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Temps de lecture estimé : 19 mn
21/12/09
corrigé 12/06/21
Résumé:  Retour sur les évènements de Matemale – La rencontre entre Manon Galibert et Marc Ginest...
Critères:  #drame #fantastique f fh bizarre fellation
Auteur : Divine      Envoi mini-message

Série : L'accident

Chapitre 04
Plongée en eaux profondes

Résumé des épisodes précédents :



Sophie Hash, une enseignante de 28 ans, échappe par miracle à un terrible accident de voiture. Sans l’intervention d’un pompier volontaire, Marc Ginest, elle aurait péri carbonisée. Deux semaines après l’accident, Sophie retrouve par hasard son sauveur dans la médiathèque de Lancroix, dont il se trouve être le nouveau bibliothécaire. Ce trentenaire au physique attrayant lui propose un dîner qu’elle accepte avec joie. Lors de cette soirée, elle tombe sous son charme. Marc la ramène chez elle sans pour autant initier le rapprochement qu’aurait souhaité la jeune femme.


Sans nouvelles de Marc, Sophie met un mouchoir sur sa fierté et le contacte une semaine plus tard pour un apéro. Le pompier lui propose alors de lui faire découvrir la région, lors de ses randonnées du week-end. Sophie accepte avec joie – l’occasion de se rapprocher de Marc ? Leur première virée a pour cadre le lac des Bouillouses, dans le Capcir. Tandis que le fringant pompier s’adonne à son loisir favori, la pêche au coup, Sophie se retrouve de fil en aiguille dans une position délicate. Elle se fait surprendre en train de se caresser par le cousin de Marc, un étudiant prénommé Thomas, tombé sur eux par hasard. Au grand désespoir de Sophie, Thomas ne semble avoir rien loupé de son manège…


Très sensible aux charmes de l’enseignante, l’adolescent se laisse tirer les vers du nez par Sophie, qui apprend ainsi ce qui est arrivé l’été précédent au lac de Matemale — les circonstances de l’étrange noyade de Manon Galibert, la fiancée de Marc. Un jeu érotique initié par la jeune femme se met en place entre Thomas et Sophie. Celle-ci s’échauffe peu à peu, au point de ressentir une attirance proprement surnaturelle pour l’ado, au moment de rejoindre, seule, sa tente pour la nuit…








La tournure des évènements sidérait Marc. Le piège censé se refermer sur Sophie et lui, à l’occasion de ce premier rapprochement en montagne, avait fait long feu ; la présence de Thomas avait redistribué les cartes au point de leurrer le charme, lui faisant prendre l’étudiant pour cible. Le rapprochement en train de se produire entre son cousin et la jolie brune démontrait que le pouvoir de Kalia avait ses limites.


Le pompier avait vu rouge au moment du « contact » entre Thomas et Sophie. La vision de la jeune femme s’abandonnant, pantelante, dans les bras de l’ado lui avait donné la nausée. Il n’avait eu qu’une envie, les séparer. Puis Marc s’était repris. D’où provenaient — réellement — les pensées qui l’avaient fait bouillir ? Était-ce vraiment sa propre colère, ou bien celle de Kalia, frustrée de voir son plan mis en échec ? C’était la première fois que la situation échappait à ce point à cette salope. Rien que ça, ça devait la terrifier !


Ce rapprochement inattendu entre l’étudiant et la belle enseignante était peut-être l’unique moyen d’empêcher la prophétie de s’accomplir. Marc était prêt à sacrifier ses sentiments sur l’hôtel de l’espoir, s’il y avait la moindre chance pour que la jeune femme échappe ainsi à l’horrible fin que lui réservait Kalia. Loin de s’interposer, il devait donc laisser le champ libre à Thomas, faire abstraction de son attachement pour Sophie, de ce qu’il éprouvait en l’imaginant dans les bras de son cousin…


En évoquant le sort de Manon, Thomas avait ravivé en lui une douleur insoutenable : la douleur de n’avoir pas su protéger celle qu’il était sur le point d’épouser, qui allait porter leur enfant. Après avoir arraché sa tendre Manon aux profondeurs polaires de Matemale, Marc avait vécu avec elle des mois de bonheur sans partage. À quel point il s’était trompé, en pensant que tout s’était arrêté avec la mort de Laure ! En fin de compte, la menace n’avait pas été levée, ni les mauvais présages dissipés, Kalia ne les avait pas oubliés, comme il l’avait cru ! Lors d’une après-midi d’août sans histoires, il avait suffi de quelques minutes pour que Manon disparaisse à jamais dans les profondeurs de ce lac maudit. Pour que Marc soit anéanti, détruit encore une fois.


