Résumé des épisodes précédents :
Etienne découvre la gastronomie italienne et, dans le même temps, une famille.
Etienne
Les régions se succédèrent pendant trois semaines. Chaque soir, Etienne appelait Kiara pour lui faire un compte-rendu de sa journée et ce qui le questionnait, depuis la fin de la première semaine, c’est qu’elle terminait la conversation immanquablement par la question.
- — Tu n’as rien d’autre à me dire ?
Ce à quoi il répondait systématiquement.
- — Non, je crois que je n’ai rien oublié.
Une autre chose l’intriguait ; il avait surpris plusieurs fois Georges en pleine conversation téléphonique étouffée et celui-ci avait cessé de parler à son approche.
En fin de seconde semaine, le Maître leur fit la surprise de les rejoindre à Pérouse.
Il y avait une exposition des spécialités de l’Ombrie telles que huile d’olive de Spoleto, Tagliolini aux truffes noires de Norcia, la Porchetta, des Bruschettes tartinées au pâté d’olive et aux saucisses, Prosciutto de Norcia, Capocollo, Pancetta, Ventresca, Coppa, Mortadella, Anguilles aux câpres, accompagnés de lentilles de Castellucio, et en dessert, des figues farcies aux amandes, Pinocatta de Perugia, Pampepato, Torta di Orvieto, Attorta, Serpentone, et arross de blanc sec d’Orvieto, de Torginano Rosso Riversa et enfin le Montefalco Sagrantino.
Le Maître insista pour déjeuner avec Etienne.
- — Alors mon grand, comment ça se passe ?
- — Tout se passe bien dans l’ensemble Maître.
- — Hum, dans l’ensemble ?
- — Je voulais vous demander depuis combien de temps vous employez Georges, notre chauffeur ?
- — Mais je ne l’emploie pas. Il m’a été prêté par Edward Liveroy, pour remplacer un des miens qui s’est marié il y a peu. J’étais dans l’embarras quand le fils d’Edward, Grégoire, me l’a gentiment proposé. Y aurait-il un problème ?
- — Ce n’est qu’une impression, mais je crains qu’il n’ait transmis des informations, voir des enregistrements à Greg. J’avais le sentiment que lorsqu’il était au téléphone, il chuchotait et se taisait dès que j’approchais. Ensuite, il nous filme jusque dans les conversations privées, et j’ai remarqué que les deux autres chauffeurs ne le font pas !
- — Les informations, comme les enregistrements de tout ce qu’il se passe pendant le stage, sont ma propriété et elle est protégée par des droits totalement légaux. Je vais vérifier tes dires et te tiendrai au courant, mais sache que je serais désolé et extrêmement furieux si cela s’avérait exact.
- — En fait, il y a un moyen très simple de le savoir : Vous lui confisquez l’ordinateur que vous lui avez confié, pour lui en proposer un autre le temps de quelques réglages.
- — Mais il va se douter de quelque chose !
- — Pas si vous faites une copie de tout ce qui se trouve dessus et que vous lui rendez dans l’heure.
- — Très bien, je vais faire comme tu me le suggères. S’il y a une chose que je déteste dans la vie, c’est qu’on me prenne pour un imbécile. Si cela s’avère vrai, je vais lui faire avouer pour qui il travaille exactement, en le menaçant de tout révéler à son grand patron.
- — Maître, je ne suis pas un parvenu. Je n’attends rien de ce que vous pourriez tirer de tout cela. Je ne l’ai fait que dans un souci de justice.
- — Etienne, c’est tout à ton honneur.
Kiara
Le séjour se poursuivait avec un ordre du jour à peu près identique chaque jour :
Le matin, soins thalasso, Balnéo, massages et relaxation.
L’après-midi, plage puis boutiques du centre.
Soirée, Restaurant dans une ville voisine puis promenade au clair de lune.
Greg avait tenu sa promesse et se tenait à distance de la jeune femme et n’avait plus abordé le sujet du fameux moment d’oubli.
- — Ce soir ma chère Kiara, je vais te montrer un petit film tourné pendant le stage de ton mari.
- — Oh, mais c’est super, je vais le voir découvrir toutes les spécialités de ce pays, c’est merveilleux.
- — J’ai un écran géant dans ma suite, je t’y invite pour une projection privée, en tout bien tout honneur, bien entendu.
- — Vu comme ça, c’est d’accord.
Après le dîner, dans une auberge de Sestri Levante, ils allèrent droit au dernier étage du palace hôtel, dans la suite louée par Greg, qu’il lui fit visiter.
Elle fut d’emblée impressionnée par tout le luxe du mobilier, le sol en marbre, les boiseries de chêne, la salle de bain toute en dorures et le lit géant dans la chambre.
