Une Histoire sur http://revebebe.free.fr/
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Temps de lecture estimé : 22 mn
19/04/25
Présentation:  Ouvrez grand les oreilles (et peut-être un peu plus). Laissez La voix vous toucher là où ça gratte, là où ça manque. Et souvenez-vous : sur Revebebe, on bande aussi avec tendresse.
Résumé:  Radio Fesses n’est pas un simple récit : c’est une vibration, une caresse textuelle à la frontière du fantasme, de la confession. Un manifeste pour celles et ceux qui veulent encore jouir du verbe sans craindre le regard.
Critères:  #tutu #revebebe #humour #réflexion #chronique #société #confession #personnages #voyeur #exhibitionniste #masturbation #fellation #lieupublic #internet
Auteur : L'artiste  (L’artiste)      Envoi mini-message
Radio Fesses

Les Veilleurs de Nuit

(Ou comment une radio a mis la main là où Spotify n’ose pas cliquer.)



La radio, elle pue le grenier. Une vieille Philips jaune pisse, retrouvée entre une raquette de badminton fondue et une encyclopédie Larousse de 1983. Elle grésille dès qu’on la branche. Elle grésille même quand elle est débranchée. Elle semble n’émettre qu’une chose : le regret.


Mais chaque nuit, à 2 h pile – pas 1 h 59, pas 2 h 01, à 2 h précises – elle s’allume seule. Le volume monte, tout doucement, comme une main sous une couette.


Et La voix arrive.


Basse. Frottée. Moelleuse. Ni femme ni homme. Ni jeune ni vieille. C’est une voix qui a déjà couché avec ton cerveau avant même que tu réalises que t’étais excité.



Puis un léger rire. Pas pervers. Pas poli non plus. Un rire complice. Celui d’un fantôme qui sait ce que tu caches dans ton tiroir du bas.


Chaque nuit, tout semble converger vers La voix. Si l’on allume son PC à ce moment-là, un site web anonyme et sans modération, au nom débile et obsédant « https : //www. radiofesses. revebebe. xyz », à l’interface moche, au contenu dément, apparaît. Pas dans un onglet. En plein écran. Comme s’il était relié à la fréquence radio.


Les mails ? Inutiles. Il suffit d’écrire et de poster. Puis La voix lit. Le téléphone ? Pareil. Pas de numéro. Juste un bouton « Appeler ». Et soudain, on est à l’antenne. Directement. Comme si la radio reconnaissait les doigts fébriles et les confessions prêtes. Personne ne comprend comment ça fonctionne, mais tout le monde sait que ça marche. Des inconnus y postent leurs nuits, leurs manques, leurs hontes bandantes. Et La voix les lit. En direct. En murmure. En orgasme auditif.


Au début, on croit à un bug. En suite, à une hallucination. Et enfin, on se cale un coussin sous les reins et on coupe les notifs. Et toi, lecteur pathétique (et donc parfait), t’es là aussi. Tu ne le savais pas encore, mais dès cette nuit, tu vas tendre l’oreille. Et peut-être… autre chose.



Ce soir, à 2 h 17, La voix a lu :


Je suis tombée amoureuse d’un pied. Le sien. Il avait une forme. Une intention. Une pudeur. Depuis, je bande quand je l’imagine marcher.


Cinq minutes plus tard, elle a soufflé :


Je rêve d’un cunnilingus fiscal et qu’on me suce en me demandant mon taux d’imposition.


Il y a aussi Cyril, 43 ans, qui n’a pas joui depuis le confinement (le premier, pas le deluxe). Il écoute en slip, la main sur son bas-ventre, les yeux fixés sur le plafond où plus rien ne s’écrit.


Mina, elle, 28 ans, bosse de nuit à l’accueil d’un hôtel Ibis Styles. Elle écoute au casque. En douce. Pendant qu’elle remplit des formulaires d’arrivée pour des couples infidèles. Elle mord son stylo quand La voix dit :


Je veux que quelqu’un m’écoute respirer pendant que je trie mes chaussettes. Et qu’il trouve ça beau.


Un vieux couple, dans leur lit médicalisé, écoute en stéréo. Lui ne parle plus. Elle n’a plus de dents. Mais à chaque récit, ils se tiennent la main comme au bal du lycée, version hospice.