Et voilà que c’était sur le point de recommencer avec Sophie. S’il ne pouvait s’empêcher d’éprouver des sentiments pour la jeune femme, au moins pouvait-il espérer qu’elle lui préfère Thomas. Tout, plutôt que de revivre l’horreur de perdre un être plus précieux que tout au monde !


Il se remémora la nuit où il avait sauvé Manon, un vendredi soir de décembre, dix-huit mois plus tôt. À l’époque, des images brouillées s’imposaient sans cesse dans ses rêves : une bande de copains quittant une fête trop arrosée, une Golf blanche zigzaguant sur la route avant de plonger dans un lac, à l’arrière de la voiture immergée, prisonnière de l’habitacle, une jeune femme pâle comme une morte, qui laissait s’échapper un bouillonnement d’air avec ses cris… Malgré ses efforts, il n’arrivait jamais à distinguer le visage de la fille, masqué par les longs cheveux blonds se déployant dans l’onde glacée.


C’était en général à cet instant-là que Marc se réveillait, en sueur et l’esprit confus.


Sa mission était on ne peut plus claire : il devait empêcher que cela n’arrive. Seul hic, ses visions, bien trop fugaces pour lui permettre de savoir où aurait lieu l’accident, à quel moment il surviendrait, ni comment localiser cette inconnue pour essayer de la prévenir. Il n’était sûr que d’une chose : cette tragédie était sur le point d’avoir lieu dans un périmètre proche. Marc n’avait pas le choix, il lui fallait s’organiser en fonction des indices dont il disposait, c’est-à-dire pas grand-chose. Son unique chance de les sauver, ses copains et elle, c’était d’être prêt à intervenir au moindre signe…



-- oOo--


Ce vendredi-là, le pompier somnolait devant sa télé quand une prémonition l’avait soudain sorti de sa torpeur. Un flash d’une précision absolue : l’accident allait se produire sur le barrage de Matemale, dans treize minutes. Sautant dans sa voiture, Marc avait démarré en trombe. Pas le temps de prévenir les secours, ils arriveraient trop tard. Filant sur les départementales désertes, le compteur bloqué à 170 km/h, il n’arrivait à penser qu’à une chose : les intercepter avant qu’ils ne finissent dans le lac. Un coup d’œil au tableau de bord lui confirma qu’il lui restait moins de six minutes. Il devait absolument arriver sur le lieu du drame avant qu’il ne se produise.


Le barrage était en vue. À peine trente secondes, à présent. Une voiture blanche arrivait de l’autre côté de la voie, fonçant à toute vitesse. Le pompier lui fit des appels de phare. En réponse, le chauffard se mit à zigzaguer sur la route sans pour autant ralentir. Marc pila au milieu du pont. Une torche à la main, il se précipita hors de sa voiture, faisant des signes pour que le type s’arrête. C’était comme si l’autre ne le voyait pas. Moteur à fond, le bolide fonçait droit sur lui.


Au dernier moment, le type braqua violemment sur la gauche, jetant sa bagnole contre le rebord de béton. Une scène incroyable s’ensuivit ; après avoir avalé le trottoir et heurté le parapet à pleine vitesse, la Golf s’éleva dans les airs, passa au-dessus de Marc en tournoyant comme un missile hors de contrôle, puis retomba dans le lac, pulvérisant la mince croûte de gel dans une énorme gerbe d’eau et de glace. Marc, sonné, se rendit soudain compte de l’ironie du sort. En essayant d’empêcher cet accident, il venait d’y apporter la touche finale !


