n° 22259 | Fiche technique | 42413 caractères | 42413Temps de lecture estimé : 29 mn | 31/01/24 |
Présentation: Turbulences, éloignements et retrouvailles dans un cadre et un environnement gastronomique. | ||||
Résumé: Turbulences, éloignements et retrouvailles dans un cadre et un environnement gastronomique. | ||||
Critères: dispute restau extracon vengeance | ||||
Auteur : Briard Envoi mini-message |
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Les deux années scolaires passèrent et Dorine obtint brillamment son diplôme. Elle fut immédiatement recrutée par le père de William à l’Entre-Deux, comme commis de cuisine auprès du chef de partie viande. Le restaurant était situé près des vignes du Château Pape Clément et désespérait de ne pas avoir encore une étoile que le chef de cuisine pensait devoir mériter depuis plusieurs années.
De son côté, Willy fut embauché comme barman. Le patron, père du jeune homme, avait en tête de leur faire connaître toutes les facettes du métier et visiter tous les postes pour prouver leur valeur, d’une part, et faire leurs classes. La jeune femme accepta volontiers la place et se mit au travail, bien décidée à apprendre tous les secrets de son premier emploi.
Major de sa promotion, Jérémy fut recruté par le père de Déborah comme aide-cuisinier dans la partie restaurant de son établissement, le Régent, place de la Comédie à Bordeaux. Déborah fut également recrutée comme serveuse.
Ses parents l’avaient eue sur le tard. Son père avait quarante-huit ans à l’époque, soixante-huit aujourd’hui.
Sa mère, plus jeune, l’avait eue à quarante-trois ans. À cinquante-trois, elle pensait, comme son mari, qu’elle prendrait sa retraite d’ici quatre ou cinq ans. Cela laissait à leur fille le temps pour se préparer à la succession et à l’établissement d’obtenir enfin une étoile au célèbre guide Michelin.
À Pessac, Dorine apprenait vite. Elle suivit régulièrement le chef de partie aux halles de Bordeaux pour choisir les viandes en fonction des menus. Le chef était méthodique et plutôt pédagogue. Il lui apprit son savoir ; les différentes races, les qualités propres à chacune ; les aspects, les couleurs, la brillance, le nacre, l’humidité naturelle, la tendreté, autant de critères précis sur lesquels se fait la différence entre les bons et les moins bons cuisiniers.
En deux ans d’apprentissage, elle suppléait la plupart du temps son chef de partie et allait faire les achats pour le restaurant avec la confiance de ses patrons. Elle apprit à débiter toutes les viandes, depuis la carcasse, jusqu’à la moindre tranche. Le bœuf, le veau, le porc, l’agneau n’eurent bientôt plus aucun secret pour elle. Son chef lui enseigna également comment débiter les gibiers. Les volants : pintade, faisan, pigeon, pluvier, bécasse, barge, canard, caille, chevalier, courlis, eider, grive, gélinotte, lagopède, tétras-lyre, macreuse, perdrix et oie sauvage. Les courants : cerf, biche, chevreuil, chamois, sanglier, lièvre, garenne.
Le chef de cuisine lui proposa rapidement une place de saucière, toujours auprès du chef de partie viande.
Le poste s’était libéré et on trouva opportun de lui confier la place. Le chef cultivait lui-même la plupart des ingrédients composant les sauces des différents plats. Il profitait du petit matin et des pauses après le service du midi pour soigner son potager. Il disposait d’un jardinier pour l’entretien de l’enclos, du sol et des plantations. Chaque jour, elle le suivait dans sa culture et sa cueillette quotidienne, au potager.
Situé sur Bègles, à quelques kilomètres du restaurant, le potager était gigantesque et subdivisé en plusieurs parcelles, chacune ayant sa spécificité.
Sur environ huit cents mètres carrés, on pouvait y trouver plusieurs races de tous les légumes, radis, aubergines, céleris-raves et branches, carottes, choux verts et rouges, oignons, courgettes, blettes, haricots, endives, betteraves, brocolis, fenouils, pommes de terre, melons, tomates, poivrons, navets, pois, aulx, échalotes, piments, poireaux et salades.