Elle n’avait jamais vu un couchage aussi grand et rond. Il l’invita à s’assoir dans un fauteuil en cuir vernis. L’écran faisait plus de trois mètres de large.
- — Attention, prête pour la projection ?
- — Oui, que la fête commence.
Les premières images montrèrent un Etienne assis à l’arrière d’une voiture au milieu de deux femmes, plutôt belles.
La plus âgée devait avoir un peu plus de quarante ans, alors que la plus jeune ne devait pas avoir beaucoup plus de vingt ans.
Le plan suivant nous montra une troisième passagère, qui devait avoisiner les trente ans et qui était assise à l’avant. Un petit homme apparut.
- — C’est Georges, mon chauffeur. Tu l’as reconnu ? C’est lui qui a fait ce film et ses enregistrements.
La scène suivante montrait son mari à table avec la troisième femme.
- — Elle, c’est Leandra. Elle est veuve depuis environ cinq ans.
Elle l’entendit évoquer la mort de son mari, de l’idée de son projet et de l’opportunité d’avoir rencontré Etienne. Elle semblait le flatter, parlait d’un grand directeur, de la marque d’un grand patron.
- — On dirait qu’elle va le dévorer tout cru. Allez mon amour, ne te laisse pas faire !
La scène suivante montra Etienne à table avec la seconde femme.
- — Elle, c’est Flavia. Elle a une quarantaine d’années et est veuve elle aussi.
Elle vit cette femme parler avec Etienne en le fixant du regard et saisit les bribes de la conversation. Il était question de mari décédé, de prendre un nouveau départ, et qu’il était arrivé au bon moment.
- — Elle commence à m’énerver celle-là.
La scène suivante le montra à table avec la plus jeune.
- — Elle, c’est Cathel. Elle a tout juste vingt ans.
Il la questionnait, lui demandait de parler d’elle, de sa vie. Elle lui parla de responsabilité, de leur soudaine complicité dans laquelle elle se jetait tête baissée.
Soudain, Kiara lui prit l’avant-bras et il sentit ses ongles s’enfoncer dans sa chair.
À l’écran, la jeune fille regardait Etienne intensément. Elle lui demanda :
Et elle l’entendit répondre
- — J’étais à mille lieux de découvrir tout ce que tu viens de me raconter Cathel, et j’en suis bouleversé.
Elle se figea quand elle vit la jeune fille poser la paume de sa main sur la joue de son mari et, l’instant d’après, le serrer dans ses bras.
La scène s’interrompit et un extrait d’un échange Face Time entre le chauffeur et Greg passa à l’écran.
- — Alors, comment ça se passe ?
- — C’est incroyable patron, ce type est un vrai tombeur. Je n’ai jamais vu ça. Il les fait enter dans des confidences, puis il leur caresse la joue, pour qu’elles fassent de même, et, même si je n’ai pas droit d’aller y filmer quoi que ce soit, j’ai entendu à travers la porte de sa chambre, les échos pas très discrets d’une femme qui prend un super pied. Je l’ai vue embrasser la jeune fille sur la bouche, mais je n’ai pas le droit non plus de filmer ça, car le film doit rester pour tout public. Mais, attendez la suite, vous n’allez pas vous ennuyer.
Kiara était sidérée. Etienne, son Etienne, l’amour de sa vie, son homme, coucher avec une pétasse d’à peine vingt ans !
Le film repartit et cette fois ce fut de nouveau Flavia qui faisait face à son époux. Elle le fixait intensément et on distinguait nettement les larmes couler sur sa joue.
Elle surprit de nouveau des bribes de la conversation.
- — Jamais je n’aurais espéré te rencontrer. Jamais je n’aurais pensé que nous pourrions devenir aussi proches en si peu de temps. Ta présence m’a tellement manquée toutes ces années, qu’il faut rattraper le temps perdu. Elle posa la paume de sa main sur sa joue, la laissa quelques instants, puis s’avança et le prit dans ses bras. J’avais besoin d’aimer un homme tel que toi. Te rencontrer et pouvoir t’aimer désormais est le plus beau cadeau de la vie.
De nouveau, elle fut sidérée par la scène suivante, Etienne s’effondrant à genou, entourant les jambes de la femme de ses bras et se serrant fort contre elle et pleurant abondamment.
De nouveau, l’image changea et un second Face Time se déroula entre Georges et Greg.
- — Ben dit donc, le cochon, il se tape la deuxième maintenant ?
- — Patron, il alterne une nuit l’une, une nuit l’autre. La troisième n’est pas encore passée à la casserole, mais je pense que ça ne va pas tarder.