Sur la fréquence 92. 7, on entend des choses que le monde ne dit plus à voix haute : des lettres d’amour jamais envoyées ; des histoires d’érection en cours d’aquagym ; des messages vocaux supprimés avant d’être envoyés « Je t’aime, mais juste avec le doigt, tu vois ? »


Et à 2 h 59 :



Puis clic. Silence.


Et le monde redevient gris. Enfin, noir… Il fait nuit.


Mais le cœur ? Lui, il est encore tout mouillé. Et demain ? Peut-être une nouvelle confession. Peut-être un soupir. Peut-être… toi.




Les Chroniques du Slip

(Ou comment les gens ont commencé à baiser par procuration avec leurs cordes vocales.)



À 2 h 03, la nuit suivante, le phénomène se reproduit. Et La voix dit :



Et c’est là que Radio Fesses devient une messe. Les gens n’écoutent plus. Ils attendent. Ils s’habillent pour. Certains mettent du parfum. D’autres se démaquillent leur libido, à poil devant la radio pour ne pas qu’elle les juge sur leur anatomie mentale. Et surtout, ils écrivent. Ils postent sur le forum. Des récits. Des souvenirs. Des aveux. Le site dégouline de secrets comme un cahier de textes trop intime qu’on aurait oublié sur un banc public.



Chronique n° 17 – La Boulangerie.

Je suis boulangère. 5h du mat, levain au cul, farine dans les cheveux. Un jour, un client m’a dit : « T’as les mains douces, tu dois bien branler la pâte. » Je l’ai regardé. J’ai rien dit. Et j’ai mouillé. C’est con. Depuis, je suis excitée quand je fais une brioche.


Chronique n° 23 – Le Fantasme logistique.

Je veux juste que quelqu’un m’enlève mon manteau, lentement, et me dise : « T’as fait les courses ? » pendant qu’il me touche le sein gauche. J’ai un fantasme de quotidien. J’ai honte. J’ai 42 ans. Et mon sex-toy préféré, c’est une liste de tâches bien rangée.


Chronique n° 41 – La Branlette Spirituelle.

Je me suis branlé pendant la messe. Pas pour le frisson religieux. Juste parce que j’étais assis derrière quelqu’un qui portait du patchouli et qui chantait faux avec une voix rauque. J’ai pensé : « Si le désir existe ici, il existe partout. » Et j’ai remercié Dieu.


La voix lit tout. Lentement. Sans glousser. Sans juger. Elle rend sacré ce qui est absurde et polit les déviances comme des galets érotiques.


Et l’audience ? Elle se transforme. Certains ferment les yeux et jouissent sans se toucher. D’autres pleurent, parce que quelqu’un vient de dire ce qu’ils n’osaient même pas penser. Et là, La voix fait une pause. Un silence. Pas technique. Érotique. Puis elle dit :



Et le lendemain ? Le site radiofesses point revebebe point xyz explose. Les gens s’ouvrent comme des boutons mal placés.


« Je me suis fait sucer en pleurant. »

« Je suis tombé amoureux d’un message vocal. »

« Je veux qu’on me touche comme on feuillette un vieux livre de cuisine. »


Et dans tout ce bazar sensoriel, un pseudo revient souvent. Un·e utilisateur·ice qui signe juste : « VOIX_NUE »


Toujours en caps. Jamais de photo. Mais ses posts… sont incroyables. Des récits précis, sensuels, drôles, désespérés. On dirait presque… qu’iel sait. Qu’iel entend tout. Qu’iel est La voix. Mais non. C’est impossible. La voix, c’est une légende. Un fantasme. Un esprit sensuel venu d’ailleurs. Pas un·e geek planqué·e en Côte d’Ivoire qui postillonne dans un micro crade.


Non ?


… Non.


Nouveau post à 2 h 37. Lu par La voix à 2 h 38 :


« J’ai jamais aimé quelqu’un sans honte. Mais quand je vous écoute, j’ai envie d’aimer mieux. Même si c’est moche. Même si ça pue un peu les pieds et la trouille. »


Et La voix répond en direct :






L’Appel

(Ou comment les bouches se sont ouvertes, et les mains sont restées suspendues.)



Cette nuit-là, à 2 h 02, La voix ne lit pas.


Elle appelle.



