fait la pute sur le boulevard, pour lui clouer le bec, je lui avouai que j’aimerais, justement, qu’elle soit ma petite pute à moi, qu’elle se mette en porte-jarretelles et qu’elle me suce la bite.

Qu’est-ce que j’avais dit là ! « Vade Retro Satanas », j’eus immédiatement droit à un exorcisme en bonne et due forme. Surtout quand je me risquai, un peu plus tard, à exhiber ma queue qui était fort à l’étroit dans mon caleçon en la gratifiant d'un « Regarde dans quel état tu me mets ! ». Qu’est-ce que j’avais pas fait là ! Certes, c’était sûrement malhabile de ma part, mais il n’y avait pas mort d’homme.

Elle prit à peine le temps de se rhabiller et partit en claquant la porte, manifestement furax.

Le lendemain matin, je trouvai cette missive dans ma boîte aux lettres :


« Fred,

Tu m’as profondément déçue.

Moi qui croyais en toi, je suis maintenant détruite et pleine de larmes.

Tu es comme tous ces hommes qui cherchent à abuser de moi.

Vraiment, tu me dégoûtes, avec ton sexe dégoûtant et tes envies dégoûtantes. Tu m’as salie, tu me débectes.

Je suis désespérée, maintenant que je sais que l’homme que j’aimais profondément me considère comme une moins que rien, tout juste bonne à être souillée par son sperme infect.

Mon cœur est brisé et je préfère en finir.

Je ne te dis pas adieu, je te dis au diable »


J’avoue que cela m’a quelque peu perturbé, je n’avais pourtant pas fait grand-chose, mis à part ces quelques mots et sortir mon sexe de mon caleçon. J’ai traversé la ville en courant à perdre haleine et j’ai frappé comme un dingue à sa porte. Sa copine est venue m’ouvrir avec un air sévère et a répondu à ma visite de façon agressive et mal aimable.



Je m’inscrivis en faux. Mais j’eus beau plaider en ma faveur et jurer le contraire, lui assurer que je n’avais pas fait grand-chose, que le reste c’était encore de ses délires, elle ne voulut rien savoir. Elle me claqua la porte au nez et j’eus beau tambouriner, elle ne revint plus m’ouvrir.




Plus aucune nouvelle d’Anick, elle me manquait beaucoup. Mais d’un autre côté, cette fille-là était bien trop compliquée, et j’avais désormais l’assurance que nous ne pourrions jamais être un couple normal !

J’en avais presque fait mon deuil, je pensais toujours à elle, mais profitais de son absence pour travailler un peu plus, car j’en avais bien besoin pour sauver mon année.


Et puis, presque un mois plus tard, je la vis revenir en catimini. Elle sonna à ma porte, toute timide, toute belle aussi, et fit amende honorable : « Je suis désolée d’avoir dit des saloperies sur toi… ». C’est tout ce que j’en retins. Rien que le fait qu’elle soit là, elle était déjà pardonnée.



Je n’en crus pas mes oreilles.



Madie, sa coloc, celle qui m’avait jeté comme un malpropre. Son vrai prénom, je ne le connaissais pas, mais c’est ainsi que nous l’appelions tout le temps.



Elle en disait des choses cette connasse de Madie ! Après m’avoir bien sabré…

C’est ainsi que j’ai pu avoir enfin accès au sexe de ma promise qui était recouvert d’une belle toison brune, c’est ainsi que j’ai pu la lécher et déguster sa liqueur épicée, c’est ainsi que je l’ai entendue jouir, c’est ainsi que plus tard j’ai essayé de la pénétrer… mais je n’ai pas du tout brillé sur ce coup-là et ai dû me contenter de frotter tristement mon gland sur sa vulve chaude. Le stress de la première fois et de ces attouchements décidés par Madie, qui semblaient tellement artificiels et qui faisaient que je n’étais pas spécialement excité.


Et quelques jours plus tard, j’avais une gonorrhée, mal à la gorge, mal à la bite, surtout quand je pissais.

Panique à bord, devoir montrer ma petite queue à un vieux moustachu qui m’incendiait de sa morale, la honte en somme.