Sur une parcelle d’environ trois cents mètres carrés, on trouvait un herbier avec persil, ciboulette, basilic, coriandre, estragon, menthe, aneth, thym, romarin, origan, anis, camomille, cerfeuil, laurier, lavande, pimprenelle, réglisse, safran, sarriette, sauge, mélisse, bourrache, hysope, citronnelles, marjolaine, livèche, oseille et verveine.
Il y avait aussi, bien à l’abri, une orangerie sur plus de cinq cents mètres carrés avec les agrumes : orange, citron, kumquat et limequat, pamplemousse, clémentine et mandarine, bergamote, yuzu, combava, cédrat, main de bouddha, bigarade, calamondin, ichang papeda, kabosu, sudachi, tangelo, tangerine, ugli et yuko.
Enfin, dans une cave voûtée de plusieurs salles faisant globalement plus de cinq cents mètres carrés, on trouvait tous les champignons cultivables : champignon de Paris, shiitaké, pleurote, pied bleu, coprin chevelu, pholiote, collybie, agaric, strophaire, oreille de judas, calocybe, cordyceps, ganoderme, poule des bois, lentin et volvaire.
Deux nouvelles années suffirent pour faire d’elle un maître-saucier et c’est tout naturellement que le chef de cuisine lui proposa un poste auprès du chef de partie poisson. Là, forte de son expérience de saucière, elle profita du savoir de son supérieur pour enrichir son bagage. Le restaurant disposait de plusieurs bassins dans lesquels ils élevaient ou entretenaient les poissons pour la reproduction, mais aussi et surtout pour la carte des menus.
Pendant deux autres années, elle découvrit, tout d’abord, les poissons d’eau de mer : bar ou loup, cabillaud, congre, dorade, églefin, lieu, lotte, maquereau, merlan, merlu ou colin, mulet, plie, raie, rouget, Saint-Pierre, saumon, sole, thon, turbo, anchois, sardine et éperlan.
Elle apprit ensuite tout sur les poissons d’eau douce, brochet, carpe, esturgeon, lamproie, perche, omble-chevalier, sandre, anguille, gardon, goujon, poisson chat et truite.
Elle s’affranchit enfin de tous les crustacés, araignée, crabe, crevette, écrevisse, clams, étrille, gambas, homard, langouste, langoustine, squille, tourteau, amande, praire, limule, palourde et couteau.
Un beau matin, le chef de cuisine lui proposa de remplacer le commis pâtissier, parti sous d’autres cieux. Là, auprès du chef de partie, elle se forgea un solide savoir.
Les gâteaux, cheese cake, tarte, mug, flan, brownie, tourte, pudding, crumble, apple pie, clafoutis, cobbler, succès, bûche, forêt noire, mille-feuilles, cake, baba, entremets, opéra, délice, Kouign-amann, charlotte, fraisier et framboisier, galette, macaron, far breton, gâteau basque, éclair, Arlette, religieuse, omelette norvégienne, choux et pièce montée, mousse, savarin, Paris-Brest, meringue, pithiviers, tiramisu, Bavarois, et crème brûlée n’eurent bientôt plus de secrets pour elle.
Après deux années en pâtisserie, elle se rendit compte qu’elle avait fait le tour de toutes les parties du restaurant.
Elle s’était imposée dans tous les postes qu’on lui avait proposés. En huit années, elle avait acquis un savoir-faire qui la rendait indispensable en cuisine. Elle participait désormais à l’élaboration des menus, avec le chef de cuisine, le second, les trois chefs de partis (viande, poisson et pâtissier), le maître-saucier et le sommelier. Son avis était écouté et la plupart du temps pris en considération.
Elle fut convoquée un matin chez le grand patron.
Elle se demandait ce que lui voulait le père de William.
Cet homme l’intimidait quelque peu, par sa stature, sa position sociale par rapport à elle et, surtout, parce qu’il était le père de son compagnon.
