n° 13367 | Fiche technique | 18115 caractères | 18115 3013 Temps de lecture estimé : 13 mn |
22/07/09 |
Résumé: Azura, Pandore, Bazouk et moi partons enfin vers la ville, mais les filles supportent mal ma conduite sportive et Bazouk s'est mis en tête d'égayer un peu notre voyage. | ||||
Critères: #humour #délire #nonérotique #merveilleux ffh | ||||
Auteur : Gufti Shank Envoi mini-message |
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Résumé de l’épisode 1 : une étrange théière est tombée dans mon jardin ; il s’est avéré qu’elle renfermait un génie, nommé Bazouk. D’abord bluffé, je me suis vite aperçu que c’était plus une plaie qu’un cadeau du ciel. Il est tout de même parvenu, après d’innombrables efforts, à me "créer" deux magnifiques jeunes femmes, physiquement absolument sublimes, Azura et Pandore. Le problème, maintenant, c’est que Bazouk ne veut pas satisfaire à tous mes souhaits, et surtout, ne veut plus rentrer dans sa théière.
Résumé de l’épisode 2 : après de nombreux essais, Bazouk est parvenu à me réaliser la voiture de mes rêves, un superbe coupé sport quatre portes noir. Mais j’ai dû me résoudre à ne pas aller travailler, car mon stupide génie ne veut pas me lâcher d’une semelle. Au moment où nous allions sortir en ville, Azura, Pandore, Bazouk et moi, trois policiers se sont pointés, alertés par ma vieille voisine à qui nous avions fait quelques misères. Grâce à l’aide de Bazouk, nous sommes toutefois parvenus à nous débarrasser d’eux en les laissant assis à ma table de jardin, endormis par un sort de mon puissant mage. Nous avons enfin pu partir tous les quatre à bord de la voiture de sport, afin d’aller en ville trouver de quoi vêtir décemment Pandore et Azura (Bazouk s’étant montré ridicule lors de sa tentative de confectionner le moindre bout de tissu).
Je roulais à toute allure à travers la campagne, aux commandes du coupé de la marque Bazouk ; monstrueusement puissante et incroyablement stable, la voiture était une merveille à conduire. À mes côtés, siégeait son fabricant ; enfin, siégeait, c’est beaucoup dire : plutôt, il « émanait de sa théière », elle-même posée sur le siège passager. Je ne manquais pas de le féliciter régulièrement, chaque fois que j’étais étonné par l’accélération, la reprise, ou la tenue de route de son véhicule. Et cela le mettait dans un état pas possible, on aurait presque dit qu’il bouillonnait sous son sourire potelé. Il allait sans doute falloir que je l’engueule un peu à nouveau…
Et derrière nous, toujours dans leurs peignoirs trop grands et délicieusement échancrés, Azura et Pandore demeuraient outrageusement belles malgré leur teinte verdâtre et les expressions de frayeur qui se dessinaient sur leurs visages depuis que j’avais abordé un peu vite les premiers virages. J’avais essayé d’entamer avec elles une sorte de conversation, mais je crois qu’elles étaient trop crispées pour y participer convenablement. Quant à mon illustre génie, je me refusais toujours à discuter sérieusement avec lui. Du coup, je parlais tout seul :
Dans le rétroviseur, je les devinai acquiescer du bout des yeux. Bazouk tenta d’émettre son avis :
mais je l’interrompis tout net :
Machinalement, je tendis la main vers l’endroit où aurait dû se trouver l’autoradio ; mais il n’y en avait évidemment pas. J’en fis la remarque à mon djinn :
Inquiet malgré tout, je commençai par ralentir et rétrograder jusqu’en seconde, tandis que mon génie se concentrait âprement. Il y eut un rapide éclair, un petit peu de fumée ; pourtant sur le qui-vive, je ne parvins pas à éviter une petite embardée, heureusement sans gravité. Dans un réflexe, j’engueulai Bazouk, avant de constater avec désarroi qu’il venait de faire apparaître devant lui ce qui devait être une sorte d’instrument de musique probablement vaguement parent d’une mandoline, et apparemment partiellement conçu grâce à de petites peaux de bêtes séchées superposées pour donner un ensemble parfaitement abject.