Et un téléphone, relié directement à l’antenne, sonne quelque part. Un vieux combiné à cadran, planqué dans une armoire, vibre comme un clitoris qu’on aurait oublié trop longtemps.


Premier appel.


Une voix masculine. Jeune. Cassée.


Je crois que je ne bande que quand je suis triste. C’est pas que j’aime ça. C’est que c’est la seule fois où je me sens réel.


Silence.


Deuxième appel. Une femme. Vieille. Peut-être. Ou juste fatiguée.


Mon mari est mort il y a trois ans. Mais je me masturbe encore en pensant à lui. Pas à son corps. À sa façon de dire « tu veux du pain grillé ? » quand j’étais nue. C’était ça, l’intimité.


Troisième appel. Une voix androgyne. Moite. Théâtrale.


Je me branle en récitant du Racine. Parce que l’alexandrin me fait mouiller. Les mots qui tombent juste, c’est plus sensuel que n’importe quel doigt.


Et ainsi de suite. Les appels pleuvent. Des gémissements voilés. Des confidences sales, tendres, bancales. Un mec lit son journal de branlettes, griffonné à l’adolescence. Une femme raconte comment elle a couché avec son ex juste pour sentir en elle « quelqu’un qui la connaît ». Une personne ne parle pas. Elle respire. Et on comprend tout.


La voix ne commente jamais. Elle dit juste : « Merci. » ; « Je t’ai entendu. » ; « Tu es encore vivant. »


À 2 h 38, un appel fait buguer tout le monde.


C’est un couple. Ils se sont mis sur haut-parleur et commencent à faire l’amour. En silence. Lentement. On n’entend que le bruit des draps, des souffles, des frôlements. Pas du porno. Du présent.


Et après le coït, ils disent :


On avait plus baisé depuis 2019. Merci de nous avoir excités comme une guerre des étoiles intérieure.


Sur le forum, ça explose. Certains pleurent. D’autres jouissent. Un utilisateur poste juste :


Je n’ai plus besoin de Tinder. J’ai besoin d’écoute.


Et puis… à 2 h 59, La voix revient. Juste pour un murmure.



Et là, on comprend.


Ce n’est pas une émission. Ce n’est pas un fantasme collectif. C’est une bande de cœurs sales qui décident, une fois par nuit, de faire tomber la dignité dans un bol de céréales sensuel. Et La voix ? Elle devient un espace. Pas un personnage. Un endroit où on dépose nos tripes. Et parfois… nos fluides.




Le Signal Monte

(Ou comment les âmes branchées se sont mises à capter des choses qui n’existaient pas encore.)



Depuis la nuit de l’Appel, plus rien n’est pareil. Les gens attendent 2 h du matin comme on attend un amant interdit. Ils posent leur téléphone sur la poitrine, parlent à leur radio comme à un ex toxique, et se parfument l’aine pour un poste en plastique. Certains écrivent leurs confessions sur du papier toilette, comme si l’intimité avait besoin de textures pauvres pour être vraie. Et surtout… le forum est devenu un pays.


Radiofesses point revebebe point xyz est devenu un bazar sacré, un foutoir d’intimités qu’on n’ose pas nommer à voix haute. Chaque nuit, à 3 h 01, les auditeurs postent ce qu’ils ont entendu. Ils commentent, réinterprètent, fantasment les voix. Un type s’est mis à illustrer les appels avec des aquarelles de sexes tristes. Une femme compose des haïkus avec des extraits de soupirs.


Ah – ce soupir long

Glissé entre deux silences

J’ai mouillé l’ombre


Et dans tout ce chaos moite et brillant, un pseudo revient toujours.


VOIX_NUE.


Toujours là. Toujours après l’émission.



La nuit se prolonge alors, et maintenant, tout le monde se demande : c’est La voix ? La vraie ? Est-ce que VOIX_NUE est celle qu’on entend aussi à 2 h ? Est-ce une seule et même personne ? Un groupe ? Un délire collectif post-pandémie ? Le mystère devient un kink en soi.


Mais une nuit, le signal change. À 2 h, la radio grésille plus fort. Pas comme d’habitude. Pas sexy. Vivante. Il y a un souffle. Littéral. Comme si quelqu’un respirait à l’intérieur de la fréquence.


