Une Histoire sur http://revebebe.free.fr/
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Temps de lecture estimé : 11 mn
20/05/25
Présentation:  Une idée... venue suite à un commentaire d’un membre du site... et j’ai aimé cette idée... alors pourquoi se priver du bonheur de se faire plaisir... n’est-ce pas ?
Résumé:  Un homme, une femme, un embouteillage et la radio...
Critères:  f h
Auteur : Jane Does      Envoi mini-message

Projet de groupe : Une chanson, une histoire
Une chanson douce...

Hihiiiiiiii…

Moi, ce que j’aime, chez Daniela,

C’est que l’on peut y mettre les doigts.

Elle est toujours d’accord

Pour me prêter son corps.

Ouh ouh ouuuhhh…



— xXx — 



Les embouteillages, habituels, récurrents et très chiants. La radio diffuse ce tube d’Elmer et ça fait rigoler doucement mon chauffeur. Il faut aussi dire que les paroles sont très « classe ». Je ne dis rien, déplie le pare-soleil et me colle une couche de rouge sur les lippes. Puis, dans le miroir de courtoisie qui me renvoie l’image de mes lèvres brillantes, je les pince pour étendre la couche uniformément. Pierre me regarde faire, comme chaque matin, ou presque.



Je tourne mon visage vers Pierre. Il rage de plus en plus souvent et perd patience très vite. Bon ! La circulation sur les boulevards, c’est la misère. Mais ça ne sert à rien de s’énerver.




— xXx — 



Moi, ce que j’aime, chez Daniela,

C’est que l’on peut s’y mettre à trois.

Elle est toujours d’accord

Pour battre des records.


Ouh ouh ouuuhhh…



— xXx — 




Nous avons fait cinquante mètres en vingt minutes. Un record ce matin, et on n’aperçoit pas encore le pont sur lequel nous allons nous engager. J’écoute les braillements du gars qui loue sa « Danièla ». Pourquoi ça m’emmerde que ce mec se fasse du fric avec des mots comme ceux-là ? Et Pierre qui s’excite au volant… sur tous les imbéciles de la terre, ceux qui conduisent comme des pieds, parce que lui est irréprochable sûrement ! Encore cinq mètres et l’autre qui parle de s’y mettre à trois. C’est quoi cette nana ? Il vit avec une pute ? Comment peut-on écrire de telles horreurs ?



Je me sens salie ! Pourquoi est-ce que tout va de travers ? Pierre et ses idées à la con ! Il est malade de me… c’est cette chanson qui lui retourne le cerveau ? Nous sommes à mi-chemin entre la rive gauche et la rive droite. Et l’autoradio continue… de débiter des louanges à cette nana. Comment peut-elle apprécier qu’on parle d’elle de cette manière ? Existe-t-elle du reste ? Une femme peut-elle être assez folle pour laisser son mec la prêter à ses potes ? Mince alors ! Comment ça me prend la tête une chanson aussi débile ? Et mon mari qui tapote sur son volant. Un matin ordinaire, un matin parisien, et deux pauvres diables parmi tant d’autres, qui vont bosser. Et voilà que maintenant il fredonne, pour ne pas péter un câble ?



— xXx — 



Daniela, la la la la la la la laaaaa

Oh Daniela (la la la la la la laaa)

Oh Daniela (la la la la la la laaa)

Oh Daniela (la la la la la la laaa)

Oh Daniela…


Ce que Daniela aime en moi

(pa pa pa pap yeah yeah yeah)

C’est que l’on a toujours le choix.

(pa pa pa pap yeah yeah yeah)

Je ferai tout pour lui plaire,

Par-devant et par-derrière.



— xXx — 



On atteint des summums là, vraiment. Pas de vitesse évidemment. Mais dans l’abjection parolière. Il me sourit ? J’y crois pas. Qu’est-ce qu’il s’imagine ? Par devant, par-derrière ? Du grand n’importe quoi ! Ils foutent quoi à la censure ? Le zouave doit avoir envie de balancer son fusil pour se boucher les oreilles. Il en a de la chance, celui-là, de ne pas être obligé d’entendre des telles inepties. Et mon Pierre qui… ah, non ! Jamais par-derrière. Et pas plus avec quelqu’un d’autre. Du coup, pourquoi ces imbécillités me font-elles penser à ce genre de truc ? Il n’en a jamais été et n’en sera jamais question. Les doigts… oui, je veux bien l’admettre… mais seulement les siens et tout en douceur. C’est moi qui me fais un film ?