Il se leva et vint poser ses mains sur les épaules de la jeune fille.
Il lui fit deux bises et elle s’en alla tout heureuse de sa nouvelle mission. Ainsi, Dorine et William allèrent à la cave retrouver le maître sommelier. Ce dernier les attendait pour leur faire une visite personnalisée de la cave.
Celle-ci se trouvait sous le restaurant et avait une superficie d’environ deux cent cinquante mètres carrés pour ce qui était de la grande salle. Il y avait également de nombreuses alcôves, d’une trentaine de mètres carrés, chacune consacrée à un vignoble.
La visite commença par le vignoble d’Alsace, avec Pinot Noir, Blanc et Gris, Riesling, Gewurztraminer, Sylvaner, Edelzwicker, Klevener, Muscat.
Vint ensuite le vignoble bordelais, comprenant Médoc, Haut-Médoc, Pauillac, Margaux, Saint-Julien, Saint-Estèphe, Listrac, Moulis, Côtes de Castillon, Graves, Graves de Vayres, Entre-deux-mers, Sauternes, Barsac, Pomerol, Lalande de Pomerol, Pessac-Léognan, Fronsac et Canon-Fronsac, Saint-Émilion, Lussac-Saint-Emilion, Montagne-Saint-Emilion, Puisseguin-Saint-Emilion, Saint-Georges-Saint-Emilion, Loupiac, Sainte-Croix-du-Mont et Clairet.
On passa ensuite au Beaujolais, Brouilly et Côtes de Brouilly, Chénas, Chiroubles, Fleurie, Juliénas, Morgon, Moulin-à-Vent, Régnié et Saint-Amour.
Les Bourgognes avec, Saint-Bris, Saint-Véran, Viré-Clessé, Chablis, Givry, Rully, Fixin, Vougeot, Nuits-Saint-Georges, Ladoix, Aloxe-Corton, Beaune Savigny et Côtes de Beaune, Irancy, Côtes-de-Nuits, Corton et Corton-Charlemagne, Chambertin et Gevrey, Clos-Vougeot, Echezeaux, Monthélie, Chassagne et Puligny-Montrachet, Meursault, Santenay, Maranges, Mercurey, Volnay, Pommard, visnes-Romanée et Romanée-Conti et Richebourg.
Vinrent ensuite les Pays de Loire, Saumur, Montlouis, Muscadet, Vouvray, Menetou-Salon, Pouilly, Fuissé, Loché, Vinzelles et Fumé, Quincy, Reuilly, Côteau-du-Giennois, Anjou, Cheverny, Vhinon, Bourgueil et Saint-Nicolas, Savennières, Bonnezeaux et Quart-de-Chaume.
Les champagnes pour finir, Grand Cru, Premier Cru, Coteaux Champenois et Rosé de Riceys.
Le maître-sommelier était intarissable sur l’association des mets et des vins et les deux jeunes gens prenaient, semaine après semaine, note sur note. Deux nouvelles années passèrent ainsi, permettant aux deux jeunes gens de devenir des experts en matière vinicole.
William se réjouissait de travailler enfin avec Dorine. Il avait passé huit ans à user ses godasses derrière le comptoir du bar et il était persuadé d’en savoir assez au niveau des cocktails, punchs et autres boissons de mélange. Même si le barman était probablement le seul aristocrate du prolétariat et qu’on s’adresse à lui par « barman » et non pas « monsieur », qu’il dispose d’un arsenal de possibilités s’il est malin et connaît le métier (citation issue du film « Cocktails et rêves »), à la longue, c’était devenu assez monotone.
Il avait hâte de convaincre son père de pouvoir reprendre l’affaire et de mettre en chantier toutes les idées qu’il avait pour moderniser l’établissement.
Son paternel ne pouvait pas imaginer tout le potentiel dont son fils disposait.
Il ne pensait et n’avait jamais pensé que « tradition », boissons traditionnelles, cuisine traditionnelle, mais ce n’est pas comme ça qu’on attirait la clientèle jeune et, surtout, la clientèle friquée.