Et à 2 h 03… une voix nouvelle.


Pas celle qu’on connaît.


Une autre. Plus grave. Plus râpeuse. Plus… fatiguée.



Et là, elle parle. Elle ne lit pas. Elle se livre. Pendant une heure, elle raconte qu’elle n’a plus touché personne depuis cinq ans. Qu’elle s’est inventé une voix pour pouvoir exister. Qu’elle a lu des lettres de cul comme d’autres récitent des prières. Qu’elle s’est caressée en écoutant les autres jouir, en imaginant que c’était elle qu’on touchait, qu’on aimait, qu’on humiliait tendrement.



Elle rit. Elle pleure.


On entend un zip. Peut-être une fermeture éclair. Un bruit de peau tiède frottant une autre chaude et humide. Un froissement de solitude.


Et puis, à 2 h 59, elle dit :



À 3 h 01, radiofesses point revebebe point xyz implose. Des milliers de posts. Certains disent que c’est du fake. D’autres qu’ils ont reconnu La voix. Un mec dit qu’il en est tombé amoureux, au point de divorcer. Une utilisatrice écrit simplement :


J’ai jamais joui si fort. J’en frissonne encore.


Et VOIX_NUE ? Rien. Pas un mot. Disparu·e.


Pourtant, le lendemain, à 2 h, la radio s’allume de nouveau. Et La voix est de retour. Calme. Brûlée. Neuve.





Les Mains se cherchent

(Ou comment La voix est sortie de la radio pour baiser dans la vraie vie, mais lentement, avec les doigts d’abord.)



Ça commence par un regard.


Diane. 34 ans. Serveuse dans un bar un peu trop conceptuel où les cocktails s’appellent « Supplice de fruits rouges » et coûtent un bras qui sent la cardamome.


Elle reconnaît un homme.


Ou plutôt… un souffle.


Il commande un ginger beer, dit « merci » d’une voix un peu rauque, et là, un frisson. Elle l’a entendu, cette voix. C’était lui. L’appel de la nuit 17.


J’ai joui sur ta peau. C’était obscène, sale. J’ai pleuré après, c’est con, mais j’avais l’impression d’avoir malgré tout aimé proprement.


Elle le fixe. Il la fixe. Silence. Soupir partagé.


Et elle glisse un post sur le forum :


Ginger Beer, 21 h. C’était toi ? Si oui… recommence à respirer dans mon oreille, mais en vrai.


Le post devient viral. Des dizaines d’histoires de reconnaissance charnelle sans preuve. Un mec raconte qu’il a serré une main dans le métro à 3 h du matin, et que cette main avait la même pression que l’appel #42. Une femme dit avoir reconnu une cliente au marché bio, parce qu’elle a prononcé « aubergine », comme dans l’histoire où elle racontait s’être fait doigter sur un potager. Les corps commencent à se croiser avec mémoire. Mais pas des souvenirs visuels. Des souvenirs sonores. Auditifs. Organiques. Intimes.


Puis vient la première rencontre officielle.


De simples flyers anonymes déposés dans les boîtes aux lettres :


Viens à 2 h 31 rue Montreuil. Une table. Une radio. Des gens qui ont déjà joui ensemble sans se connaître. »


Et les gens viennent. Pas une orgie. Pas une fête. Un cercle de chaises. Un micro au centre. Chacun a une minute pour se présenter comme il l’a fait à l’antenne.


« Moi, c’est l’appel 24. Celui où je raconte que je bande que dans les parkings vides. »

« Moi, c’est celle qui a mouillé sur le mot «épicerie». »

« Moi j’ai dit que je voulais qu’on me chuchote «tu mérites» pendant que je fais une fellation. »


Et puis, on se touche. Mais pas comme tu crois. On se touche La voix. On lit des extraits. On murmure des fragments de posts. On se tient la main pendant que quelqu’un lit une lettre écrite à une ex qui chantait la Marseillaise pendant la sodomie.


Et certains pleurent. Et d’autres jouissent. Sans se déshabiller. Juste avec la mémoire de la chaleur partagée par les ondes.


Et cette nuit-là, La voix arrive aussi.


Pas sur la radio.


En vrai.