Greg commençait à souffrir de la pression exercée par les ongles de Kiara sur son avant-bras.
Le film reprit et on vit Etienne seul en face de Léandra. La conversation tournait autour de trois tentations auxquelles il n’avait plus l’envie ni la volonté de résister. Elle fut abasourdie de l’entendre lui dire :
- — Quand la vie met devant vous trois belles tentatrices, il est déjà difficile de leur résister. Dès lors que la tentation prend le relais, il faut laisser faire et profiter pleinement.
Elle lui mit, elle aussi, la paume de sa main sur la joue et, une fois de plus, elle l’entendit pleurer.
- — Que ce soit moi qui profite de tout cela, de tous ces présents du ciel est un cadeau inespéré. Être ton compagnon pour cette si belle aventure est un privilège qui me comble de bonheur.
Le film s’interrompit de nouveau et un troisième Face Time commença.
- — Alors Georges, quelles nouvelles ?
- — Ben, ça y est patron, la troisième y est passée elle aussi. Et je peux vous dire qu’il l’a fait beugler si fort que, le lendemain, les deux autres chauffeurs m’ont demandé si je savais qui avait poussé la sérénade toute la nuit. Vous savez, c’est un grand manipulateur, je ne suis même pas sûr que chacune sait pour les deux autres.
- — Qu’est-ce que tu as comme autres détails ?
- — Le Maître leur a fait une visite surprise ce midi. Il a eu une longue conversation avec lui, et j’en ai surpris la teneur. Le Maître l’a menacé de porter plainte contre lui pour avoir triché au concours et de risquer d’entacher sa réputation. Il lui a fait jurer de tout avouer lors d’une interview en rentrant au Palace.
- — C’est tout ?
- — Ben non, il lui a parlé de faux, usage de faux, de tentative d’extorsion de fonds, de tentative de corruption. Enfin bref, il lui a dit qu’il risquait la prison ferme et qu’il allait porter plainte contre lui. Je pense que ça va chauffer pour ses abattis. Il lui a dit qu’il serait la honte du grand chef Joël Constant et qu’il serait déshonoré.
- — Ah la vache ! Je savais que c’était un petit vaurien, mais à ce point, on est au niveau de l’escroc. Merci pour tout Georges, tu m’as aidé à faire la lumière sur tous ces évènements.
Le film se termina immédiatement après. Greg regarda Kiara. Elle avait le visage défait, son rimmel avait coulé sur ses joues, elle respirait avec peine en fixant le sol.
- — Écoute, il ne faut pas réagir à chaud. Je sais que tu as découvert l’horreur et que ça t’a fichu un sacré coup. Mais ne te laisse pas emporter par la haine, tu vaux mieux que ça.
Elle sembla reprendre conscience de l’endroit où elle se trouvait. Elle se leva et se tourna vers lui.
Il se leva à son tour et la suivit vers la salle de bain. Là, elle défit les épaulettes de sa robe longue et lui apparut, de dos, en slip et soutien-gorge. Elle prit appui sur le lavabo et le fixa dans la glace.
- — Baise-moi Greg. Sois ma vengeance.
Il s’approcha d’elle par derrière, défit l’attache du sous-vêtement, puis le retira. Il lui baissa sa culotte et se releva.
- — Je suis déjà raide sans t’avoir touché.
- — Ne dis rien, baise-moi, je t’en prie.
Elle accentua la cambrure de son dos. Son gland entra en contact avec sa vulve. Il la saisit par les hanches et s’arrêta.
- — Tu es sûre ?
- — Enfonce-toi, baise-moi, fais-moi jouir.
Il poussa vers l’avant et son sexe pénétra de moitié l’intimité de la jeune femme.
Il fit un léger retrait puis poussa plus fortement et pénétra en entier. Il stoppa quelques instants pour qu’elle s’habitue à sa présence.
- — Vas-y Greg, fais-moi jouir.
Il commença de lents et longs va-et-vient en regardant comme hypnotisé sa verge coulisser dans le vagin de celle qu’il avait toujours rêvé de posséder. Il se pencha et attrapa ses seins pour les presser.
- — Tu me sens ?
- — Oui, tu es fort, je te sens bien. Continue.
Elle commença à gémir et sa respiration s’accéléra bruyamment.
- — Oui, c’est bon, je vais venir. Viens en moi, ne te retiens pas.
Il donna l’assaut final, cramponné à ses hanches, et en ahanant fortement, puis s’arrêta au fond de son vagin et déversa toute sa semence en plusieurs flots ininterrompus.
Elle tomba à genou, pleurant à grosses larmes.