Non, celle-ci avait besoin d’innovations, de modernité, de changement, de nouveaux décors, mais aussi et surtout d’une gestion plus musclée de l’établissement. Pour se développer, il fallait à cette entreprise familiale un vrai patron, avec de la poigne. Or, lui, de la poigne, il en avait à revendre. Dorine n’arrêtait pas de le lui reprocher comme si c’était un défaut.
Mais on ne gouvernait pas avec une main de velours, ça se saurait.
Il allait le prouver, tout d’abord dans cette négociation dont on lui avait confié les premières approches.
Son père lui avait pris rendez-vous avec le représentant du Régent. Il avait un peu étudié le profil de ce bar-restaurant du centre de Bordeaux. Au cœur de la métropole, il avait la réputation d’être bien achalandé et d’avoir une cuisine raffinée et plutôt gastronomique. En fait, il avait découvert que les deux établissements étaient assez proches en termes de fonctionnement et de réputation. Il connaissait les tenants et aboutissants de la négo, maintenant, c’était à lui de jouer.
Bien entendu, lui et Dorine, pendant leurs études, avaient appris déjà pas mal de choses sur tout ce qu’ils voyaient, depuis une dizaine d’années, dans leur établissement.
Mais là, ils avaient affaire à la crème de la crème, à l’excellence, et ils savaient combien cela leur était profitable. Dorine avait profité du savoir de tous les chefs de partie pour se forger une véritable identité de cuisinière, inventive, technicienne et innovante, son identité propre. Elle savait désormais apprêter, assaisonner, boucaner, brider, braiser, caraméliser, canneler, chemiser, compoter, contiser, décuire, déglacer, dénerver, désosser, détendre, détremper, ébarber, effiler, émonder, émulsionner, étuver, foisonner, fraiser, habiller, larder, limoner, manchonner, nacrer, quadriller, rectifier, singer, vanner, videler et, bien entendu, travailler tous les ingrédients de la cuisine. Elle connaissait parfaitement tous les produits de l’art culinaire, savait les marier avec inventivité. Elle savait aussi accorder les vins en fonction des plats, des ingrédients et des menus.
Enfin, elle avait gagné le respect de la profession et se sentait prête pour faire le grand saut au sein du restaurant. Ne voulant surtout pas créer de malaise en cuisine, elle s’entretint avec le chef pour savoir si le moment était propice pour demander plus de responsabilités.
Celui-ci la rassura et l’encouragea à rencontrer le « Big boss ».
Elle demanda donc un entretien avec le patron.
Le rendez-vous ne se fit pas attendre et, dès le lendemain matin, elle pénétrait dans son bureau.
Visiblement, l’homme s’amusait de cet entretien pour la pousser dans ses retranchements.
Elle le comprit aussitôt et joua le jeu.
Elle le regarda avec intensité.
Dorine se leva et tendit sa main à son patron.
Il lui serra la main et l’attira à lui pour une accolade très amicale.
Elle sortit du bureau et croisa William qui s’y dirigeait.
Il la prit dans ses bras et l’embrassa passionnément.
Son père l’attendait assis à son bureau.
William rentra à l’appartement où l’attendait Dorine.
Il la prit dans ses bras et l’embrassa.
Il l’embrassa de nouveau.
Elle mit fin au baiser et le regarda dans les yeux.
Il l’embrassa.
De nouveau, elle interrompit le baiser.
Il l’embrassa.
Au fur et à mesure des baisers, il la menait vers la chambre dont la porte était ouverte.
Sitôt entré, il la bascula sur le lit.
Il commença frénétiquement à lui défaire les boutons de son chemisier et le lui retira.
Il s’attaqua à la fermeture de sa jupe.
Il enleva le vêtement et s’attaqua au soutien-gorge.
Il ne l’écouta pas et lui enleva sa culotte.
Il se redressa et arracha plus qu’il n’enleva tous ses habits et se retrouva, comme elle, totalement nu.
Il se coucha sur elle et tenta de la pénétrer.