Ma voix, c’est très étrange, mais elle ne restitue pas la bonne tonalité des mots que je veux lui assener. Ce sale type avec sa déclaration enflammée réussit surtout à me déstabiliser. Comment est-ce possible ? La musique insiste encore et résonne dans ma tête. Pas moyen de me sortir les mots de la caboche. Et de l’autoradio, Elmer Food Beat qui insiste encore et encore. Avec ces paroles qui sont autant de piques qui me percutent, qui me creusent le ventre, à moi aussi ! Enfin pas pour ce qu’elles racontent, bien entendu, mais bien par ce qu’elles représentent. Et les doigts de Pierre, dont seul le bout des phalanges tripote le pommeau du levier de vitesse, pourquoi est-ce que je les imagine qui me massent la ligne accessible de ma cuisse ? Dingue ! Je ne vais pas m’y mettre moi aussi ?



— xXx — 



Ouh Ouh Ouuuhhhh…


Daniela…

Et dans la bouche de Daniela

(Et dans la bouche de Daniela)

Et dans la bouche de Danielaaaa…


Oh oh oh oooh…

Il y a toujours de la place

Pour les copains qui passent.


Ouh ouh ouh ouhhh

Daniela, la la la la la la la laaaaa

Oh Daniela (la la la la la la laaa)

Oh Daniela (la la la la la la laaa)

Oh Daniela (la la la la la la laaa)



— xXx — 



C’est surtout de celle de Pierre que dépasse une petite pointe de langue rose et attirante. Ne rien lui montrer, ne rien lui laisser voir, est-ce vraiment possible ? Pas certaine qu’il ne soit pas déjà au courant. Le vocable « bander » et les images qui s’impriment dans ma tête, d’une bouche qui, à l’instar de la mienne, ne peut qu’être rouge vermeil, bon sang ! Je me sens dolente et troublée. Il bande pour de bon ? Est-ce raisonnable de vérifier ? Surtout que nous sommes au milieu d’un flot de voitures immobiles et que si l’un ou l’autre des conducteurs voisins tourne le cou… non ! Je ne peux pas faire ça. Mais dire que ça ne me démange pas serait mentir. Encore vingt mètres, et nous serons quai Branly…


Dans mon cerveau embrouillé, j’arrive même à me dire qu’il ne saurait être question de hasard ! Elmer « fou de bites », Danièla la libertine, et la connotation plus que douteuse de Branly… tout se ligue contre moi, pour me forcer la main ? Je ne peux pas y croire, mais la puissance des évènements est là qui me rattrape pour de bon. Ce creux aux reins, n’est-ce pas aussi un signe du destin ? Notre bureau est encore trop éloigné du point où nous sommes bloqués. Bien entendu que Pierre n’a aucun geste déplacé, alors ? Ma cervelle me distille lentement des images plus qu’érotiques. Carrément pornographiques serait plus vrai. Et… il me tarde que prenne fin ce foutu trajet, qui, ce matin, n’en finit plus.


Qu’est-ce qu’il raconte l’autre sur la radio ? De la place pour les copains ? Mais non ! Mais pour ce qui chez mon mari distend le tissu à la hauteur de sa braguette, oui ! Je n’oserai jamais me pencher en avant, pour venir poser mon front au niveau de son nombril… là dans cet embouteillage évidemment. Mais… lorsque nous serons dans nos locaux ? Y aura-t-il un petit moment de répit, histoire de nous remettre de notre balade ? Pierre sent-il mon excitation ? En tout cas, il a un de ses sourires qui me font toujours craquer… et la chanson continue… avec un leitmotiv qui me donne des frissons.



— xXx — 



Ouh ouh ouh ouhhh

Daniela, la la la la la la la laaaaa

Oh Daniela (la la la la la la laaa)

Oh Daniela (la la la la la la laaa)

Oh Daniela (la la la la la la laaa)


Et mes doigts se posent sur la patte masculine qui cramponne le manche de la boîte de vitesse. La risette que je lis sur la bouche de mon mari… ne dit-elle pas muettement cet accord qui nous… unit si souvent ?



— xXx — 



Oui !!! C’est très bizarre comme les mots soudain ont une tout autre consonance… et il me semble percevoir dans les haut-parleurs de notre habitacle…


Ouh ouh ouh ouhhh

Hélène, la la la la la la la laaaaa

Oh Hélène (la la la la la la laaa)

Oh Hélène (la la la la la la laaa)

Oh Hélène (la la la la la la laaa)



Elmer Food Beat « Daniela »


https://www.youtube.com/watch?v=HyuXkxdJoJ0