Et quand j’ai voulu prévenir Anick de ce qui m’arrivait, elle n’a rien voulu savoir. Selon elle, c’était à cause de ma perversité, parce que j’avais essayé de glisser un doigt dans son anus, chose que je ne m’étais pourtant pas risqué à faire. Elle ne voulait plus me voir, m’accusait de l’avoir trompée avec une autre pouffiasse. En plus, elle me reprocha d’être incapable de bander et affirma devant sa copine que je l’avais traitée comme une vraie prostituée. Elle était vraiment déçue par mon attitude et par mes performances.

Je suggérai quand même à son amie qu’elle devrait l’emmener voir un dermato, mais celle-ci prit sa défense au lieu d’abonder dans mon sens. Tout juste si elle ne m’accusa pas, elle aussi, d’avoir forniqué avec d’autres femmes et d’être l’unique cause de la contamination de la belle Anick. Tout était forcément ma faute et l’autre foldingue était par définition blanche comme neige. Ces deux harpies m’incendièrent jusque dans la rue. Écœuré, dépité, je rentrai chez moi la queue entre les jambes.

La période des exams approchait, je ne revis plus Anick.



o-o-o-o-o-o-o-o-o-o



Quelques années plus tard, je m’étais mis en ménage avec une ex-collègue qui, au propre comme au figuré, m’avait fait un enfant dans le dos. Autrement dit, j’étais papa sans vraiment l’avoir désiré. Nous vivions en Normandie mais étions allés en week-end quelque part en Bretagne et c’est en revenant, non pas de Nantes, mais plus vraisemblablement de Quimper ou de Lorient qu’en passant dans le centre-ville de Loudéac, une foldingue se jeta subitement sur le capot de notre voiture en nous regardant avec de grands yeux ronds.



Elle sortit comme une furie de la voiture et se mit à incendier la grande brune qui n’était autre qu’Anick. C’est vrai, comment l’avais-je oublié, sa famille était originaire de cette région.

J’entendis un « Casse-toi connasse », puis ma moitié reprit le volant et manqua même d’écraser l’importune qui continuait de me regarder avec ses yeux de merlan frit.



Les jours qui suivirent, j’ai parcouru l’annuaire de Loudéac et ai essayé d’appeler ses homonymes. Je suis tombé sur une dame charmante qui s’est avérée être une tante de la susdite :



Et, comme je lui demandais un peu plus de précisions sur la grande brune.





Je patientai encore quelques jours avant d’essayer de joindre le numéro que la tantine m’avait donné. Comment allait-elle le prendre ? J’attendis également que ma copine soit en soirée avec d’autres filles pour être tranquille et seul chez moi.

Anick me remit tout de suite, comme si elle attendait mon coup de fil depuis la nuit des temps, elle ne me demanda même pas comment j’avais eu son numéro. Elle semblait très excitée et attaqua d’emblée :



Fichtre, ça commençait fort. Elle semblait encore plus vulgaire et plus axée sur le sexe qu’avant. Mais je n’avais pas l’intention de lui dévoiler mes parties de jambes en l’air avec ma moitié, d’autant plus que celles-ci devenaient fort rares !



Moi j’habitais près de Caen, donc pas vraiment la porte à côté, mais je pouvais faire l’aller-retour dans la journée. N’empêche que les coups de fil devinrent bientôt quotidiens. Quand je ne décrochais pas, elle me laissait des messages sur mon répondeur et m’inondait de SMS toute la journée. Désormais, c’était matin, midi et soir qu’elle voulait me parler. Elle était secrétaire médicale, à croire qu’elle n’avait que ça à foutre.

Nous nous parlions d’amour, de sentiments et de désirs aussi. Mais les conversations dérivaient invariablement vers le sexe qui était toujours son sujet de prédilection. Elle tenait absolument à me décrire dans les moindres détails les relations amoureuses qu’elles avaient pu entretenir durant toutes ces années, la plupart particulièrement tordues. Comme ce petit vieux qui était son logeur et qui voulait toujours qu’elle vienne s’asseoir sur ses genoux et qu’elle l’appelle « papa », ou ces quatre chasseurs qui l’avaient entraînée dans un relais de chasse pour la prendre en tournante jusqu’à plus soif. Je la laissais égrainer ses délires, ça avait l’air de lui faire du bien de me raconter tout ça et je n’avais surtout plus aucune envie de trier le vrai du faux.