Mais il ne l’écouta pas et commença à la pénétrer.
Il s’arrêta et attendit quelques instants que les parois de son vagin s’humidifient et se desserrent.
Quand il sentit la tension interne de sa compagne se relâcher, il commença à aller et venir.
Mais, une fois de plus, il voulut lui montrer toute sa force et entama un rythme plus accentué.
Resserrant ses jambes autour de lui, elle se mit à accompagner ses coups de reins.
Il ahanait, cherchant encore à accélérer.
Il se mit à accentuer fougueusement ses coups de boutoir, lui provoquant quelques gémissements.
Il se ficha au fond d’elle et lâcha plusieurs salves de semence.
Le sentant jouir, elle se serra autour de lui, et atteignit, elle aussi, l’orgasme.
Il se coucha à côté d’elle.
William se sentait tout bizarre. Il n’avait pas revu ou entendu Déborah depuis le jour du fameux FaceTime.
Il savait que ça lui ferait quelque chose de la revoir, mais il ne pensait pas que ce serait dans un tel contexte. Il s’était senti coupable de l’avoir trompée avec Dorine, mais aussi et surtout de ne pas avoir eu le courage de rompre avec elle. Il avait compris qu’elle se soit sentie blessée et trahie par lui. Mais, au fond, ils étaient jeunes et ne s’étaient rien promis.
Ce n’est pas qu’il n’était pas bien avec elle, non, mais il avait toujours voulu conquérir les filles, et Dorine avait, au début tout du moins, été une proie de plus. Le problème avait été, d’abord qu’elle vivait sous son toit et qu’il la voyait tous les jours, ensuite qu’elle s’était drôlement embellie ces derniers mois, au point de ne plus être ni le glaçon ni la fille inaccessible qu’il avait connu.
Enfin, les kilomètres que Deb avait mis entre eux n’avaient rien arrangé. Bon sang, c’est qu’il n’était pas de bois ! Avoir chaque jour sous les yeux un canon comme Dorine avait de quoi vous faire bouillir et baver comme un animal sauvage au moment du rut.
Cela avait été plus fort que lui. Quand il l’avait trouvée toute tremblante et pelotonnée sur le canapé, il avait eu envie d’elle et avait tenté sa chance. Si elle lui avait cédé, c’est que son charme avait opéré et qu’il était arrivé à ses fins.
La suite, c’est qu’il s’était épris de cette splendide jeune fille qui n’avait pas arrêté de le surprendre.
Par sa beauté bien entendu, mais pas seulement. Elle était vraiment une belle gamine, carrossée de façon quasi parfaite, mais, ce qui ne gâchait rien, c’est qu’elle en avait dans la tête. Belle, cultivée et intelligente, la fille de rêve.
Vivre avec elle avait été d’une facilité déconcertante. Elle savait entretenir un intérieur, était économe, organisée et soignée. Il s’était complu dans la vie de couple.
Il se sentait un homme mûr et épanoui et c’était grâce à elle. Il le savait, et lui en était reconnaissant.
En revanche, c’est vrai que côté sexe, il sentait bien que ce n’était pas toujours le super pied. Elle aimait la douceur, les caresses et, avec lui, elle n’y trouvait pas toujours son compte. Il avait bien conscience que si, de son côté, il était satisfait, elle, en revanche, ne l’était pas forcément à chaque rapport.
Il savait qu’il devait s’assagir, mais que ce n’était pas évident d’aller contre sa nature. Il n’avait pu s’empêcher, souvent, de comparer les deux jeunes femmes les plus importantes de sa vie. Incontestablement, Déborah était une partenaire sexuelle qui correspondait mieux à son tempérament. Elle aimait quand il y allait fort, quand il donnait sa pleine puissance dans des relations sexuelles musclées.
Dorine, elle, préférait qu’il soit plus dans la retenue, « sur la réserve » comme il le disait parfois, et, c’est vrai, que cela l’avait souvent mis en difficulté, voir avait un peu gâché son plaisir.