Pas déguisée. Pas masquée. Elle lit. Elle écoute. Et elle murmure :



Et là… certains s’embrassent. D’autres s’embrasent. Une fellation presque liturgique partagée comme un secret dans les toilettes, une masturbation à deux mains dans un coin sombre, un doigt glissé sans un mot dans une culotte qui pleure d’émotion


Personne ne juge. Parce que tout le monde a déjà joui dans sa tête ensemble.


À 4 h 12, tout le monde sort dans la rue.


Ils sont quinze. Ils marchent pieds nus dans les flaques. Ils chantent une chanson inventée en direct :


🎶 « J’ai mis mon sexe dans ton oreille… »

🎶 « Tu m’as sucé l’âme à distance… »

🎶 « Radio Fesses, je t’écoute avec mon gland… »


La police ne les arrête pas. Elle les écoute et soupire aussi.




Silence d’onde, cri d’intérieur

(Ou comment l’absence de La voix a réveillé le besoin de parler avec les lèvres mouillées du cœur.)



Depuis cette nuit de liesse au 31 rue Montreuil, la radio ne s’allume plus. Pas de grésillement. Pas de souffle. Pas de « Bonsoir, mes veilleurs. » Juste le vide. Un vrai vide. Celui qui hurle sans bruit.


Le forum explose. Certains hurlent à la censure. Un mec poste une photo de lui en train de se branler en pleurant devant une radio éteinte. Mais pas de message. Pas de signal. Pas même un post de VOIX_NUE, qui, soit dit en passant, a disparu depuis la rencontre.


Alors au bout de quelque temps, quelqu’un lance une idée. Un simple message, posté sur le web comme une couille à la mer, sous le nom CochonAstral88 :


Et si on continuait ? Nous, les autres, les moites, les fidèles. On prend le relais. Chacun sa nuit. Chacun sa voix. Une nouvelle émission. Une radio du peuple qui bande.


Et ça part. Un délire. Une pulsion collective. Un orgasme horizontal. Ils se partagent les nuits. Une personne par jour. Un micro. Un programme. Et chaque nuit, une nouvelle voix émerge.


Nuit #1 – L’Écho de la chatte libre :


Une prof de français lit ses lettres de rupture, en terminant chaque texte par un extrait de son journal de masturbation.


Nuit #2 – Mâle en surchauffe :


Un mec raconte ses plus grosses hontes sexuelles. Une fois, il s’est bloqué le pénis dans une bouteille de Perrier. L’émission se termine sur un fou rire collectif en direct.


Nuit #3 – Crème solaire et sodomie consentie :


Deux meufs racontent leur premier plan à trois pendant des vacances naturistes. On entend les vagues. Et des bruits de glaçons.


Nuit #4 – Lettre à mon anus, ce mal-aimé :


Une voix grave, fluide, lit une lettre sensuelle à son propre sphincter. C’est tellement touchant qu’une auditrice avoue ensuite avoir caressé le sien avec une larme au coin de l’œil.


Et ça prend. Des gens restent éveillés toute la semaine. Ils écoutent, enregistrent, créent des best of. Un mec a lancé une appli : FessCast. Un autre fait des montages ASMR avec les respirations des anciens appels.


La voix manque toujours, mais les voix nouvelles suffisent. Elles ne remplacent pas. Elles prolongent.


Et un soir… une surprise.


2 h 01. Un signal. Faible. À l’ancienne.


Puis, une voix.


La voix.



Silence.


Puis un nouveau programme est annoncé.



Et à la fin, juste une phrase.



Clic.




Les Censeurs Mouillés

(Ou comment l’État tenta d’éteindre la fréquence de la fesse, et se fit caresser l’intime au tribunal.)



Un matin, une dépêche AFP tombe.


Une fréquence pirate non déclarée, surnommée Radio Fesses, diffuse chaque nuit du contenu érotique non réglementé. Le ministère de la Communication et de l’Éthique Sonore ouvre une enquête.


Le Ministère de la Communication et de l’Éthique Sonore. Un nom qui sent la paperasse tiède et la masturbation sous contrainte dans les toilettes de la préfecture.


À sa tête : Sylvain Grobert. Costume gris. Voix aigre. Vierge émotionnellement depuis 2004. Il déteste tout ce que représente Radio Fesses : l’intime sans contrôle ; le sexe qui fait rire ; les gens qui jouissent sans demander la permission.