Selon ses dires, durant toute cette période, elle n’avait jamais cessé de penser à moi, elle me voyait comme un Messie, vierge et immaculé, un pur amour resplendissant au milieu de la dépravation qui l’entourait. De mon côté, j’avais très peu pensé à elle mais, mes relations avec ma compagne étant ce qu’elles étaient, et les souvenirs de ce lointain passé revenant en surface, je décidai de faire le voyage en terre mancelle.


On se synchronisa pour une RTT et je me retrouvai bientôt chez elle, dans ses bras, au milieu d’un foutoir indescriptible. Elle se laissait aller.

Au niveau sentimental et émotionnel, nous étions toujours 100 % en phase, comme si elle était faite pour moi et moi pour elle. Nous passâmes la journée à nous caresser, à nous bécoter, à nous dorloter mais sans pour autant aborder des choses plus sexuelles.

La fois suivante, elle voulut quand même que je la lèche mais je m’y refusai, sûrement le souvenir de cette « chaude pisse » qui m’avait enflammé la bouche et qui faisait aussi que je ne bandais plus avec elle. Je m’opposai même à ce qu’elle me suce, on ne sait jamais, des fois qu’elle aurait contaminé ma queue avec sa bouche ! Nous nous sommes contentés de nous branler mutuellement, ce qui n’était déjà pas si mal.


Mais elle commençait à s’impatienter, je ne venais pas la voir assez souvent à son goût. Et puis elle s’inquiétait de ce que je pouvais faire avec mon épouse, quand est-ce que je la touchais, qu’est-ce que je lui faisais et qu’est-ce qu’elle me faisait de son côté ? Plus grand-chose, à vrai dire, car notre couple battait de l’aile depuis un certain temps déjà. Mais le peu qui se passait, il aurait fallu que je lui raconte tout dans le menu détail.

Alors elle m’inondait de messages de toutes sortes. J’avais beau mettre le téléphone en sourdine et ôter le mode vibreur, ma moitié s’aperçut rapidement que des missives arrivaient à toute heure du jour et de la nuit. Il y eut des scènes, des menaces, des éclats de voix et finalement, très logiquement, une rupture. Elle m’expulsa de la maison et demanda le divorce avec en prime une jolie pension.


Cela ne calma pas pour autant les ardeurs de l’autre foldingue car, selon elle, maintenant que je vivais tout seul, je pouvais voir autant de femmes que je le désirais et devais par conséquent la tromper avec toutes ces salopes. « Et pourquoi tu ne viens pas me voir tous les week-ends ? Tu préfères en voir d’autres, c’est ça ? » Classique, me direz-vous, mais sa façon de faire ne l’était pas, car elle était particulièrement hargneuse.

Pour essayer de la calmer, je trouvai enfin une solution. Je venais de me dégoter un nouveau travail sur Rennes et lui proposai d’emménager avec moi. Il y avait justement un cabinet médical, à quelques centaines de mètres de mes bureaux, qui cherchait justement quelqu’un. Elle passa les entretiens et fut prise.




La période qui suivit fut particulièrement faste et idyllique. Nous vivions ensemble, nous étions heureux, amoureux, merveilleusement bien en couple. Au niveau sexe, ce n’était toujours pas ça. Certes, j’avais réussi à la pénétrer une petite dizaine de fois, mais la plupart du temps cela fonctionnait nettement moins bien et souvent pas du tout, je n’étais pas un bon coup ! Et il suffisait qu’elle reparte dans ses divagations sexuelles pour que ça me coupe toute envie.

Malheureusement, ses égarements se firent de plus en plus fréquents. En étais-je la cause ? Était-ce parce que je n’arrivais pas à la satisfaire ? Plus elle délirait et moins j’étais performant, et moins j’étais performant et plus elle délirait, l’effet boule de neige. Entre les médecins du cabinet qui l’exhibaient soi-disant devant des patients, le garagiste qui l’avaient fourrée sur un capot de voiture et les voisins qui la sodomisaient dans la cave… il y avait toujours de quoi dire et surtout de quoi penser. L’image de cette putain de « chaude pisse » me revenait sans cesse en tête.