Et, perdant un bout de peau par-ci par-là, l’ustensile sonore voleta doucement jusqu’à la banquette arrière où les deux jeune femmes verdissaient encore. Avec inquiétude, elles regardèrent arriver la bazoukoline ; mais c’en fut trop pour Pandore : avec le bruit et l’odeur d’une canalisation qui se débouche après plusieurs années d’engorgement, elle projeta vivement devant elle un impressionnant substrat de poulet rôti prédigéré qui vint former un tas délicieusement embaumant derrière le siège de Bazouk. Je stoppai la voiture aussi vite que possible, puis me tournai pour porter assistance à la pauvre jeune femme.
Sa création instrumentique cessa de voleter pour s’effondrer partiellement dans le magma de vomi de Pandore, qui se remettait tout juste et faisait des efforts pour ne pas foutre les pieds dedans. Bazouk lança une imprécation en direction du tas de gerbe, qui fut soudain puissamment catapulté dans la vitre de la portière d’Azura. Au même moment un abominable torchon style Louis XV apparut sur les genoux de Pandore et une fringante odeur de jasmin se répandit vigoureusement dans toute la voiture.
J’étais tellement désemparé que je ne sus pas bien quoi faire. Je commençai par arrêter le moteur et ouvrir grand ma portière. Derrière moi, Azura, inquiète, regardait avec dégoût la flaque de gerbe s’écouler lentement le long de sa vitre. Pandore en remit une petite galette sur le torchon. Bazouk s’agaçait en lançant toutes sortes d’envoûtements extravagants mais inefficaces en direction de la vitre près d’Azura qui demeurait fermée et couverte de glaires et de glaviaux.
Je vins moi-même aussi vite que possible lui ouvrir et lui conseiller d’aller prendre l’air sur le bord protégé de la route. Avisant la portière désormais ouverte, Bazouk relança son maléfice de la « gerbe volante », et m’envoya en pleine tête la galette puante. J’eus un méchant haut-le-cœur ; me frottant le visage en me retenant de respirer, je désespérai de parvenir bien longtemps à m’empêcher de vomir à mon tour, lorsque tout cet ignoble dégueulis me fut intégralement arraché de la tête, à ma grande satisfaction. Et, la sympathique odeur exceptée, il ne restait curieusement plus rien.
Je commençai immédiatement à engueuler Bazouk avec rage, mais Azura, qui était allée se réfugier de l’autre côté de la voiture dont Pandore sortait enfin également, hurla soudain :
Grâce à un merveilleux réflexe, je parvins à éviter de justesse la course de la seconde galette de Pandore, qui alla s’écraser grossièrement à quelques mètres de l’autre côté de la route. Cette fois, je fis rapidement le tour de la bagnole et ouvris violemment la portière de Bazouk en lui gueulant dessus de ne plus rien faire jusqu’à nouvel ordre. Il cessa visiblement ses sortilèges et se drapa d’un air candide. Je l’abandonnai pour m’approcher de Pandore ; elle se remettait doucement et peu à peu reprenait de vagues couleurs.
Il restait qu’on puait la gerbe. Surtout moi, d’ailleurs. Azura fit une drôle de tête lorsque je tentai de m’approcher d’elle pour m’enquérir de son état. Et évidemment, j’avais pas la moindre flotte ; pas de cours d’eau à proximité. Il m’allait vraiment falloir mettre Bazouk à contribution…
Mais trop tard… Ce fut soudain la mousson… Une terrible pluie torrentielle s’abattit avec force dans un carré de quelques ares tout au plus. En moins de dix secondes, j’étais littéralement trempé. Azura et Pandore avaient couru se réfugier au sec, dix mètres plus loin et se marraient gaiement en me regardant bouillir. Je me nettoyai rapidement la tête et le visage sous la douche géante que m’octroyait Bazouk.
