n° 22212 | Fiche technique | 26469 caractères | 26469 4496 Temps de lecture estimé : 18 mn |
30/12/23 |
Résumé: Mangouste, l’ex tueuse à gage reprend du service. | ||||
Critères: #humour #aventure #policier ff | ||||
Auteur : Laetitia Envoi mini-message |
DEBUT de la série | Série : Les aventures de Mangouste Chapitre 01 / 02 | Épisode suivant |
Je ne me mets plus en colère. J’observe, je réfléchis et je m’éloigne.
Le Dalaï-Lama – 1953
Je ne me mets plus en colère. J’observe, je réfléchis et je mets des tartes dans la gueule.
Mangouste – 2024
Mangouste, l’ex-tueuse à gage éthique est de retour. Pour les lecteurs découvrant ses aventures, je conseille fortement de lire les précédents épisodes, même si cette aventure (en deux parties) peut se lire indépendamment.
Les amateurs de Mangouste savent qu’elle chante beaucoup. Je vous donne systématiquement les paroles des chansons qu’elle entonne. Ce que je vous propose, c’est un peu comme un karaoké, quelque part. Le lecteur motivé pourra chanter à tue-tête, ou fredonner en même temps que Mangouste dans l’histoire, selon la situation.
En fait, je rends mes récits encore plus interactifs. Un peu comme un récit érotique peut vous exciter grave ou vous titiller la libido.
Vous remarquerez l’effort fait pour vous, amis lecteurs. C’est comme la masturbation devant un film porno, en fait, qui est aussi un peu un genre de karaoké finalement, si on réfléchit deux minutes à l’affaire !
Chloé Maurecourt rentrait chez elle vers deux heures du matin. Elle venait tout juste de quitter la galerie d’art, où avait eu lieu le vernissage où elle exposait une vingtaine de ses tableaux.
Assommant ! Supporter ces snobinards d’amateurs de peinture, quelle plaie. Snobs et pédants ! Le champagne et les petits fours étaient moyens en plus. Mais, c’est la croix que devait porter tout artiste peintre.
Au final tout de même, une soirée lucrative, puisque la moitié des toiles avait été vendue. À des prix plus que prohibitifs, en plus. Arnaquer ces crétins ne lui causait aucun scrupule. Le directeur de la galerie, où elle expose, est vraiment un escroc ! Elle avait bon espoir de tout vendre quasiment, avant la fin de la semaine.
La température douce de cette nuit de la fin mai, lui permettait de rouler la vitre de la Maserati GranCabrio ouverte, son coude négligemment appuyé sur le bord de la portière. Cette douceur ne lui permettait toutefois pas d’avoir la capote baissée, d’autant plus qu’elle roulait à vive allure dans les rues de la capitale désertes à cette heure avancée. Elle venait d’ailleurs de griller quelques feux sur la rue de Rennes.
En approchant de chez elle, elle laissait de plus en plus son esprit dériver. Elle repensait à son réveil le matin même, le corps chaud d’Alix de Saint Aymé de Préville (voir le précédent épisode) collé contre elle. Cette pensée lui provoqua quelques frissons dans le dos et des idées coquines, voire déplacées. La belle Alix avait quitté Paris le matin même, pour quelques jours. Dommage, elle ne pourrait pas l’appeler et lui demander de la rejoindre dans son lit pour y finir la nuit.
Autant au début de leur relation, deux mois précédemment, elles faisaient l’amour de manière tout ce qu’il y a de conventionnel, avec beaucoup de tendresse. Autant depuis quelque temps, leurs joutes dérivaient vers quelque chose de beaucoup plus vicieux. La belle Alix se lâchait et s’émancipait… Tant mieux !
Chloé se mit à fredonner :
C’est une poupée
Qui fait « non, non, non, non »
Toute la journée
Elle fait « non, non, non, non »
Elle est
Elle est tellement jolie
Que j’en rêve la nuit
C’est une poupée
Qui fait « non, non, non, non »
Toute la journée
Elle fait « non, non, non, non »
Personne ne lui a jamais appris
Qu’on pouvait dire oui.
Sans même écouter
Elle fait « non, non, non, non »
Sans me regarder
Elle fait « non, non, non, non »
Pourtant je donnerais ma vie
Pour qu’elle dise oui.
Elle ralentit l’allure en arrivant dans son quartier. En dépassant le carrefour de la rue de Vaugirard et de la rue de Rotrou, devant le jardin du Luxembourg, elle vit du coin de l’œil des ombres bouger.
N’y prêtant pas plus attention que cela dans un premier temps, elle réalisa pleinement, avec quelques secondes de retard, la nature de la scène qu’elle venait d’entrapercevoir.
Chloé pila en appuyant de toutes ses forces sur la pédale de frein. Elle passa le levier de vitesse de la boîte automatique en position marche-arrière et accéléra pour reculer. Cela eut pour effet de faire crisser les pneus sur les pavés de la rue.