Sans perdre de temps, le pompier se précipita à l’arrière de sa voiture, ouvrit le coffre et revêtit en toute hâte la tenue de plongée prévue au cas où les choses tourneraient mal. Il réfléchirait plus tard aux implications de sa présence sur place. Après avoir passé son masque, chaussé les palmes et endossé les bouteilles, il mordit dans le détendeur et se jeta à l’eau. Les feux arrière de la voiture folle ne s’étaient pas éteints. Deux rails sanglants et glauques sur le fond boueux de la retenue. Priant pour qu’il ne soit pas déjà trop tard, le pompier s’enfonça dans les flots glacés de l’Aude, palmant de toutes ses forces pour ne pas laisser le froid l’engourdir.


Arrivé au niveau de la voiture, Marc balaya l’habitacle avec sa lampe-torche. Un nuage pourpre entourait le crâne du conducteur, incrusté dans le pare-brise. Cet irresponsable n’avait même pas sa ceinture… Les paupières écarquillées sur des billes de verre givré, le passager à côté de lui était tout aussi mort. À l’arrière, par contre, il y avait du mouvement. La fille entrevue dans ses visions était là, luttant pour défaire sa ceinture, tout en se dévissant le cou pour maintenir sa tête hors de l’eau. Piégée au plafond, une réserve d’air providentielle lui permettait de respirer. L’espoir fit soudain battre le cœur de Marc.


Passant au-dessus de la Golf, il atteignit en trois coups de palmes l’aile arrière. Il s’arc-bouta sur la portière, qui s’ouvrit en laissant s’échapper d’énormes bulles d’air. La blonde, paniquée, gesticulait en tout sens. Marc expulsa son détendeur et le fourra dans la bouche de la fille. Comprenant qu’on venait la sauver, elle cessa de se débattre. Le pompier put alors décoincer l’attache de sa ceinture et la tirer hors de la voiture. Après avoir récupéré l’embout de caoutchouc, il prit une longue inspiration et fila vers la surface, un bras autour de la taille de la jeune femme.


La fille avait perdu connaissance. Dans un effort surhumain, Marc réussit à la propulser sur la crête du muret, après s’être débarrassé de ses bouteilles dans le lac. Blanche comme un linge, la respiration heurtée, les lèvres cyanosées, elle était en hypothermie. Avec le froid, la situation s’aggravait de minute en minute. Il n’avait pas le temps d’attendre ses collègues, il devait agir lui-même, réchauffer à tout prix le buste et les voies aériennes, pour empêcher le cœur de flancher !


Le pompier récapitula les gestes d’urgence qu’on lui avait appris ; après avoir poussé le chauffage de la voiture à fond, il allongea la jeune femme sur la banquette arrière et la déshabilla, lui ôtant son pull gorgé de flotte, arrachant son fin chemisier blanc, ne lui laissant que son soutif noir. À ce stade, de simples vêtements secs ne suffiraient pas à la revivifier. Sans se laisser déconcentrer par la plastique somptueuse de la fille, Marc ôta sa combinaison de néoprène et s’étendit sur elle, se serrant de son mieux contre sa peau glacée pour lui communiquer sa propre chaleur. Sous les seins de marbre, aussi durs que ceux d’une statue, battait un cœur de colibri affolé, cognant follement aux barreaux de la cage thoracique.


Lui insuffler de l’air chaud, à présent. Il écarta les mâchoires de la jeune femme et colla sa bouche à la sienne, respirant par le nez et soufflant directement dans sa gorge. Un observateur extérieur aurait vu là un couple faisant l’amour, ou, pour le moins, assez avancé dans ses préliminaires. Ce ballet charnel était bien plus que cela. Marc se battait pour la maintenir en vie, faire pencher le fléau de la balance du bon côté. Et il y parvenait. La blonde reprenait peu à peu des couleurs, son corps abandonnait sa rigidité effrayante, s’amollissait sous lui. Elle remuait imperceptiblement, creusait le bassin, se mettait à frissonner. Marc se rendit compte qu’il bandait. La jeune femme, toujours inconsciente mais éminemment désirable, lui faisait plutôt de l’effet…