Après quelques engueulades passionnées, celui-ci mit tout de même fin à son orage tropical. Les filles me rejoignirent près de la voiture et Azura s’empressa d’ôter son peignoir tandis que Pandore m’exhortait à retirer mes vêtements trempés pour mettre ledit peignoir. Tant bien que mal, je convainquis la première de ne pas rester nue au bord de la route, et la seconde que j’allais bien finir par sécher tout seul.
Nous rejoignîmes finalement dans le coupé la théière et son habitant forcené ; en nous asseyant, nous pûmes constater que l’ignoble parfum de jasmin ne prenait que difficilement le dessus sur celui, subtil et délicat, du rendu de Pandore. Quant à la monstrueuse bazoukoline, elle trônait toujours à l’arrière, laide, tâchée et puante.
Il dut se rendre compte que j’étais passablement agacé, car il ne tenta pas de négocier la survie de sa créature à cordes.
Il claqua des doigts ; il y eut un petit éclair ; et nous tombâmes soudain tous cinq, les filles, la théière, la bazoukoline et moi, de quelques dizaines de centimètres pour nous échouer tristement sur le cul au bord de la route. Cet abruti avait fait disparaître la voiture !
Dans un mouvement de colère enragée, j’attrapai le premier truc à ma portée, donc l’abjecte bazoukoline, pour frapper de toutes mes forces la théière et son locataire. Quelques lambeaux de peaux séchées volèrent au passage de l’espèce de chou déshydraté musical, et comme j’assénai un grand coup sur Bazouk, celui-ci parut soudain être aspiré vers le bas. Mon gourdin à musique trembla et résonna curieusement lorsqu’il s’abattit sur la théière dans un grand bruit, semblable à celui que produirait un gong fendu accompagné d’un orchestre symphonique désaccordé. La résidence de Bazouk voltigea quelques secondes et rebondit deux mètres plus loin avant de s’immobiliser sur le bord de la route.
Et c’est seulement alors que je réalisai que mon génie avait disparu.
Je me relevai à mon tour. Moi aussi, j’avais bien mal au coccyx. Quelle andouille, quand même, ce djinn ! Heureusement qu’il allait enfin nous foutre la paix !
Bon, le problème, c’est qu’on n’avait plus de voiture… C’est con, elle était bien… J’allai malgré tout ramasser la théière, en prenant bien soin de ne pas la frotter. J’étais bien content car on allait enfin être débarrassé de Bazouk, mais pas totalement satisfait car je ne comprenais pas précisément ce qui l’avait fait rentrer au fond de son bocal. Je ramassai aussi la bazoukoline, partiellement dans le but de ne pas polluer la campagne, mais aussi parce que je me demandais si elle n’avait pas joué un rôle dans le ré-emprisonnement de mon génie.
En effet, nous n’avions pas vu le moindre véhicule durant tout le grand one-man-show de Bazouk, et fort heureusement, d’ailleurs… Azura haussa les épaules ; Pandore se contenta de resserrer son peignoir, elle grelottait de toutes ses forces. J’allai lui masser vigoureusement les épaules, les bras et le buste pour la réchauffer un peu.
Je n’avais strictement aucune envie de refaire appel à Bazouk, mais d’un autre côté, quinze bornes à pied, ça me saoulait un peu.
On marcha dix bonnes minutes avant d’entendre enfin derrière nous un léger bruit de moteur. Ce devait être une voiture, très loin, mais qui s’approchait. J’expliquai encore à mes deux naïades l’attitude à adopter pour impressionner le conducteur, leur enjoignis de ne pas dire un mot de Bazouk ni de ce qui nous était arrivé, et nous attendîmes patiemment.
C’était une magnifique Citroën Visa II, qui nous rejoignait guère plus vite que l’aurait fait un tracteur. Au volant se tenait une petite vieille toute crispée, affublée d’énormes lunettes qu’elle maintenait le plus près possible du pare-brise. Prenant sans doute peur, elle ralentit encore lorsque je lui adressai de grands gestes, et elle finit par caler à quelques mètres de nous. M’armant de mon sourire le plus affable, je m’avançai pour lui parler lorsque j’aperçus Azura qui ouvrait savamment son peignoir en passant sa langue sur ses lèvres. La grand-mère me jeta un regard épouvanté tandis que j’approchai encore de son tacot. Mais elle ouvrit quand même sa vitre côté passager.