- — Voilà ma vengeance. Tu m’as trompé avec trois salopes, je vais faire de même.
Elle prit le temps de se remettre de ses émotions et fila sous la douche.
Lorsqu’elle revint dans la chambre, elle le trouva nu, allongé sur le lit, l’attendant visiblement.
- — Viens ma chérie, c’était merveilleux.
- — Pas ce soir Greg. Je vais aller me coucher dans ma chambre. Mais demain, je te promets une nuit d’enfer ici. Là, il faut que je l’appelle pour voir s’il n’a rien à m’avouer.
Elle mit un genou sur le matelas, se pencha et l’embrassa sur la bouche.
Etienne
Le coup de fil du soir avait laissé Etienne plus que perplexe. Qu’est-ce qu’elle entendait par « Tu es certain que tu ne m’as rien caché, que tu n’as rien à m’avouer ? »
Il lui dit qu’il avait été exposé à trois formidables tentations, et qu’au final, il y avait cédé. Qu’il ne voulait pas lui en parler au téléphone, mais le ferait de vive voix dès son retour.
Un quart d’heure plus tard, il reçut un appel du Maître avec qui il eut une conversation jusqu’à deux heures du matin. Le contenu de l’échange lui fit un peu froid dans le dos, mais, reprenant ses esprits, il s’aperçut que jouer avec le feu finit toujours par brûler.
Le lendemain, jeudi, fut une apothéose de gastronomie, avec la visite de la Calabre, dernière région avant un retour en une seule journée sur Cinque Terre.
Le matin les avait vu découvrir un nouveau chauffeur, Paolo, qui allait les transporter pour les deux derniers jours.
Le midi fut une explosion de goûts et de saveurs, avec les spécialités de la région.
Les légumes étaient les rois du buffet ; aubergine alla parmigiana, tomates et mozzarella, piment Peperoncino, viande de sanglier et pâtes aux palourdes, Nduja, avec saucisse et piment, le thon à l’huile et à la calabraise, la Bottarga à base d’œufs de poisson, l’espadon aux poivrons et tomates, les anchois, et les sardines à la calabraise également. Les desserts, la pitta et les Nepitels et les Susumelles. Le tout arrosé de Galioppo, de Greco, et le Ciro.
L’après-midi fut consacré en un bain de soleil réparateur sur la Spaggia di Copanello.
En rentrant à l’hôtel, on lui déposa un billet. C’était un mot de Kiara.
- — Je sors ce soir et vais veiller très tard. Ne cherche pas à me joindre, je serai dans un endroit où le réseau ne passe pas. On se retrouve demain, rejoins-moi sur la plaggia di Guvano Vernaza pour seize heures. À demain. Je t’aime. Bisous
Mais que se passait-il ? Elle si prompte, d’habitude, pour l’implorer de l’appeler en fin de journée pour lui raconter son aventure, elle qui ne pouvait jamais être celle qui mettait fin à leur conversation, elle qui avait fait de ces coups de fil du soir un rituel incontournable !
Il se coucha, l’esprit dans la plus grande des confusions.
Kiara
L’avant dernière journée s’était finalement passée comme les précédentes, avec les soins le matin, un déjeuner en terrasse puis une après-midi à lézarder sur les bains de soleil de l’immense piscine du palace.
Elle avait croisé à plusieurs reprise le Maître qui, visiblement, ne l’avait pas remarquée, mais ne s’en offusqua pas.
Greg fit livrer un repas dans sa suite et ils dégustèrent un thon à la calabraise avec des pâtes al dente et une glace italienne vanille-chocolat, et un champagne, français, lui.
Il lui offrit un superbe déshabillé en soie et elle s’isola dans la salle de bain pour l’essayer.
Elle revint et s’arrêta dans le chambranle de la porte, la lumière à contre-jour, ce qui ne cachait rien de son corps, nu sous le léger vêtement.
- — Suis-je à ton goût mon chéri ?
- — Tu es sublime Kiara, je suis en train de retomber amoureux de toi.
- — Non, il ne faut pas. Je fais ça pour me venger de l’infidélité d’Etienne, mais c’est lui que j’aime, c’est lui l’homme de ma vie. Je n’ai pas de sentiments autre que de l’amitié pour toi, et il n’en sera jamais autrement. Ce salaud m’a trompée, je lui rends la pareille et après nous serons quittes. Demain, il aura la surprise de sa vie. Nous aurons une explication, et après ça, nous reprendrons notre vie comme avant, s’il a bien compris la leçon. Tu es un amant merveilleux, tu as beaucoup de charme, mais c’est lui que j’aime.
Il la saisit par le bras et l’attira sur le lit. Elle se laissa faire et se retrouva allongée contre lui.