Bien qu’il ne l’ait jamais rencontrée, le pompier avait l’impression troublante de déjà la connaître. Elle ressemblait à la femme de ses visions, si fragile, si désespérément en danger, cette femme dont il était tombé amoureux avant même de s’en rendre compte. Il avait assisté tant de fois à sa mort que l’idée de ne rien faire pour la secourir lui était insupportable. S’il avait plongé du barrage, c’était uniquement pour elle, dans l’espoir de la tenir saine et sauve dans ses bras. Et voilà qu’en cet instant précis, par la simple vertu de son souffle, il la ramenait à la vie. Un peu comme cet abruti de Prince Charmant réanimant Blanche-Neige d’un baiser, après avoir magistralement foiré son coup avec la Belle au bois dormant.


Loin dans sa conscience, une partie de lui-même n’était pas dupe. Un marionnettiste jouait en cet instant précis avec leurs existences. Une entité démoniaque, poursuivant en arrière-plan un but implacable. Marc devait garder la tête froide, se rappeler ce qui était arrivé à Laure, après qu’il l’eut sauvée…


La blonde ouvrit soudain les yeux, se débattant vaguement. Il recula. Comment allait-elle réagir ?



En quelques gestes rapides, Marc lui fit revêtir l’épaisse chemise en flanelle qu’il venait de sortir d’un sac coincé entre les sièges. Il compléta sa tenue avec un gros pull en laine, à mailles serrées. Elle ne réagissait que très peu. L’air hébété, elle le regardait sans avoir l’air de comprendre.



La fille fondit en larmes. Qu’elle soit en mesure de pleurer était bon signe. Le retour des émotions signifiait une sortie de l’état de choc dans lequel l’avaient plongée le froid et l’immersion. Rassuré, Marc quitta l’habitacle et se rhabilla à son tour. Le pompier appela ensuite ses collègues de Mont-Louis, leur indiquant en quelques phrases brèves l’endroit où ils se trouvaient et les conditions de sortie de route de la Golf. Il retourna ensuite dans la voiture, auprès de la blonde.


Marc avait déjà eu affaire à la justice. Dans quelle mesure essaierait-on de le mouiller dans cette suite d’évènements dramatiques ? Comment allait-il expliquer sa présence providentielle sur les lieux de l’accident ? Le hasard ? Pourquoi pas ?


Cette fois-là, il s’en sortit plutôt bien ; en constatant l’alcoolémie du conducteur de la Golf, les flics conclurent à un tragique fait divers et interrompirent l’enquête. Marc devint le héros du jour, pour avoir sauvé de la noyade une aussi belle jeune femme — qui plus est, prisonnière d’une voiture abîmée par quinze mètres de fond, dans un lac gelé. Un héros qui, étonnamment, ne souffrait pas de la plus petite engelure. Nul n’osa cependant poser de questions embarrassantes à celui que tout le monde — jusqu’au préfet — considérait soudain comme une sorte de surhomme.


Il fit la une des quotidiens, déclencha l’admiration de tous, devint l’idole de la famille Galibert. Pourtant, rien de tout cela ne comptait vraiment aux yeux de Marc Ginest. Il n’en avait que pour ceux de la jolie blonde. Admise aux urgences du centre hospitalier de Perpignan, la jeune femme avait vu son état s’améliorer sensiblement, au point d’être transférée de la réanimation à la traumatologie en moins de vingt-quatre heures. Sa seule séquelle était une courte amnésie, entre le départ de la fête et son réveil dans les bras du pompier.


