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n° 12376Fiche technique30654 caractères30654
Temps de lecture estimé : 18 mn
12/03/08
corrigé 01/06/21
Résumé:  Le père Bideau raconte aux fiancés l'assassinat de Marie La Tourette et, comme elle le lui a demandé, remet à Louis ses grimoires de magie blanche. L'inspecteur Pauvert apprend la mort de Desgrange et découvre les pouvoirs magiques de Louis.
Critères:  hagé fagée uniforme bizarre campagne mélo policier sorcelleri -fantastiq -amourdram
Auteur : Musea      Envoi mini-message

Série : Les sorcières de Saint Amant

Chapitre 18
L'héritage

La voiture de Louis, ouvrant la marche, traversait les derniers kilomètres de forêt avant d’arriver à Saint-Amant Roche Savine. Gustave Meyer était à son volant. Et elle était suivie d’une autre en escorte, occupée par les deux adjoints que l’inspecteur Pauvert avait mis sur l’affaire : Alfonse Charpin et Henri Cabet. Gustave conduisait nerveusement, préoccupé à l’idée de laisser Louis et Claire seuls. Malgré un temps idyllique, il gardait la mâchoire serrée tout en roulant à vive allure.


À l’arrière le luthier dormait, allongé sous une couverture. Il ne semblait pas souffrir de sa blessure. Claire était assise à l’avant et elle observait la route avec un peu d’angoisse. Elle n’aimait pas la vitesse. Son estomac se crispait à chaque virage que prenait Meyer et elle faisait un effort pour ne pas laisser les nausées l’envahir. Heureusement, elle venait d’apercevoir le toit rouge de sa ferme. Encore un tournant et ils seraient parvenus à destination. Elle fit signe au conducteur de prendre le prochain embranchement et lorsqu’il s’engagea dans le chemin des Herbettes, elle se tourna vers son fiancé endormi pour le prévenir :



Claire se retourna brusquement vers l’avant, et au lieu de la figure familière d’Anita, elle aperçut, assis sur la souche d’un chêne récemment coupé, un vieil homme recroquevillé sur sa canne. Lorsqu’il aperçut la voiture, celui-ci se leva péniblement et scruta ses occupants. Reconnaissant Claire, il se hâta aussi vite qu’il pouvait et à peine la jeune fille était-elle sortie de la voiture qu’il lui prit la main :



Il se pencha en avant et, apercevant le luthier allongé à l’arrière du véhicule, il l’apostropha :



Claire venait de servir un café à tous et le luthier reposait à ses pieds, allongé sur un matelas descendu dans la cuisine et adossé au mur, lorsque le vieil homme commença son récit :



Après ton départ, mon garçon, continua-t-il en regardant Louis, Marie a envoyé Augustine, sa meilleure amie, près de moi : elle avait besoin de me parler. Et une fois là-haut, Marie m’a ouvert son cœur. C’était comme si, d’un seul coup, elle se déchargeait d’un poids. Elle m’a parlé de votre conversation mais également de ce qu’elle a fait aussi bien pour toi que pour Claire et notre village. Elle m’a parlé de magie, la bonne et la mauvaise. Les influences que chacune a eu à Saint-Amant, ceux qui la pratiquaient et ceux qui en font encore usage. Les bras m’en tombaient devant toutes ces révélations. On aurait dit que Marie ne pouvait plus s’arrêter de raconter.




  • — Mais, Marie, je ne suis pas un sorcier comme toi. Comment veux-tu que je puisse être utile ?
  • — Tsst… Le moment venu, tu sauras être mon messager et avertir ceux qui ont été choisis pour continuer mon travail. Je n’ai pas besoin que tu lances des sorts, seulement que tu transmettes ce que tu auras reçu.


Elle m’a donné cette caisse que voilà, qui contient toutes ses affaires de sorcellerie et tous les secrets qu’elle connaît. Et elle m’a fait promettre de récupérer la clé chez Augustine, en cas de malheur. Et bien sûr de vous donner tout ce que contient son petit trésor. C’est l’héritage de magie blanche que Marie a pu préserver. Elle vous demande d’en prendre soin. Et de tout faire pour garder le village hors des nuisances de la magie noire.



Les deux policiers qui étaient restés silencieux jusque là prirent la parole :



Il sortit une petite clé dorée de sa biaude et la tendit au luthier.



Intrigué, Louis saisit la clé que lui donnait le père Bideau. Puis il fit signe à Gustave.



Son ami s’exécuta. Louis, le cœur battant, mit la clé dans la serrure et ouvrit le coffre. La première chose qu’il vit fut une photo sépia de son père et de Rose. Ce cliché semblait avoir été pris peu de temps avant leur mort. Vêtus de leurs plus beaux atours, les deux amants fixaient le photographe, le regard ému comme s’ils voulaient lui dire quelque chose d’important. Troublé, le luthier constata une fois de plus l’étrange ressemblance de Claire avec sa mère. Et il sourit en regardant le visage de son père, qui reflétait la joie intense de l’homme ayant trouvé la femme qu’il aimait. Il retourna la photographie et, stupéfait, reconnut l’écriture paternelle. Ce qu’il lut ressemblait à un poème :


À toi mon bel amour éternel,

À toi mon fils que j’ai si mal aimé,

À toi magie qui m’a tant comblé.