Il dit devant la presse :


C’est une fréquence dégénérée. Une orgie sonore. Une invitation au chaos par les oreilles. Et je ne parle même pas des gémissements sur fond de flûte.


Il monte un commando administratif. Des agents du CSA. Des ex-journalistes frustrés. Un psy raté qui a appelé trois fois la radio pour raconter ses rêves humides avec Emmanuel Macron.


Ils tracent l’émetteur et trouvent l’adresse. Une arrière-salle de laverie automatique. Entre deux machines à laver : une table, un micro, des coussins, un flacon d’huile de lavande et un cendrier en forme de clitoris, et une pancarte peinte à la main :


Ici, on se lave l’âme en mode délicat.


Ils coupent les fils, saisissent le matos, ferment le forum. Et ils pensent que c’est fini.


Sauf que…


À 2 h du matin, la radio se rallume.


Pas sur la fréquence.


Dans les gens.


Des centaines d’auditeurs ouvrent leur fenêtre. Ils sortent des enceintes et diffusent des enregistrements. Ils lisent les textes à voix haute dans la rue.


Une femme monte sur une poubelle et crie :



Des gens jouissent dans la rue. Pas par exhibition, par affirmation. Parce que maintenant, Radio Fesses n’est plus une émission. C’est une langue. Une température. Un endroit en soi.


Le ministère panique. Grobert transpire par les oreilles lorsqu’un avocat, maître Delorge, prend la défense du mouvement. Il dit, devant la cour :



La juge lève un sourcil, mais acquiesce. En silence. En serrant les cuisses.


Le lendemain, un communiqué officiel :


Par décret exceptionnel, la fréquence 92. 7 FM est reconnue comme zone autonome émotionnelle temporaire. Ce que vous y entendez ne regarde que vous.


Le forum revient. La radio reprend. Et La voix, toujours là, dit simplement :



Et ce soir-là, même Sylvain Grobert écoute.


La main sur le cœur, les yeux humides, et peut-être, un peu plus bas… quelque chose qui bat enfin.




La Dernière Onde

(Ou comment une voix a fini par dire adieu sans couper le micro, et comment les gens ont appris à se parler tout seuls en se touchant le cœur [et un peu le reste].)



C’est une nuit sans lune. Un silence de fin du monde. La ville dort d’un sommeil inquiet, et pourtant, à 1 h 59, des milliers de doigts attendent le clic. Le son familier du début de l’émission. Le petit grésillement orgasmique. L’ouverture. Le souffle.


Et puis, elle est là.


La voix.


Calme. Fatiguée. Mais… apaisée.



Silence.



Elle rit. Pas un rire sexy. Un rire triste, d’après-orgasme mondial.



Alors, elle propose un dernier jeu. Un rituel :



Et elle commence la dernière lecture.


Ce n’est pas un texte. Pas une histoire. Juste une liste de phrases, prises au hasard, dans des lettres envoyées depuis le début.


« J’ai aimé une fois, et c’était une erreur merveilleuse. »

« J’ai peur que personne ne m’ait jamais réellement touché. »

« Je bande de l’âme quand tu dis mon prénom comme une gifle. »

« Je veux juste dormir en sentant que quelqu’un me respire dans la nuque. »

« J’ai appris à jouir sans honte. Merci. »


Et puis… le silence.


Long.


Profond.


Tu crois que c’est fini. Mais non. La voix revient une dernière fois. Presque un souffle.



Clic.


Le lendemain matin, le forum est noir. Juste une page. Un bouton. « Réécouter. » Et dessous : « Ou recommencer. »




Épilogue – Le monde avec la radio éteinte.



Les gens continuent. Ils parlent, se lisent, s’écrivent et s’enregistrent. Le désir est devenu un réseau parallèle. Pas Tinder. Pas Grindr. Un érotisme sans image, mais avec une voix. On l’appelle la Fesse Connection. Certains envoient leurs fantasmes à des inconnus en audio. D’autres se retrouvent pour murmurer ensemble dans des placards IKEA. Une app est née : « Gemir ». Tu matches… pas avec des profils, avec des phrases.


Et toi, lecteur de l’extrême… Si tu entends encore La voix, parfois. Quand tu es seul. Quand tu écris. Quand tu bandes sans savoir pourquoi. C’est que tu fais maintenant partie de la fréquence.