Anick me faisait aussi la vie pour mon gamin, ne voulait pas que je le reçoive à la maison, ne voulait pas non plus que j’aille le voir à Caen. « Je te préviens, si tu vas voir ta salope là-bas, moi je me donne aux premiers venus ! »


Certains aspects de ma vie devenaient vraiment insupportables. Mais je faisais contre mauvaise fortune bon cœur, je l’aimais et je lui pardonnais à peu près tout, j’aurais fait n’importe quoi pour elle. Malheureusement, elle n’allait pas bien, pas bien du tout, les délires sexuels avaient fait place aux délires tout court, des monstres, des visions, des fantômes qui envahissaient sa tête, ses propos devinrent de plus en plus incohérents. Son employeur avait été contraint de la mettre en repos forcé, un médecin lui prescrivit des neuroleptiques et elle restait prostrée des journées entières dans un coin de notre appart.

Et puis, un soir, elle n’était plus là, elle avait subitement disparu dans la nature après avoir saccagé une partie de l’appartement, un acte de pure démence. Quelqu’un de sa famille la retrouva finalement quelques jours plus tard, complètement hagarde, errant dans Loudéac. La seule solution : qu’elle soit à nouveau placée !




J’allais la voir, autant que faire se peut, dans sa maison de repos. Au début, elle semblait heureuse de me voir, mais au fil du temps elle devint de plus en plus taciturne, voire méchante. Un psychiatre, jugeant que mes venues ne lui faisaient pas de bien, me conseilla même d’espacer mes visites.

Les mois passèrent, son état ne s’améliorait pas. Et quand je venais, c’était elle qui ne voulait plus me voir…



o-o-o-o-o-o-o-o-o-o



Je vivais seul mais n’avais nulle envie de remplacer ma chérie par quelqu’un d’autre. Mais elle était partie si loin dans les limbes de son esprit torturé, et j’avais si peu d’espoir de la revoir…

C’est à cette époque que je suis devenu un aficionado des sites de rencontres, ainsi que je l’évoquais au début de cette confession. J’avais besoin de me rassurer, de me prouver que je n’étais pas si nul que ça en matière sexuelle. J’avoue que mes premières conquêtes apaisèrent mes craintes sur ce plan-là. Je n’aimais pas ces femmes, en tout cas pas vraiment, et de toute façon beaucoup moins qu’Anick, pourtant je prenais du plaisir avec elles et leur en donnais tout autant. Je voulais tellement bien faire que certaines d’entre elles me trouvèrent même « exceptionnel » et s’accrochèrent à moi.

Qu’avais-je loupé avec Anick ? Était-ce à cause de cette chaude pisse ? De ses délires sexuels ? De ses menaces à peine voilées ? Ou simplement parce que je l’aimais trop, et qu’amour et sexe sont très souvent incompatibles ?




Quelques années après son internement, j’étais gare Montparnasse avec des collègues, de retour de déplacement chez un client. Nous buvions un verre en terrasse en attendant notre train. Qui je vois passer à quelques mètres de nous ? Je l’aurais reconnue entre mille. Je me suis levé d’un bond et lui ai emboîté le pas. Mes amis en sont restés comme deux ronds de frite. Je l’ai rejointe en bas des escalators et l’ai agrippée par la manche. Elle s’est retournée, a laissé chuter sa valise et nous nous sommes embrassés comme si nous étions seuls au monde. Je l’ai serrée contre moi, les gens passaient autour de nous, instant magique !



Angoissante question. Elle travaillait désormais sur Chartres. Pourquoi Chartres ? Elle n’en savait trop rien. Elle me remercia pour ses affaires que j’avais ramenées chez sa mère. Depuis quand était-elle sortie ? Pourquoi ne pas m’avoir recontacté ? Tant de questions, tant de choses à dire, nous avons squatté un bistrot pour le restant de la journée et, bien sûr, raté nos trains respectifs.



Elle me regarda avec de grands yeux plein d’amour :



Et c’est bien ce qui se passa, une longue nuit de tendresse mais pas de sexe.




Nous ne vivons plus ensemble mais nous nous revoyons de temps en temps.

Et je dois dire que, même si aujourd’hui je vis avec une autre femme, il me semble que je l’aime toujours.