Revenue au niveau de la rue de Rotrou, peu large et mal éclairée, elle vit deux hommes essayant de faire entrer de force une jeune femme à l’arrière d’une berline sombre. La fille se débattait. Un des hommes avait mis sa main sur la bouche de sa victime pour l’empêcher de crier.
Un grand sec, plus de deux mètres au moins et un petit gros, presque aussi large que haut :
Puis en criant, cette fois :
Chloé descendit de la Maserati, retira ses escarpins Chanel à talons de douze centimètres, les balança sur le siège conducteur de la Maserati et s’approcha des deux gugusses :
Machin, à la vue des jolies gambettes de Chloé, de la robe relevée sur des bas noirs et une petite culotte en dentelle, ouvrit grand les yeux et la bouche. La gauche (de gambette) partit comme un éclair et atteignit Machin aux parties. Il grimaça et se tordit de douleur, en poussant un petit cri aigu du genre « Aaaaarggg… glouuuups ». Puis « Hiiiiiiiii » :
Au loin, une sirène de police se fit entendre. Ducon (le grand maigre aux cheveux gominés), lâcha la fille et aida Machin (le petit gros) à se relever :
Ducon et Machin remontèrent dans la berline sombre, dont le moteur n’avait pas cessé de tourner, et partirent en trombe, vers la place de l’Odéon, prenant la rue de Rotrou à contresens.
La voiture de police passa sur la rue de Vaugirard, gyrophare et sirène en action, sans s’arrêter. Apparemment, ils n’étaient pas là pour ça, une urgence plus urgente ailleurs sûrement.
Elle parlait un français parfait, mais avec un fort accent, a priori américain :
Elle entraîna la fille vers la Maserati :
En arrivant à l’appartement de Chloé, les nerfs de la fille lâchèrent. Elle fondit en larmes :
« Intéressant », se dit Chloé en s’apercevant que la fille ne se dégageait pas de son étreinte et restait collée à elle. Le surplus d’émotion certainement. Elle sentait sa poitrine tout contre la sienne, juste secouée encore par quelques gros soupirs et sanglots de plus en plus espacés. Elle pouvait presque sentir les battements de son cœur reprendre leur rythme normal.
Chloé s’enhardit à descendre sa main gauche vers le bas du dos de la fille et la serra encore un peu plus fort de son bras droit. Puis s’écartant, elle essuya du bout de son doigt les larmes coulées sur la joue de la belle brune et y déposa un baiser rapide, puis un autre plus appuyé. Toujours pas de mouvement de recul…
« L’émotion, ça doit être ça, finalement, ou mon charme légendaire », se dit-elle.
Pour faire bonne mesure, un troisième baiser claqua tout prêt du coin de la bouche de la fille, pendant qu’elle lui caressait les cheveux.
Chloé s’écarta enfin. « De plus en plus intéressant » :
Les sanglots se tarirent enfin. Il ne perdurait que quelques gros reniflements :
Du regard, elle fit le tour de l’immense salon, ses moulures, son parquet ancien en chêne massif, sa cheminée en marbre, ses baies vitrées monumentales, ses grands canapés de cuir se faisant face, le piano à queue posé au milieu de la pièce, les quelques sculptures et bustes de différentes époques et différents styles, contemporains, romantiques, allégorie de l’antiquité, la collection de vases chinois, période Ming de Chloé.
Son regard s’arrêta sur l’immense toile qui ornait quasiment tout un mur. Une jungle luxuriante, d’où émergeaient quelques animaux, dont une panthère noire, un boa, quelques antilopes, des singes, ainsi que des oiseaux multicolores. Cette jungle occupait les deux tiers du tableau. Vision exotique, mais poétique. Le dernier tiers représentait une clairière, une femme et un homme, nus, de dos, se tenaient par la main et observaient de loin une cité futuriste :
Elle déposa les deux verres de vodka sur la table basse et s’assit sur le canapé, près de la fille :
Elle retira aussitôt son doigt pour le remplacer par ses lèvres.
Le lendemain matin, Valentina fut réveillée par Chloé qui lui apportait un plateau avec un copieux petit-déjeuner pour deux :
Elles roulaient à vive allure sur l’autoroute de l’est :
Chloé arrêta la Maserati dans une zone industrielle plus que morose, quelque part au fin fond du Val-de-Marne, devant un bâtiment qui semblait être une usine désaffectée.
Les murs d’enceinte et la façade du bâtiment étaient couverts de tags. Le grillage de la clôture était découpé à plusieurs niveaux et on pouvait entrer sans difficulté. Au-delà s’étendait une friche. L’endroit servait aussi de dépotoirs pour toutes les entreprises et les quelques habitants du secteur. Tout le monde venait y déposer ses encombrants et ses gravats.
Elles empruntèrent un couloir sombre, à peine éclairé par les loupiottes indiquant « sortie de secours ». Ça, au moins, ça fonctionnait encore. Au bout d’un couloir, Chloé poussa une porte.
Puis à l’attention de Valentina :
Charade se mit à pianoter rapidement sur son clavier, des lignes de codes.
