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Temps de lecture estimé : 5 mn
30/05/25
Résumé:  Une incroyable passion sur une plage.
Critères:  #érotisme #romantisme #occasion inconnu plage amour
Auteur : Melle Mélina      Envoi mini-message

Projet de groupe : Une chanson, une histoire
L'été

Assis à la terrasse d’un café juste en face de la plage, je griffonnais quelques dessins en vue de mon futur roman graphique. Pour m’imprégner d’une ambiance que je voulais festive, ensoleillée et colorée – loin de mes standards habituels – je passais cet été caniculaire dans un enfer idyllique de bord de mer.

Cependant, la foule compressée m’agaçait plus que je ne l’aurais voulu. Impossible de se concentrer. Parfois, on venait me suspendre de mon travail, qui pour avoir des renseignements sur mes dessins, qui pour me demander si la chaise à mes côtés était libre, qui pour parler du beau temps.

Le serveur remarqua mon irritation et me suggéra une petite crique connue des seuls autochtones, c’est ainsi que j’arrivai sur un littoral difficile d’accès, les roches bordant le sentier y menant risquant à chaque pas de dégringoler.


La plage était quasi déserte et je m’installais non loin de l’eau à écouter le ressac des vagues venant s’échouer à quelques mètres de mes pieds. Le sable me brûlait, mais je ne regrettais pas le confort de la chaise de café.

Le site était plus que ravissant : nonobstant d’offrir une grève isolée du capharnaüm des voitures et des touristes, des alcôves naturelles donnaient à cet endroit un charme irréel. Si le soleil de plomb s’abattait avec trop de force, quelques espaces ombragés attendaient qu’on s’y précipite pour trouver un peu de fraîcheur.

Enfin, je gribouillais mes feuilles lorsque je l’aperçus. Il n’était plus question de laisser mon regard sur les croquis ; je ne pouvais plus me détacher de cette vision – car peut être n’était-ce qu’un mirage, une facétie de mon esprit retors ?


Gracieuse féline capable de coups de griffes marqués dans les chairs, une dangereuse lumière qui m’attirait, moi, petit moustique, dans un piège que je savais infernal. Il m’aura suffi d’un simple coup d’œil pour le comprendre : cette stupéfiante beauté des îles m’avait embrumé l’esprit et j’étais déjà en manque de la voir disparaître.

Je laissai mon carnet et mes crayons seuls sur le sable (les yeux dans l’eau), ce rêve devait être trop beau… Instinctivement, je la suivis – je ne savais pas pourquoi. Qu’avait-elle fait qui me permette de croire en une telle audace ? Quelle folie s’était alors emparée de ma raison ? Je la rattrapai et je lus son tatouage sur l’épaule : un avertissement pour qui voudrait jouer.


Me sentant à ses trousses, d’un simple regard, elle m’invita à l’abri des regards et laissa glisser le paréo la révélant, la dévoilant comme Ève au premier jour. Sans qu’un mot ne soit prononcé, je me jetai peine perdue dans ses griffes acérées, comme une proie dans son piège.

Juste un sourire, peut-être même une esquisse de sourire en guise de réponse et bientôt je tombai sur le dos et laissai ce succube à califourchon me dévorer les entrailles. Je plongeai dans le brasier pour fondre de délice. Elle me mordait les lèvres pour se repaître de mon sang tandis que je me noyais inexorablement dans ses yeux noir de jais. Elle me lacérait la poitrine de ses ongles crochus tandis que je poussais mon agonie au plus proche de l’inexorable.

Nos corps fusionnèrent, nos cœurs battirent à l’unisson et nos souffles se mélangèrent. Elle posséda mon âme, en extirpa ma raison, me promit les enfers et je l’acceptai sans modération pourvu que nos danses continuent.

