n° 22643 | Fiche technique | 20260 caractères | 20260 3733 Temps de lecture estimé : 15 mn |
17/09/24 |
Résumé: Savons-nous vraiment pourquoi les couples battent de l’aile ?
Il suffit de si peu pour que tout bascule... | ||||
Critères: fh ff | ||||
Auteur : Jane Does Envoi mini-message |
Avec le temps, les choses avancent, évoluent en quelque sorte, et ce qui au début paraît beau, presque merveilleux pour les amours naissantes, horripile quelques années plus tard. Moi, c’est Angèle. Je suis une femme plutôt active et mon mari l’est tout autant. Nous avons une jolie maison, un bon travail tous les deux, et en douze ans de vie commune, nous avons su construire une ambiance calme. Un foyer heureux qui s’est agrandi avec la venue en un seul accouchement de deux enfants. Des jumelles, Amélie et Alyzée, qui nous donnent toute satisfaction, c’est vrai. Alors ? Eh bien, allez savoir pourquoi, l’approche de la quarantaine, ou la routine peut-être, mais depuis quelque temps je me surprends à rêver.
Quand je dis « rêver », le mot n’est pas le bon, sans doute. C’est un besoin irrépressible de voir et de connaître un univers différent. Je ne parviens pas à expliquer ce que je ressens. Tout m’énerve, jusqu’aux propos les plus anodins de Manu. Ah oui… c’est vrai, l’homme avec qui je passe ma vie se prénomme Emmanuel, d’où ce diminutif commun. Manu qui lorsqu’il est à la maison me prend la tête de plus en plus. Je n’ai pas là encore, de vraies raisons d’être dans cet état de fébrilité permanente. Nos filles ont dix ans désormais et je dois avouer que nos routes sont pavées de joie. Pas d’engueulades, pas plus que la norme, quoi ! Et pourtant…
Je prépare le repas du soir de ma marmaille et du salon, la voix de Manu qui crie pour couvrir le son de la télé trop fort. Je suis plongée dans mes pensées, sombres, je l’avoue. Et je ne réponds pas, mais c’est simplement parce que distraite, je n’écoute pas non plus. Voici que rapplique Amélie !
Je ne bronche pas, et le nez dans mes gamelles, je termine ma béchamel. Il est grand et peut bouger ses fesses pour se servir son fichu apéro. Quelques secondes passent et il surgit devant moi, pas très souriant.
C’est vrai que j’ai haussé le ton. Bon sang ! Je ne me comprends plus moi-même et la crise est peut-être plus profonde que mon cerveau l’imagine. Manu est reparti et je l’entends qui bricole dans le meuble où sont entreposées les bouteilles d’alcool fort. Il a bien réussi à se le servir, son foutu apéro, et sans mon aide. Pourquoi est-ce que mes yeux s’humidifient comme ça ? Je ne vais pas piquer une crise de nerfs, pas à la maison, pas devant nos filles. Et je me replonge dans la confection de ma sauce. Des endives au jambon… les filles en raffolent. Et le plat à gratiner repose sur la grille du four. J’ai donc un moment pour moi !
— xXx —
Les jours passent et me semblent en tous points identiques aux précédents. Le coup de semonce et la prise de bec qui nous ont opposés, Manu et moi, sont oubliés. Surtout par lui, parce que de mon côté, la cocotte bout toujours autant. Trente-six ans… je vais avoir cet âge dans un mois. Est-ce l’approche de la quarantaine qui me tarabuste tellement ? Notre altercation a eu lieu il y a… une douzaine de jours, et je songe que mon homme n’a pas une seule fois changé sa politique. Il en est resté à son petit cérémonial. Il rentre de son cabinet, il est avocat, vers les dix-huit heures, s’installe dans son fauteuil, le journal du jour à lire sous le nez. Et il suit aussi les infos à la télé, avec les filles qui vont le rejoindre dans l’attente du dîner.
Une belle vie pour tout le monde, non ? Et la boniche de service qui se tape le linge à laver, le rangement des chambres des demoiselles, la préparation du repas, oui, une vie de rêve en fait. De surcroît, pour couronner le tout, lorsque je vais me coucher, mon brave conseil ronfle déjà. Et j’ai beau me creuser la cervelle, il m’est impossible de me souvenir de notre dernière caresse, ou pire encore, de la dernière étreinte qui nous a réunis lui et moi. C’est dire que ce n’est pas vraiment récent. Je me sens oubliée, juste utile pour les travaux ménagers, en fait. Pourquoi est-ce que j’ai la pénible impression que notre couple se délite au point que Manu en perd l’envie de mon corps ?