À toi qui aura trouvé ta belle

Par l’entremise de Marie l’oubliée,

Je te confie la magie et le feu

De désir et d’amour comble-le


Je suis le bois du sacrifice

Rose est l’offrande abandonnée

Marie le soufflet de cheminée

Qui purifie, avive sans leurre

La passion et guide ton ardeur.


Bergère et douce fille de ma mie

Offre-toi à l’amant qui supplie

Celui dont l’amoureuse langueur

Apprivoisera toutes tes peurs

Et ouvrira la porte de la vie

Pour que palpite en toi la blanche magie.


Rituel d’union blanche

Le 14 septembre 1929


Ému, le luthier dut relire plusieurs fois le poème avant de comprendre que cet écrit lui était destiné ainsi qu’à Claire. Ce n’était pas un poème mais une ordonnance magique. Comment le maréchal-ferrant avait-il pu rédiger un tel écrit ? Rose lui avait-elle enseigné des pratiques de magie blanche ? Et Marie, comment était-elle entrée en possession de cette photo, de ce rituel ? Avait-elle répété ces paroles étranges pour le faire revenir en Auvergne et pour qu’il tombe amoureux de Claire ?


Il passa la main sur son front, anéanti par le flot de questions que le rituel provoquait. Et bouleversé, tellement la révélation lui paraissait incroyable, immense. Autour de lui, le silence s’était fait. Claire fixait son compagnon avec inquiétude et Gustave, resté debout près du luthier, semblait tout aussi angoissé.



Semblant surgir d’un rêve, il releva la tête vers sa fiancée et lui sourit.



Et il tendit la photographie à Claire. Celle-ci l’examina, bouleversée de retrouver le visage de sa mère et celui du maréchal-ferrant. Elle ne pouvait détacher ses yeux du sourire des deux amants. Elle avait l’impression qu’ils lui murmuraient d’étranges mots, incompréhensibles et pourtant audibles… Au cou de Rose, Claire reconnut le pendentif qu’elle-même portait désormais. Elle pâlit et porta la main à sa gorge. Il y était toujours. La pierre centrale brillait doucement comme à l’ordinaire.


Gustave s’approcha de la jeune fille, inquiet de la voir muette et pâle à son tour. Il observa la photographie qu’il trouva très belle et prenant celle-ci des mains de Claire, il retourna le cliché pour lire ce qui était inscrit au dos. Mais le poème avait disparu.



Intrigué, le luthier reprit la photographie des mains de Gustave et constata que la formule avait disparu. Avait-il rêvé ? Non, ce n’était pas possible ! L’écriture de son père l’avait tellement frappé… Et puis ces mots… Il fixa son ami avec véhémence :



Le vieil homme soupira :



Les larmes montaient aux yeux du vieil homme, qui renifla bruyamment pour tenter de les arrêter. Claire, émue, s’approcha de lui et entoura ses épaules de son bras.



ooooo0000ooooo



Au même moment à Brioude, dans les locaux du commissariat de police, Marius Pauvert voyait son enquête se compliquer :



Marius raccrocha, l’air perplexe et comme perdu dans un songe. Sa mère qui examinait le poignard releva la tête et, voyant son fils inquiet, elle s’approcha :



Marius saisit le poignard avec un mouchoir et l’examina. Le sang s’était déposé sur la lame dans une forme très longue, nervurée. Cela lui rappelait quelque chose, mais quoi ?



Joignant le geste à la parole, la vieille dame sortit de sa poche une pointe de cristal de roche, pendue au bout d’une chaîne d’argent. Elle n’eut pas plus tôt approché le pendule de la lame que celui-ci s’agita en tous sens.



Sa mère haussa les épaules et soupira devant tant de dénégation.



Mme Pauvert se concentra, immobilisa le pendule et posa sa question à voix haute :



Puis elle approcha l’objet du poignard. Le cristal tourna rapidement en cercle. Marius avait beau examiner attentivement le poignet et les doigts de sa mère, il dut se rendre à l’évidence qu’elle n’influençait en rien ce mouvement rotatif. Le pendule tournait, animé d’une vie propre. Et il confirmait incontestablement la théorie maternelle. L’incrustation provenait bien de la magie blanche. Seulement… comment une telle affirmation pourrait-elle être validée dans une enquête de police ? Le commissaire Drossard allait le prendre pour un fou s’il parlait de tout ça.



Marius Pauvert soupira. Ces histoires de magies blanche et noire devenaient de plus en plus inquiétantes.



Marius Pauvert sourit en contemplant le visage animé et les joues roses de sa mère. Elle semblait si persuadée…



Lise Pauvert rougit de confusion et objecta en souriant, manière de s’excuser :