Peut-être allais-je mourir ? Qu’importe, s’il faut mourir…


Et enfin, lorsqu’à bout de force, j’abandonnai le combat, éreinté et vidé de toute mon essence, elle devint plus câline. S’ensuivit un long moment de pure tendresse après l’orage qui m’avait englouti dans les limbes d’une nuit sans sommeil. Je me délectais de l’harmonie de son corps, de ses courbes parfaites, de la chaleur qui irradiait, de son goût sucré, du parfum de sa peau, du satin de ses cheveux de corbeau. Je la photographiai mentalement afin de pouvoir jouir de son image dans mes futurs moments de solitude, car je savais bientôt ce rêve consumé.

La lune resplendissait dans le ciel, la mer et la nuit se confondaient, le sable à présent froid luisait devant l’eau noire. La lumière était juste suffisante pour que je la distingue facilement. Elle me sourit, visiblement satisfaite de cette nuit remplie. Au bord de la déchirure, Morphée eut raison de ma volonté et lorsque je me réveillais, cinq minutes étaient passées et ma belle sylphide avait disparu.


Je la cherchais encore, suivais les traces de ses pieds que j’avais tant aimés, les traces de sa marche se dirigeant vers Neptune…

L’aube apparaissant, je retrouvais bientôt son paréo abandonné. Je m’en saisis et le conservais comme une preuve que ce rêve avait bien été réel. Je trouvais également mon carnet de dessins et lorsque j’ouvris les pages : elle était là.

Sur mes pages.

Son tatouage me narguant.

Ce tatouage me prévenant du danger.


Tout était raconté : je me voyais fulminer assis à la terrasse d’un café, suivre un sentier sinueux pour arriver sur une crique abandonnée. Puis, comme sortie des eaux salées, un corps sucré : une naïade que je suivis comme hypnotisé. Était dessiné ce regard m’invitant à la suivre, puis nos ébats, ses morsures, ses griffures et la plaie au niveau de mon cœur qui ne cicatriserait pas de sitôt.

Avait-elle été jamais réelle, n’était-elle que le fruit de mon imagination ? Son paréo attestait qu’elle fut présente. Je regardai bientôt mon corps et découvris les meurtrissures qui me rassuraient et me laissaient un goût amer.


Je suis à présent chez moi à Paris, dans cette vieille chambre du 18e, il règne une odeur de Lexomil – la Goutte-d’Or et Barbès peuvent faire les bruits qu’ils veulent, tout me semble morne et tiède.



Bernard Lavilliers : L’été.


Je cherchais quelques rimes quand elle m’est apparue

Cette beauté qui signe « Princesse de la rue »

Élégante, exotique, sortie des « Fleurs du mal »

Des fumées baudelairiennes, un amour marginal

Juste derrière l’épaule un tatouage dit

« Malheur à qui me frôle, je suis comme je suis »

Je suis comme je suis, plaisir à qui me prend

Et dans ce jeu de rôle, je te veux maintenant

L’été, était nu sur la plage

Et cet amour sauvage

Profondément marqué

Marqué par un été torride

Septembre semble vide

Vide et désespéré

Un été sans sommeil jusqu’à la déchirure

Le ciel noir et la mer à jamais confondus

Je pourrais dessiner toute ta chevelure

Papillons bleus et noirs de tes mèches tordues

Mais la foudre est tombée, j’en garde la brûlure

Et ce poignard de nacre dans la plaie qui me tue

Tes lèvres entrouvertes et puis cette blessure

Où l’amour et la mort se mêlent « Soniador »

L’été, était nu sur la plage

Et cet amour sauvage

Profondément marqué

Marqué par un été torride

Septembre semble vide

Vide et désespéré

Je suis comme je suis, malheur à qui me prend

Malheur à qui me frôle, attention si je mens

Et l’amour et la mort se mêlent « Soniador »

L’été, était nu sur la plage

Et cet amour sauvage

Profondément marqué

Marqué par un été torride

Septembre semble vide

Vide et désespéré

L’été, était nu sur la plage

Et cet amour sauvage

Profondément marqué

Marqué par un été torride

Septembre semble vide

Vide et désespéré



Bernard Lavilliers : L’été

https://www.youtube.com/watch?v=zMA9QL5WZzs