Déborah, c’était la femelle à l’état brut. Elle aimait passionnément, certes, mais avec le besoin de donner et de recevoir toujours le plus ardent, le plus fort témoignage d’amour. Avec elle, c’était physique.
Il en était là de ses réflexions lorsque son père lui annonça qu’ils arrivaient. Le temps était superbe et le bassin projetait une magnifique clarté bleutée. La journée s’annonçait belle et ils entrèrent dans un restaurant pour déjeuner.
Déborah ne décolérait pas. Depuis que son père lui avait demandé de l’accompagner pour les tractations du jumelage des deux établissements en lui annonçant que William serait présent, elle avait senti sa colère grimper pour atteindre son paroxysme le jour de la rencontre. Elle ne pouvait détourner ses pensées de la trahison de son ex-chéri. Elle revivait comme dans un film que l’on se passe et repasse la même scène, l’instant où elle vit Dorine sortir de la chambre, juste revêtue d’une serviette et semblant faire comme chez elle.
Elle ressentait, physiquement, la même chaleur monter jusque dans ses tempes et envahir toute sa tête.
Ce traître de William était rapidement, sitôt parti à des centaines de kilomètres d’elle, retombé dans ses travers et n’avait pu s’empêcher de sauter cette petite oie blanche. Elle n’était pas si blanche que ça, en fait, elle était une véritable salope. Elle savait pertinemment que Willy et elle sortaient ensemble depuis de longs mois. Tout le lycée le savait. Elle s’était laissé séduire pour mettre dans son lit le seul mec qu’elle n’aurait, en principe, jamais dû envisager d’avoir. Mais voilà, ce mec était tellement léger dans sa vie et dans ses relations amoureuses, qu’il n’avait sans doute pas pu résister à l’idée de culbuter celle qui aurait dû, depuis longtemps, être la petite amie de son meilleur copain.
Mais quel con, ce Jérémy ! Depuis le temps qu’il bavait devant les grosses loches de sa voisine de palier, comment se faisait-il qu’il ne se soit jamais déclaré ? Il ne pouvait qu’être puceau, pensa-t-elle en rigolant silencieusement. Pourtant, c’était un beau gars. Rien à voir avec Willy. Jérème, c’était la force tranquille, la force sage, la force réfléchie. Bref, Il était sûr de sa force, mais n’en abusait pas. Elle aimait par-dessus tout son corps. Une plastique de véritable athlète. Un corps de rêve, qu’on adore caresser du plat de la main.
Un corps dont on ne se lasse jamais. Willy était très musclé, c’est vrai. Mais c’était de la force à l’état brut. D’ailleurs, il n’était qu’une brute épaisse. Toujours dans l’épreuve de force. Mais, elle le savait au fond d’elle-même, c’était ça qu’elle adorait. Sentir en permanence la puissance de son partenaire.
Si Jérème était un calme et un pondéré, Willy, lui, c’était une bombe atomique, un trente-deux tonnes en mouvement. Il vous attrapait, il vous broyait. C’est ce contraste entre sa féminité, toute en nuance et en douceur, face à cette force sauvage et indomptable qui la faisait craquer. Il y a longtemps qu’elle le savait.
Jérème, c’était un taureau tranquille, sûr de sa force, mais qui n’en use que s’il y est obligé.
Willy, c’était un cheval fougueux qui avait besoin de ruer dans vos brancards pour vous montrer sa force, et ça, ça la faisait grimper aux rideaux. Il n’empêchait que cet homme avec qui elle avait connu ses plus forts orgasmes, l’avait bel et bien laissé tomber pour une pétasse qui avait la réputation de son sobriquet, le glaçon. Il devait se faire chier à cent sous de l’heure, mais ça, c’était bien fait pour lui.
Les quatre se firent face.
Le père de William tendit la main et les poignées de main se firent.
William alla vers Déborah.
Il s’avança, mais elle lui tendit la main.
Le père de la jeune femme désigna un salon équipé de deux canapés se faisant face.