Alors, va.


Et mouille quelque chose. 💦


Elle est là. Elle ne parle plus. Elle écoute.




FIN

(ou pas)





Chapitre Bonus – L’Orgasmographe de Lilith_Correctrice_69

(Ou comment une critique posée a déclenché une érection littéraire)



Il est 2 h 11 sur Radio Fesses. La voix vient de lire un témoignage poignant sur un gars qui s’est branlé devant Motus pendant le confinement et à qui feue sa femme manque terriblement. Les auditeurs soupirent. Les draps se froissent. Un mec quelque part s’essuie la larme avec un gant de toilette trop rêche. Et soudain…


Un message apparaît :

Expéditeur : Lilith_Correctrice_69

Objet : Retours constructifs.


« J’ai bien aimé. C’est original. On sourit, certes. Mais la narration est un peu longue, et ça devient répétitif. Et ce chapitre bonus… Franchement, un cheveu sur la soupe. Dommage. »


La voix tousse. Un silence. Puis elle répond, avec la caresse d’un martinet linguistique :


  • — Lilith… Lilith_Correctrice_69… 3 388 notations. Tu as distribué plus de demi-érections littéraires que le comité de lecture de Penthouse en 1974. Tu crois qu’on n’a pas vu ton petit 16, là, comme un coup de langue sans conviction ? Viens. On va parler. On va régler ça. Sur l’oreiller narratif.

Et l’émission bascule. Des milliers d’auditeurs découvrent qu’ils ont été notés, jugés… parfois après une branlette. Le choc est immense. Certains s’effondrent :


Moi qui pensais que mon texte sur la levrette existentielle était puissant… Pas simplement « bien écrit, bien qu’un peu verbeux » …


La voix continue, malicieuse :


  • — Lilith, tu veux du rythme ? Tu veux qu’on évite les redites ? OK. Voici la version condensée de l’histoire « Clafoutis et Consentement » : « un mec mange un gâteau. Il bande. Il découvre que c’est l’odeur de la vanille. Sa voisine passe. Elle parle de levure. Ils baisent sur une table IKEA bancale. Puis elle pleure à cause d’un souvenir de compote. Fin. » Tu vois ? C’est rapide. C’est tendu. C’est de la littérature gonflée comme une meringue oubliée dans un four éteint. Mais c’est moins bon, je trouve.

Les auditeurs applaudissent. Une standing ovation métaphorique dans les slips. Mais Lilith n’a pas dit son dernier mot. Elle appelle. EN DIRECT.


Sa voix est ferme, mais troublée, à se demander si elle n’a pas posé sa délicieuse croupe sur le meuble en question :


  • — J’écris mes critiques au lit. En culotte. J’ai mouillé sur des tournures de phrases. Mais je dois rester lucide. Je suis l’ultime pare-feu entre le plaisir textuel et la branlette stylistique.

Silence. Puis, La voix, complice :


  • — On va te pondre un chapitre à ta mesure, Lilith. Un truc calibré pour les maniaques du point-virgule sensuel. Pour les évaluatrices qui se touchent pendant la BDL* d’une nouvelle libertine. (*BDL = Bonne Dernière Lecture. Oui, y a des gens qui mouillent là-dessus.)



Épilogue Bonus : Les Petites Morts Orthotypographiques

(Ou comment un 16/20 m’a troué l’ego comme un gode en forme de stylo rouge)



Dans un bureau anonyme, une critiqueuse professionnelle tape. Son clavier : un sex-toy. Sa tasse de thé : pleine de sueur d’écrivain recalé. Elle lit des manuscrits au kilomètre. Elle corrige. Elle note. Elle mouille un peu sur des métaphores et légèrement sur des phrases inversées avec synecdoque finale. Mais elle n’avoue jamais.


Sauf ce jour-là.


Quand un texte surgit. Sale. Redondant. Exalté. Comme une branlette de 12 pages où l’auteur s’écoute parler. Et elle… elle a pris son pied, et attribue un « Très bon – 16 ». Et en refermant le fichier, elle gémit :


  • — Fallait pas que ça se voie.

Sauf que… ça s’est vu. Et maintenant, elle est dans le chapitre. Et on l’aime pour ça.





FIN

(Pas de l’orgasme)