- — J’ai compris, mais ce soir et cette nuit, tu es à moi, et rien qu’à moi. Demain, je partirai après votre explication. Mais je veux y assister, au cas où il se montrerait violent avec toi. Ça, je ne le tolèrerais pas et je lui ferais bien comprendre, par la force, s’il le faut.
- — Je ne veux pas que tu lui fasses du mal. Il va souffrir, autant qu’il m’a fait souffrir, mais je ne lui veux aucun mal.
- — Bon, assez parlé de ton cornard de mari, passons aux choses sérieuses.
- — Ne parle pas de lui comme ça. Je t’ai dit que je me vengeais de son infidélité. Tu n’es qu’un outil pour assoir ma vengeance. Un très bel outil, très efficace, certes, mais seulement un outil.
Il la bâillonna d’un baiser enfiévré tout en basculant sur elle.
Elle cambra ses reins, tourna la tête vers lui, et sourit.
- — Ah, oui ! Je sens que tu vas bien me faire jouir.
Ils étaient partis au milieu de la nuit pour parcourir les mille trente-trois kilomètres qui séparaient Catanzaro de Corniglia.
Etienne s’installa à l’avant près du chauffeur et ne desserra pas les dents de tout le voyage.
Il sauta le repas, profitant de l’heure de pause pour dormir un peu.
Ils arrivèrent un peu avant seize heures et il demanda qu’on le laisse près de la Spaggia di Copanello.
Il se mit à l’entrée de la plage bondée de monde et la chercha du regard.
Il la vit enfin, debout, le regard tourné vers lui. Dès qu’il commença à aller vers son emplacement, elle se tourna vers Greg, lui prit la main et l’entraina vers la mer.
Il arriva aux serviettes. Une troisième avait été posée à côté des leurs.
Il y avait une feuille de papier dessus, tenue par un galet et quelques mots écrits : « On est allé se baigner, attends-nous. »
Il se déchaussa, retira son veston, son pantalon puis sa chemise et enfin ses chaussettes. Il se releva et partit vers l’eau.
Il les aperçut. Elle était collée à lui et montait et descendait en rythme le long de son corps. Dès qu’elle le vit approcher, elle lui fit signe de rester à distance et accéléra le rythme. Ses yeux se révulsèrent.
- — Ah, ouiiiiii, vas-y, plus fort !
Les baigneurs qui les entouraient détournèrent le regard, gênés par les cris de la jeune femme.
Ne pouvant en supporter plus, il fit demi-tour et retourna aux serviettes.
Là, il s’essuya rapidement les jambes puis se rhabilla. Il prit la feuille de papier, la retourna et griffonna : « Rendez-vous au salon VIP à 17h00. Viens avec ton amant. »
Il sortit de la plage et appela un taxi.
Un quart d’heure plus tard, il prenait une douche dans leur suite parentale. Il se changea et descendit au salon VIP.
Il restait dix minutes avant le rendez-vous, aussi en profita-t-il pour envoyer quelques textos.
A dix-sept heures pile, Kiara fit une entrée majestueuse dans le salon, tenant par la main un Greg tout sourire.
Etienne leur désigna le divan en face duquel il était assis. Elle le fixa intensément, un sourire moqueur au coin des lèvres.
- — Comment vas-tu mon amour ? Le voyage n’a pas été trop fatiguant ?
- — Probablement moins que ton escapade dans l’eau.
- — Ah, tu sais, il m’a tellement défoncée que je suis complétement dilatée, et pour un bon moment. Il va falloir que tu attendes un peu avant de pouvoir honorer ta petite femme, sinon, toi et moi, on risque de ne pas ressentir grand-chose. Tu sais, Greg est un grand cachotier, il cache un véritable gourdin dans son pantalon. J’en ai fait l’heureuse expérience à trois reprises. Trois fois, ça ne te dit rien ?
Elle haussa soudainement le ton.
- — Trois, comme le nombre de tes tentations auxquelles tu as cédé. Car c’est bien de cela dont il s’agit, n’est-ce pas ? Trois salopes que tu t’es enfilées à tour de rôle tout au long de ces trois semaines. Espèce de salaud, tu croyais quoi ? Que j’allais rester là comme la pauvre mariée cocue éplorée ? Eh bien non, mon cher mari. J’ai ma personnalité moi aussi et mon honneur. J’ai acheté trois pilules du lendemain vois-tu et, finalement, je n’ai fait que remettre les pendules à l’heure. Un partout, la balle au centre, comme ça te plait de le dire parfois.
On frappa et il se leva pour aller ouvrir la porte. Flavia, Cathel et Léandra entrèrent. Il leur désigna le canapé face à Kiara.