Les palabres commencèrent. Les deux chefs de famille et patrons échangèrent longtemps sur les raisons, les conditions, les attendus, bref, les tenants et aboutissants du jumelage de leurs deux établissements.
Le père de Déborah s’interrompit.
Elle se leva et alla passer commande.
Quand le garçon apporta les boissons, elle se leva de nouveau.
William attendit quelques minutes et, voyant qu’elle ne revenait pas :
Il sortit et, ne la voyant pas sur le parvis du restaurant, se mit à la chercher.
Il la trouva sur la Jetée Thiers, regardant l’île aux Oiseaux.
Elle ne le regardait pas et continuait à fixer droit devant elle.
Il esquissa un sourire.
Elle jouait le jeu, comme dans le passé quand ils s’amusaient à s’agacer.
Là, elle perdit sa contenance.
Elle cessa de regarder l’horizon pour le fixer droit dans les yeux.
Elle l’observa quelques instants en silence avec un léger sourire sur les lèvres, puis le pointa du doigt.
William rentra le soir pour le dîner.
Dorine l’attendait, inquiète et impatiente de savoir comment cela s’était passé.
Cela faisait cinq semaines que les pourparlers avaient commencé et, hormis quelques rares comptes-rendus sans grande importance, William ne lui avait quasiment rien donné comme informations sur l’avancement des échanges.
Elle décida de rencontrer son patron pour savoir où cela en était.
Elle profita d’un matin où elle le croisait près de son bureau pour lui poser la question.
Dorine sortit de ce bref échange complètement déconcertée. Pourquoi Willy ne lui avait-il pas parlé de ça ? Pourquoi ne lui avait-il pas dit qu’il avait en charge une partie des négociations, sans son père et, visiblement, en tête à tête avec la Déborah ? Que lui cachait-il ? Qu’est-ce qui se tramait dans son dos ?
Elle voulut en avoir le cœur net. Elle appela Jérémy.
Il y eut un long silence.
Déborah revivait.
Avoir retrouvé son Willy, alors qu’elle ne l’avait pas oublié, alors que tout n’était pas toujours super avec Jérème, alors qu’elle savait maintenant qu’il avait changé, mûri, et alors qu’elle savait que ça n’était pas l’amour fou avec Dorine. En clair, tout cela la rendait fiévreuse.
De nouveau, elle se sentait envoûtée, irrésistiblement attirée par ce garçon, cet homme à présent.
C’est vrai qu’il avait incroyablement changé. Il faisait homme, presque patron. Il semblait toujours aussi sûr de lui, mais, aujourd’hui, il était posé, serein, impavide. Il avait dans le regard quelque chose qu’il n’avait pas à l’époque. Quelque chose d’intimidant, de fascinant. On ne pouvait plus détacher son regard de ses si beaux yeux vert menthe. Il s’était transformé en un homme plus que séduisant.
Son visage taillé à coups de serpe, ses épaules larges, ses jambes musclées et arquées, sa taille fine, son port altier, il était vraiment un très bel homme. Ils n’avaient d’ailleurs pas tergiversé trop longtemps pour se tomber dans les bras l’un de l’autre.
Dès la seconde réunion, il proposa aux deux patrons de les soulager de la partie bassement matérielle et que Deb et lui allaient s’en charger. Ils avaient juste besoin de leur accord pour trouver un local pour se réunir.
On leur confia le bureau du père de Deb, qui, passant la journée au restaurant sur le bassin d’Arcachon, avec le père de Willy, leur laissait la pièce en toute liberté. Il faisait bien vingt mètres carrés, avec un grand bureau près du mur du fond et avec un immense canapé pour mettre à l’aise les visiteurs.
C’est là qu’ils s’étaient jetés dans les bras l’un de l’autre et s’étaient aimés à la folie.
Chacun retrouvant toutes les sensations un temps oubliées.
Sitôt la porte franchie, il l’avait attirée à lui.
Il la lâcha et se tourna vers la porte.
Elle regardait ses chaussures et se tordait les mains.
Il se précipita contre elle et la prit dans ses bras.
Il l’embrassa et elle lui rendit son baiser.