Je n’eus pas le temps d’achever. À toute allure, la petite vieille avait sorti de sa boîte à gants une bombe lacrymogène et m’en balançait plein la tronche. Je me reculai vivement en toussant et en pleurant. La mémé redémarra en accélérant de toutes ses forces dans le vide avant d’embrayer et de passer la première dans un grand bruit de ferraille craquelée. Quelle connasse !
On reprit finalement la marche, mais notre rythme était loin d’être idéal : Pandore grelottait toujours, et moi, je me frottais les yeux toutes les trois secondes. Seule Azura était encore en bonne forme.
Je commençais à désespérer lorsqu’une seconde voiture se signala soudain. Une berline qui paraissait rouler normalement. Je fis de nouveau de grands signes à son conducteur qui ralentit pour s’arrêter près de nous.
C’était un type d’une quarantaine d’années, en costar cravate, probablement un représentant. Je m’approchai pour répondre, espérant qu’avec mes yeux coulants certainement tout rouges, il n’aille pas me prendre pour je ne sais quel toxico.
C’était Azura qui était en train de refaire son sketch : elle avait échancré encore un peu son peignoir et provoquait le VRP de ses yeux enivrés en passant les mains le long de son corps.
Oh, merde !
Et il démarra en trombe sous mes yeux dépités. On n’avait même plus besoin de Bazouk pour être ridicules… J’hésitai à engueuler Azura, mais finalement, elle faisait ce que je lui avais demandé. C’était juste qu’elle manquait un peu de mesure…
On parcourut encore quelques centaines de mètres ; une troisième bagnole nous croisa, mais le conducteur ignora visiblement mes signes et mes appels. Ça commençait à me saouler vraiment, et j’envisageais de plus en plus sérieusement d’essayer de ressusciter Bazouk lorsqu’une quatrième voiture arriva derrière nous. Je refis mon spectacle de grands gestes en demandant à Azura de ne pas reproduire le sien.
C’étaient deux jeunes gens d’une vingtaine d’années ; la nana écouta bravement mon histoire de panne et de ville où nous nous rendions. Elle me demanda simplement pourquoi Azura et Pandore étaient en peignoirs. J’abracadabrantai rapidement un récit navrant, mais cela parut leur convenir et ils nous proposèrent de nous emmener à l’arrière de leur petite voiture. Nous montâmes nous installer avec force courbettes et remerciements.
Ils paraissaient plutôt sympas, et ça me gênait un peu de les pipeauter, mais je me voyais pas leur raconter la véritable histoire de la bazoukoline ou leur expliquer précisément pourquoi je me trimbalais avec une théière. Je leur proposai de les dédommager financièrement ; ils refusèrent joyeusement. Et puis on s’arrêta de parler ; je ne savais pas franchement quoi leur dire, et je pense que la nana nous prenait quand même pour des extra-terrestres.
Le mec, lui, matait outrageusement mes compagnes dans son rétro intérieur. Sa copine finit d’ailleurs par lui demander s’il préférait pas regarder un peu la route aussi. J’étais assez mal à l’aise et fus content d’arriver. Je les remerciai chaleureusement, le mec s’appliqua à répondre que ç’avait été un plaisir, la fille marmonna un truc de convenance, et ils nous larguèrent finalement au bas d’une rue commerçante. Je les devinai s’engueuler déjà, à peine repartis.
Je regardai à droite à gauche ; il y avait des magasins de fringues à tout bout de champ. Mais nous n’étions pas très loin d’un petit supermarché, où on nous poserait sans doute moins de questions. Bazouk était retourné tout au fond de sa théière, et je comptais bien tirer parti de ce répit pour profiter tranquillement de l’après-midi avec Azura et Pandore. En regardant leurs stupides peignoirs, je me dis que le plus urgent était de leur acheter des vêtements. Mais d’abord, on allait manger un petit truc, j’avais faim, et je me disais que la pauvre Pandore devait carrément crever la dalle.
À suivre…