Marc passait la voir chaque jour pour lui faire la causette. Manon appréciait sa conversation pleine d’humour, sa personnalité attachante, et même ce petit côté séducteur qui ne gâchait rien. Le pompier s’asseyait sur le bord du lit et ils parlaient de tout et de rien, plaisantant et riant avec naturel, sans complexes. La jeune femme lui était reconnaissante de la légèreté de ce badinage, qui compensait durant quelques heures l’horreur d’avoir perdu deux de ses amis, après avoir elle-même frôlé la mort. Le seul sujet que Marc n’abordait pas avec elle, ou alors avec un manque évident d’enthousiasme, était la zone d’ombre de l’accident et des évènements l’ayant précédé. Elle avait peu à peu cessé de lui poser des questions, malgré sa curiosité exacerbée par la discrétion du pompier.


La jeune femme était très vite tombée sous son charme. Squattant sa chambre jusqu’à ce que les aides-soignantes le chassent, parfois bien après l’heure des visites, Marc avait d’ailleurs failli se faire interdire de séjour quand on les avait trouvés tous les deux dans le lit de Manon, en train de s’embrasser passionnément. Un peu trop passionnément, même…


La partie analytique de sa conscience s’expliquait assez bien cette attraction particulière : comment ne pas se sentir attirée par les traits réguliers et empreints de force de caractère de Marc, son sourire craquant, sa musculature appétissante ? Pourtant, ce qu’elle éprouvait pour lui allait au-delà de la simple séduction physique. Des sentiments forts étaient nés entre eux. Il avait fait preuve d’une telle détermination, d’un si grand sang-froid, il avait pris de tels risques pour la sauver… Pour tout cela, elle lui vouait une admiration infinie. Même si ce comportement héroïque était le reflet de son métier. Cela ne changeait rien à l’affaire.


L’instinct de Manon, quant à lui, lui indiquait clairement autre chose. Son attirance pour Marc n’avait rien à voir avec cette admiration bien naturelle ; il s’agissait avant tout d’un énorme coup de foudre, le genre de flash ne se produisant qu’une fois dans une vie, au mieux. Une alchimie quasi surnaturelle les avait instantanément reliés, et ce dès l’accident, quand elle avait repris connaissance dans ses bras. Comment s’expliquer autrement les violentes bouffées de désir que la jolie blonde éprouvait pour cet homme mystérieux, en particulier quand il la touchait ? Des pulsions dantesques l’envahissaient alors, si fortes qu’elle n’avait d’autre choix que de se masturber, une fois seule dans sa chambre.


À plusieurs reprises, elle avait failli parler de l’explosion de sa libido aux médecins du service, désireuse de savoir si le traumatisme subi pouvait expliquer cette soudaine addiction pour la masturbation, une tendance plus qu’étrange et envahissante dans son cas. Manon n’avait pourtant jamais osé franchir le pas, de crainte d’avoir à détailler les envies qui s’emparaient d’elle. Comme la nuit, par exemple, quand ses désirs l’empêchaient de fermer l’œil. Fantasmant sur le corps de Marc pesant contre le sien, elle glissait une main furtive sous les draps rêches et caressait du bout des doigts son clito encapuchonné et préalablement recouvert de mouille. Elle se faisait jouir rapidement puis s’endormait pour quelques heures, avant de se réveiller, à nouveau brûlante et trempée.


Après cinq jours passés en observation, on déclara Manon officiellement rétablie. Malgré son état de fatigue, elle fut autorisée à quitter sa chambre. Pas question pour autant de se séparer de son cher Marc. Dès sa sortie d’hôpital, elle le rejoignit dans sa voiture, là où le pompier l’attendait, prêt à l’emmener au bout du monde. Plus prosaïquement, ils se rendirent à Font-Romeu, dans l’appartement de Manon.



-- oOo--


Le trajet lui parut interminable. Comme engourdie par la tension sexuelle qui régnait entre eux, Manon gardait le silence. Une étrange chaleur montait de ses talons et lui faisait comme des fourmis dans les jambes. Les lèvres entrouvertes, le souffle court, elle rêvassait tout en caressant la cuisse de son compagnon, flattant de temps à autre la bosse prometteuse qui déformait la couture de son jean. Sans quitter la route des yeux, celui-ci glissait alors ses doigts en conque à la jointure de ses cuisses, obligeamment écartées pour lui permettre de mieux pétrir le varech moite de sa vulve.