Chloé et Valentina attendirent un moment en discutant avec les autres hackers. Au bout d’un quart d’heure, Charade leva la tête de son écran :
Chloé et Manon – le vrai prénom de Charade, donc – s’écartèrent. Elles discutèrent de manière animée pendant deux ou trois minutes, puis le ton baissa. Pour finir, un pâle sourire illumina le visage de Manon. Chloé se pencha et lui embrassa la joue.
Elle rejoignit Valentina, après avoir salué les autres membres d’Ecto Kosmos :
Samuel Cortot, c’est l’intermédiaire qui a pris la suite de Pierre Le Gall après sa mort (voir Mangouste contre l’organisation) :
- — Allo Kofi ?
- — Non, répondit une voix féminine.
- — Ce n’est pas le numéro de Kofi Ndiaye ? (voir « L’ordre règne à Bujumbura »).
- — Si, je vous le passe, je suis son infirmière.
- — Son infirmière ! Ah oui, j’avais oublié le coup de l’infirmière.
- — Pardon ?
- — Non, rien, je vous remercie. Allo Kofi ? C’est Chloé !
- — Chloé ? Quel bon vent t’amène ?
- — Je cherche des renseignements.
- — Des renseignements ? Tu es encore sur le sentier de la guerre ! Tu n’arrêtes pas pour une jeune retraitée ! Au fait, j’ai lu tes exploits dans la presse la dernière fois avec Mombassa.
- — Oui, oh, tu sais, je n’y suis pas pour grand-chose, ils en rajoutent beaucoup dans les médias.
- — D’accord, tu cherches qui cette fois ?
- — Miasme, tu connais ?
- — Miasme ? Ben voyons ! Tu aimes t’attirer les foudres des puissants toi !
- — À ce point-là ?
- — Bon, je te fais un topo. Même si Miasme a perdu de son influence ces dernières décennies, ils ont toujours des amis puissants. Miasme est apparue à la renaissance à Venise. C’était une sorte de confrérie occulte à buts conspirationniste. Elle a profité du morcellement du pouvoir en Italie à l’époque avec ses villes-états. Elle a longtemps cherché à déclencher des guerres entre Venise et ses rivales, Gênes et Pise notamment. Miasme s’est opposée à une dynastie de l’époque, les Borgia et leur célèbre légende noire.
- — Les Borgia ? Une légende un peu usurpée, d’ailleurs. Lucrèce, notamment, était une défenderesse des arts et des lettres.
- — C’est ce qu’on dit oui. Miasme a évolué au fil des siècles. Entre théories de conspirations, occupation de l’Italie par d’autres pays conquérants, Espagne, empire austro-hongrois, troupes napoléoniennes. Miasme a œuvré au 19e siècle pour l’indépendance de l’Italie et l’unification du pays en soutenant le royaume de Sardaigne et en favorisant un contexte nationaliste. Ils comptaient asseoir leur autorité après l’occupation étrangère des siècles précédents qui ont suivi le déclin des villes-états, Venise en tête. On dit qu’ils ont soutenu le fascisme et que Mussolini était un initié. Ça reste à vérifier.
- — Ah oui, carrément !
- — Voilà en gros, l’histoire. Activités occultes, liens avec les différents pouvoirs en place. Dotés de moyens financiers et d’appuis politiques, un rayonnement à l’échelle de l’Europe, pas seulement de l’Italie. Ils ont été liés dans les années 70 aux attentats, autant d’extrême gauche que d’extrême droite en Italie, les fameuses années de plomb. Des agitateurs, avec des liens avec la mafia, Cosa Nostra bien sûr, la Camorra aussi, et la ’Ndrangheta, la mafia calabraise, à l’origine elles-mêmes, toutes des sociétés secrètes. Et la mafia romaine surtout, la Magliana. Ils sont devenus des ennemis de l’état et de la démocratie ? L’usage de la violence ne leur fait pas peur ? Ils sont à l’origine de plusieurs assassinats à travers les époques. Même s’ils ont perdu de leur influence aujourd’hui, ils ont longtemps fait office de décideurs politiques. Vu la faiblesse du pouvoir en Italie, ils ont longtemps été derrière les gouvernants visibles, et siégé dans l’ombre comme un gouvernement invisible. De tout temps, ils ont infiltré les partis de tout bord en Italie. Actuellement, on dit que c’est une femme qui dirige Miasme depuis quelques années. Son identité est secrète par contre, on ne la connaît pas. Voilà, tu sais à peu près tout. Pas des enfants de chœur, fait attention à toi Chloé.
- — Oh, tu sais, j’ai botté le cul de l’Organisation, ce n’est pas Miasme qui va m’impressionner plus que ça. Après, je me méfie toujours.
Après avoir raccroché, Chloé et Valentina débriefèrent rapidement sur ce qu’elle venait d’apprendre auprès de Samuel Cortot et de Kofi Ndiaye :
Oui bonguorno, Chloé Maurecourt, je veux réserver une suite Grand Canal View pour demain.
Après avoir raccroché, elle dit à Valentina :
À suivre…