Tout jeter aux orties ? Non, c’est juste pas possible ! Nos filles ne méritent pas que je rejette en bloc ce qui est mauvais avec le bon qui subsiste sûrement. Je dois me ressaisir, faire la part des choses. Mais comme il est difficile d’étaler mes états d’âme à mon mari qui ne voit rien venir. Lui est dans son petit confort et imperturbablement il perpétue ce qui m’énerve de plus en plus. Ce que lui voit comme des petits mots gentils, ces « mamans » incessants dont il m’affuble à longueur de soirées, cette manière d’ignorer royalement mes mises en garde, non, je suis certaine que le dialogue est vain. Alors ? Vais-je sombrer sans lutter ? Cet amour qui nous a unis… à en fabriquer ces deux gamines qui ne demandent qu’à sourire, où est-il parti ? Se cache-t-il si bien que nous passons à côté tous les jours sans nous en apercevoir ?
Au bureau, ma collègue et associée, devenue une amie au fil des ans, demeure d’humeur égale. Elle aussi vit une période compliquée et il m’arrive de songer que ça déteint sur moi. Mais elle ne montre rien lorsque nous sommes ensemble au travail. Apparemment, elle se bat et doit faire face à une maladie qui mange lentement son homme. Mes petits soucis, face à ceux qu’elles traversent, ne sont que broutilles. Julie sait trop bien camoufler ses cernes sous les yeux, dus sans doute à des nuits d’insomnies et des larmes qu’elle ne montre jamais. Chacune de nous a sa vie et les heures croisées qui nous réunissent dans le travail sont tels des rails de voies ferrées, elles ne se rejoignent jamais.
C’est bien des mois après mes premiers troubles, surmontés tant bien que mal, qu’un petit matin de novembre Julie m’informe que son mari s’est éteint à l’hôpital et qu’elle sera indisponible quelque temps. Sa souffrance de ce départ est immense, bien sûr, mais elle vit cela comme la délivrance de cet homme avec qui elle a marché tout au long de leurs plus belles années. Pas d’enfant, elle se sent soulagée de ne plus voir souffrir l’homme qui comptait le plus pour son cœur. Et elle retrouve dans ses activités professionnelles une sorte de dérivatif. Mais l’épreuve qu’elle a vécue m’a fait la découvrir dans un univers totalement différent de celui du cadre de notre job. Et… j’apprécie la femme qui se cache sous le masque de la veuve encore fragile.
En fait, je me rends compte que sous les traits de la petite brune travailleuse que je côtoie depuis des années, se tient une femme remarquable, un cœur qui a battu pour un homme, et qui, là, d’un coup, se libère de toutes contraintes et misères du monde. J’imagine que ce qu’elle a enduré l’a rendue plus forte. Et mon regard sur Julie change. Oh ! Ça ne se fait pas en une minute, non ! C’est lent, long et allez comprendre pourquoi cette femme de quelques années mon aînée, je la vois avec des yeux neufs. Nous partageons plus de choses depuis qu’elle est veuve, que tout au long de notre parcours au bureau. Ce qui se crée là est plus fort qu’une amitié entre deux nanas. Nous allons prendre un pot ensemble, nous nous parlons plus, des signes très particuliers qui résonnent autrement en moi… en nous peut-être !
— xXx —
Manu, en sa qualité d’avocat et de bâtonnier, se doit de suivre des colloques qui durent jusqu’à une semaine, et ce dimanche soir il quitte la maison pour une huitaine de jours. Alors les filles sont à l’école la journée et chez la nounou quand il n’y a pas cours et que je travaille. Le soir, je les récupère et nous passons des soirées entre filles. Je sens que Julie est plutôt morose et je lui ai donc proposé de venir passer la soirée avec nous. Bien sûr, mon mari ne trouve rien à redire lorsque je lui fais part par téléphone de cette invitation à celle dont il connaît le parcours, et les ennuis. C’est donc le lundi soir qu’elle entre pour la première fois chez nous. Les filles évidemment sont un peu intimidées, mais tout rentre très vite dans l’ordre.