Une fois arrivée chez elle, Manon était restée debout, intimidée, tandis que Marc se débarrassait de sa veste. Puis il s’était approché d’elle et lui avait retiré son manteau, le faisant glisser de ses épaules avec une lenteur irritante. Posant les lèvres sur son cou dégagé, il avait alors embrassé et mordillé la chair tendre de sa gorge. Un spasme avait parcouru le bas-ventre de Manon, qui avait aussitôt commencé à couler. Ce plaisir à la limite de la douleur la plongeait dans un état de sidération. Paralysée, frémissante, elle était clouée sur place, telle une antilope épuisée, agonisant entre les crocs d’un prédateur impitoyable.


Vacillant légèrement, Manon se sentait partir, comme si les lèvres de Marc aspiraient tout autant ses forces vitales que sa volonté. Juste avant que ses jambes ne la trahissent, il cessa ce manège affolant et s’écarta d’elle, laissant la peau de son cou rougie et gonflée. Marc ne la lâcha pas pour autant. Plaquant ses mains sur le visage en feu de sa victime consentante, il la maintint bien droite par la seule pression de ses paumes. Manon le contemplait, éperdue, un trop-plein de désir voilant l’azur de ses yeux. Il écarta une mèche de son front, se pencha sur elle et, enfin !, souda sa bouche à la sienne. Tandis que leurs langues entamaient un ballet endiablé, elle ressentit comme une explosion de chaleur dans l’estomac, se propageant rapidement à sa chatte. Cette sensation la réveilla, lui donnant envie de prendre l’initiative.


Sans cesser de lui manger la bouche, Manon lança ses doigts à l’assaut de sa ceinture, dont elle défit prestement la boucle avant de s’attaquer aux boutons du jean. Une fois la braguette accessible, elle glissa sa dextre dans l’ouverture, flattant le membre comprimé sous l’étoffe du slip. Tout en massant le gland qui pointait déjà hors de l’abri, elle frottait avec ardeur la colonne bien dure et tant convoitée de son sexe. Puis, le dégageant de sa prison de tissu, elle entoura avec ses doigts ce membre plus qu’imposant, ce qui la fit mouiller de plus belle. Faisant coulisser sa main, elle le décalotta avec révérence avant de le branler d’un mouvement ferme et ample.


Avide de voir sa queue de plus près, et même, pourquoi pas, de la goûter, elle interrompit leur étreinte pour s’agenouiller devant Marc. Faisant glisser d’un même geste pantalon et sous-vêtement à ses chevilles, elle vit enfin apparaître le pénis qui l’avait tant fait fantasmer durant ses longues nuits d’hôpital. Une queue magnifique, séparant de toute sa splendide rigidité les pans d’une chemise de coton blanc. Débarrassée des étoffes superflues, Manon reprit sans aucune gêne sa lente masturbation, le branlant avec ampleur, malaxant de son autre main ses bourses bien pleines, tirant sur le frein pour faire saillir la masse compacte du gland.


Arrondissant les lèvres, elle lécha doucement l’extrémité luisante, énorme et écarlate du sexe prisonnier de ses doigts, au bout duquel sourdait une goutte de liquide séminal. Le prendre de quelques centimètres, à peine plus loin que l’arrondi du casque, juste assez pour goûter sa saveur fauve et salée, faisant éprouver à Marc le moelleux de sa bouche sans la lui offrir ; une véritable torture, autant pour lui que pour elle. Un brin masochiste, elle aimait ce plaisir acide du manque, de l’anticipation. Elle l’embrassa et le suçota ainsi de longs instants, avant de lever les yeux sur son visage. Marc la regardait avec un sourire tendu ; son souffle s’était accéléré, et il paraissait un brin fébrile. Le moment préféré de Manon : quand elle tenait le garçon entre ses mains et que les rôles s’inversaient, lui donnant à son tour tout pouvoir sur la relation.