Elle se leva les yeux hors de la tête.
- — Et en plus tu oses faire venir tes pouffes devant moi ? Ça ne t’a pas suffi de me tromper, il faut encore que tu cherches à m’humilier ?
- — Bon, maintenant je crois que tu en as assez dit, c’est à moi de parler.
- — Pas question ! Que je te laisse m’embobiner comme tu as dû le faire avec elles ? Tu vois Greg, il m’a tout raconté. Je sais tout, tout ce que tu as fait, depuis le concours, en passant par les faveurs de mon père, jusqu’à ces escapades sexuelles avec tes trois putes.
Etienne vit rouge. Il se leva le regard plein d’une colère qu’elle ne lui avait jamais vu.
- — Ferme-la ! Ferme-la je te dis.
Elle fut tellement surprise de la détermination qu’elle lut dans son regard, qu’elle se recula précipitamment et tomba assise dans le sofa.
Il s’approcha encore et pointa un doigt menaçant vers Greg en levant le poing.
- — Quant à toi connard, si tu bouges une oreille, tu vas faire connaissance avec un vrai gourdin.
Kiara tourna la tête vers son ami et découvrit un visage rempli de terreur. Elle le sentit pris de tremblements sur tout le corps.
- — Tout d’abord, je vais te parler de cet enculé qui te sert d’amant depuis trois jours. Je n’ai jamais profité de largesses du jury et ton père te le confirmera. Par contre ce que tu as l’air d’ignorer, c’est qu’il a été viré comme un malpropre du concours pour avoir tenté de soudoyer tout le jury. Ils ont tous porté plainte pour tentative de corruption, harcèlement moral et financier, fraude en bande organisée. Mais ce n’est pas tout.
Elle le regardait intensément, la bouche grande ouverte, comme si elle cherchait de l’air.
- — Il a soudoyé le chauffeur du Maître, celui qui devait nous transporter pour le remplacer par le sien, le fameux Georges. Pas de bol, je le connaissais et le Maître et moi avons commencé à le soupçonner de lui transmettre des extraits de vidéos enregistrées la journée et qu’il arrangeait le soir, après vos « sexcapades » en tout bien tout honneur. Le Maître nous a rejoint sur le parcours. Il lui a fait tout avouer et nous avons pu voir le film, truffé de trucages, qu’il t’avait sans doute montré pour me discréditer définitivement. Le Maître et moi, et, cette fois-ci ton père, avons porté plainte pour faux, usage de faux, tentatives de corruption, usage frauduleux d’images prohibées, tentative de porter atteinte à la réputation de personnes physiques et morales. Détournement d’images à caractère privé. L’avocat que nous avons en commun nous a parlé d’un risque d’une peine de prison ferme d’au moins dix ans.
Kiara n’en croyait pas ses oreilles et pleurait abondamment. Elle ne savait que balbutier.
- — Je ne savais pas … Je ne savais pas … Non, je ne savais pas.
La porte s’ouvrit et trois carabiniers entrèrent l’air décidé, suivis par le Maître qui arborait un visage sévère.
- — Lequel de vous est Gregory Liveroy ?
Tous les regards convergèrent vers lui.
Le brigadier s’approcha de lui.
- — Levez-vous, tournez-vous. Mettez vos mains dans le dos.
Le carabinier le menotta puis le retourna pour lui faire face.
- — Monsieur Liveroy, je vous arrête pour les chefs d’inculpations suivants : tentative de corruption, harcèlement moral et financier, fraude en bande organisée, faux, usage de faux, tentative de corruption, usage frauduleux d’images prohibées, tentative de porter atteinte à la réputation de personnes physiques et morales et, pour finir, détournement d’images à caractère privé. Avez-vous compris les raisons de votre arrestation ?
- — Mais je ne comprends pas. Vous savez qui je suis ? Je peux vous faire virer sur le champ si vous ne me libérez pas.
- — Oui je sais qui tu es espèce de petit escroc de fils à papa. Est-ce que tu as compris les chefs d’inculpation espèce de petit merdeux ?
Greg baissa les yeux et marmonna un « oui ».
Le brigadier se tourna vers les deux carabiniers.
- — Emmenez-moi cette petite frappe.
Il se tourna vers Etienne.
- — Y a-t-il madame Berger parmi-vous ?
Les regards se tournèrent vers Kiara qui se mit à trembler.
- — Mais qu’est-ce que j’ai fait ?
- — Madame, vous êtes accusée de complicité sur la plupart des chefs d’inculpation de monsieur Liveroy. Je vais vous demander de vous lever.
Etienne mit sa main sur l’avant-bras du brigadier.