Avant le dîner, nous sommes quatre à jouer au scrabble, pour le plus grand bonheur des petites qui adorent ce jeu. Je soupçonne même notre hôte de laisser gagner un peu Amélie qui est une mauvaise perdante. Ce qui nous fait sourire, ce sont les mimiques des gamines quand elles « transpirent » ou butent sur un Z ou un Y, difficultés qui justifient le nombre plus élevé de points que valent ces lettres. Vient forcément l’heure d’aller coucher les donzelles, qui tentent comme tous les enfants de gagner un peu de temps. Mais comme Julie nous accompagne pour les border et qu’elle s’engage à leur lire l’histoire quotidienne, la pilule passe mieux, du coup.
Nous regagnons toutes les deux le salon, et je range tranquillement le plateau du jeu, le sac contenant les pions frappés d’une lettre, et l’une d’entre elles, comme toujours, s’évadent et après deux ou trois rebonds se faufilent sous le canapé. Avant que je puisse esquisser le moindre mouvement pour la récupérer, mon amie se met à genoux et baisse la tête en tentant de rattraper le petit carré de plastique. Je suis à moins d’un mètre d’elle et je ne peux que voir ce corps gracile qui se contorsionne dans une posture assez étrange. Sa jupe étroite la gêne dans ses mouvements et c’est bien d’un geste machinal, sans se formaliser de ma présence, qu’elle la relève sur ses cuisses sans pour autant se relever.
Si dans ce simple mouvement Julie dénude bien haut ses longues jambes, l’arrière du vêtement que j’ai en droite ligne du regard s’en trouve également plus ou moins retroussé. Et allez savoir pourquoi, mais… la soudaine apparition d’un string me fait un drôle d’effet. En fait, je devine une jolie paire de fesses que seule une ficelle blanche vient interrompre. Je n’arrive plus à détacher mes yeux de ce derrière qui se trémousse devant moi. Il n’y a pourtant aucune connotation sexuelle dans les mouvements que réalise la femme qui ne veut que ramasser un pion du scrabble. Et lorsqu’enfin entre ses doigts la petite chose ivoire remonte de sous le sofa, c’est avec un sourire qu’elle lève le visage vers l’endroit où je me trouve.
L’air de triomphe qu’elle arbore à une tout autre signification pour la voyeuse involontaire que je suis. Dans mes prunelles, lit-elle ce qui ne devrait pas s’y refléter ? Toujours est-il qu’à son tour, je la sens déroutée. Sa voix, comme une musique m’entre dans les oreilles, me vrille les tympans. C’est doux, c’est… quasi magique !
Elle se redresse, roule des hanches pour faire redescendre sa jupe, et comme elle est dans l’obligation de se servir de ses mains pour recouvrir ses fesses, elle saisit d’un coup que ce sont bien celles-ci qui viennent de me mettre le feu aux joues. Et cette fois, c’est elle qui rougit et balbutie quelques mots d’excuse.
Elle me tend le carré et je lui ouvre le sac. Sa main qui va pour le fourrer dans le sachet en toile frôle la mienne. C’est comme un coup de tonnerre. Je ne pige plus du tout ce qui me tombe dessus. Là, j’ai une incroyable envie, celle d’embrasser cette femme. Nous nous connaissons depuis que je travaille et je me sens comme aimantée par cette Julie qui est à quelques centimètres de moi. Comment ma patte lâche-t-elle la toile contenant les jetons ? Je ne sais plus, mais il est évident que ce sont nos deux bouilles qui se rapprochent ensemble pour une jonction de nos lèvres que plus personne ne saurait arrêter. Le plus incroyable de cette affaire, c’est bien que je trouve merveilleuse cette pelle qui nous enflamme les sens. Et… que je n’ai pas envie qu’elle cesse.
Si nos bouches s’unissent, nos doigts ne sont pas en reste. Ils se caressent sur le tissu de nos vêtements et nous roulons sur le tapis entre divan et fauteuils. Je suis totalement submergée par une foule de sentiments totalement contradictoires. La pensée que je vais tromper mon mari, mon cerveau la compense en m’envoyant des informations d’un autre ordre. Il s’auto-excuse en me renvoyant l’idée que ce n’est pas tromper que de toucher une autre femme, puisque la possession est impossible. C’est très intense et mes réactions sont toutes axées sur le fait que Julie ne peut pas me pénétrer. Comment nos vêtements se retrouvent-ils tous entassés, enchevêtrés les uns dans les autres ? Il ne reste sur le corps de la jolie copine que ce string qui m’a tant bouleversée.