Il était temps de récompenser sa résistance. Creusant les joues, elle le glissa dans le lit de sa bouche, s’arrêtant seulement quand il cogna au fond de son palais. Manon s’étonnait de pouvoir l’enfoncer autant en elle, les rares occasions où elle avait tenté une gorge profonde s’étant soldées par une violente envie de vomir. Rien de cela avec Marc, comme si son gland anesthésiait le fond de sa bouche. Le degré d’excitation de Manon n’était certainement pas étranger à cette bizarrerie plutôt plaisante…


Profitant à fond de ses bonnes dispositions, elle le faisait aller et venir entre ses lèvres tout en lui pétrissant les fesses, le prenant à chaque fois un peu plus loin. Cette fellation goulue — pratique à laquelle elle s’adonnait, pour la première fois, avec une frénésie hystérique — lui procurait des sensations démentes, une jouissance tant physique que mentale. Chacun des coups de boutoir de Marc semblait se prolonger, à travers sa gorge, jusqu’à son vagin. Elle n’avait jamais pris un tel pied à sucer un mec, et regrettait de n’avoir pas connu ça plus tôt.


Décidée à pousser l’expérience au paroxysme, Manon s’évertuait à le loger tout entier dans sa gorge, malgré sa taille. À force de contorsions buccales, elle parvint finalement à engloutir l’intégralité de son sexe. Les lèvres écartelées par sa large base, le front reposant sur son pubis, le menton sur ses couilles, elle était pleine de lui jusqu’à la suffocation. Elle sentit se contracter l’énorme serpent lui emplissant la bouche, prêt à cracher de longues giclées de foutre directement au fond de sa gorge. Elle avait terriblement envie qu’il se vide ainsi en elle.


Le maintenant bien enfoncé dans sa gorge, prête à s’étouffer avec son membre plutôt que de renoncer à cette envie folle, elle attendait avec impatience qu’il se lâche, les tempes battantes, des larmes plein les yeux, les mâchoires tétanisées de crampes. Avec un cri guttural, il éjacula enfin. Manon sentit une lave incandescente gicler par saccades dans sa trachée, un flot bouillonnant de sperme qu’elle essayait d’avaler tant bien que mal, mais qui remontait dans sa bouche, s’échappait de ses lèvres crispées, la noyait littéralement.


Des étoiles dansaient devant ses yeux papillonnants, des taches brunes envahissaient sa vision, signe d’une privation trop longue d’oxygène. La semence dans sa gorge prit un goût de vase, devint aussi froide que l’onde glacée de Matemale. Prête à s’évanouir, elle laissa glisser hors de sa bouche le sexe luisant de salive et de foutre. Elle était à nouveau dans la Golf immergée, luttant pour sa survie, essayant d’inspirer l’air raréfié au-dessus de sa tête, tandis que résonnait sous son crâne un rire dément de sorcière.



Marc l’avait étendue sur le lit. Elle était bel et bien tombée dans les pommes ! Si elle voulait renouveler ce genre d’exploit, elle allait devoir apprendre à respirer avec une queue au fond de la gorge. Et elle le voulait ! Oh que oui !



Avec un rire, il se jeta sur elle et commença à la déshabiller.


Pendant deux jours et deux nuits, ils passèrent le plus clair de leur temps à faire l’amour, ne s’interrompant que pour manger et dormir. Manon n’avait jamais connu une telle orgie de plaisir. Elle se sentait possédée par une sorte de rage, une envie permanente d’explorer toutes les possibilités de son corps avec ce partenaire quasi surhumain. C’était incroyablement bon de s’abandonner dans les bras de Marc, de s’offrir à lui, sans pudeur ni limites. Manon avait eu de nombreux partenaires, mais ses étreintes passées ne lui semblaient que des brouillons hâtifs, en comparaison de la formidable entente sexuelle établie avec Marc.


De son côté, Marc s’extasiait de pouvoir revivre une telle passion physique. Il avait l’impression de replonger dans une addiction débridée, perdant tous ses repères dans cette frénésie sexuelle. C’était si bon de retrouver les sensations qu’il avait crues à jamais disparues avec Laure…


Et c’est ainsi qu’il avait tué Manon, ne pensant qu’à lui-même malgré ses promesses d’amour éternel.



[À suivre]