- — Je vous en prie, pourriez-vous nous laisser encore quelques instants avec elle ?
Le chef de brigade se tourna vers le Maître qui hocha discrètement la tête.
- — Vous avez un quart d’heure.
Le policier et le Maître sortirent. Kiara était recroquevillée dans le canapé, le visage livide et décomposé. Etienne se tourna vers elle après avoir proposé aux trois femmes de se rassoir.
- — Maintenant, comme nous n’avons plus beaucoup de temps, je vais te parler de ces trois fameuses tentations. Tout d’abord, sache qu’elles n’ont rien, mais absolument rien de sexuel. La première est celle de pouvoir enfin devenir mon propre patron. La seconde est celle de construire mon propre projet. Et la troisième, sans doute la plus importante, est celle de prendre un nouveau départ, ici, aux Cinque Terre.
Kiara le fixait comme hypnotisée, la bouche grande ouverte ayant du mal à respirer.
- — Et je vais aussi te présenter mes trois tentatrices. Tu te souviens qu’à la mort de ma mère, mon père a rencontré une jeune femme italienne et s’est remarié. Cette femme, c’est Flavia, ma chère belle-mère. Elle m’a accepté comme membre de sa famille, c’est ça le geste de la paume de la main sur la joue. Quelque part, elle est la mère qui m’a manqué et je suis, en quelque sorte, le fils qu’elle n’a pas eu.
Il se tourna vers la plus jeune.
- — Mon père et Flavia ont eu une fille, Cathel, ma demi-sœur. Mais elle aussi m’a admis comme un membre de sa famille et il n’y a plus de demi, c’est ma petite sœur, celle que je n’ai jamais eue et je suis le grand frère qui lui a manqué dans sa jeunesse.
Il s’approcha enfin de la dernière.
- — Et voici la mère de mon projet, Léandra. Elle est la sœur de Flavia et qui m’a, elle aussi, accepté comme un ami, un neveu, un homme de sa famille.
Il refit face à Kiara qui était complétement décomposée, le regard perdu.
- — Comme tu le vois, alors que toi tu m’abandonnais, j’ai trouvé un refuge, une famille, un nouveau départ. Je regrette profondément que tu aies préféré te jeter dans le lit de ce salopard au lieu de me parler franchement. Si tu avais des doutes, il fallait me les dire, nous nous serions expliqués comme des adultes responsables. Au lieu de ça, tu n’as écouté que ta colère, tu t’es laissé aveugler par l’envie de vengeance et voilà, voilà maintenant où cela t’a amenée.
Kiara se mis à genoux devant lui, l’implorant.
- — Je t’en prie, je ne savais pas ce que je faisais. J’ai voulu te punir de m’avoir trompée, j’ai voulu que toi aussi tu souffres comme j’ai souffert de croire que tu couchais avec ces femmes. Je m’en veux tellement maintenant. Pourras-tu me pardonner ?
Etienne fit signe à Léandra d’aller à la porte. Elle l’ouvrit et le policier entra de nouveau.
- — Tu m’as abandonné au moment où j’avais le plus besoin de ton soutien. Je ne crois pas que je serai capable de te pardonner un jour. Brigadier, vous pouvez l’emmener.
Épilogue
Un an plus tard.
Etienne
La réunion du milieu d’après-midi commença. Autour de la table, et comme quasiment tous les jours, se trouvaient Etienne, Directeur F&B, Léandra, cheffe de cuisine, Javier son second, Flavia, Maîtresse d’hôtel et Flavio le majordome, Cathel, la cheffe de rang et Alessio le sommelier.
Etienne prit la parole.
- — Combien de couverts ce midi ?
Léandra lui répondit.
- — Deux-cent dix, c’est un bon chiffre.
- — Combien de réservations pour ce soir ?
- — Une trentaine de réservation en plus.
- — Au niveau des chambres, nous en sommes où ?
Flavia prit la parole.
- — Nous sommes complets jusqu’à la fin du mois. On va battre notre record.
- — Cathel, toujours personne pour la caisse et le bar ?
- — Non, frérot, rien de sérieux. Je commence à me désespérer que nous trouvions la perle rare.
Un voile troubla la vue d’Etienne quelques secondes. Il se racla la gorge puis regarda son équipe.
- — Ce n’est pas si grave que ça. Je vais continuer à faire le job jusqu’à ce que l’on trouve.
On frappa à la porte de la salle de réunion. Une jeune fille passa la tête par l’entrebâillement de la porte, sembla chercher quelqu’un du regard, le trouva et s’adressa à lui.
- — Monsieur Etienne, il y a quelqu’un pour vous à l’accueil.