Et encore n’est-il plus là que l’espace d’un temps suffisant pour glisser sur ses longues quilles. Je flirte avec ce ventre et dans des positions identiques à celles que les amants de quelque sexe que ce soit adoptent, nous allons à la rencontre de chacune d’entre nous. Je sens cette peau douce aux saveurs épicées, rehaussées encore davantage par un parfum qui fait frémir mes narines. Elle aussi lisse de ses doigts la choupette de poils qui orne mon pubis. Et je suis face à cet endroit chez elle qui est aussi chauve qu’un œuf. Les mains ne suffisent plus pour goûter au fruit défendu.
Est-ce elle ou moi qui de nous deux s’offre un voyage de la pointe de la langue sur d’autres lèvres ?
Pas de retour en arrière, aucune retenue de dernières minutes, nous faisons l’amour entre nous, et c’est la première fois que je touche un ventre qui se trouve être un reflet du mien. Elle n’est pas immobile non plus et nous roulons sur le flanc, laissant nos visages s’enfouir largement dans l’espace ouvert de nos gambettes écartées au maximum. Je m’enivre de ces odeurs intimes et ne cherche plus à savoir si je fais bien ou mal. Il n’y a plus là que deux personnes qui se donnent un vrai plaisir. Qu’est-ce que ça a de si différent que nous soyons deux corps semblables ? Ça n’interdit pas le plaisir de venir chauffer nos sens, de nous faire mouiller sans relâche. Et… je découvre cette incroyable balade en femmes majeures sur la partition d’une Julie offerte qui se donne, mais qui sait prendre aussi.
Les doigts, les langues, tout est mis à contribution pour une jouissance qui n’a de cesse de nous emporter toujours plus loin dans les caresses. Qui de nous jouit d’abord ? Je m’en fiche, mais ce dont je suis sûre, c’est bien de la violence de cet orgasme qui me secoue entièrement. Puis lentement, le calme revient sur nos amours fougueuses. Nous nous embrassons encore et encore de longues minutes. Nos lèvres semblent ne plus vouloir se quitter, mais il le faut bien. Et lorsque nous nous relevons, une sorte de barrière s’instaure presque immédiatement. Pas de froid entre nous, juste une limite que l’instant d’après remet en place. Oui… Nous nous redressons, nous nous rhabillons, et comme si rien n’était arrivé, nous sommes de nouveau deux amies « normales ».
Juste un coup de chaud, un coup de peau. Nous n’en parlons pas, plus. Un dernier verre, puis Julie quitte ma maison et c’est exactement comme si jamais nous n’avions franchi la limite. Je me sens bien, pas plus que cela anxieuse. La parenthèse se referme sur ma première et unique expérience saphique… Depuis ce fameux soir, Manu est rentré et Julie et moi continuons de bosser main dans la main. Il n’a plus jamais été question de ces instants fous. Je ne sais quels souvenirs elle en garde, mais de mon côté, il me reste… une sorte de plénitude et un vrai sentiment que ce soir-là, Julie a pleinement contribué à sauver mon couple.
Pourquoi ? Comment ? Je n’en sais rien. Peut-être que si j’avais vécu une identique mésaventure avec un autre homme, aurais-je eu d’autres réactions, d’autres réflexes ? Là, c’est un bon souvenir, un secret entre elle et moi, et nous n’en reparlons jamais. Nous savons que ça a eu lieu, mais nous ne renouvellerons pas l’expérience. La vie continue, Manu a pris conscience qu’une femme avait une double journée et depuis… nous avons adopté un autre mode de fonctionnement plus partageur dans notre couple. Je n’ai pourtant aucun regret pour ce qui s’est passé ce soir-là, et je garde toujours l’idée que je ne l’ai pas tout à fait trompé. Mais… à bien y réfléchir… ai-je tort ou raison ?
En tout cas… une vraie première fois avec une femme… a fait que notre mariage retrouve une seconde jeunesse… et en cela Julie est une fée… elle a sorti notre amour de son long hiver…