- — C’est pour le poste à la caisse ?
- — Je ne sais pas, elle m’a dit que c’était personnel.
Incrédule, il lui demanda d’accompagner la personne jusqu’ici.
La jeune fille referma la porte et disparut quelques instants, avant de frapper de nouveau et, cette fois, d’ouvrir la porte en grand.
Tous se figèrent. Devant eux se tenait une Kiara, amaigrie, les cheveux emprisonnés dans un foulard et une valise à la main.
Etienne se leva et vint jusqu’à elle.
- — Mais, qu’est-ce que tu fais ici ?
Elle posa sa valise et défit son foulard. Elle s’était fait couper les cheveux très courts et avait le regard d’un chien battu.
- — Je suis sortie aujourd’hui. Je voulais te revoir une dernière fois avant de rentrer en France et sortir définitivement de ta vie.
Tous les regards étaient suspendus aux lèvres de la jeune femme qui paraissait au bord de l’épuisement.
- — Je voulais te parler une dernière fois, te dire tous les regrets que j’ai pour ma conduite inqualifiable. J’ai été tellement aveuglée par mon désir de vengeance que j’en ai oublié l’essentiel. Que tu es et a toujours été un homme droit, honnête et fidèle, et que tu aurais été incapable d’être l’auteur de tous les forfaits dont on t’accusait. Je sais que je t’ai perdu à jamais. J’ai eu un an pour me faire à cette idée, et, en dépit des choses horribles que j’ai commises, j’ai essayé de croire que tu aurais peut-être encore un peu de compassion et d’indulgence pour moi. Je n’espère rien, il y a longtemps que j’ai compris que je ne méritais pas un homme comme toi et qu’il y avait bien pire comme punition que la prison, c’est de perdre ton amour à jamais. Je me suis maudite, si tu savais combien de fois.
Il lui prit les mains, les retourna et vit les pansements récents sur ces deux poignets.
- — Qu’est-ce que c’est que ça ? Tu peux me dire ?
- — Oh, j’ai bien essayé de partir pour ne plus pleurer, pour ne plus faire de cauchemars, pour ne plus me faire mal avec tout ce qui me tombait sous la main. Mais ma compagne de cellule m’a sauvé la vie, enfin ce qu’il en reste. J’ai été heureuse, et je n’ai pas su apprécier à quel point ton amour m’était le bien le plus précieux sur terre. Je voulais juste que tu saches, avant de partir, que je ne suis pas une mauvaise femme, que je t’ai aimé plus que tout, plus que ma vie.
Il la poussa doucement vers son fauteuil.
- — Assieds-toi. Moi aussi j’ai des choses à te dire. Je n’avais rien prémédité, mais le fait que tu aies eu le courage de venir me dire tout ça en face, m’a décidé. Voici mon équipe. Chez nous, rien ne se décide seul. Tout se décide à l’unanimité de la famille. Tu connais Léandra, voici Flavio, son compagnon qui fait désormais partie de la famille. Tu te souviens de Flavia, et bien voici Flavio, son mari. Enfin tu te rappelles ma petite sœur Cathel, voici Alessio son fiancé. Le temps a passé Kiara, mes tentations sont devenues réalité et mon projet, notre projet, a abouti et se porte très bien.
Je n’ai plus de tentations, cela fait un an maintenant que je vis avec. Non, maintenant, j’ai trois souhaits.
Il se pencha vers elle et la regarda tendrement.
- — Premier souhait, j’ai besoin de quelqu’un pour diriger le bar et la caisse et je t’embauche à l’essai.
Il se tourna vers son équipe. Tous lui firent un sourire en signe d’assentiment. Kiara éclata en sanglots et tomba à genou devant lui, les yeux ravagés par les larmes.
- — Deuxième souhait, j’ai pas mal gambergé depuis un an et j’ai fait des examens médicaux ici. Eh bien, contrairement à ce que me disaient ceux que j’avais fait faire en France, il se trouve que mes spermatozoïdes ne sont pas très rapides et pourraient être la cause des difficultés à être un bon procréateur. On m’a délivré un traitement qui devrait remettre les choses dans l’ordre.
Il se mit lui aussi à genou et prit les deux mains de Kiara.
- — Troisième souhait, mon plus cher désir serait de retrouver ma chère femme et de reconstruire avec elle et ici, sur des bases solides et au sein de sa nouvelle famille, notre si bel amour.
Il la prit dans ses bras et l’embrassa passionnément, puis il l’aida à se relever et se tourna vers son équipe.
Flavia, Léandra et Cathel s’approchèrent de la jeune femme et, chacune leur tour, elles posèrent la paume de leur main sur sa joue.